Floréal Cuadrado
Floréal Cuadrado, né le au Poujol-sur-Orb (Hérault)[1], est un militant anarchiste illégaliste français actif dans les Groupes d'action révolutionnaires internationalistes dans les années 1970.
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Exilé volontaire en Amérique latine à la fin des années 1980, il revient en France et, à partir des années 1990, est secrétaire du Syndicat des correcteurs à Paris. Il publie ses « souvenirs » en 2015.
Biographie
Il est le fils aĂźnĂ© dâune famille de militants libertaires espagnols. Ses grands-parents sont adhĂ©rents de la ConfĂ©dĂ©ration nationale du travail et son pĂšre Liberto[2] est griĂšvement blessĂ© sur les bords de lâĂbre lors de la rĂ©volution sociale espagnole de 1936[3].
AprĂšs lâĂ©cole Ă©lĂ©mentaire, le collĂšge technique, il est ouvrier en constructions mĂ©talliques aux Ătablissements Fouga et Cie Ă BĂ©ziers.
Il rejoint Paris Ă la fin de Mai 68, oĂč il frĂ©quente les milieux de « lâillĂ©galisme »[4] et des groupuscules communistes, mais sans cĂ©der Ă leurs avances : « Pour moi, le vĂ©ritable communisme Ă©tait le communisme libertaire, pour lequel mes parents et leurs amis sâĂ©taient battus »[5].
Groupes d'action révolutionnaires internationalistes
En 1973, il est impliquĂ© dans les Groupes d'action rĂ©volutionnaires internationalistes[6] - [7] - [8] qui revendiquent notamment l'enlĂšvement Ă Paris, le , du directeur de la Banque de Bilbao, Ăngel Baltasar SuĂĄrez (libĂ©rĂ© le ) afin de faire pression sur le rĂ©gime franquiste et Ă©viter la condamnation Ă mort de Salvador Puig i Antich.
Le , Ă Paris, il est arrĂȘtĂ©, au cours d'une opĂ©ration « coup de poing »[9], avec Raymond Delgado et Jean-Marc Rouillan[10] Ă bord de la voiture de Rouillan, qui contient des armes, des explosifs, des tampons officiels et des faux papiers, ainsi quâune photocopie du permis de sĂ©jour du banquier SuĂĄrez[11], ce qui permet Ă la police de lâaccuser de faire partie des GARI[12]. Il est incarcĂ©rĂ© Ă la Prison de la SantĂ© et dĂ©fĂ©rĂ© devant la Cour de sĂ»retĂ© de lâĂtat[13]. Il est libĂ©rĂ© en janvier 1975 aprĂšs une grĂšve de la faim collective[14]. Il sera finalement acquittĂ© en [15].
Au sein des GARI, il s'est consacré à la fabrication de faux-papiers. à sa sortie de prison, il poursuit son action en faveur de militants espagnols et d'insoumis français. Il est formé à cette activité par un anarchiste espagnol de soixante-dix ans, José, qui a participé à la guerre d'Espagne puis à la résistance intérieure française au nazisme[16].
Entré en clandestinité, refusant la ligne « militariste » de certains anciens des GARI, il devient un des principaux faussaires de la mouvance activiste des années 1970-1980, fournissant des faux-papiers à nombre de militants étrangers[16].
Exil
Il quitte la France en 1986, trĂšs critique envers les pratiques illĂ©galistes parisiennes de l'aprĂšs 68 : « Notre prĂ©tendu engagement rĂ©volutionnaire nous avait conduits, de chicanes narcissiques en querelles logomachiques, Ă nous muer lentement en politicailleurs de lâillĂ©galisme, menant un affrontement privĂ© contre le systĂšme, incapables de construire, parce que nos combats nâĂ©taient pas gĂ©nĂ©ralisables, un embryon dâorganisation rĂ©volutionnaire susceptible de la moindre extension. »[4]
Il sâexile dâabord en AlgĂ©rie puis en Espagne avant dâarriver au Venezuela[4]. Tout comme Lucio Urtubia, il nĂ©gocie ensuite son retour en France par l'entremise de l'avocat Roland Dumas, socialiste notoire.
