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E85 (carburant)

Le carburant E85, également appelé superéthanol, est un mélange constitué d'un biocarburant (ou agrocarburant), l'éthanol, et d'essence SP95. C'est un vecteur énergétique majoritairement renouvelable qui permet de limiter la consommation en énergie fossile, mais qui entre en concurrence avec les surfaces agricoles dédiées à l'alimentation humaine.

Pompe proposant du carburant E85.

Il permet de remplir les réservoirs des véhicules polycarburant (qui fonctionnent indifféremment à l’essence (SP95, E10, SP98) et au superéthanol).

Il est utilisé depuis des années au Brésil, en Suède et aux États-Unis. Il a été introduit en 2007[1] sur le marché français.

Les végétaux contenant du saccharose ou « sucre » (betterave, canne à sucre…) ou de l’amidon (blé, maïs…) peuvent être transformés pour donner du bioéthanol par fermentation puis distillation.

Historique de l'introduction du carburant E85 en France

La concentration en bioéthanol du superéthanol varie de 65 % lors des périodes hivernales à 85 % en été (en volume)[1].

Le gouvernement français a donné son feu vert, le , à l'expérimentation en France du carburant E85. Deux régions pilotes, la Champagne-Ardenne et la Picardie, ont testé des flottes de véhicules fonctionnant avec du bioéthanol[2].

Rapport Prost

C’est le que le groupe de travail « Flexfuel 2010 » a rendu public son rapport, le « rapport Prost », proposant un ensemble de mesures pour développer le superéthanol en France. Ce rapport a été élaboré avec le concours de l’inspection générale des finances et du conseil général des Mines sous la direction de l'ancien pilote de Formule 1 Alain Prost. Sa mission a consisté à analyser de manière réaliste la mise en place du lancement du superéthanol en élaborant un plan d’action commun. Ce rapport a mis en évidence toutes les actions devant être conduites pour la mise en place du superéthanol[3].

Dans le rapport, plusieurs points sont soulignés :

  • l’importance d’une fiscalitĂ© favorable Ă  une implantation rapide ;
  • la nĂ©cessitĂ© d’un engagement de la part des constructeurs Ă  crĂ©er des modèles au mĂŞme prix entre les voitures Flex fuel (Ă©thanol) et les voitures Ă  essence ;
  • l’aide aux exploitants indĂ©pendants de stations-services pour s’équiper de « pompes vertes » ;
  • le rapport Prost a ainsi fixĂ© au la date de la dĂ©finition concise des normes du superĂ©thanol et au l’autorisation de vente d’E85.

Commercialisation en France

C'est ainsi que, depuis le , la commercialisation des biocarburants est autorisée.

Évolution de l'utilisation du E85 en France
Année Pompes Stations E85
(%)
Consommation
(Ml)
Évolution annuelle
en volume (%)
Prix moyen
(€/l)
Parc modifié Parc d'origine
2010 316
2014 500
2015 700
2016 0,848
2017 117,9
2018 1 000 11 182,5 +54% 32 500 70 000

Le gouvernement français s'est engagĂ© Ă  installer 500 pompes E85 sur le territoire avant la fin 2007. 322 pompes E85 Ă©taient ouvertes le et 316 le [4]. L'objectif des 500 stations Ă©tait atteint en et fin 2015 on dĂ©nombrait plus de 700 stations-service distribuant du superĂ©thanol[5]. Le chiffre symbolique des mille stations distribuant du superĂ©thanol dans l’Hexagone a Ă©tĂ© franchi au dĂ©but du mois d’. Ă€ cette date, 11 % des stations-service proposent du E85. L’ouverture rĂ©gulière de pompes explique en grande partie l’augmentation spectaculaire de la consommation d’E85 en 2017 avec +23 %[6].

L'arrêté du , relatif à l’encadrement des homologations, a facilité la mise en place des procédures d’installation des boitiers rendant les moteurs compatibles avec le superéthanol[7].

