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Les Moires

Les Moires (en espagnol : Átropos — « Moires Â» — ou Las Parcas — « Les Parques Â») est une huile rĂ©alisĂ©e par Francisco de Goya entre 1819 et 1823. C'est l'une des Peintures noires, des Ɠuvres peintes Ă  mĂȘme les murs de la maison, appelĂ©e Quinta del Sordo, que Goya acquit en 1819.

Les Moires
Átropos
Artiste
Date
Type
Technique
Huile al secco sur mur transposée sur toile
Dimensions (H Ă— L)
123 Ă— 266 cm
No d’inventaire
P000757
Localisation

Contexte de l'Ɠuvre

En 1819, Francisco de Goya acquiert la Quinta del Sordo, une maison dans la banlieue de Madrid dans laquelle le peintre vit ses derniÚres années en Espagne, avant de partir définitivement pour Bordeaux.

À partir de 1820, Goya est de plus en plus apprĂ©ciĂ© par ses contemporains, alors qu’il s’engage dans le style du « Sublime Terrible ». Le concept en fut dĂ©veloppĂ© par Edmund Burke dans A Philosophical Enquiry into the Ideas of the Beautiful and Sublime (1757), et se rĂ©pandit dans toute l’Europe au cours de la seconde moitiĂ© du XVIIIe siĂšcle. Du fait de la mentalitĂ© romantique, on estime alors, chez un artiste, l’originalitĂ© plus que tout autre talent, et des auteurs comme Felipe de Guevara signalent le goĂ»t des contemporains pour les productions des mĂ©lancoliques, dont le tempĂ©rament les porte Ă  produire des Ɠuvres pleines de « choses terribles et dĂ©jantĂ©es qu’on n’avait jamais imaginĂ©es[1]. »

HypothĂšse de la localisation originale des Peintures noires dans la Quinta del Sordo.

Il entreprend alors de peindre Ă  mĂȘme le mur plusieurs huiles, dans toute la maison. Les Moires est probablement situĂ©e sur le mur gauche du premier Ă©tage (selon la porte d'entrĂ©e Ă  cette salle), Ă  cĂŽtĂ© de Duel au gourdin[2].

La peinture fait ainsi partie de ce que l'on appelle les Peintures noires : quatorze fresques peintes avec la technique de l’huile al secco (sur la surface de plĂątre d’une paroi) qui furent transposĂ©es sur toile entre 1874 et 1878 par Salvador MartĂ­nez Cubells sur commande du baron Émile d'Erlanger[3]. Ce banquier français, qui possĂ©dait cette propriĂ©tĂ©, avait l'intention de les vendre lors de l'Exposition universelle de 1878 de Paris ; mais il n'a pas trouvĂ© preneur et les a finalement donnĂ© en 1881 au musĂ©e du Prado, qui les conserve et les expose toujours aujourd'hui.

Description du tableau

Représentation et interprétations

Francisco de Goya revisite avec cette peinture le thĂšme mythologique des dĂ©esses du destin que sont les Parques, menĂ©es par Atropos, dĂ©esse de l'inexorabilitĂ© (« l'Implacable »), qui porte des ciseaux pour couper le fil ; Clotho, qui porte normalement une fileuse pour tisser le destin (que Goya substitue par une poupĂ©e ou un nouveau-nĂ© — probablement une allĂ©gorie de la vie) ; et LachĂ©sis, « la RĂ©paratrice Â», qui dans cette reprĂ©sentation regarde au travers d'une loupe ou d'un miroir et symbolise le temps : c'est elle qui mesurait la longueur du fil.

Ces trois figures fĂ©minines suspendues en l'air sont accompagnĂ©es d'une quatriĂšme, qui semble masculine et fait face au spectateur, les mains dans le dos — probablement attachĂ©es.

Les Parques seraient ainsi en train de dĂ©cider du destin de ce dernier personnage, dont les mains attachĂ©es l'empĂȘchent de s'opposer au destin qu'elles dĂ©cident pour lui.

