Insurrection dans le nord du Tchad
Depuis 2016, le Front pour l'alternance et la concorde au Tchad (FACT) et le Conseil de commandement militaire pour le salut de la République (CCMSR) mènent une rébellion dans le nord du Tchad face au gouvernement tchadien. Depuis leurs bases arrière du sud de la Libye, le FACT et le CCMSR mènent des offensives et des raids dans le nord du Tchad pour renverser le gouvernement de l'ancien président Idriss Déby, au pouvoir depuis le coup d'État de décembre 1990. D'autres groupes rebelles sont également impliqués dans l'insurrection, bien que dans une moindre mesure.
Date | – en cours |
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Lieu | RĂ©gions du nord du Tchad |
Issue |
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Contexte
Historiquement, le Tchad a souffert d'un grand nombre de guerres civiles, de conflits étrangers et de coups d'État depuis son indépendance de la France en 1958[3]. Idriss Déby prit la présidence tchadienne lors d'un coup d'État militaire en 1990. Depuis lors, il bénéficia du soutien de la France[4] et de la Chine. Le gouvernement de Déby réussit à vaincre à plusieurs reprises les rébellions contre son régime. Les groupes d'opposition militants ont finalement été chassés du pays vers l'exil[4].
En 2014, la deuxième guerre civile libyenne éclate. Plusieurs groupes rebelles tchadiens deviennent ainsi des mercenaires au service de diverses factions libyennes, recevant de l'argent et des armes pour préparer leur retour au Tchad[4]. Deux nouveaux groupes rebelles tchadiens, FACT et le CCMSR, s'organisent dans le sud de la Libye en 2016[4] - [5]. Selon les services de renseignement tchadiens en 2017, les rebelles dirigés par Timane Erdimi, neveu et opposant de longue date d'Idriss Déby, rassemblent des armes dans le sud de la Libye[3].
2017
En juillet 2017, le CCMSR lance une offensive sur Kouri Bougoudi cherchant à prendre le contrôle de la région et de ses mines lucratives. Ces agressions sont finalement repoussées par le gouvernement tchadien bien que le CCMSR ait affirmé avoir lancé une deuxième attaque en août 2017, ce que le gouvernement tchadien nie[6]. En septembre, le Tchad rompt ses relations diplomatiques avec le Qatar, l'accusant de tenter de déstabiliser le pays. Selon le journaliste Ben Taub, cette évolution est liée au fait que le Qatar hébergeait Timane Erdimi qui tentait toujours de renverser Déby[3].
À l'automne, les combats entre les loyalistes du gouvernement et les insurgés deviennent plus fréquents le long de la frontière tchado-libyenne. Déby répond en relocalisant des centaines de soldats tchadiens déployés pour lutter contre Boko Haram vers le nord[3].
2018
Le 11 août 2018, le CCMSR lance une attaque majeure contre l'avant-poste militaire de Kouri Bougoudi dans les montagnes du Tibesti, revendiquant la mort de 73 soldats et la capture de 45 autres, tout en dénombrant que 11 victimes de leurs cotés (4 morts, 7 blessés). Le gouvernement tchadien tente d'abord de nier l'attaque, puis minimise son importance. Alors que le CCMSR propose de libérer ses prisonniers en échange de la libération des chefs rebelles emprisonnés, le gouvernement tchadien refuse de négocier avec « des mercenaires sauvages, des bandits [et] des voyous »[7], et ordonne plutôt aux mineurs locaux d'abandonner leur camp à Kouri Bougoudi. L'armée se replie ensuite de la zone le 22 août, la laissant au CCMSR et aux mineurs illégaux[7] - [8]. Dès lors, l'armée de l'air tchadienne effectue plusieurs bombardements dans la région, ciblant le camp minier de Kouri Bougoudi et les troupeaux de chameaux, tuant plusieurs civils et privant les habitants de leurs moyens de subsistance. Pendant ce temps, le CCMSR poursuit ses attaques contre des positions gouvernementales, comme à Tarbou dans la région du Tibesti (21 septembre) et à Miski dans la région du Borkou (24 octobre)[7]. Certains habitants reprocheront au CCMSR d'exploiter et d'aggraver les tensions ethniques dans les montagnes du Tibesti[9].