Afin de dĂ©velopper l'usage de ce carburant la fiscalitĂ© Ă  la pompe est avantageuse : prix moyen de 0,848 €/l[8] au dont 0,079 6 â‚¬/l de TICPE[9] (taxe sur les produits Ă©nergĂ©tiques) ; le certificat d'immatriculation des vĂ©hicules flexfuel est exonĂ©rĂ© dans certaines rĂ©gions[10].

La consommation d'E85 en France Ă©tait de 117,9 millions de litres en 2017, et est passĂ©e Ă  182,5 millions de litres en 2018[7].

Le parc français de vĂ©hicules E85 est de 32 500 vĂ©hicules modifiĂ©s en 2018 ou avant, et de 70 000 vĂ©hicules compatibles d’origine. Entre 30 000 et 40 000 vĂ©hicules pourraient ĂŞtre modifiĂ©s en 2019[7].

En octobre 2021, la France a vendu 420 million de litres d'E85[11].

En 2021, 2 500 stations françaises distribuent de l'E85[12].

Modification des véhicules essence à l'aide d'un kit superéthanol ou d'une reprogrammation superéthanol

La modification d'un véhicule fonctionnant au SP95/98 touche surtout à l'avancement du point d'avance à l'allumage (+4° angulaire avec 100 % de E85), mais aussi au débit des injecteurs et au taux de compression à revoir à la hausse. Une élévation de la pression dans les cylindres est possible grâce à l'indice d'octane plus élevé de ce carburant qui atteint 106 : ce qui a pour effet d'augmenter le rendement thermique du moteur, donc son rendement global et fait donc chuter d'autant la consommation spécifique du moteur. Cependant, et malgré le discours des constructeurs, la quasi-totalité des véhicules à essence injection fonctionnent sans anomalie et sans modification jusqu'à au moins 30 % de E85. Certains véhicules[13] sont utilisés par leurs propriétaires avec 100 % de E85 sans modification, comme la Toyota Prius, bien qu'elle ne soit pas homologuée pour ce carburant, quelle que soit la génération (Prius I, II, III)[14].

Il existe de nombreux kits[15] assurant la conversion des véhicules classiques roulant à l'essence. La majorité des véhicules produits après 2000 ont un circuit de carburation prévu pour résister à un certain taux de superéthanol (durits, réservoirs et autres conducteurs du mélange compatibles). Cela permet à ces véhicules de pouvoir utiliser le nouveau carburant E10 sans modification. Grâce à ces kits, ils peuvent être convertis à l'utilisation du E85. Sous réserve de fiabilité à long terme non garantie, n'importe quel véhicule à essence équipé d'un système d'injection avec régulation par sonde lambda (sonde « à oxygène » disposée sur la ligne d'échappement) peut fonctionner avec une certaine proportion d'E85 : de nombreux essais empiriques font état de véhicules du début des années 1990 à injection électronique fonctionnant sans à-coups ni problème jusqu’à un taux de 50 % d'E85. Les désagréments constatés pour des taux similaires ou plus élevés encore sont surtout perceptibles moteur froid ou par temps humide (moteur qui « cale » après démarrage, instabilité du ralenti et à-coups en fonctionnement à charges partielles).

À noter cependant qu'une différence fondamentale existe entre ces kits E85 et les kits GPL : la nécessité de détecter la teneur en éthanol du mélange, d'assurer la compatibilité matériaux, de valider la compatibilité du système de post-traitement, d'adapter les stratégies de contrôle moteur (phasage injection, temps d'injection, avance à l'allumage) font qu'un véhicule flexfuel ne peut en aucun cas être considéré comme un véhicule classique auquel on a ajouté un kit E85, alors que c'est le cas pour les véhicules GPL.

Depuis 2007, on peut trouver sur Internet, notamment sur des sites spécialisés, des internautes roulant de 10 à 100 % de E85 sans modification[16]. D'après ces derniers, ces véhicules sont toujours en état de marche à l'heure actuelle. L'utilisation du E85 dans des voitures non adaptées est sous l'entière responsabilité de l'usager.

