HĂ©magglutination
LâhĂ©magglutination est une variante de la rĂ©action dâagglutination. Elle est dĂ©finie comme la fixation dâanticorps spĂ©cifiques sur des structures antigĂ©niques prĂ©sentes Ă la surface des globules rouges. Cette rĂ©action aboutit Ă la formation dâun agrĂ©gat d'hĂ©maties appelĂ© agglutinat. LâhĂ©magglutination est un mĂ©canisme principalement utilisĂ© en laboratoire afin dâĂ©tablir des sĂ©rodiagnostics et de dĂ©terminer les groupes sanguins. Cette mĂ©thode est trĂšs utilisĂ©e Ă©tant donnĂ© sa rapiditĂ©, sa bonne sensibilitĂ© et son faible coĂ»t.
Principe
La rĂ©action d'hĂ©magglutination met en jeu la fixation d'anticorps sur des antigĂšnes dit particulaires. C'est un moyen de dĂ©tecter les anticorps dâun immun-sĂ©rum, signe de la rĂ©ponse immunitaire humorale, qui se fixent sur les antigĂšnes membranaires des hĂ©maties. C'est aussi un moyen de dĂ©terminer le groupe sanguin grĂące Ă un anticorps connu appelĂ© sĂ©rum test. Ceci est possible par le biais dâun pouvoir agglutinant.
Deux théories rendent compte de ce mécanisme :
- La thĂ©orie des ponts : une immunoglobuline (Ig) Ă©tant accrochĂ©e par ses deux sites anticorps Ă deux sites antigĂ©niques membranaires dâĂ©rythrocytes diffĂ©rents.
- La thĂ©orie du potentiel zĂȘta : lâanticorps est une protĂ©ine amphotĂšre qui neutralise les charges Ă©lectronĂ©gatives des radicaux carboxylates (COO- de l'acide sialique en particulier) et permet le rapprochement des hĂ©maties.
- ThĂ©orie mixte : en fait, selon la position de l'Ă©pitope plus ou moins enfoui sous le glycocalix (RH) ou Ă l'extrĂ©mitĂ© d'une chaĂźne protĂ©ique ou osidique (MNS, ABO), et donc plus ou moins Ă©loignĂ© de la membrane lipidique, l'accessibilitĂ© par les anticorps sera trĂšs diffĂ©rente. Le rapprochement des hĂ©maties peut donc ĂȘtre initiĂ© par une chute du potentiel zĂȘta, puis renforcĂ© par des ponts, ou ĂȘtre initiĂ© par des ponts sur des Ă©pitopes nombreux (ABO) et trĂšs externes ou sur des hĂ©maties dĂ©formĂ©es prĂ©sentant des spicules, fixation initiale qui contribue Ă©galement Ă baisser le potentiel zĂȘta.
La liaison des anticorps aux antigĂšnes membranaires (ABO, RH, Duffy, KiddâŠ), adsorbĂ©s (Lewis, Chido-Rodgers) ou artificiellement fixĂ©s (technique prĂ©cĂ©dant au milieu des annĂ©es 1970 l'IEA pour les sĂ©rologies virales, par exemple) prĂ©sents sur les hĂ©maties entraĂźne une baisse du potentiel zĂȘta et un rapprochement des hĂ©maties. Une fois ces hĂ©maties suffisamment proches, elles peuvent s'agrĂ©ger en agglutinats soit par l'action de force de van der Waals ou de tension superficielle, et/ou par les ponts qui peuvent se former entre deux hĂ©maties grĂące aux deux (IgG) ou divers (IgM) sites anticorps (Fab) d'une mĂȘme immunoglobuline.
Certaines agglutinines sont plus ou moins agglutinantes :
- Les IgM ont un fort pouvoir agglutinant, cela résulte de leur structure moléculaire : chaque molécule d'IgM est constituée de 5 sous-unités identiques ayant la structure de base des molécules d'Ac, à savoir, 2 chaines lourdes (H), deux chaines légÚre (L) et deux sites anticorps.
- Alors que les IgG sont peu ou pas agglutinantes du fait de leur structure bivalente et de leur poids moléculaire (160 000) inférieur à celui des IgM (1 000 000).
Les antigĂšnes peuvent exister naturellement sur la cellule : ce sont des antigĂšnes particulaires (ex. : antigĂšnes de groupes Ă©rythrocytaires sur les hĂ©maties) ou ĂȘtre fixĂ©s artificiellement sur une particule inerte (bille de latex, gĂ©latine, particule de charbon, bille de polystyrĂšne, hĂ©matieâŠ) : ce sont des antigĂšnes solubles rendus particulaires. On parle alors d'agglutination directe ou passive.
Les hématies sont des structures intéressantes d'utilisation car elles représentent un support neutre et rendent visible la réaction. Cependant ce sont des supports fragiles qui nécessitent préalablement un traitement au formol les rendant plus résistants.
De plus, pour ces rĂ©actions il est nĂ©cessaire dâeffectuer :
- un tĂ©moin rĂ©actif avec des hĂ©maties non sensibilisĂ©es Ă lâantigĂšne qui vĂ©rifie que la solution tampon est bien isotonique et que les hĂ©maties sont bien neutres.
- un témoin positif et un témoin négatif qui permettent d'effectuer un contrÎle qualité.
HĂ©magglutination directe active
LâhĂ©magglutination directe active repose sur la mise en prĂ©sence dâhĂ©maties et dâun sĂ©rum contenant des anticorps agglutinants, en rĂšgle gĂ©nĂ©rale des IgM. DĂšs lors, les hĂ©maties sâagglutinent si ces anticorps baissent suffisamment le potentiel zĂȘta et forment des ponts avec les antigĂšne particulaires prĂ©sents naturellement sur les membranes des hĂ©maties.
ex. : recherche de groupe sanguin[1] (les hĂ©maties sont porteuse des antigĂšnes des diffĂ©rents systĂšmes de groupe sanguins), lâidentification dâhĂ©maties animales et la dĂ©tection d'anticorps dans un liquide biologique.
