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Georges de Sagla

Georges de Sagla (en guĂšze Giyorgis SĂ€glawi ; en amharique : áˆ”áŠ„áˆˆáĄ አባ፡ áŒŠá‹źáˆ­áŒŠáˆ”áĄ áˆ”áŠ„áˆˆáĄ አባ፡), Ă©galement appelĂ© Georges de Gasetcha ou Georges de Dabra Bahrey[1], est un ecclĂ©siastique et Ă©crivain religieux Ă©thiopien, nĂ© vers 1365, mort le [2]. C'est un saint de l'Église Ă©thiopienne, cĂ©lĂ©brĂ© le 7 du mois de hamlĂ© (jour de sa mort).

Georges de Sagla
Baselyos, Giyorgis
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Activités
Écrivain, religieux
Autres informations
Étape de canonisation

Sources

L'histoire d'Abba Giyorgis Saglawi est connue par deux textes. D'une part, une Vie liturgique du saint (GĂ€dl) a Ă©tĂ© composĂ©e peu de temps aprĂšs sa mort, sous le rĂšgne du roi Zara Yaqob (1434-1468) ou peu aprĂšs ; elle n'est connue actuellement que par trois copies (dont une, utilisĂ©e pour l'Ă©dition en CSCO, appartenant au monastĂšre de DĂ€brĂ€ Hayq). D'autre part, le personnage est longuement Ă©voquĂ© dans une homĂ©lie en l'honneur de l'archange Uriel (Dersana Ura'el), oĂč il est bĂ©nĂ©ficiaire d'un miracle accompli par l'archange ; ce texte est extrait d'un homĂ©liaire constituĂ© plus rĂ©cemment, datant du rĂšgne de MĂ©nĂ©lik II[3] ; il est reproduit Ă  la suite du GĂ€dl dans un manuscrit conservĂ© Ă  DĂ€brĂ€ Bahrey.

Biographie

Selon le texte des Miracles d'Uriel, il Ă©tait issu d'une famille de haute noblesse originaire d'Aksoum ; son grand-pĂšre Ă©tait prince (masfen) des TigrĂ©ens ; son pĂšre, HeywĂ€t BenĂ€, fut gouverneur de SĂ€gla (dans le Wello), puis fut nommĂ© gouverneur-en-chef (« chef des princes ») du TigrĂ© par le roi David Ier ; Ă©tant encore Ă  SĂ€gla, et n'ayant pas d'enfant, il en demanda un Ă  une icĂŽne de l'archange Uriel dans l'Ă©glise de la localitĂ© et fut exaucĂ©. Selon le GĂ€dl, quelque peu divergent, son pĂšre s'appelait Hezba Seyon et appartenait au corps des kĂ€henatĂ€ dĂ€btĂ€ra (« prĂȘtres du Tabernacle »[4]), les desservants des chapelles de la cour royale, nommĂ©s par le roi[5]. Le GĂ€dl raconte que Giyorgis fut consacrĂ© diacre par le MĂ©tropolite (Abouna), puis alla recevoir une formation monastique au monastĂšre de DĂ€brĂ€ Estifanos du lac Hayq, sous la tutelle de l'abbĂ© SĂ€rĂ€qĂ€ Berhan (qui, en tant que supĂ©rieur de cet Ă©minent monastĂšre, Ă©tait 'aqabĂ€ sĂ€'at, « gardien des heures », auprĂšs du souverain). Il aurait pris le « vĂȘtement monacal de probation » (sans devenir pleinement moine) pour Ă©chapper Ă  un mariage avec une fille du roi. Selon les Miracles d'Uriel, il serait restĂ© sept ans sans pouvoir apprendre une seule lettre de l'alphabet, Ă  tel point que l'abbĂ© le renvoya chez son pĂšre en lui conseillant d'en faire un soldat, mais le pĂšre insista, et l'archange fit miraculeusement du fils un lettrĂ© Ă©rudit.

