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Infanterie cycliste

L'infanterie cycliste désigne les soldats d'infanterie qui manœuvrent sur le champ de bataille en utilisant des bicyclettes. Son apparition remonte à la fin du XIXe siècle, lorsque la bicyclette devint populaire en Europe, aux États-Unis et en Australie.

Troupes indiennes dans la Somme en 1916.

Usage initial

De nombreuses expériences ont été menées pour rechercher des applications militaires à la bicyclette et ont abouti à la mise en place d'unités complètes avec des missions et des matériels spécifiques.

Belgique

Comme bien d'autres armées, l'armée belge adopte le vélo et le donne à ses carabiniers qui deviendront les carabiniers-cyclistes. Ils participeront à la première victoire alliée contre l'Allemagne (La bataille de Haelen, le ), où ils reçurent de l'adversaire le surnom de « Diables noirs ». Pendant l'entre-deux-guerres, l'armée belge mis également sur pied une unité de cyclistes frontières coiffés d'un béret semblable à celui des Chasseurs ardennais mais bleu.

États-Unis

Des hommes du 25e régiment d'infanterie de l'armée de terre des États-Unis en 1897.

L'expĂ©rimentation la plus massive des unitĂ©s Ă  bicyclettes est organisĂ©e par le premier Lieutenant Moss de la 25e Infanterie des États-Unis (un rĂ©giment d'infanterie composĂ© uniquement d'Afro-AmĂ©ricains avec des officiers blancs). Utilisant une grande variĂ©tĂ© de bicyclettes, le lieutenant Moss et ses troupes effectuent d'Ă©piques expĂ©ditions Ă  bicyclette parcourant de 800 Ă  1 600 km Ă  la fois. Ă€ la fin du XIXe siècle, l'armĂ©e amĂ©ricaine Ă©value l'utilisation de la bicyclette pour le transport de troupes sur de longues distances. Les Buffalo Soldiers stationnĂ©s dans le Montana parcourent ainsi des centaines de kilomètres en tout-terrain Ă  une vitesse impressionnante.

France

Les premières expérimentations datent d'un décret du , sous la direction du Capitaine Gérard. Il crée dans son régiment, le 87e de ligne, un groupe de 12 cyclistes qu'il augmente jusqu'à atteindre l'effectif d'une compagnie en 1898. Entre 1893 et 1895, il invente une bicyclette pliante[1] capable de franchir des terrains non-préparés. Ce modèle est lancé puis produit par Peugeot. Des unités expérimentales sont créées à partir de 1895 dans diverses unités. Le , leur tenue est fixée. Le , le 2e et le 6e corps sont dotés de compagnies cyclistes. En 1903, toutes les compagnies cyclistes sont transférées à des corps de chasseurs. Le , elles sont transformées en compagnies permanentes. Puis l'intérêt pour des unités cyclistes se perd et ne refait surface que dans les années 1911-1912. Le , les compagnies sont transformées en dix groupes de chasseurs cyclistes qui sont subordonnés aux dix divisions de cavalerie de l'armée française. Ces groupes comprennent 2 capitaines, 1 médecin, 1 officier des détails, un état-major de 17 hommes, trois pelotons à 2 officiers et 8 sous-officiers, 121 caporaux et chasseurs et chacun divisé en 3 escouades soit au total 417 hommes. Leur rôle est de soutenir la cavalerie amie et de lui apporter des capacités de combat d'infanterie contre la cavalerie et l'infanterie adverse. Ces groupes sont utilisés lors de la bataille des frontières et la bataille de la Marne, mais leur activité s'arrête avec la guerre de tranchées. Elle reprend lors des phases de mouvement de 1916 à 1918.

le 6eGCC photographié à Vienne (France) août 1914
Le 6eGCC photographié à Vienne (France) août 1914

Royaume-Uni

Des unités à bicyclettes apparaissent à partir des années 1880. La première unité permanente est formée par la milice (Volunteer) en 1888, le 26th Middlesex Rifle Volunteers Battalion. Pendant la guerre des Boers, la bicyclette est employée de manière intermittente mais aucune unité n'est déployée. En 1908, à la suite de la réforme de Lord Haldane qui transforme les unités de "volunteers" en Territorial Force, 9 bataillons de cyclistes sont formés :

