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Enrico Caterino Davila

Enrico Caterino Davila (né le à Piove di Sacco, prÚs de Padoue et mort en juillet 1631 à San Michele Extra (it), aujourd'hui un quartier de Vérone) est un historien italien.

Enrico Caterino Davila
Enrico Caterino Davila
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs

Saint-Michel extra muros, Drapeau de la RĂ©publique de Venise RĂ©publique de Venise
Activités

Biographie

Enrico Caterino Davila naquit le 30 octobre 1576 Ă  Piove di Sacco, village dans le territoire de Padoue. Sa famille, qui avait plusieurs branches, Ă©tait originaire d’Ávila, en Espagne. Ses ancĂȘtres, de pĂšre en fils, depuis 1464, connĂ©tables du Royaume de Chypre : Antonio Davila, son pĂšre, l’était en 1570, lorsque cette Ăźle fut prise par les Turcs. Il fut obligĂ© de quitter l’üle aprĂšs avoir perdu tous ses biens. Il avait des parents et quelques propriĂ©tĂ©s Ă  Padoue ; il s’y rĂ©fugia d’abord avec sa femme et ses neuf enfants, six fils et trois filles. La branche ainĂ©e de sa famille Ă©tait puissante en Espagne ; il espĂ©ra y rĂ©tablir sa fortune, et s’y rendit avec deux de ses fils. Il parvint Ă  en faire placer un auprĂšs du roi Philippe II ; mais, n’obtenant du reste que des promesses et des paroles sans effet, il vint en France en 1572, et s’étant procurĂ© des recommandations puissantes auprĂšs de Catherine de MĂ©dicis, il en fut favorablement accueilli. Cette reine plaça son fils Louis auprĂšs d’elle en qualitĂ© de gentilhomme de sa Chambre, et prit deux de ses filles, Margherita et Cornelia, parmi ses demoiselles d’honneur. Antonio les fit venir aussitĂŽt de Padoue, et y retourna ensuite lui-mĂȘme. Il eut, quelque temps aprĂšs, un dernier fils Ă  qui il donna, par reconnaissance, les deux noms du roi Henri III et de la reine Catherine. C’est ce fils qui s’est rendu cĂ©lĂšbre dans les lettres par son Histoire des guerres civiles de France. Il n’avait pas encore atteint sa septiĂšme annĂ©e quand son pĂšre l’amena en France. Catherine de MĂ©dicis avait mariĂ© avantageusement Marguerite, l’une de ses sƓurs ; elle lui avait fait Ă©pouser Jean d’HĂ©mery, marĂ©chal de France, seigneur de la terre Villars en Normandie, et ce fut au chĂąteau de Villars qu’Antonio Davila se rendit avec son jeune fils. Enrico Caterino, aprĂšs avoir fait ses premiĂšres Ă©tudes en Normandie, vint les continuer Ă  Paris, et fut placĂ© parmi les pages, ou de la reine mĂšre ou du roi. Il dit lui-mĂȘme au 9e livre de son Histoire, « qu’il Ă©tait prĂ©sent, en 1588, Ă  l’ouverture des Ă©tats de Blois, et si prĂšs du roi, qu’il entendit trĂšs-distinctement tout son discours. » L’annĂ©e suivante fut fatale au jeune Davila ; la reine, sa protectrice, mourut dĂšs le mois de janvier, et Henri III fut assassinĂ© au mois d’aoĂ»t. Peut-ĂȘtre se retira-t-il alors auprĂšs de la marĂ©chale d’HĂ©mery, sa sƓur. DĂšs qu’il eut atteint l’ñge de dix-huit ans, il entra au service. MalgrĂ© l’abjuration d'Henri IV, la guerre civile durait encore. Davila se distingua dans plusieurs rencontres ; il eut un cheval tuĂ© sous lui au siĂšge de Honfleur, en 1594, et fut blessĂ© en 1597, d’un coup de pertuisane, au siĂšge d’Amiens. La paix s’étant faite en 1598, il fut rappelĂ© Ă  Padoue par son pĂšre, qui y Ă©tait retournĂ© aprĂšs la mort de Catherine de MĂ©dicis. Il s’y rendit l’annĂ©e suivante ; mais Ă  peine avait-il revu son pĂšre, qu’il le perdit par l’accident le plus