Homologation française

Auparavant ces modifications ne disposaient d'aucun cadre réglementaire. La direction régionale de l'Industrie, de la Recherche et de l'Environnement (DRIRE), chargée de valider de telles transformations, refusait de créer une procédure de réception pour les véhicules modifiés, au même titre qu'avec les kits GPL. Toutefois, un décret sur l'homologation de ces kits devrait être publié en [17].

Ă€ partir du , un arrĂŞtĂ© « autorise l'implantation d'un kit E85 sur les vĂ©hicules de 15 CV et plus et ceux Ă©quipĂ©s d'un filtre Ă  particules » jusque-lĂ  exclus du dispositif d'homologation. Toutes les voitures Ă  essence depuis 2001, rĂ©pondant Ă  la norme Euro 3 minimum sont concernĂ©es, ce qui reprĂ©sente un parc d'environ dix millions de vĂ©hicules[18].

Risques mécaniques des moteurs à essence à injection électronique directe roulant à l'E85 sans dispositif particulier

Dans un moteur à essence à injection électronique directe conçu pour accepter du carburant E10, l’exploitation de l’éthanol à des concentrations supérieures à celle de l’E10 présente plusieurs conséquences mécaniques potentiellement dommageables telles qu’explicitées ci-dessous.

  • L’auto-inflammation du mĂ©lange air/carburant voire du cliquetis entraĂ®nent des combustions prĂ©maturĂ©es du mĂ©lange air/carburant pour l’un et explosion(s) locale(s) dĂ©synchronisĂ©e(s) de l’étincelle des bougies pour l’autre, donc destruction potentielle des coussinets, biellettes et pistons pour l’un et dĂ©tĂ©rioration accĂ©lĂ©rĂ©e de la segmentation, des tĂŞtes de pistons voire des cylindres pour l’autre, risque nĂ©anmoins intrinsèquement Ă©liminĂ© par l’indice d’octane Ă©levĂ© de l’éthanol prĂ©sentant une meilleure rĂ©sistance aux explosions anarchiques que l’essence. L’indice de rĂ©fĂ©rence AKI[19] mesurant entre autres la susceptibilitĂ© au cliquetis d’un carburant, fait effectivement Ă©tat d’un indice d’environ 92 pour le SP98 contre 98 pour un E85 de qualitĂ© supĂ©rieure (indices[20] RON 108 et MON 89), indiquant une bien moindre sensibilitĂ© Ă  l’inflammation non contrĂ´lĂ©e de ce dernier. Cependant le carburant E85 destinĂ© au grand public ne bĂ©nĂ©ficie pas d’un tel niveau de qualitĂ©. L’indice AKI dĂ©terminĂ© sur la base des fiches carburants de la compagnie Total (ou sur la base des indices RON et MON directement indiquĂ©s sur les pompes des stations-services) s’établit Ă  90 qu’il s’agisse du Premier 95 E10[21] ou de superĂ©thanol[22] contre 92 pour l’Excellium 98[23], signifiant par-lĂ  que la sensibilitĂ© Ă  l’auto-inflammation et au cliquetis du superĂ©thanol ne prĂ©sente pas de diffĂ©rence par rapport Ă  celle du Premier 95 E10 ou en d’autres termes, le risque d’inflammation non contrĂ´lĂ©e de l’E85 est identique Ă  celui du carburant E10 pour lequel le vĂ©hicule est justement conçu. Ă€ noter par ailleurs, que mĂŞme dans l’hypothèse peu probable de l’apparition de cliquetis, tous les moteurs Ă  injection Ă©lectronique sont capables de modifier spontanĂ©ment leur avance d’allumage pour Ă©liminer ce phĂ©nomène, puisqu’ils sont conçus pour maintenir un rĂ©gime de fonctionnement optimal tout en compensant leur usure normale dans le cas par exemple de l’augmentation des jeux de soupapes ou plus simplement, pour s’ajuster aux changements constants du rĂ©gime du moteur.
  • L’augmentation de la tempĂ©rature aux sièges des bougies[24] notamment, donc surchauffe locale et risque de fissuration de la culasse sur le long terme voire dans les cas les plus extrĂŞmes, soudure de la bougie Ă  la culasse, risque Ă©levĂ© principalement en conditions dites de mĂ©lange pauvre, conditions rĂ©gnants dans le moteur de manière plus ou moins transitoire lors du passage d’une carburation classique Ă  100 % d’essence Ă  une carburation Ă  l’E85 ou Ă  un mĂ©lange essence/E85 quel qu’en soit le ratio. Toutefois les proportions stĹ“chiomĂ©triques[25] du mĂ©lange (9,8 pour l’E85 contre 14,7 pour le carburant SP98) sont automatiquement rĂ©ajustĂ©es par le calculateur sur la base des informations provenant entre autres de la sonde lambda, qui commandera de manière plus ou moins rapide l’augmentation de la quantitĂ© de carburant injectĂ©e, jusqu’à retrouver ainsi les proportions d’équilibre du mĂ©lange, Ă©liminant dès lors ce