En , la Cour d'assises de Douai le déclare coupable du délit de recel dans l'affaire du hold-up de Condé-sur-l'Escaut de 1979[17]. Il bénéficie cependant de l'amnistie du [18].
MĂ©moires
Au début des années 1990, il est membre du comité syndical du Syndicat des correcteurs (Fédération des travailleurs des industries du livre, du papier et de la communication CGT)[19]. En 1997, il est désigné secrétaire des correcteurs[20] et défend le syndicat de métier, opposé au syndicalisme fourre-tout, incarné selon lui par le nouveau Syndicat général du livre et de la communication écrite CGT[21] - [22].
En 2015, il publie « Comme un chat », sous-titrĂ© « Souvenirs turbulents dâun anarchiste - faussaire Ă ses heures - vers la fin du vingtiĂšme siĂšcle » oĂč il brosse les portraits de ceux qu'il a croisĂ©s Guy Debord[4] - [23] - [24], Serge Quadruppani, Lucio Urtubia, Jean-Marc Rouillan, Hugo ChĂĄvez mais aussi Alexandre Grothendieck ou Denis Guedj.
Citation
« Nous ne le savions pas, nous qui dĂ©sirions sans fin que crĂšve ce vieux monde, que nous nâĂ©tions que la fin dâune histoire, la queue dâune comĂšte. Des annĂ©es durant, nous avons refusĂ© ou plutĂŽt nous avons Ă©tĂ© incapables de lâanalyser. Ce que nous avons pu faire a eu son coĂ»t en vies dĂ©vastĂ©es et parfois perdues, mais nâa pas servi Ă grand-chose. Je nâose dire Ă rien, mais je ne suis pas loin de le penser. »[3]
Ćuvres
- Comme un chat. Souvenirs turbulents d'un anarchiste, faussaire Ă ses heures, vers la fin du vingtiĂšme siĂšcle, Ăditions du Sandre, 2015, (ISBN 978-2-35821-105-5), prĂ©sentation Ă©diteur.
Bibliographie
- Jean-Luc Einaudi, Franc-tireur. Georges Mattéi, de la guerre d'Algérie à la guérilla, Digital Index Editeur, Modena, 2013, (ISBN 9788897982654), lire en ligne.
- Mathieu Lindon et LĂ©a Iribarnegaray, « FlorĂ©al Cuadrado, anars et arnaques », LibĂ©ration,â (lire en ligne).
- Freddy Gomez, Ăclats dâanarchie. Passage de mĂ©moire. Conversations avec Guillaume Goutte, Rue des Cascades, 2015.
- Serge Audier, Anarchie vaincra (sur le papier), Le Monde, , lire en ligne.
Iconographie
- Centre International de Recherches sur l'Anarchisme (Lausanne) : Lettre de prison des inculpés des GARI.
- Fédération internationale des centres d'études et de documentation libertaires : Lettre de prison des inculpés des GARI.
- FĂ©dĂ©ration internationale des centres d'Ă©tudes et de documentation libertaires : Lâamnistie passe, les prisonniers politiques restent.
Articles connexes
Notes et références
- Alain Hamon, Jean-Charles Marchand, Action directe, du terrorisme français à l'euroterrorisme, Le Seuil, 1986, page 26.
- Dictionnaire des guérilleros et résistants antifranquistes : Liberto Cuadrado.
- Ăditions du Sandre, 2015, prĂ©sentation Ă©diteur.
- Mathieu Lindon et LĂ©a Iribarnegaray, « FlorĂ©al Cuadrado, anars et arnaques », LibĂ©ration,â (lire en ligne).
- Serge Audier, Anarchie vaincra (sur le papier), Le Monde, 3 juin 2015, lire en ligne.
- (en) Michael York Dartnell, Action directe : ultra-left terrorism in France, Londres, Routledge, 1995, page 91.
- Au procÚs des accusés de Condé-sur-l'Escaut Les si lointaines années 70, Le Monde, 25 avril 1989, lire en ligne.
- (es) Miguel Iñiguez, Esbozo de una Enciclopedia histórica del anarquismo español, Fundación de Estudios Libertarios Anselmo Lorenzo, Madrid, 2001, page 260.