funeste ; il tomba, ou se jeta d’un lieu trĂšs-Ă©levĂ©, et mourut quelques heures aprĂšs. Son fils avait alors vingt-quatre ans ; il avait apportĂ© de France un grand nombre de notes, de mĂ©moires, de piĂšces originales, matĂ©riaux qu’il destinait dĂšs lors Ă  l'ouvrage qu’il n'entreprit que plusieurs annĂ©es aprĂšs. Ses Ă©tudes avaient Ă©tĂ© fort nĂ©gligĂ©es, et souvent interrompues ; il profita de son sĂ©jour Ă  Padoue, pour les reprendre et pour se mettre en Ă©tat d’exĂ©cuter son projet. Dans un voyage qu’il fit Ă  Parme, en 1606, il frĂ©quentait l’acadĂ©mie des Innominati, qui avait alors de la cĂ©lĂ©britĂ©. Tommaso Stigliani y eut une dispute avec Davila, et l'appela en duel. Davila lui passa son Ă©pĂ©e au travers de la poitrine, et fut lui-mĂȘme blessĂ© Ă  la jambe gauche. Quoique son adversaire ne fĂ»t pas mort de sa blessure, il fut obligĂ© de quitter Parme, et se rendit Ă  Venise, dans un moment oĂč la RĂ©publique levait des troupes ; il offrit de lever lui-mĂȘme un corps de trois cents hommes d’infanterie. Le SĂ©nat accepta cette offre, lui fournit des fonds, et lui fixa des honoraires. Davila se trouva ainsi engagĂ© de nouveau dans le mĂ©tier des armes. Il fut chargĂ© de plusieurs expĂ©ditions, du commandement de plusieurs places dans les Ăźles de Candie, en Dalmatie et en terre ferme. La RĂ©publique fut si contente de ses services qu’elle lui assigna une pension de 150 ducats, rĂ©versible Ă  ses enfants, et qu’elle statua par un dĂ©cret, que, quand il se trouverait an SĂ©nat, il serait placĂ© auprĂšs du doge comme l’avaient Ă©tĂ© ses ancĂȘtres lorsqu’ils Ă©taient connĂ©tables de l’üle de Chypre. Dans cette vie active, et malgrĂ© ces frĂ©quents changements de lieu, Davila ne cessa point de cultiver les lettres et de travailler, dans ses moments de loisir, au grand ouvrage qu’il avait entrepris. Il le fit enfin paraĂźtre en quinze livres, sous ce titre : Historia delle guerre civili di Francia di Henrico Caterino Davila, nella quale si contengono le operationi di quattro re, Francesco II, Carlo IX, Henrico III et Henrico IV, cognominato il grande, Venise, Tommaso Baglioni, 1630, in-4°. L’épĂźtre dĂ©dicatoire adressĂ©e au sĂ©nateur Domenico Molino, est datĂ©e de Brescia, dont Davila Ă©tait alors gouverneur. Quelques mois aprĂšs, il eut ordre de se rendre Ă  Crema et d’en prendre le commandement. Il se mit en chemin vers le mois de juillet 1631, avec toute sa famille qui Ă©tait nombreuse. Le SĂ©nat avait donnĂ© l’ordre de lui fournir partout les charrois nĂ©cessaires pour ses bagages. ArrivĂ© au bourg de St-Michel, prĂšs de VĂ©rone, il demanda les voitures qui lui Ă©taient dues ; un homme brutal, nommĂ© le Turc, auquel il s’adressa, refusa d’obĂ©ir, et rĂ©pondit Ă  ses instances par un coup d'arquebuse qui l'Ă©tendit mort sur la place. D’autres hommes armĂ©s, qui accompagnaient l’assassin, firent feu ; plusieurs personnes furent blessĂ©es, et le chapelain de Davila fut tuĂ©. Le fils aĂźnĂ© du malheureux historien vengea son pĂšre, et cassa d’un coup de pistolet la tĂȘte du meurtrier. Ses complices furent arrĂȘtĂ©s, envoyĂ©s Ă  VĂ©rone et punis de mort. Davila n’avait alors que 55 ans. Il laissait une veuve, chargĂ©e de neuf enfants, quatre garçons et cinq filles ; la pension que la RĂ©publique de Venise lui avait prĂ©cĂ©demment faite Ă©tait insuffisante ; elle l'augmenta convenablement, et pourvut aux besoins de cette famille, dont le chef emportait son estime et ses regrets.