risque. Il est nĂ©anmoins important de souligner que l’augmentation de carburant injectĂ© ne peut se faire quand dans la limite du rĂ©gime de fonctionnement maximal de la pompe d’injection. Si la correction nĂ©cessaire dĂ©passe ses capacitĂ©s de compensations prĂ©Ă©tablies par le constructeur, le moteur continuera de fonctionner en mĂ©lange pauvre et par consĂ©quent en mode dĂ©gradĂ©. Or si ces conditions ne parviennent pas Ă  ĂŞtre Ă©liminĂ©es des cylindres suffisamment rapidement, elles ont pour consĂ©quence supplĂ©mentaire d’y augmenter la tempĂ©rature et d’y crĂ©er un environnement propice Ă  la (rĂ©)apparition du cliquetis avec les risques explicitĂ©s auparavant. Ă€ noter que lorsque l’équilibre du mĂ©lange parvient Ă  ĂŞtre rĂ©tabli par le calculateur dans le moteur, les tempĂ©ratures de fonctionnement Ă  l’éthanol sont plus faibles qu’à l’essence, en partie grâce Ă  la prĂ©sence d'une faible quantitĂ© d’eau dans le carburant, ce qui diminue considĂ©rablement les contraintes thermiques sur le moteur, prolongeant d’autant sa durĂ©e de vie. En outre, dans le cas oĂą la pompe d’injection arrivant en butĂ©e ne parviendrait toujours pas rĂ©tablir les conditions d’équilibre, une mesure corrective relativement simple consisterait Ă  remplacer les injecteurs d’origine par des Ă©quivalents prĂ©sentant un orifice d’injection plus large de +20 % Ă  +30 % environ (l'augmentation du dĂ©bit volumique Ă©tant une fonction linĂ©aire de la section de passage). Par ailleurs, une mesure de prĂ©vention permettant de compenser tout ou partie de l’augmentation transitoire de tempĂ©rature aux sièges des bougies lors des phases d’ajustement se reproduisant Ă  chaque passage d’une carburation 100 % essence Ă  une carburation Ă  base d’éthanol (donc pauvre) qu’elle soit complète ou partielle, serait de remplacer les bougies prĂ©conisĂ©es par leurs Ă©quivalents d’un indice plus froid (ou de deux au maximum). Opter pour une gamme de bougies davantage plus froides se ferait au prix d’un encrassement accĂ©lĂ©rĂ© de celles-ci notamment lorsque les usages du vĂ©hicule en question sont principalement urbains et pĂ©riurbains, se soldant ainsi par une augmentation de la consommation ce qui est l’inverse de l’effet initialement recherchĂ© par les utilisateurs d’E85.
  • L’augmentation de la pression d’explosion dans le moteur, principalement sur les sièges de soupapes, sur le piston ainsi que la bielle et les coussinets sur lesquels elle s’appuie, d’environ +20 % Ă  tous les rĂ©gimes lors de l’utilisation de l’E100 par exemple en comparaison du SP95[26], donc usure accĂ©lĂ©rĂ©e du moteur si les marges de sĂ©curitĂ© Ă  la conception ne permettent pas de compenser cette charge supplĂ©mentaire. Cependant, une Ă©tude conjointement diligentĂ©e par le ministère de l’Énergie amĂ©ricain et le DĂ©partement d’étude sur la mobilitĂ© de l’ArmĂ©e amĂ©ricaine, publiĂ©e[27] en 1981 et portant sur l’analyse comparative de l’état d’usure d’un bloc-moteur de 2,3 L conçu initialement pour une carburation classique Ă  l’essence, soumis Ă  vingt heures de fonctionnement Ă  rĂ©gime constant et soutenu sous divers types de carburants alternativement : 100 % mĂ©thanol, 10 % mĂ©thanol plus 90 % essence, 100 % Ă©thanol, 10 % Ă©thanol plus 90 % essence puis 100 % essence, fit Ă©tat d’une usure Ă©quivalente sinon infĂ©rieure du moteur, lorsque celui-ci fonctionnait au carburant E100 ou E10, comparativement Ă  l’essence classique, ce qui du reste n’était pas le cas du mĂ©thanol, une autre forme de carburation très prisĂ©e par les professionnels des sports mĂ©caniques. Le risque d’usure prĂ©maturĂ©e du moteur sous augmentation rĂ©pĂ©tĂ©e de la charge peut donc raisonnablement ĂŞtre Ă©cartĂ©, ce que confirme d’ailleurs l’expĂ©rience accumulĂ©e par la flotte de vĂ©hicules dĂ©crite dans cet article[28] du journal automobile L'Argus. Ă€ noter que les vĂ©hicules basĂ©s sur la technologie des Toyota Prius affichent un certain avantage pour ce qui concerne leur compatibilitĂ© au carburant E85 sans dispositif particulier. Leur fonctionnement en cycle d'Atkinson[29] diminue en effet la pression après explosion dans les cylindres grâce Ă  l’évacuation prĂ©alable d’une partie du mĂ©lange d’admission par retard contrĂ´lĂ© de la fermeture des soupapes