  • Le 25th (County of London) (Cyclist) Battalion, the London Regiment issu des rangs du 26th;
  • Le 10th (Cyclist) Battalion, the Royal Scots;
  • Le 5th (Cyclist) Battalion, the East Yorkshire Regiment;
  • Le 9th (Cyclist) Battalion, the Royal Highland Regiment (The Black Watch) qui devient le Highland Cyclist Battallion;
  • Le 6th (Cyclist) Battalion, the Norfolk Regiment;
  • Le 7th (Cyclist) Battalion, the Welsh Regiment;
  • Le 8th (Cyclist) Battalion, the Northumberland Fusiliers qui devient the Northern Cyclist Battalion;
  • Le 6th (Cyclist) Battalion, the Queen's Own (Royal West Kent Regiment) qui devient le Kent Cyclist Battalion;
  • Le Essex and Suffolk Cyclist Battalion.

En 1908, un dixième bataillon est créé,

En 1910, l'Essex and Suffolk Cyclist Battalion est coupé en deux et donne naissance aux :

  • 7th (Cyclist) Battalion, the Essex Regiment;
  • 6th (Cyclist) Battalion, the Suffolk Regiment.

En 1911 deux autres bataillons sont créés :

  • Le 6th (Cyclist) Battalion, the Royal Sussex Regiment
  • Le 9th (Cyclist) Battalion, the Hampshire Regiment

Enfin, au début de 1914 est créé le quatorzième bataillon cycliste :

  • Le Huntingdonshire Cyclist Battalion.

Aucune de ces unités territoriale n'est déployée en France en 1914 et sont utilisées pour défendre les côtes britanniques.

En 1915, l'Army Cyclist Corps est fondé pour regrouper tous ces bataillons auquel se joignent dix huit autres bataillons formés par des régiments de Yeomanry de deuxième ligne :

  • 1st Cyclist Battalion, rattachĂ© au I Corps.
  • 2nd Cyclist Battalion (Yorkshire Dragoons), rattachĂ© au II Corps.
  • 4th Cyclist Battalion rattachĂ© au IV Corps.
  • 5th Cyclist Battalion (North Irish Horse), rattachĂ© au V Corps.
  • 6th Cyclist Battalion, rattachĂ© au VI Corps.
  • 7th Cyclist Battalion, rattachĂ© au VII Corps.
  • 8th Cyclist Battalion, rattachĂ© au VIII Corps.
  • 9th Cyclist Battalion, rattachĂ© au IX Corps.
  • 10th Cyclist Battalion, rattachĂ© au X Corps.
  • 11th Cyclist Battalion, rattachĂ© au XI Corps.
  • 13th Cyclist Battalion, rattachĂ© au XIII Corps.
  • 15th Cyclist Battalion, rattachĂ© au XV Corps.
  • 17th Cyclist Battalion, rattachĂ© au XVII Corps.
  • 18th Cyclist Battalion, rattachĂ© Ă  la 1st Army.
  • 19th Cyclist Battalion, rattachĂ© au XIX Corps.
  • New Zealand Cyclist Battalion, rattachĂ© au XXII Corps.
  • Australian Cyclist Battalion, rattachĂ© au Australian Corps.
  • Canadian Cyclist Battalion, rattachĂ© au Canadian Corps.

La quasi-totalité de ces unités n'ont pas été employées comme unités cyclistes mais remises à la disposition de l'infanterie de ligne comme réserve. Lorsque les unités ont pu être employées dans leur rôle normal lors des phases de mouvements, leur emploi n'a pas convaincu.

L'Army Cyclist Corps est dissous en 1919 et les dernières unités reviennent à l'infanterie de ligne en 1922.

Suède

Militaire de l'armée suédoise en 2004.

Au début de la Seconde Guerre mondiale, l'armée suédoise comptait six régiments d'infanterie à vélo. Ils étaient équipés de bicyclettes militaire suédoises. Les plus courantes étaient les m/42, un vélo droit et sans dérailleur, produit par différents grands fabricants suédois de vélos. Ces régiments ont été supprimés entre 1948 et 1952, et les bicyclettes conservé pour un usage général dans l'armée. Au début des années 1970, l'armée commence à les vendre comme surplus militaire. Ils deviennent très populaires grâce à leur faible coût et à leur faible entretien, spécialement chez les étudiants. Pour répondre à cette popularité, une entreprise indépendante, Kronan, a commencé à produire une version modernisée du m/42 en 1997.

