Isabelle de Ludres
Marie-Élisabeth (dite Isabelle), marquise de Ludres, née en 1647[4] à Ludres en Lorraine, et morte en 1726 à Nancy, est une maîtresse du roi Louis XIV, rivale de Madame de Montespan.
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Une jeunesse lorraine
Isabelle de Ludres nait à Ludres, dans le Duché de Lorraine. Elle est la fille de Jean de Ludres et de Claude des Salles.
Admise enfant au Chapitre des dames nobles de Poussay comme chanoinesse, elle y est élevée.
En 1662, le quinquagénaire duc de Lorraine et de Bar Charles IV en visite à Poussay remarque cette jeune fille de 15 ans d’une grande beauté, et décide d’en faire sa femme. De 43 ans l'aîné d'Isabelle, il est de plus excommunié pour adultère et bigamie, ayant abandonné son épouse légitime la duchesse Nicole (dont il tenait sa couronne), obtenu une annulation de son mariage par un clergé complaisant (il a fait condamner pour sorcellerie le prêtre qui avait baptisé Nicole et prétendu que le baptême de Nicole n'étant pas valide, son mariage ne l'était pas non plus). Il s'est alors cru autorisé à épouser en 1637 sa maîtresse Béatrice de Cusance, princesse de Cantecroix, dont il a deux enfants mais qu'il abandonne quelques années plus tard. Pendant ce temps, la duchesse Nicole ameutait avec succès la curie romaine pour sauver son honneur d'épouse.
À la mort de la duchesse (1657), Charles IV décide d’épouser Béatrice qu'il avait abandonnée mais dont il a deux enfants. Mais en politique comme en amour, le duc est plutôt aventurier. En effet, les fiançailles avec Isabelle durent un an, puis Charles, rappelé à l'ordre par Beatrix, se ravise et consent à convoler en mariage légitime avec son ex-maîtresse, qui meurt peu après (1663).
Charles IV veut alors épouser Marie-Louise d'Apremont qui a alors 14 ans. Isabelle s’y oppose en raison de leurs précédentes fiançailles, et reçoit l’appui du clergé lorrain. Le duc la menace d’engager des poursuites pour le crime de « lèse-majesté » qu’elle a selon lui commis et il épouse Marie-Louise en 1664.
En 1664, Isabelle quitte Poussay pour la cour de France, en conservant son titre de chanoinesse ; elle est présentée au roi en présence de son frère, son ex-fiancé et ses parents, le jour de l'inauguration des fêtes des Plaisirs de l'Isle enchantée, le dans l'après-midi.
La cour de France
À son arrivée elle reçoit une charge de Dame d’honneur de « Madame », duchesse d'Orléans, belle-sœur du roi, puis, à la mort de celle-ci, passe au service de la reine Marie-Thérèse (1670), puis de Madame Palatine, la nouvelle « Madame », seconde épouse du frère du roi (1673).
La lutte avec la Montespan
La beauté, mais aussi le zézaiement et l'accent lorrain traînant et voluptueux d’Isabelle de Ludres attirent les courtisans. Elle leur aurait résisté, jusqu’à ce que, à la suite d'une disgrâce passagère de Madame de Montespan, à Pâques 1675, le roi s’intéresse à elle. Leur liaison est assez discrète, mais pas suffisamment pour ne pas éveiller la jalousie de la favorite en titre. Cette dernière fait courir le bruit que « la belle de Ludres » a le corps recouvert de dartres, ainsi que « la gale, la lèpre, et toutes les maladies imaginables ». Le roi a beau jeu de vérifier par lui-même la fausseté de ces allégations et garde Isabelle auprès de lui.
Il est cependant contraint de se séparer d’elle, ou d'en faire mine, lors du retour de la plantureuse Athénaïs. Volontiers moqueuse, celle-ci s’évertue à critiquer Isabelle devant le roi, en la traitant de « haillon », en imitant son accent Lorrain prononcé ou en singeant sa naïveté, mais elle ne peut empêcher Louis XIV de la fréquenter de nouveau lorsqu’elle doit quitter la cour au printemps 1676, enceinte du sixième enfant naturel qu'elle doit aux assiduités du roi. Elle aurait été séduite par Philippe de Vendôme.
L'apogée et la chute
Pendant que le roi est en campagne contre les Espagnols, Isabelle ébruite sa liaison avec lui, disant même qu’elle est enceinte de ses œuvres. Le chroniqueur Primi Visconti raconte que les dames disposant du privilège envié du tabouret chez la reine se levaient à l’arrivée d’Isabelle de Ludres. Elle se vante d’avoir « débusqué » Madame de Montespan et se voit déjà nouvelle favorite attitrée. Elle a même l’audace d’écrire en personne au roi, qui est encore aux armées. Leur relation devant demeurer secrète, Louis XIV s’en irrite. Il ne la chasse pas de la cour, mais rompt tout commerce avec elle.
Au retour du roi, puis de la marquise de Montespan, Isabelle doit subir à nouveau les sarcasmes de cette dernière, mais publiquement. Un jour que la cour entend la messe, le roi salue Isabelle de Ludres. Athénaïs fait alors irruption et leur adresse des reproches devant toute l’assemblée.
La retraite
Au début de 1678, Isabelle quitte le service de Madame et se retire au couvent de la Visitation de Sainte-Marie, après avoir refusé un don d’argent que lui propose le roi. Tout comme celui de la duchesse de La Vallière quatre ans plus tôt, le départ de la chanoinesse laisse ce dernier indifférent.
Elle vit plusieurs années dans des cloîtres parisiens. Endettée, Isabelle est contrainte de réclamer une pension au roi, qui la lui accorde. Elle regagne ensuite sa Lorraine natale (qui retrouve son indépendance au traité de Ryswick en 1697) et vit notamment dans son château de Vaucouleurs où elle a à son service le couple Bécu-Cantigny dont la petite fille sera la comtesse du Barry qui naît à Vaucouleurs en 1743.
La « belle Ludres » est créée marquise en 1720. Elle meurt à Nancy le âgée de près de 80 ans.
Notes et références
- Pigaillem, Henri, 1958-, Dictionnaire des favorites, Pygmalion, , 498 p. (ISBN 978-2-7564-0445-5, OCLC 937868061, lire en ligne)
- Georges Poull, Marie Isabelle de Ludres, chanoinesse de Poussay et marquise de Bayon (La Belle de Ludres), in Les chapitres de dames nobles entre France et Empire, études réunies sous la direction de Michel Parisse et Pierre Heili. Editions Massene, Paris, 1998. (ISBN 2-911043-36-7). p. 217
- Madame de Villedieu et Micheline Cuénin, Mémoires de la vie de Henriette-Sylvie de Molière, Éditions de l'Université François-Rabelais, (lire en ligne)
- 1647 est l'année de naissance indiquée le plus souvent dans les sources d'autorité, mais les sources ne s'accordent pas sur cette information, allant de 1642[1] - [2] à 1648[3].