Accueil🇫🇷Chercher

Henri Gillard

Henri Gillard, plus connu sous le nom de l’abbé Gillard ou du recteur de Tréhorenteuc (né le et mort le [1]), est un prêtre breton attaché à l'église Sainte-Onenne de Tréhorenteuc de 1942 à 1962. Dès son arrivée, il fait restaurer cette petite église communale du Morbihan en la décorant de peintures qui mélangent le merveilleux celte à la foi chrétienne, à travers la symbolique du Graal. Il popularise nettement la légende arthurienne grâce à ses nombreux ouvrages et aux visites guidées du Val sans retour tout proche, qu'il organise. Durant ses années de ministère, il guide les visiteurs et les héberge dans l'église. Son action dynamise la commune de Tréhorenteuc, alors victime d'un important exode rural, pour en faire une destination touristique prisée. Désavoué et exilé par sa hiérarchie en 1962, l'abbé Gillard est finalement réhabilité après son décès en 1979 et enterré dans l'église de Tréhorenteuc. Une statue à son effigie a été érigée et une association s'est constituée pour défendre ses œuvres et son héritage.

Henri Gillard
Image illustrative de l’article Henri Gillard
Statue de l'abbé Henri Gillard devant l'église du Graal
Biographie
Nom de naissance Henri Antoine Marie Gillard
Naissance
Manoir de Trénaleuc, Guégon
(Morbihan, France)
Ordination sacerdotale
Décès
Plumergat
(Morbihan, France)
Recteur de Trehorenteuc
(1942 – 1962)

Blason

Biographie

Henri Gillard naît à Guégon le , au manoir de Trénaleuc. Ses ancêtres sont agriculteurs depuis plusieurs générations. Il étudie à Ploërmel puis au grand séminaire de Vannes, avant d'être ordonné prêtre le , à l'âge de 23 ans. D'abord professeur de collège, il devient vicaire à Plumelec puis est nommé à Crédin où déjà, sa hiérarchie apprécie peu son originalité. Il est mobilisé pour la Seconde Guerre mondiale en 1940 et regagne Crédin après la débâcle[2] - [3]. Durant l'occupation allemande, il se réfugie dans ses lectures[3].

En , il arrive à Tréhorenteuc comme nouveau recteur de la paroisse locale. En raison de ses idées originales et non-conformes, le diocèse de Vannes souhaite vraisemblablement le « mettre au placard » dans cette petite commune rurale isolée et reliée par des chemins de terre, dont l'église tombe en ruines[4] - [5]. Tréhorenteuc, affecté par l'exode rural, est considérée comme le « pot de chambre » du diocèse[6]. L'abbé Gillard prend en sympathie les agriculteurs pauvres de la commune, partage leur vie et devient leur secrétaire de mairie[7]. Avec les 150 habitants[8] de Tréhorenteuc, il distingue le potentiel des légendes de Brocéliande et du Val sans retour tout proche[5]. L'abbé Gillard ne place pas les aspects « païens » de la légende arthurienne et le catholicisme en opposition[9]. En redécorant l'église de Tréhorenteuc (à ses frais[7]), il fait appel au merveilleux celtique, chrétien, et à l'ésotérisme : l'abbé se met ainsi en phase avec les nouvelles pratiques socio-économiques de son époque, permises par l'arrivée des congés payés et les progrès de l'automobile, il répond à une demande touristique[10]. Les premiers circuits sont créés dans les années d'après-guerre : des cars partent de Rennes le dimanche pour desservir Tréhorenteuc, d'où l'abbé Gillard se charge de faire visiter le Val sans retour[11]. Il effectue une présentation symbolique et religieuse du lieu, et n'hésite pas à héberger les visiteurs dans son église restaurée, à la manière d'une auberge de jeunesse[12]. Henri Gillard passe à la télévision (FR3) et à la radio (Europe 1), pour présenter les lieux de la légende arthurienne[13]. La représentation du chemin de croix qu'il a commandée pour l'église, figurant la fée Morgane dans un habit qui laisse deviner ses formes, contribue notamment à faire connaître les lieux[9]. Dès 1943, il fait éditer de petits guides de visite aux « éditions du Val »[14]. Son grand sens de la communication[5] et sa personnalité construisent la notoriété de ce village, qui attire peu à peu des visiteurs venus de toute la France. Dans un contexte de déclin de l'économie agricole, son action permet à la commune de trouver quelques revenus touristiques[5]. Moins qu'un lieu de culte, son église devient un centre culturel, « faute d'habitants »[15].