Ensuite, selon le GĂ€dl, il aurait succĂ©dĂ©, comme « prĂȘtre du Tabernacle », Ă  son pĂšre Hezba Seyon, qui se retira dans un monastĂšre. Cette succession eut lieu sous le rĂšgne de David Ier. Ce roi le nomma Ă©galement nebura ed (administrateur) du monastĂšre de DĂ€brĂ€ Dammo, chargĂ© de la prĂ©dication et du contrĂŽle du clergĂ© dans cette rĂ©gion, et prĂ©cepteur de ses huit fils[6] et de sa fille. Mais Ă  la fin du rĂšgne, il subit une disgrĂące : il accusa d'hĂ©rĂ©sie un proche du roi nommĂ© Bitu, qui riposta en faisant croire au souverain que Giyorgis l'avait dĂ©noncĂ© comme hĂ©rĂ©tique auprĂšs du MĂ©tropolite. Giyorgis fut fouettĂ©, jetĂ© en prison, puis banni sur un sommet montagneux isolĂ©. Il ne retrouva sa place Ă  la cour qu'aprĂšs la mort de David Ier (1413), et l'avĂšnement de son ancien Ă©lĂšve Yeshaq Ier qui lui rendit ses dignitĂ©s. Sous ce rĂšgne il connut encore un exil temporaire Ă  la suite d'une nouvelle calomnie, mais cette fois le roi fut dĂ©trompĂ© et lui demanda pardon. À la fin de sa vie, il se retira comme moine au monastĂšre de DĂ€brĂ€ Barhey, dans sa rĂ©gion natale, et y fut enterrĂ© aux cĂŽtĂ©s du grand saint monastique BĂ€salotĂ€ Mika'el.

Il fut essentiellement, pendant la plus grande partie de sa vie, non pas moine, mais membre du clergĂ© sĂ©culier de la cour royale. et Ă  ce titre thĂ©ologien, liturgiste et poĂšte religieux. Les trois fondements de sa pensĂ©e religieuse sont : la lutte contre les hĂ©rĂ©sies, la dĂ©fense de l'observance du sabbat, et la dĂ©votion Ă  la Vierge. Sur le second point, le roi David Ier adopta en 1404 un dĂ©cret autorisant les monastĂšres issus du mouvement d'Ewostatewos Ă  observer le sabbat le samedi (s'Ă©cartant ainsi de l'enseignement de la papautĂ© copte pour prĂ©server la cohĂ©sion de son royaume) ; on ignore si Giyorgis pesa sur ce dĂ©cret (son Livre du MystĂšre, oĂč il dĂ©fend cette pratique, est de 1424). Il Ă©tait sur ce point en dĂ©saccord avec les moines de DĂ€brĂ€ Hayq. Selon le Livre de la LumiĂšre (MĂ€shĂ€fĂ€ Berhan) du roi Zara Yaqob, sous le rĂšgne de Yeshaq Ier l'Abouna BĂ€rtĂ€lomĂ©wos fut accusĂ© de sympathie pour le mouvement religieux dissident des ZĂ€-Mikaelites[7] ; le roi dĂ©pĂȘcha auprĂšs de lui un conseil de prĂȘtres chargĂ©s de contrĂŽler son orthodoxie ; parmi eux est citĂ© un « Giyorgis » qui doit ĂȘtre Giyorgis de SĂ€gla.

ƒuvre

L'ouvrage le plus fameux de Georges de Sagla est le MĂ€shĂ€fĂ€ MestirĂ€ SĂ€may WĂ€medr (Livre du mystĂšre du ciel et de la terre), achevĂ© le : il s'agit d'un recueil d'homĂ©lies (trente dans l'Ă©dition de Yaqob Beyene) destinĂ©es Ă  ĂȘtre lues sur toute l'annĂ©e liturgique, chacune dĂ©nonçant et rĂ©futant une des grandes hĂ©rĂ©sies de l'AntiquitĂ© tardive (celles de Sabellius, d'Arius, de Nestorius, etc.) ; le seul hĂ©rĂ©tique Ă©thiopien qui soit citĂ© est son ennemi personnel Bitu. L'une des homĂ©lies est consacrĂ©e Ă  l'observance du sabbat. Ces textes seraient le rĂ©sultat de discussions de Giyorgis avec un EuropĂ©en dĂ©signĂ© comme Messer Zan (un VĂ©nitien venu en Éthiopie sous le rĂšgne de David Ier) ; ils Ă©taient aussi destinĂ©s Ă  combattre les nombreuses dissidences religieuses qui agitaient l'Éthiopie chrĂ©tienne de l'Ă©poque. L'auteur fit lui-mĂȘme de cet ouvrage, Ă  la demande d'un gouverneur, un rĂ©sumĂ© intitulĂ© FekkarĂ© Haymanot (Explication de la foi).

Son autre ouvrage le plus connu est le MĂ€shĂ€fĂ€ SĂ€'atat, c'est-Ă -dire le Livre des Heures (dit aussi MĂ€shĂ€f Sebáž„Ă€t zĂ€mĂ€'alt wĂ€zĂ€lelit, Livre de la glorification du jour et de la nuit), un livre contenant la liturgie des heures du jour et de la nuit, sur le modĂšle de l'Horologium copte qui avait Ă©tĂ© traduit en guĂšze au XIVe siĂšcle. Giyorgis y met en pratique ses idĂ©es en matiĂšre d'orthodoxie, en particulier la dĂ©votion Ă  la Vierge et l'observance du sabbat. Cet ouvrage est devenu le livre d'heures usuel dans l'Église Ă©thiopienne.