froides pendant la mise en compression. Ce principe fait ainsi coĂŻncider au mieux le taux de compression thĂ©orique au taux de compression rĂ©el, puisque le travail dĂ©gagĂ© par l’explosion est exploitĂ© tout au long de la descente du piston jusqu’à l’ouverture de la soupape d’échappement, permettant aux gaz ainsi exploitĂ©s de se dĂ©gager avec la remontĂ©e suivante du piston. Il en rĂ©sulte une consommation moindre de carburant mais avec en contrepartie une perte considĂ©rable du couple thermique, toutefois astucieusement compensĂ© par celui mis Ă  disposition instantanĂ©ment par le moteur Ă©lectrique. Or c’est cette baisse des pressions d’explosion du cycle Atkinson qui permet de limiter naturellement les risques d’auto-inflammation dans le moteur et aussi de dĂ©gager la marge nĂ©cessaire Ă  compenser tout ou partie de l’augmentation de charge sur les organes moteur lors de l’utilisation de l’éthanol, augmentant ainsi d’autant leur longĂ©vitĂ©.
  • SĂ©paration des phases liquides dans le rĂ©servoir, donc augmentation de la quantitĂ© d’eau dans le circuit de carburation, entraĂ®nant un rĂ©gime saccadĂ© du moteur. L’éthanol prĂ©sente une assez bonne miscibilitĂ© Ă  l’essence, ce qui en fait un mĂ©lange relativement stable. Cependant, comme tous les alcools, l’éthanol reste particulièrement hydrophile[30]. Lorsqu’il existe des traces d’eau dans le rĂ©servoir, situation assez courante, celles-ci se dĂ©tachent spontanĂ©ment de l’essence pour s’associer de prĂ©fĂ©rence Ă  l’ethanol. MĂŞme dans l’hypothèse improbable qu’il n’existe pas d’eau dans un rĂ©servoir, l’éthanol, lorsqu’il y sĂ©journe plusieurs semaines, s’associe Ă  l’eau se condensant dans le rĂ©servoir au grĂ© des variations extĂ©rieures de tempĂ©rature. (Avoir un rĂ©servoir bien plein limite ce phĂ©nomène, car il y a moins d'air humide). Ainsi, si le vĂ©hicule reste immobilisĂ© suffisamment longtemps, le carburant se sĂ©parera en deux phases : le mĂ©lange eau-Ă©thanol dans le fond du rĂ©servoir et le mĂ©lange essence-Ă©thanol au-dessus. Un rĂ©servoir plein d’éthanol prĂ©sentera cependant moins de risque de sĂ©paration de phases qu’un rĂ©servoir contenant un mĂ©lange d’éthanol et d’essence, l’éthanol possĂ©dant en effet une plus grande capacitĂ© d’absorption d’eau qu’un mĂ©lange essence/Ă©thanol, le risque de sĂ©paration de phases diminue Ă  la faveur cependant d’un autre risque : l’altĂ©ration de l’indice d’octane puis la persistance potentielle des conditions de mĂ©lange pauvre dans les cylindres jusqu’à Ă©puisement du rĂ©servoir, avec les consĂ©quences explicitĂ©es prĂ©cĂ©demment. Ce phĂ©nomène de sĂ©paration de phase est donc davantage susceptible d'apparaitre dans un rĂ©servoir contenant un mĂ©lange d’essence et d’éthanol que d’éthanol simple. L’essence Ă©tant en effet hydrophobe, l’eau sĂ©grĂ©gĂ©e sera absorbĂ©e par une quantitĂ© limitĂ©e d’éthanol prĂ©sente dans le rĂ©servoir jusqu’à saturation de celui-ci, le reste de l’eau Ă©tant relĂ©guĂ© au fond. Or c’est par le fond du rĂ©servoir que le carburant est puisĂ©. Il en rĂ©sulte que le mĂ©lange eau/Ă©thanol pompĂ© puis injectĂ© dans les cylindres possède un indice d’octane inconnu et alĂ©atoire dont les consĂ©quences potentielles sont une dĂ©tĂ©rioration de la pompe d’injection, des buses d’injecteurs mais surtout un fonctionnement anarchique du moteur se soldant Ă  terme par une fragilisation prĂ©visible voire une casse des organes internes, les plus exposĂ©s Ă©tant encore une fois les coussinets, les pistons, les soupapes et dans une moindre mesure la culasse. Bien que ce phĂ©nomène de sĂ©grĂ©gation de phases soit très dommageable, les solutions pour y remĂ©dier restent relativement simples : utiliser rĂ©gulièrement son vĂ©hicule de sorte que le rĂ©servoir se vide suffisamment frĂ©quemment pour ne pas avoir le temps d’y accumuler d’eau et Ă©viter les stationnements prolongĂ©s (supĂ©rieurs Ă  quinze jours) du vĂ©hicule lorsque le rĂ©servoir contient de l’éthanol ou lorsqu’il contient un mĂ©lange d’éthanol/essence (mĂŞme plein, quoique le risque y soit moindre). Dans le cas contraire, une purge partielle du rĂ©servoir avant remise en route du moteur sera une mesure prĂ©ventive recommandĂ©e, cette règle restant valable mĂŞme pour une carburation classique Ă  l’essence.