Suisse

Vélo d'ordonnance 05 de l'armée suisse avec du matériel de la Seconde Guerre mondiale, dont un mousqueton 31

L’Armée suisse avait une troupe d'infanterie d’élite cycliste qui a cessé d’exister au . Les troupes cyclistes d’élite sont créées en 1892 en vertu de la loi fédérale établissant la formation de compagnies cyclistes. En 1912, elles intègrent les sections de combat afin d'étendre leurs compétences au-delà des missions de liaison comme par exemple l’exploration, l’occupation des avant-postes ou la sûreté des flancs de déplacement de l’infanterie[2]. En 1937, les troupes cyclistes passent de l'infanterie aux troupes légères nouvellement créée, qui intègrent également la cavalerie et les troupes légères motorisées. En 1962 elles sont renommées troupes mécanisées et légères (TML). Le , dans le cadre du passage d'Armée 95 à Armée XXI en 2004, les trois régiments de cyclistes incorporés aux trois corps d'armée de campagne[3] sont dissous, marquant ainsi la fin des troupes cyclistes au sein de l'Armée suisse.

Les troupes cyclistes de 1995 Ă  2003:

  • Radfahrerregiment 4: Batallion Cycliste 1, Radfahrerbatallion 2 et 7
  • Radfahrerregiment 5: Radfahrerbatallion 3, 4 et 8
  • Radfahrerregiment 6: Radfahrerbatallion 5, 6 et 9

Un rĂ©giment Ă©tait composĂ© de trois bataillons. Parmi eux, deux Ă©taient composĂ©s d'une compagnie d'Ă©tat-major (EM), de trois compagnies de cyclistes, d'une compagnie cycliste lance-mines (lm 8,1 cm 1933/72, motorisĂ©) et une compagnie cycliste anti-chars (M47 Dragon et Panzerfaust 3). Un bataillon Ă©tait composĂ© d'une compagnie d'Ă©tat-major, d'une compagnie de cycliste, d'une compagnie de lance-mine lourd (lm 12 cm, motorisĂ©), d'une compagnie de chasseur de chars (Piranha TOW) et d'une compagnie sanitaire.

Les vélos militaires, que les troupes cyclistes appelaient "machine", continuent néanmoins d’être utilisés pour leurs côtés pratiques, écologiques et sportifs par exemple lors des écoles de recrues et des écoles de cadres, sur les places d’armes et durant les cours de répétitions[4].

Il y a eu deux modèles de vélo fabriqués pour l’armée Suisse. Le vélo d'ordonnance 05, qui a été fabriqué de 1905[5] aux années 80 en plusieurs versions, il n’avait qu’une seule vitesse. Il a ensuite été remplacé par le Vélo militaire d'ordonnance 93, avec 7 vitesses. Tous deux étaient fabriqués par l’entreprise Condor.

Histoire au combat

La première utilisation connue de la bicyclette au combat date du « Jameson Raid » précédant la Seconde Guerre des Boers, pendant lequel des cyclistes ont fait office de messagers. À la guerre, les cyclistes militaires effectuaient également des missions de renseignement ; cependant, différents combats ont impliqué de l'infanterie cycliste des deux côtés.

Première et Seconde Guerres mondiales

Deux Bersaglieri en 1917.
Soldats allemands, 1914.

Pendant la Première Guerre mondiale, la bicyclette était extrêmement utilisée que ce soit dans l'infanterie, le renseignement, la transmission des informations ou pour les soins médicaux. L'armée allemande conduit une étude sur l'usage de la bicyclette et publie ses résultats sous le titre Die Radfahrertruppe. Pendant ce temps, en Italie, les unités « Bersaglieri » utilisent des bicyclettes jusqu'à la fin de la guerre.

Militaires de l'armée impériale japonaise à vélo lors de l'invasion des Philippines.

