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Goya et son médecin

Goya et son médecin[1] ou Goya soigné par le docteur Arrieta (en espagnol : Goya atendido por el doctor Arrieta) est une peinture réalisée par Francisco de Goya en 1820. Elle reflète la grave maladie dont a souffert son auteur de à la date à laquelle il a été traité par le médecin Eugenio Arrieta.

Goya et son médecin
Goya atendido por el doctor Arrieta
Artiste
Date
Type
Technique
Lieu de création
Dimensions (H × L)
117 × 79 cm
No d’inventaire
52.14
Localisation

Contexte de l'œuvre

Francisco de Goya est très malade de novembre 1819 à 1820, date à laquelle le docteur Arrieta le soigne. Aucun document n'atteste de la cause de ses maux, mais Goya lui-même prétend que son docteur lui a sauvé la vie. La récupération de Goya coïncide avec le réveil idéologique de l'Espagne, que Goya voyait enfin influencée par les Lumières[2].

Au pied de l'œuvre, une note, très probablement de Goya, dit :

« Goya agradecido, á su amigo Arrieta: por el acierto y esmero con qe le salvo la vida en su aguda y
peligrosa enfermedad, padecida á fines del año 1819, a los setenta y tres de su edad. Lo pintó en 1820.
»

« Goya reconnaissant, à son ami Arrieta : pour la justesse et l'application avec lesquelles il lui a sauvé la vie dans son intense et
dangereuse maladie, dont il a souffert fin 1819, à l'âge de soixante-treize ans. Il l'a peint en 1820. »

On ne sait pas exactement quelle était la maladie dont souffrait Goya. Il y a eu beaucoup de spéculations à ce sujet, et les hypothèses les plus probables indiquent une maladie vasculaire cérébrale[N 1] ou une maladie infectieuse[N 2].

Analyse

De nombreux critiques interprètent ce tableau comme un ex-voto à son médecin, Eugenio Arrieta, en remerciement de la guérison de la délicate maladie dont souffrait Goya, âgé de soixante-treize ans, et dont le peintre considérait si l'on admet que l'inscription est autographe qu'elle lui avait sauvé la vie.

Le tableau pourrait être conçu comme une Pietà laïque : à la place habituelle de Jésus-Christ se trouverait un Goya mourant, et le médecin ferait office d'ange protecteur. À l'arrière-plan se trouvent des femmes qui ont été interprétées non seulement comme les compagnes de Goya (il a vécu avec Leocadia Weiss (es)), mais aussi comme les divinités du destin ou Les Moires, sur lesquelles sa vie est suspendue, comme par un fil.

Les traits du visage sont rendus de façon magistrale. Goya se représente la bouche légèrement ouverte, le regard perdu, dans une attitude presque moribonde, sans force et sans conscience totale. Ses mains s'agrippent fébrilement aux vêtements qui le recouvrent. L'utilisation habile de la couleur et de l'éclairage établit un contraste entre les tons de chair respectifs de Goya et de son médecin. Le premier apparaît pâle et affaibli, tandis que le visage du médecin est sain. La robe de chambre de l'artiste est également d'un blanc éclatant, tout comme le drap, ce qui accentue le caractère dramatique de la scène et rapproche l'utilisation de la lumière de la maîtrise de Rembrandt.

Les coups de pinceau des toiles blanches sont décisifs mais précis. Quant à la composition, les personnages apparaissent proches du spectateur, qui semble assister à la scène dans la pièce où elle se déroule, cadrés comme ils le sont en plan moyen. Sur le fond sombre se détachent les silhouettes des femmes ou Moires, visages étranges qui reflètent le monde inquiétant des ombres qui hantait l'artiste aragonais dans cette transe. Nombre de leurs caractéristiques rappellent l'univers des Peintures noires que Goya a peintes sur les murs de sa maison (la Quinta del Sordo) durant ces années.