Il est donc relativement possible pour un moteur à essence à injection électronique directe conçu pour bruler du carburant E10 de rouler à l’éthanol dans des proportions plus ou moins importantes (jusqu’à 100 %) sans dispositif particulier, dans la limite de l’augmentation des volumes d’injection autorisés par la pompe d’injection et des amplitudes éventuelles de réglages de l’avance d’allumage par le calculateur. À noter que lorsque l'une ou l'autre des limites est atteinte, un code défaut moteur est généralement indiqué au tableau de bord. Aussi, le bon fonctionnement de la sonde lambda et du (des) capteur(s) de cliquetis est ici particulièrement primordial puisque l’une détecte le besoin en ajustement de carburant et l’(es) autre(s) la nécessité éventuelle de modifier l’avance d’allumage. Deux paramètres fondamentaux à l’évitement d’une casse moteur, par le haut ou par le bas.

S’agissant des précautions d’usage, il convient d’éviter le stationnement prolongé d’une part et la modification des proportions optimisées par le calculateur d’autre part. Cette dernière mesure a pour principal objectif d’éviter le retour aux conditions pauvres dans les cylindres. Toutefois, lorsque cela se produit (après par exemple un plein d’essence), il est recommandé de retourner au ratio optimal précèdent de manière progressive, afin de ne pas placer l’électronique en défaut, en déplaçant d’emblée ses plages de fonctionnement en butée.