Giyorgis est Ă©galement l'auteur de trois Ɠuvres de poĂ©sie mariale : Hoáž„etĂ€ Berhan (La Porte de la LumiĂšre), suite d'invocations, de mĂ©ditations et de priĂšres ; EnzirĂ€ Sebáž„Ă€t (La Harpe de Glorification), hymnes en vers rimĂ©s pour chaque jour de la semaine ; ArganonĂ€ WeddassĂ© (L'Orgue de Louange), dit aussi ArganonĂ€ Dengel (L'Orgue de la Vierge).

Parmi les autres textes liturgiques de Giyorgis, il faut citer : È˜Ă€lotĂ€ FĂ€tteto (PriĂšre de la Fraction [du Pain]), WeddassĂ© HĂ€waryat (Louange des ApĂŽtres), TĂ€'Ă€meho Qeddusan (Salutation aux saints), WeddassĂ© mĂ€sqĂ€l (Louange de la croix). D'autres encore figurent dans des manuscrits. Il y a aussi le Symbole d'Athanase (le Quicumque) traduit en guĂšze, qui aurait Ă©tĂ© apportĂ© en Éthiopie, en version latine ou italienne, par le VĂ©nitien Messer Zan, et traduit par Giyorgis[8].

L'homĂ©lie des Miracles d'Uriel donne une liste d'ouvrages d'Abba Giyorgis (l'archange apporte au saint cinq calices en cristal emplis d'un breuvage « tirĂ© de la Mer de Vie », d'oĂč viennent ses compositions littĂ©raires). On y relĂšve la mention d'un commentaire Ă  des Psaumes de David, et aussi cent cinquante poĂšmes de louange Ă  la Vierge (autant que de Psaumes de David) qui se seraient intitulĂ©s MĂ€zmurĂ€ IyĂ€sus (Psaumes de JĂ©sus). Ces textes ne sont pas connus.

L'usage des livres d'Abba Giyorgis dans l'Église Ă©thiopienne fut imposĂ© notamment sous le rĂšgne de Zara Yaqob, Ă©poque Ă  laquelle il fut canonisĂ© et sa Vie composĂ©e (dans doute dans le scriptorium de la cour royale). C'est sous le rĂšgne de Zara Yaqob (au concile de DĂ€brĂ€ Metmaq en 1450) que l'observance du sabbat fut rendue obligatoire pour toute l'Église. L'importance considĂ©rable donnĂ©e par Giyorgis au culte marial suscita aussi des rĂ©sistances dans le clergĂ©.

Éditions de textes

  • Pontus Leander, « Arganona Ueddase nach Handschriften in Uppsala, Berlin, TĂŒbingen und Frankfurt-am-Main », Göteborgs Högskolas Artskrift, vol. 28, no 3, 1922, p. 3-173.
  • Marc-Antoine van den Oudenrijn (Ă©d.), HelenĂŠ Æthiopum reginĂŠ quĂŠ feruntur preces et carmina[9], Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, t. 208-209 (Scriptores Æthiopici, t. 39-40), Louvain, E. Peeters, 1960-61 (EnzirĂ€ Sebáž„Ă€t, p. 1-84 ; Hoáž„etĂ€ Berhan, p. 85-112).
  • Getatchew Haile (Ă©d.), « Fekkare Haymanot or The Faith of Abba Giyorgis SĂ€glawi », Le MusĂ©on, vol. 94, 1981, p. 235-258.
  • GĂ©rard Colin (Ă©d.), GĂ€dlĂ€ Giyorgis SĂ€glawi / Vie de Georges de Sagla, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, t. 492-493 (Scriptores Æthiopici, t. 81-82), Louvain, E. Peeters, 1987.
  • Yaqob Beyene (Ă©d.), Giyorgis SĂ€glawi. Mashafa mestir / Il libro del mistero, Corpus Scriptorum Christianorum Orientalium, t. 515-516 et 532-533 (Scriptores Æthiopici, t. 89-90 et 97-98), Louvain, E. Peeters, 1990-1993.
  • Getatchew Haile (Ă©d.), « A Miracle of the Archangel Uriel Worked for Abba Giyorgis of Gasəčča », dans Harald Aspen, Birhanu Teferra, Shiferaw Bekele et Svein Ege (dir.), Proceedings of the 16th International Conference of Ethiopian Studies, Trondheim, July 2007, Trondheim, NTNU-trykk, 2009, vol. I, p. 23-35.
  • (en + gez) Alessandro Bausi, « Praises of the Cross by Abba Giyorgis of SĂ€gla », Aethiopica, Wiesbaden, Harrassowitz, vol. 14,‎ , p. 47-120 (lire en ligne).