HĂ©magglutination directe passive
LâhĂ©magglutination directe passive se fait avec des antigĂšnes solubles fixĂ©s sur les membranes des hĂ©maties les rendant ainsi particulaires. Les hĂ©maties jouent ici le rĂŽle de support figurĂ© inerte n'intervenant pas dans la rĂ©action antigĂšnes-anticorps. La prĂ©sence d'anticorps agglutinants sera alors dĂ©celĂ©e par l'agglutination des hĂ©maties sur lesquelles l'antigĂšne a Ă©tĂ© fixĂ©.
HĂ©magglutination indirecte
Cette rĂ©action dâhĂ©magglutination associe des antigĂšnes particulaires et des anticorps peu ou non agglutinants. Il est donc nĂ©cessaire de favoriser l'agglutination, expliquĂ©e par deux thĂ©ories, la thĂ©orie des ponts d'une part, et la baisse du potentiel zĂȘta d'autre part, ou l'association des deux.
Il existe trois méthodes d'agglutination artificielle afin de réaliser cette réaction :
- ajout au milieu de macromolĂ©cules, telles que l'albumine, qui diminuent les forces de rĂ©pulsion inter-globulaire par action sur le potentiel zĂȘta, et favorisent l'agglutination par les anticorps incomplets IgG. (Exemple : dĂ©termination du groupe RhĂ©sus sanguin) ;
- traitement par des enzymes protĂ©olytiques, ce qui supprimera un certain nombre de charges Ă©lectriques superficielles de la membrane (acide sialique en particulier, COOâ) et diminuera les forces de rĂ©pulsion. (ex. : recherche des agglutinines irrĂ©guliĂšres (RAI) dans le dĂ©pistage de l'isoimmunisation sanguine fĆto-maternelle) ;
- pontage ou baisse du potentiel zĂȘta par des antiglobulines (2e anticorps spĂ©cifique du 1er) qui en se fixant l'anticorps humain spĂ©cifique de l'antigĂšne Ă©rythrocytaire, permettent leur agglutination en diminuant le potentiel zĂȘta et/ou rĂ©unissent des cellules voisines et augmentent la taille des rĂ©seaux, c'est le Test de Coombs, appelĂ© maintenant test Ă l'antiglobuline dont 2 versions existent.
Inhibition de l'hémagglutination
Un grand nombre de virus possĂšdent des hĂ©magglutinines sur leur enveloppe. Ils vont ainsi provoquer l'agglutination des globules rouges. La rĂ©action d'inhibition de l'hĂ©magglutination met en jeu un antigĂšne viral et des anticorps antiviraux, dirigĂ©s contre cette hĂ©magglutinine, et les rĂ©cepteurs portĂ©s par les hĂ©maties. Dans cette rĂ©action, les anticorps antiviraux protecteurs se fixent sur le virus et empĂȘchent sa combinaison avec les rĂ©cepteurs des hĂ©maties introduites dans le deuxiĂšme temps de la rĂ©action. Si les anticorps reconnaissent leur antigĂšne, le complexe immun formĂ© neutralise la capacitĂ© hĂ©magglutinante du virus et on aboutit Ă une hĂ©magglutination nĂ©gative. Dans le cas oĂč les anticorps ne correspondent pas au virus isolĂ©, le complexe immun ne se forme pas et le virus peut induire une hĂ©magglutination.
ex. : recherche de ÎČHCG, sĂ©rodiagnostic de la rubĂ©ole ou de la rougeole.
Le terme d'inhibition de l'agglutination est souvent utilisĂ© en immuno-hĂ©matologie. Cette technique permet de mettre en Ă©vidence un antigĂšne soluble prĂ©sent dans un liquide biologique, plasma ou sĂ©rum, salive, sperme, laitâŠ
Il peut s'agir soit d'un antigÚne de groupe sanguin présent sur les globules rouges tests humains, soit d'un antigÚne qui y a été fixé, de façon spécifique, immunoglobuline, parfois non spécifique.
Cette technique a permis de mettre en évidence la présence de substances de groupe ABO, Lewis dans la salive de sujets secréteurs, grùce à des érythrocytes de groupe connu.
Cette technique a également permis de découvrir les divers allotypes d'immunoglobulines G at A, grùce à la technique d'inhibition d'antiglobuline. Il s'agit des systÚmes Gm, km et Am. Le principe est décrit dans discussion:Robin Coombs.
En mĂ©dico-lĂ©gal, cette technique maintenant largement dĂ©passĂ©e, permettait de mettre en Ă©vidence l'origine humaine (ou simiesque -nous sommes cousins) d'un liquide biologique, sang, sperme⊠par inhibition d'une antiglobuline reconnaissant les immunoglobulines humaines. Il s'agissait de l'inhibition d'un test Ă l'antiglobuline, en pouvant mĂȘme en dĂ©terminer les phĂ©notypes Gm.
Notes et références
Voir aussi
Bibliographie
- Jacques BĂ©raud, Le technicien d'analyses biologiques : guide thĂ©orique et pratique, Ăditions TEC & DOC, Tours, 2001 (ISBN 2-7430-0404-5)
- T. Kindt, R. Goldsby, B. Osborne (traduit de l'anglais par C. Fridman), Immunologie : le cours de Janis Kuby, Dunod, Paris, 2008 (6e Ă©dition) (ISBN 978-2-10-051242-3)
Liens externes
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :
- Ressource relative à la santé :