L'église Sainte-Onenne, plus connue sous le nom de « chapelle du Graal », restaurée par l'abbé Gillard.

La personnalité originale de l'abbé favorise son intégration au milieu culturel breton. Le poète breton Charles Le Quintrec évoque d'interminables discussions autour de la légende de Ker-Is et des épopées celtiques, entre l'abbé Gillard et ses invités[16]. Il souligne que pour Henri Gillard « tout n'était que symboles »[17]. De fait, Gillard est passionné par les nombres et l'astrologie, passant de longues heures à regarder les étoiles et à lire des ouvrages anciens. Sa hiérarchie n'a pas de prise sur lui, il revient sans cesse à ses calculs et ses études de la symbolique[16]. Toujours d'après Le Quintrec, l'abbé parle bas et vite, et possède le regard d'un enfant[17].

Henri Gillard fréquente d'autres intellectuels bretons, en particulier Xavier de Langlais et Jean Markale[18].

En 1962, ses idées attirent l'attention de son évêché. Sa hiérarchie, choquée par ses actions et la façon dont il mêle le christianisme au merveilleux païen, le déplace et l'empêche d'accéder à l'église Sainte-Onenne[5] - [9]. Il vit ses dernières années dans la maison de retraite du clergé à Sainte-Anne-d'Auray. Il reçoit toujours de nombreuses visites, y compris de la presse et de la télévision[17]. Cet éloignement de Tréhorenteuc le fait souffrir. Il ressemble, d'après Le Quintrec, à un « enfant perdu, égaré et amoindri » en quête de tendresse[17]. Il faut attendre son décès en pour que le diocèse de Vannes le réhabilite officiellement, et lui permette d'être enterré dans son église[5].

Bibliographie

Henri Gillard écrit une vingtaine d'opuscules sous le nom d'auteur « Le recteur de Tréhorenteuc », deux livrets audiovisuels sur les Épitres et l'Évangile dans les musées nationaux, et un essai consacré au zodiaque. La plupart de ses ouvrages sont désormais visibles à l'office de tourisme de Tréhorenteuc[2].

  • Les Mystères de BrocĂ©liande, Éditions du PloĂ«rmelais, 1954
  • La mystique des nombres dans les beaux arts, Éditions du PloĂ«rmelais, 1955
  • Symbolisme et mystique des nombres en BrocĂ©liande, Éditions du PloĂ«rmelais (Impr. le PloĂ«rmelais), 1956
  • VĂ©ritĂ©s et lĂ©gendes de TrĂ©horenteuc, St. Joachim, 1971
  • Les ÉpĂ®tres dans les musĂ©es nationaux : livret audio-visuel, St. Joachim, 1971
  • Implantation en BrocĂ©liande des romans de la Table ronde, Henri Gillard, 1972
  • Le Zodiaque: ses signes, les nombres sacrĂ©s et les idĂ©ogrammes, Henri Gillard, 1976
  • VĂ©ritĂ©s et lĂ©gendes de TrĂ©horenteuc, Association de sauvegarde des Ĺ“uvres de l'AbbĂ© Gillard, PrĂ©face de Jean Markale, 1996

Postérité

L'abbé Gillard est considéré comme l'homme qui a redonné vie aux légendes arthuriennes dans cette petite commune de Bretagne, grâce à ses efforts et à la restauration de son église, dédiée à Sainte Onenne[4]. Il a mêlé légendes celtiques et foi chrétienne, dans une ouverture d'esprit certaine[19]. Il laisse en héritage une célèbre petite phrase, « La porte est en dedans », et d'autres réflexions ésotériques du type « Ce que l'on voit n'existe pas, mais ce que l'on ne voit pas existe »[3].