Bibliographie

  • (en) Getatchew Haile, « On the Writings of Abba Giyorgis SĂ€glawi from Two Unedited Miracles of Mary », Orientalia Christiana Periodica, vol. 48, 1982, p. 65-91.
  • GĂ©rard Colin, « La notice sur Nestorius du Mashafa Mestir de Georges de Sagla », Orientalia Christiana Periodica, vol. 50, no 1, 1984, p. 107-125.
  • (it) Yaqob Beyene, « La dottrina della chiesa etiopica e il Libro del mistero di Giyorgis di Sagla », Rassegna di Studi Etiopici, vol. 33, 1989, p. 35-88.
  • Marie-Laure Derat, Giyorgis de SaglĂą (1365-1425), un prĂȘtre du Tabernacle, mĂ©moire de DEA, UniversitĂ© de Paris-I, 1994.
  • Robert Beylot, « La controverse sur le sabbat dans l'Église Ă©thiopienne », dans Alain Le Bolluec (dir.), La controverse religieuse et ses formes, Paris, Édition du Cerf, 1995, p. 165-187.
  • Marie-Laure Derat, « La saintetĂ© de Giyorgis de SĂ€gla : une initiative royale ? », Warszawskie Studia Teologiczne, vol. XII, no 2, 1999, p. 51-62.

Notes et références

  1. Roger Schneider (« Notes Ă©thiopiennes », Journal of Ethiopian Studies, vol. XVI, 1983, p. 105-114) a Ă©tabli que ces trois noms renvoyaient au mĂȘme personnage, SĂ€gla et GĂ€sečča (Gasetcha) Ă©tant deux localitĂ©s voisines, et DĂ€brĂ€ Baáž„rey Ă©tant le monastĂšre Ă©tabli sur l'amba (plateau entourĂ© de falaises) de Gasečča. SĂ€gla est le lieu de naissance d'Abba Giyorgis, DĂ€brĂ€ Baáž„rey, Ă  Gasečča, le monastĂšre oĂč il finit ses jours, et qui existe toujours. L'endroit se trouve dans la province historique de Wello, Ă  l'est du cours du Nil Bleu, prĂšs de son affluent la riviĂšre WalĂ€qa (Ă  200 km environ au nord d'Addis-Abeba).
  2. Dans le calendrier julien en usage à l'époque en Europe. Dans le calendrier éthiopien, le 7 du mois de hamlé, an 1417.
  3. Voir AndrĂ© Caquot, « L'homĂ©lie en l'honneur de l'archange Ouriel (Dersāna Urā'ēl) », Annales d'Éthiopie vol. I, 1955, p. 61-88 (prĂ©sentation et Ă©dition d'une des homĂ©lies du recueil).
  4. Ou « prĂȘtre du Camp (royal) », la cour Ă©tant un « camp ».
  5. Selon Getatchew Haile, le gouverneur HeywĂ€t BenĂ€ Ă©tait peut-ĂȘtre son pĂšre naturel et le prĂȘtre Hezba Seyon son pĂšre spirituel. Mais Marie-Laure Derat fait remarquer que le GĂ€dl dit explicitement qu'Hezba Seyon Ă©tait son pĂšre naturel, et que son « pĂšre spirituel » est bien plutĂŽt SĂ€rĂ€qĂ€ Berhan, abbĂ© de DĂ€brĂ€ Hayq. Un point d'accord entre les deux textes est que la famille Ă©tait d'antique origine israĂ©lite, remontant au temps du roi Salomon.
  6. Quatre des fils de David Ier rĂ©gnĂšrent successivement aprĂšs sa mort (et donc furent a priori Ă©lĂšves de Giyorgis) : ThĂ©odoros Ier, Yeshaq Ier, Takla Maryam Ier et Zara Yaqob, ce dernier ayant Ă©crit lui-mĂȘme des livres de thĂ©ologie.
  7. Sur la doctrine des ZĂ€-Mikaelites, groupe « spiritualiste » qui s'opposait Ă  l'« anthropomorphisme » de l'Église Ă©thiopienne, voir Pierluigi Piovanelli, « Connaissance de Dieu et sagesse humaine en Éthiopie. Le traitĂ© Explication de la DivinitĂ© attribuĂ© aux hĂ©rĂ©tiques "mikaĂ©lites" », Le MusĂ©on, vol. 117, 2004, p. 193-227.
  8. Louis Guerrier, « Un texte éthiopien du Symbole d'Athanase », Revue de l'Orient chrétien, vol. 20, 1915-17, p. 68-76 et 131-141.
  9. Cette reine HĂ©lĂšne est une Ă©pouse du roi Zara Yaqob, ensuite rĂ©gente († 1522).
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