2019
Le 12 janvier 2019, un groupe armé soudanais, le Mouvement pour la justice et l'égalité (JEM), traverse la frontière avec la Libye avec des dizaines de véhicules et attaque des positions du CCSMR à Kouri Bougoudi[10]. Selon le JEM, 67 de ses combattants ont été tués tandis que le CCSMR a fait état de trois morts et de 12 blessés[11].
Du 3 au 6 février, l'armée de l'air française effectue des frappes aériennes sur le groupe de l'Union des forces de la résistance (UFR) ayant fait intrusion au Tchad. Le 9 février 2019, l'armée tchadienne affirme avoir capturé 250 rebelles dont quatre chefs et détruit quarante véhicules[12]. Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, justifie l'opération en affirmant que la France avait agi « pour empêcher un coup d'État »[3].
2021
Le 26 janvier 2021, 50 rebelles du FNDJT à bord de 20 véhicules 4 x 4 attaquent le poste n° 35 à Kouri Bougoudi, à 40 km au sud de la frontière avec la Libye[13].
Le 11 avril 2021, le groupe rebelle tchadien Front pour le changement et la concorde au Tchad (FACT) lance une offensive dans la région du Tibesti, dans le nord du pays, à la suite de l'élection présidentielle tchadienne de 2021[14]. Le président Idriss Déby est tué lors de l'offensive du 20 avril. Malgré ce succès, l'offensive rebelle échoue et le gouvernement revendique la victoire le 9 mai 2021. La présidence tchadienne passe sous Mahamat Déby, le fils d'Idriss Déby[15]. Il établit le Conseil militaire de transition comme nouvelle autorité gouvernementale et refuse initialement de négocier avec les groupes d'insurgés[16].
Déby adoucit sa position en août, proposant un dialogue national avec les rebelles. FACT exprime son intérêt pour la proposition[16]. La discussion entre le gouvernement et les insurgés débute en octobre, supervisée par l'ex-président Goukouni Oueddei. Le CCMSR et la FNDJT confirment leur participation[17]. Le 29 novembre, le gouvernement tchadien annonce une amnistie pour 296 rebelles et dissidents politiques[18].
Notes et références
- (en) Cet article est partiellement ou en totalité issu de l’article de Wikipédia en anglais intitulé « Insurgency in Northern Chad » (voir la liste des auteurs).
- (en-US) Eric Claude Olander, « What’s at Stake for China in Chad Following the Unexpected Death of President Idriss Deby? », sur The China Africa Project, (consulté le )
- Chadian President Idriss Deby dies on frontline after 30 years in power
- Ben Taub, « A Shadow Rebellion in Chad », The New Yorker, (consulté le )
- Emadeddin Badi, « Déby's death: A microcosm of the flaws of French foreign policy in Libya », Atlantic Council, (consulté le )
- (en) « Front for Alternation and Concord in Chad (FACT) - Chad | Terrorist Groups | TRAC », www.trackingterrorism.org (consulté le )
- (en-US) « Fighters from new rebel group attack Chad soldiers at Libya border », Yahoo News, (consulté le )
- Andrew McGregor, « War in the Tibesti Mountains – Libyan-Based Rebels Return to Chad », Aberfoyle International Security, (consulté le )
- « Fighters from new rebel group attack Chad soldiers at Libya border », Reuters, (consulté le )
- Chad: Defusing Tensions in the Sahel (2018), p. 17–18.
- AFP, « Fighting over gold in Chad leaves dozens dead: sources », news24, (consulté le )
- Chad: Clashes between armed groups leave dozens dead in north Jan. 12, 15 January 2019
- Rebel Incursion Exposes Chad's Weaknesses, 13 February 2019
- In #Chad, FNDJT Rebels Claim Attack In Tibesti, 30 January 2021
- Edouard Takadji et Krista Larson, « Chad army claims it has stopped rebel drive toward capital », Washington Post,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Kizzi Asala, « Chad: Army says operation against rebels is "over" », Africa News,‎ (lire en ligne, consulté le )
- « Chad Rebel Group FACT Says It's Willing to Join National Dialogue », VOA,‎ (lire en ligne, consulté le )
- « Tchad: la junte engage des discussions avec les groupes rebelles et les partis de l'opposition », AA,‎ (lire en ligne, consulté le )
- Chad gives amnesty to hundreds of rebels and dissidents, meeting opposition demand, 29 November 2021
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- « Chad: Defusing Tensions in the Sahel », International Crisis Group, Brussels, no 266,‎ (lire en ligne)