Véhicules compatibles d'origine avec le superéthanol

Pompe E85 aux États-Unis en 2010.

Flex fuel (ou VCM, véhicule à carburant modulable) est le nom donné aux véhicules spécialement conçus pour fonctionner indifféremment au superéthanol et/ou au super sans plomb classique. Plus précisément, les véhicules flexfuel sont capables d’adapter automatiquement leur fonctionnement pour tout mélange d’essence et d’éthanol pur dans des proportions comprises entre 0 % et 85 % en volume d’éthanol, d’où le mot « flex ».

Ce sont en pratique des véhicules dotés de moteurs essences équipés de dispositifs d’injections spécifiques (calculateur, injecteurs…). De plus, les matériaux utilisés doivent être compatibles avec l’éthanol. L’éthanol est en effet plus corrosif que l’essence.

Offres en Amérique en 2011

Le Brésil était déjà bien avancé en matière de biocarburants. Pour ce pays, le moteur de leur développement était plus économique qu’écologique. Le parc de véhicules flexfuel de ce pays est estimé à deux millions. L’offre, dans ce pays, est déjà très complète car pratiquement tous les constructeurs implantés localement proposent des modèles flexfuel : Fiat, Ford, General Motors, PSA, Renault, Volkswagen, etc.

Les États-Unis visent leur indépendance énergétique avec le développement des biocarburants. Huit constructeurs y commercialisent en 2011 des véhicules flexfuel : Chrysler (cinq modèles), Ford (sept modèles), General Motors (quatre modèles), Isuzu (un modèle), Mazda (un modèle), Mercedes-Benz (deux modèles), Mercury (deux modèles), Nissan (un modèle).

Offres sur le marché unique européen en 2011

La Suède avait pour volonté d’être indépendante d’un point de vue énergétique en 2010. Les modèles disponibles sont proposés par Ford et Volvo.

Les constructeurs s'étaient organisés en France pour proposer des véhicules flexfuel ou VCM. Deux marques proposaient ce type de véhicules depuis : Saab (cinq modèles) et Ford (deux modèles), auxquels se sont ajoutés Volvo (trois modèles), Dacia (trois modèles), Peugeot (un modèle) et Renault (trois modèles).

Appellations par les constructeurs :

  • Saab BioPower
  • Dacia HiFlex et E85
  • Ford Flexifuel
  • Opel 2.0 Turbo (220 ch)
  • Volvo Flexifuel
  • Renault BioÉthanol eco2, Éthanol eco2, SP95/E85
  • Cadillac E85
  • Jeep
  • CitroĂ«n et Peugeot BioFlex
  • Volkswagen Multifuel[31].

D'autres modèles sont apparus mais ont été retirés du marché, comme la Citroën C4I, les Peugeot 307 et 308, et la Renault Clio III. En 2007, Renault s'était engagé à ce qu'en 2009, 50 % de ses voitures essence soient flexfuel.

Pour des raisons économiques (faiblesse des ventes) et de coût lié à la mise aux dernières normes européennes (Euro 5), la quasi-totalité des marques proposant des véhicules flexfuel ont suspendu leurs ventes en France le [32].

Offres sur le marché unique européen depuis 2019

Après le retrait en 2018 de la commercialisation de la VW Golf Multifuel il n'y avait plus de voiture Flexfuel en vente.