ƒuvres

Frontispice de l'Histoire des guerres civiles de Davila, dans la traduction de Baudoin. Estampe de Grégoire Huret.

L’édition qu’il avait donnĂ©e de son histoire Ă©tait trĂšs-incorrecte. On dit qu’il avait offert cet ouvrage Ă  plusieurs libraires de Venise, qu’ils l’avaient tous refusĂ©, Ă  l’exception du seul Baglioni dont les presses Ă©taient vacantes, et qui se chargea de l’imprimer, Ă  condition que, s’il lui venait quelque labeur prĂ©fĂ©rable, il le quitterait pour s’en occuper. L’édition finie, la vente fut si rapide que tout fut enlevĂ© en une semaine. On ajoute que le libraire le rĂ©imprima sous la mĂȘme date, et qu’il s’en vendit jusqu’à 15,000 exemplaires dans une annĂ©e ; mais cela paraĂźt fort exagĂ©rĂ©. Les Ă©ditions qui suivirent, Venise, 1634 et 1638, Lyon, 1641, et Venise, 1642, n’étaient guĂšre moins fautives que la premiĂšre ; il en parut enfin une meilleure et fort belle, Paris, imprimerie nationale, 1644, in fol. L’ouvrage avait Ă©tĂ© traduit en français par Jean Baudoin, Paris, 1642, 2 vol. in-fol., avec des sommaires Ă  chaque livre et des notes marginales, traduction rĂ©imprimĂ©e plusieurs fois ; il le fut en espagnol par Basile Varen de Soto, Madrid, 1651 et 1659, in-fol., avec une continuation en 5 livres, depuis 1598, oĂč finit Davila, jusqu’en 1630 : il en parut une 3e Ă©dition beaucoup plus belle, avec figures, Anvers, 1686, in-fol. Davila fut aussi traduit deux fois en anglais, 1° par William Aylesbury, Londres, 1647, in-fol., traduction qui n’est pas complĂšte et ne va que jusqu’à l’annĂ©e 1572 ; 2° par Charles Cotterell, Londres, 1666, in-fol., traduction complĂšte. Enfin il en a paru une traduction latine par Pietro Francesco Cornazzano, Rome, 1745, 3 vol. in-4° ; et une nouvelle traduction française par l’abbĂ© Mallet, et Grosley, Paris, 1757, aussi 3 vol. in-4°. AprĂšs plusieurs Ă©ditions italiennes, publiĂ©es pendant le XVIIe siĂšcle, il en fut donnĂ© une dans le XVIIIe siĂšcle, que l’on prĂ©fĂšre Ă  toutes les autres, Venise, 1733, 2 vol. in-fol. On y a joint une traduction des observations marginales de Baudouin, et d’excellents mĂ©moires, d’Apostolo Zeno sur la famille et la vie de l’auteur, dans lesquels ce savant critique a mis des faits rĂ©els et constatĂ©s Ă  la place des fables qu’Imperiali et Papadopoli avaient accrĂ©ditĂ©es, dans son Musaeum Historicum ; et l’autre dans son Histoire de l’UniversitĂ© de Padoue ; ce qui n’a pas empĂȘchĂ© deux dictionnaires, l'un italien et l’autre français, de rĂ©pĂ©ter rĂ©cemment les mĂȘmes fables. Depuis cette magnifique Ă©dition, on en a eu deux Ă  Londres, 1753, 2 vol. in-4° et 1801, 4 vol. in-8° ; mais cette derniĂšre surtout est remplie de fautes. On doit donner la prĂ©fĂ©rence Ă  celle qui fait partie de la collection des classiques italiens, Milan, 1807, 6 vol. in-8°. Il n y a qu’une opinion sur le mĂ©rite de Davila, considĂ©rĂ© comme Ă©crivain. Son style, exempt des vices qui rĂ©gnaient de son temps, sans ĂȘtre aussi pur que celui de Guichardin, est plus serrĂ©, plus concis, et brille en mĂȘme temps