- Fanny Bugnon, La violence politique au prisme du genre à travers la presse française (1970-1994), thÚse de l'Université d'Angers, 2011, page 80.
- Charles Le Quintrec, Roland Jacquard, La longue traque d'Action directe, Albin Michel, 1987, page 74.
- Ils pourraient avoir participé à l'enlÚvement de M. Suarez, Le Monde, 7 décembre 1974, lire en ligne.
- Faits divers, Le Monde, 12 décembre 1974, lire en ligne.
- Les lendemains des GARI, La Lanterne Noire, n°2, décembre 1974 - janvier 1975, lire en ligne.
- Sept membres des GARI font la grĂšve de la faim, Le Monde, 9 janvier 1975, lire en ligne.
- La cour d'assises de Paris a acquitté les cinq militants du GARI. Le mythe du guérillero, Le Monde, 30 mars 1981, lire en ligne.
- Jean-Luc Einaudi, Franc-tireur. Georges Mattéi, de la guerre d'Algérie à la guérilla, Digital Index Editeur, Modena, 2013, lire en ligne.
- Au procÚs des accusés de Condé-sur-l'Escaut L'avocat général demande dix ans de réclusion criminelle contre Raymond Delgado, Le Monde, 26 avril 1989, lire en ligne.
- à la cour d'assises du Nord amnistie ou acquittement pour six des sept accusés dans l'affaire de Condé-sur-l'Escaut, Le Monde, 28 avril 1989, lire en ligne.
- Cantonade, bulletin du Syndicat des correcteurs et des professions connexes, FILPAC CGT, n°216, mars 2009, page 58.
- René Berthier, La crise syndicale du Livre parisien CGT (1993-2007), 2008, page 47.
- Extrait de l'« Adresse Ă la CGT », Les Ăchos, 16 janvier 1998, lire en ligne.
- Un communiqué du Syndicat des correcteurs, de la section des imprimeurs rotativistes, PDP, REC, L'Humanité, 16 janvier 1998, lire en ligne.
- « ImmĂ©diatement, je reconnus la voix si particuliĂšre de Guy Debord, puis son visage [...] Ce que Guy Debord venait de me dire fut pour moi une immense dĂ©ception. » - FlorĂ©al Cuadrado, Comme un chat. Souvenirs turbulents d'un anarchiste, faussaire Ă ses heures, vers la fin du vingtiĂšme siĂšcle, Ăditions du Sandre, 2015, page 253.
- Rencontre impossible. Guy Debord, en son temps, avait dĂ©menti la lĂ©gende de sa participation Ă Champ Libre dans une lettre Ă Jaime SemprĂșn du 26 dĂ©cembre 1976 : « Je nâai ni le goĂ»t, ni le temps, ni les moyens dâĂȘtre Ă©diteur, et je nâai certainement pas rachetĂ© en secret les Ăditions Champ libre. Je nây suis pas non plus âdirecteur littĂ©raireâ, directeur de collection, lecteur ou agent littĂ©raire ; ne croyant pas du reste que dans ce domaine il existe une seule espĂšce dâemployĂ© qui puisse exercer des responsabilitĂ©s avec une indĂ©pendance vraiment complĂšte, quâil sâagisse dâun GuĂ©gan ou dâun ViĂ©net, ou mĂȘme dâun Pauvert ou dâun Bourgois. Il va mĂȘme de soi que la question ne sâest jamais posĂ©e. Aux Ăditions Champ libre, je ne suis rien dâautre quâauteur, avec exactement le mĂȘme contrat que jâavais chez Buchet. Je suis si peu portĂ© aux mondanitĂ©s littĂ©raires quâil se trouve que je nâai mĂȘme pas jusquâĂ prĂ©sent pĂ©nĂ©trĂ© dans les locaux de la rue de la Montagne-Sainte-GeneviĂšve â encore que je nâen fasse un crime Ă personne ; je cite le fait parce quâil est peu courant chez un auteur, et certainement impossible pour un collaborateur de lâĂ©dition. » (Editions Champ Libre, Correspondance, 1978, p. 58 et Guy Debord, Correspondance volume 5, Librairie ArthĂšme Fayard 2005, p. 387.)