En 2019, Ford commercialise une voiture qui peut rouler à l'E85, un SUV Kuga III, et donc profiter de la gratuité du certificat d'immatriculation[33]. 78 % de ces véhicules sont vendus avec un moteur compatible E85, mais dans l'UE, ces ventes ne se réalisent qu'en France et en Suède[34].
En 2020, trois modèles hybrides Flexfuel sont disponibles chez le constructeur Jaguar Land-Rover (Discovery, Evoque et E-PACE).

En janvier 2021, six modèles Flexfuel sont annoncés chez Ford (Fiesta, Focus, Puma, Kuga, Fiesta Van, Transit Connect)[35].

Offres au Brésil

Les moteurs flex au BrĂ©sil sont conçus pour fonctionner Ă  l'essence (qui est toujours mĂ©langĂ©e avec 20 % Ă  25 % d'Ă©thanol au BrĂ©sil), alcool Ă©thylique hydratĂ© (96 % d'Ă©thanol, 4 % d'eau), ou n'importe quel mĂ©lange de ces carburants. Cela correspondrait plutĂ´t Ă  une sorte de carburant « E90 ».

RĂ©clamation de l'ONU pour la fin de la commercialisation de l'E85

Le 17 octobre 2012, dans une déclaration à l'AFP, Olivier De Schutter, rapporteur de l'ONU, recommande l'abandon de la production européenne ainsi qu'en Amérique du Nord « L’Europe doit faire mieux que réviser à la baisse ses objectifs d'incorporation des agrocarburants comme elle s'apprête à le faire : elle doit avoir le courage politique de les abandonner et les États-Unis devraient faire de même […]. Il est dangereux dans une situation où les stocks mondiaux de céréales sont aussi bas de fixer des objectifs aussi inatteignables[36]. »

Notes et références

  1. Le superéthanol E85, sur developpement-durable.gouv.fr, 7 juillet 2011.
  2. Marchés - le Superéthanol E85 (consulté en mai 2014).
  3. « Rapport du groupe de travail sur le soutien au développement de la filière E85 » [PDF], sur finances.gouv.fr (consulté le ).
  4. « Liste des stations E85 en service. Cette base recense 441 stations au », sur super-ethanol.com (consultĂ© le ).
  5. « Croissance du bioéthanol en France en 2015 », sur bioethanolcarburant.com, (consulté le ).
  6. « Superéthanol E85 : des pompes de plus en plus faciles à trouver », sur L'Argus, (consulté le ).
  7. Gredy Raffin, « Les Français consomment plus de superéthanol-E85 », JournalAuto,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  8. « Statistiques des prix à la pompe de l’éthanol E85 en France », sur super-ethanol.com (consulté le ).
  9. La fiscalitĂ© des hydrocarbures applicable au - SuperĂ©thanol E 85 : 7,96 â‚¬/hl, sur developpement-durable.gouv.fr.
  10. La carte grise et les dispositions fiscales avantageuses pour les véhicules roulant au superéthanol E85, sur carte-grise.org (consulté le 19 octobre 2012).
  11. « Essence : le superéthanol E85 a la cote », sur CNEWS (consulté le )
  12. « Comment Ford devient leader des véhicules Superéthanol-E85 », sur Les Echos, (consulté le )
  13. Lire en ligne, sur e85-carburant.fr.
  14. Forum Prius sur l'E85, sur prius-touring-club.com.
  15. Il existe de nombreux kits, sur e85-carburant.fr
  16. « Tests E85 sur véhicules essence », sur super-ethanol.com.
  17. « Superéthanol : l’homologation des boîtiers E85, c’est pour avril », sur en-voiture.blog.leparisien.fr (consulté le ).
  18. Jacques Chevalier, « Le bioéthanol donne un sursis aux grosses cylindrées », sur Le Point, (consulté le ).
  19. « Quel indice d’octane dans les carburants ».
  20. « Elf E85 ».
  21. « Premier 95 E10 ».
  22. « Superéthanol E85 ».
  23. « Excellium 98 ».
  24. « Bougies d’allumage : diagnostic des pannes ».
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