Comme dans toutes les Peintures noires, la gamme chromatique est rĂ©duite, et dans celle-ci en particulier, elle se limite aux tons ocres et noirs. Tout cela renforce l'ambiance nocturne et irrĂ©elle de cette Ɠuvre.

La peinture est représentative des caractéristiques que le XXe siÚcle a considéré comme précurseuses de l'expressionnisme pictural.

Notes techniques

La peinture murale originale dans la Quinta del Sordo photographiée par Jean Laurent en 1874. L'inscription sous l'image a été ajoutée au négatif vers 1890 par les successeurs de J. Laurent ; le négatif original est conservé par l'Institut du patrimoine culturel d'Espagne, faisant partie du Fonds photographique Ruiz Vernacci.

On sait que les Peintures noires ont Ă©tĂ© peintes par-dessus des images dĂ©jĂ  peintes sur ces murs et reprĂ©sentant des scĂšnes champĂȘtres avec de petites figures, dont il mit Ă  profit les paysages Ă  l’occasion. Les spĂ©cialistes ne s'accordent pas sur la paternitĂ© de ces premiĂšres peintures, Glendinning prĂ©tendant que les peintures « ornaient dĂ©jĂ  les murs de la Quinta del Sordo quand il l’acheta[1] », tandis que Bozal pensant le contraire, puisque ce n’est qu’ainsi qu’on peut s’expliquer qu’il ait rĂ©utilisĂ© certains de leurs matĂ©riaux[4]. Ce dernier suppose qu'il a repeints ces sujets joyaux Ă  la suite des succĂšs mouvementĂ©s du Triennat libĂ©ral[4].

Les Peintures noires sont réalisées à l'huile al secco sur le plùtre des murs. Ces peintures avaient des cadres de papier, tandis que le reste de la décoration était du papier peint avec des motifs floraux et végétaux au rez-de-chaussée, et géométriques diagonales à l'étage. Elles ont été transposées sur toile entre 1874 et 1878 par Salvador Martínez Cubells[3].

Notes et références

  1. Glendinning 1993, p. 116.
  2. Voir les images de la visite virtuelle de la localisation originale : vue de l'huile prĂšs de la porte, vue depuis le mur de la porte.
  3. Bozal 2005, p. 247 (vol. 2) : « Salvador MartĂ­nez Cubells (1842 - 1914), restaurador del Museo del Prado y acadĂ©mico de nĂșmero de la Real Academia de Bellas Artes de San Fernando, trasladĂł las pinturas a lienzo por encargo del que en aquel momento, 1873, era propietario de la quinta, el barĂłn FrĂ©deric Emile d'Erlanger (1832 - 1911). MartĂ­nez Cubells realizĂł este trabajo ayudado por sus hermanos Enrique y Francisco [...] ».
  4. Bozal 2005, p. 248 (vol. 2).

Annexes

Bibliographie

  • (es) Valeriano Bozal, Francisco Goya : vida y obra, TF Editores & Interactiva, (ISBN 978-84-96209-39-8).
  • (es) Nigel Glendinning, « Francisco de Goya », Cuadernos de Historia (col. « El arte y sus creadores Â», n° 30), Madrid, no 16,‎ .
  • (es) Gregorio Cruzada Villaamil, « La Casa del Sordo », El Arte en España, Madrid, no VII,‎ , p. 265-267.
  • Jean Laurent, Catalogue illustrĂ© des tableaux du MusĂ©e du Prado Ă  Madrid, Madrid, J. Laurent et Cie, , p. 32.
  • (es) L. GarcĂ­a de Valdeavellano, « Ante las pinturas de la Quinta del Sordo », Arte Español, no IX,‎ , p. 336-341.
  • (es) F. J. SĂĄnchez CantĂłn, Goya y sus Pinturas Negras en la Quinta del Sordo, Milan, Barcelone, Rizzoli, Vergara, , p. 42, 53, 69-83.
  • (es) R. AlcalĂĄ Flecha, « Goya y el mito de las Parcas », Goya: revista de Arte, no 258,‎ , p. 349.

Articles connexes

Liens externes

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