par une admirable facilitĂ©. Sa maniĂšre de narrer, de disposer les Ă©vĂ©nements, de les enchaĂźner l’un Ă  l’autre, d’introduire ses personnages, de les faire agir et parler, de dĂ©crire les lieux, les villes, les champs de bataille, les faits d’armes, les assemblĂ©es, les conseils, la conduite des nĂ©gociations, n’est pas moins louable que son style. Il paraĂźt enfin avoir pris des soins extrĂȘmes pour connaĂźtre la vĂ©ritĂ©, l’avoir puisĂ©e dans de bonnes sources, et l’avoir dite en gĂ©nĂ©ral avec franchise. Mais cette franchise n’a pu manquer d’ĂȘtre quelquefois altĂ©rĂ©e par sa position et ses relations particuliĂšres, par les prĂ©jugĂ©s de son pays et de son siĂšcle. Un Italien de ce temps-lĂ  ne pouvait tenir la balance Ă©gale entre les catholiques et les protestants ; un homme qui devait la fortune de sa sƓur, de son frĂšre et le commencement de la Ă  Catherine de MĂ©dicis, Ă  qui son nom mĂȘme rappelait qu’il lui avait Ă©tĂ© pour ainsi dire consacrĂ© dĂšs sa naissance, ne pouvait ĂȘtre un juge impartial de cette reine. On ne lui a pas reprochĂ© raison de se montrer trop prĂ©venu pour elle. Il ne met en vue que son adresse et sa prudence, quand il faudrait laisser voir sa dissimulation profonde, sa perfidie, sa cruautĂ©, qui, sans parler de tout le reste, lui firent mĂ©diter, prĂ©parer pendant plus de deux ans, couvrir de dehors caressants et faire exĂ©cuter au milieu des fĂȘtes le massacre de 40,000 Français. Il avoue pourtant dans un endroit que l’effusion du sang n’effrayait pas Catherine, et lorsqu’à la fin du 9e livre, aprĂšs avoir racontĂ© sa mort, il a tracĂ© en beau sĂłn caractĂšre, la conscience de l’historien reprenant enfin l’empire qu’elle aurait dĂ» toujours avoir, il ajoute que cette reine fut accusĂ©e d’une insigne mauvaise foi, dĂ©faut commun, dit-il, dans tous les temps, mais particuliĂšrement dans ce siĂšcle ; qu’on lui reproche une aviditĂ©, ou plutĂŽt un mĂ©pris pour le sang humain, plus grand qu’il ne convenait Ă  la tendresse de son sexe (comme si cette aviditĂ© ou ce mĂ©pris convenaient mĂȘme Ă  la duretĂ© du nĂŽtre) ; qu’enfin, dans beaucoup d’occasions, pour arriver Ă  ses fins, elle parut regarder comme honnĂȘtes tous les moyens qu’elle jugeait utiles, quoiqu’ils fussent en eux-mĂȘmes vĂ©ritablement iniques et perfides. Davila serait exempt de reproche, Ă  l’égard de Catherine de MĂ©dicis, si, en racontant les diffĂ©rents actes de sa rĂ©gence, il l’avait toujours peinte telle qu’elle est dans cet aveu tardif. MalgrĂ© quelques dĂ©fauts graves, sur lesquels ce n’est pas ici le lien d’insister, son histoire reste avec les qualitĂ©s Ă©minentes qui la distinguent : ce qu’elle a de dĂ©fectueux ne peut plus ĂȘtre d’aucun danger. Le cours des annĂ©es a mis tout Ă  sa place, et, comme il arrive toujours aprĂšs un certain laps de temps, ce n’est plus tel ou tel historien qui peut nous tromper sur les faits ; ce sont les faits bien connus qui nous servent Ă  juger l’historien lui-mĂȘme.

Voir aussi

Bibliographie

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