Lors de l'invasion de la Chine en 1937, le Japon emploie 50 000 soldats Ă  bicyclette. Au dĂ©but de la Seconde Guerre mondiale, leurs campagnes au sud pour capturer Singapour en passant par la Malaisie pĂ©ninsulaire dĂ©pendent largement des soldats Ă  vĂ©lo. La bicyclette permet le transport silencieux et flexible de centaines de soldats, capables ensuite de surprendre et de semer la confusion chez les dĂ©fenseurs. Les bicyclettes permettent Ă©galement de rĂ©duire les exigences de la machine de guerre japonaise, ne nĂ©cessitant ni camion ni bateau supplĂ©mentaire pour les transporter et n'utilisant pas de prĂ©cieux pĂ©trole. L'usage de la bicyclette par les AlliĂ©s durant la Seconde Guerre mondiale est limitĂ©, mais inclut des bicyclettes pour les parachutistes et les messagers Ă  l'intĂ©rieur des lignes amies. L'opĂ©ration Biting Ă  Bruneval en 1942 est ainsi conduite par des vĂ©lo-commandos aĂ©roportĂ©s.

Guerre non conventionnelle

Unité cycliste des Tigres de libération de l'Îlam tamoul en 2004.

Bien que massivement utilisée pendant la Première Guerre mondiale, les vélos ont été largement remplacés par le transport motorisé dans les armées modernes. Cependant, ils ont repris une nouvelle vie comme « arme du peuple » dans la guérilla et les guerres non conventionnelles, où la capacité du vélo à transporter de lourdes charges (environ 180 kg) et des approvisionnements à la vitesse d'un homme qui marche le rend très utile pour les forces légères. Sur de longues périodes, les Vietcongs et l'Armée populaire vietnamienne ont utilisé des bicyclettes pour transporter l'approvisionnement de la « Piste Hô Chi Minh », évitant ainsi les attaques répétées des États-Unis et les bombardements stratégiques des Alliés. Lourdement chargés, ces bicyclettes étaient difficilement dirigeables. Le ravitailleur marchait alors à côté, poussant la bicyclette comme une brouette. Avec certains chargements très lourds, les ravitailleurs attachaient parfois des tiges de bambou au vélo pour le diriger comme avec un gouvernail (cette méthode est encore utilisée en Chine aujourd'hui). Les « vélos de transport » vietnamiens étaient reconstruits dans des ateliers dans la jungle avec un cadre renforcé pour porter de lourdes charges sur tout terrain.

XXIe siècle

L'usage du vĂ©lo comme un moyen de transport d'infanterie a continuĂ© au XXIe siècle avec le rĂ©giment cycliste de l'armĂ©e suisse, composĂ© de 3 000 soldats, qui a existĂ© jusqu'en 2003.

Certains rapportent que des vélos tout terrain ont été utilisés par les forces spéciales américaines comme véhicule de renseignement lors de l'invasion américaine de l'Afghanistan et des batailles consécutives et il est, en 2009, utilisé par le contingent néerlandais de l'ISAF.

Références

  1. « La Nature, 1895 », sur Cnum, (consulté le )
  2. Les troupes cyclistes suisses - Une histoire parallèle à l’évolution du vélo, musees.vd.ch.
  3. HervĂ© de Weck, « Troupes mĂ©canisĂ©es et lĂ©gères » dans le Dictionnaire historique de la Suisse en ligne, version du .
  4. Durant les cours de répétition, des vélos peuvent être utilisés par les officiers entre le cantonnement et leur logement, par la garde pour le trajet entre le cantonnement et le parc véhicules mais aussi par le sergent-major, le fourrier ou l’équipe de cuisine pour de petits trajets.
  5. Ordonnanzfahrrad MO 05

Liens externes

  • (en) Jim Fitzpatrick, The Bicycle In Wartime: An Illustrated History [« La Bicyclette en Temps de Guerre : Une histoire illustrĂ©e »], Brassey's Inc., Washington, DC, 1998 (ISBN 1574881574)
  • (sv) Gert Ekström, Ola Husberg, Ă„lskade cykel, Bokförlaget Prisma, 2001, 1e Ă©d. (ISBN 9151839067)
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