C'est aussi le dernier recteur de Tréhorenteuc : après son départ, la charge religieuse de la petite église est confiée au recteur de Néant-sur-Yvel et au curé de Mauron[20]. Après son décès est créée l'« Association de sauvegarde des œuvres de l'Abbé Gillard ». L'édifice est désormais qualifié d'« église ésotérique »[4]. Durant ses années de service comme prêtre, l'abbé Gillard a rencontré Jacques Bertrand, alias Jean Markale, qui est considéré depuis comme son héritier spirituel[14].

Statue

En 1998, une statue de bronze à son effigie est érigée devant l'église, en hommage notamment à son investissement pour sa restauration[9].

Le mercredi , des touristes remarquent la disparition de la statue de l'abbé Gillard, demandant si elle est en restauration[21]. La date du vol est inconnue, ni la personne qui ouvre l'église, ni les habitants n'ayant remarqué la disparition de la statue[21]. Le maire de Tréhorenteuc Michel Gortais dépose plainte pour ce vol, vol qui affecte les habitants de la commune, qu'ils soient religieux ou non[21].

Notes et références

  1. État civil sur le fichier des personnes décédées en France depuis 1970
  2. Yves Guilloux, Le triskell et l'écharpe : la transceltique d'un maire breton, éditions Cheminements, coll. Une mémoire, 2004, (ISBN 2844782515 et 9782844782519), p. 250
  3. Ealet 2008, p. 146
  4. Claude Arz, Voyages dans la France mystérieuse, Place des éditeurs, coll. Ésotérisme et spiritualité, 2011, (ISBN 284228450X et 9782842284503), p. (livre numérique, rech. « Abbé Gillard »)
  5. Ealet 2008, p. 11
  6. Ealet 2008, p. 145
  7. Ealet 2008, p. 147
  8. Papieau 2014, p. 103
  9. Jean-Pierre Colignon, « À Tréhorenteuc, une pin-up dans un chemin de croix », dans Curiosités, jeux et énigmes de la Bretagne, Albin Michel, (ISBN 2226306781 et 9782226306784), livre numérique
  10. Papieau 2014, p. 105
  11. Calvez 2010, p. 13.
  12. Ealet 2008, p. 153-154.
  13. Ealet 2008, p. 154-155.
  14. Ealet 2008, p. 149
  15. Gillard 1971, p. 4
  16. Charles Le Quintrec, Un Breton à Paris, Albin Michel, 2012, (ISBN 2226228225 et 9782226228222), p. (livre numérique)
  17. Le Quintrec 1987, p. livre numérique
  18. Papieau 2014, p. 104
  19. Ealet 2008, p. 137
  20. Ealet 2008, p. 142
  21. « Tréhorenteuc. Devant l’église, la statue de l’abbé Gillard a été volée », Ouest-France,‎ (lire en ligne, consulté le ).

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Marcel Calvez, « Druides, fĂ©es et chevaliers dans la forĂŞt de BrocĂ©liande : de l'invention de la topographie lĂ©gendaire de la forĂŞt de Paimpont Ă  ses recompositions contemporaines », Festival international de gĂ©ographie. Programme scientifique, Saint-DiĂ©-des-Vosges,‎ (lire en ligne)
  • Marcel Calvez, « TrĂ©horenteuc, nouveau centre de la topographie lĂ©gendaire arthurienne, et l'abbĂ© Henri Gillard », Colloque international "Territoire, Ă©conomie, patrimoine", Saint-Brieuc,‎ (lire en ligne)
  • Jacky Ealet, TrĂ©horenteuc en BrocĂ©liande, Les oiseaux de papier, coll. « De BrocĂ©liande Ă ... », (ISBN 978-2-916359-28-1). Ouvrage utilisĂ© pour la rĂ©daction de l'article
  • Henri Gillard, VĂ©ritĂ©s et lĂ©gendes de TrĂ©horenteuc, St. Joachim, , 48 p.
  • Charles Le Quintrec, « 17 juin », dans Les Lumières du soir : Journal 1980-1985, Albin Michel, (ISBN 2226228586 et 9782226228581)
  • Isabelle Papieau, Le retour de la celtitude : De BrocĂ©liande aux fĂ©es stars, Éditions L'Harmattan, coll. « Logiques sociales », , 184 p. (ISBN 978-2-336-34479-9 et 2-336-34479-3)

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.