Le tableau reflète un thème très caractéristique du XIXe siècle et de la bourgeoisie, à savoir l'admiration pour la science. Dans ce cas, il n'y a pas d'intervention chrétienne ou de miracle religieux, mais plutôt une performance complète de sagesse et de médecine incarnée par le docteur Arrieta, dépeint avec humanité mais non sans fermeté dans sa profession. Le tableau s'écarte ainsi des conventions picturales de la peinture religieuse et académique du XVIIIe siècle et des satires contre les médecins courantes sous l'Ancien Régime (un thème que Goya lui-même a largement traité dans ses estampes), inaugurant une forme d'art moderne.

Notes et références

Notes

  1. Le professeur García-Conde Gómez fait l'analyse suivante :
    « Goya debió sufrir entonces, como en épocas posteriores, crisis de insuficiencia cerebro-vascular transitoria como fondo de una ateromatosis generalizada. La medicación que D. Eugenio García de Arrieta le administra en el cuadro debe ser valeriana... »

    Francisco José García-Conde Gómez, La estimación social del médico en relación con su eficacia (1994)[3].

    « Goya a dû souffrir alors, comme il le fera à nouveau plus tard, d'un athérome généralisé sur fond de crise d'insuffisance vasculaire cérébrale. Les médicaments que D. Eugenio García de Arrieta lui administre dans le tableau doit être de la valériane... »
  2. Le professeur Gómiz León en fait lui l'analyse suivante :
    « Según documentos que permanecieron en poder de los descendientes de Arrieta, se habla en ellos de fiebres tifoideas (tubardillo)[sic], y que Goya presentó cefalea, fiebre alta, delirios y parálisis parcial. »

    Juan José Gómiz León, Goya y su sintomatología miccional de Burdeos, 1825 (2007)[4].

    « Selon des documents qui sont toujours en possession des descendants d'Arrieta, sont évoquées des fièvres typhoïdes [sic], et que Goya a présenté des symptômes de céphalée, de fièvre élevée, de délires et de paralysie partielle. »

Références

  1. C'est le premier titre en français connu, et qui a été utilisé lors de l'exposition de Goya au musée de l'Orangeraie, à Paris, du au in Jean Hossard, « Un autoportrait de Goya avec son médecin », Revue d'histoire de la pharmacie, vol. 60, no 213, , p. 126-127 (ISSN 1775-3864, lire en ligne)
  2. Werner Hofmann (trad. de l'allemand), Goya : Du ciel à l'enfer en passant par le monde, Malakoff, Hazan, , 336 p. (ISBN 978-2-7541-0770-9), p. 230.
  3. (es) Francisco José García-Conde Gómez, La estimación social del médico en relación con su eficacia : Discurso leído en la solemne sesión inaugural del curso académico 1994, celebrada el día 11 de enero, Madrid, Instituto de España, Real Academia Nacional de Medicina, , 10 p. (lire en ligne), p. 8
  4. (es) Juan José Gómiz León, « Goya y su sintomatología miccional de Burdeos, 1825 », Archivo Español de Urologia, vol. 60, no 8, , p. 923 (lire en ligne)

Annexes

Bibliographie

  • (es) Valeriano Bozal, Francisco Goya : vida y obra, TF Editores & Interactiva, (ISBN 978-84-96209-39-8), p. 243-247 (vol. 2).
  • (es) Nigel Glendinning, Goya, Madrid, Arlanza, , 159 p. (ISBN 978-84-95503-40-4).
  • (es) Rose-Marie Hagen et Rainer Hagen, Francisco Goya, 1746-1828, Cologne, Taschen, , 96 p. (ISBN 978-3-8228-1823-7, lire en ligne).
  • Jean Hossard, « Un autoportrait de Goya avec son médecin », Revue d'histoire de la pharmacie, vol. 60, no 213, , p. 126-127 (ISSN 1775-3864, lire en ligne).
  • Marc Marti, « Goya et la peinture de soi : auto-représentation et autoportrait au XVIIIe siècle », Oxymoron, no 3, (lire en ligne).
  • (es) J. F. Moffitt, « Goya y los demonios : El Autorretrato con el doctor Arrieta y la tradición del Ars Moriendi », Goya: Revista de Arte, no 163, , p. 12-23.

Liens externes

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