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Domuztepe

Domuztepe est un site archĂ©ologique situĂ© dans la province de KahramanmaraĹź, entre les villes de KahramanmaraĹź et Gaziantep, dans le sud de la Turquie. Il s'agit d'un ancien village nĂ©olithique d'environ 1 500 habitants, construit au bord d'un ancien marais. Avec une superficie de 20 Ă  25 hectares, c'est l'un des plus grands sites de la culture de Halaf, culture nĂ©olithique du Nord de la MĂ©sopotamie.

Domuztepe
Image illustrative de l’article Domuztepe
Vue sur Domuztepe depuis le Nord-Est
Localisation
Pays Drapeau de la Turquie Turquie
Province KahramanmaraĹź
District KahramanmaraĹź
Type Tell
CoordonnĂ©es 37° 19′ 16″ nord, 37° 02′ 08″ est
Superficie 20-25 ha
GĂ©olocalisation sur la carte : Turquie
(Voir situation sur carte : Turquie)
Domuztepe
Domuztepe
GĂ©olocalisation sur la carte : province de KahramanmaraĹź
(Voir situation sur carte : province de KahramanmaraĹź)
Domuztepe
Domuztepe
Histoire
Culture Culture de Halaf
PĂ©riode NĂ©olithique du Proche-Orient

Historique

Le site a été fouillé entre 1995 et 2006 par une équipe conjointe de l'université de Manchester et de l'université de Californie à Los Angeles. Puis les fouilles ont repris en 2008 sous l'égide de l'université de Manchester et du British Museum.

Chronologie

Attribué à la culture de Halaf, le village a été abandonné vers . Son occupation — encore non entièrement documentée par des fouilles — pourrait avoir commencé avant [1] - [2].

Après une interruption de 5 000 ans, le site connait Ă  l'Ă©poque hellĂ©nistique (vers ) une occupation tardive sur sa partie ouest. En outre, un bâtiment considĂ©rable appartenant Ă  l'Ă©poque romaine tardive (Ier ou IIe siècle apr. J.-C.) a Ă©tĂ© dĂ©couvert sur le sommet du monticule. Ce bâtiment semble avoir Ă©tĂ© restaurĂ© et entretenu jusqu'Ă  la pĂ©riode islamique moyenne (du XIe siècle au XIVe siècle apr. J.-C.)[3] - [4].

Un site néolithique

Le site de Domuztepe est surtout fouillé pour sa période néolithique. Il présente un grand intérêt pour la compréhension de plusieurs aspects de la culture de Halaf dans l’extrême Nord-Ouest de son extension géographique : le riche symbolisme de la poterie peinte, l'utilisation de jetons et de nouvelles habitudes mortuaires en sont les principaux traits caractéristiques[5].

Malgré l'étendue du site, les échanges à longue distance, la spécialisation des artisans et l'utilisation de sceaux et de scellés qui semblent indiquer une tendance à une complexification naissance de la société, Domuztepe n'a pas livré de preuves archéologiques de l'existence de chefferies complexes[6].

Mode de subsistance

L'alimentation Ă©tait fortement basĂ©e sur les plantes et animaux domestiques. Les os d'animaux appartiennent Ă  très peu d'animaux chassĂ©s et sont plutĂ´t composĂ©s de moutons, de bovins et de porcs. L'importance des bucranes sur les tessons de cĂ©ramiques peintes trouvĂ©s dans la Fosse de la mort (voir ci-après) s'explique probablement par une nette prĂ©fĂ©rence pour le bĂ©tail. Les cĂ©rĂ©ales sont domestiquĂ©es et consistent en grande partie en blĂ© amidonnier et un peu d'orge commune. Les champs de culture de cĂ©rĂ©ales peuvent s'Ă©tendre jusqu'Ă  4 kilomètres. Par ailleurs, Domuztepe Ă©tant anciennement situĂ© au bord d'un marais, l'exploitation de roseaux pour confectionner des paniers et peut-ĂŞtre pour le logement semble avoir Ă©tĂ© important dans l'Ă©conomie locale[7].

La Fosse de la mort

Domuztepe possède un vaste et complexe site funĂ©raire. Il est connu sous le nom de Fosse de la mort (en). Ce dĂ©pĂ´t d'environ 5 Ă— 4 mètres et 1 mètre de profondeur Ă©tait rempli d'objets, d'ossements humains et animaux. Plus de 10 000 ossements très fragmentĂ©s d'animaux et d'humains (au moins une quarantaine d'individus) s'y trouvaient. En outre, les archĂ©ologues y ont collectĂ© un nombre important de tessons de poterie, de matĂ©riaux vĂ©gĂ©taux, des outils en os, des perles, des empreintes de sceaux, et des restes de paniers plâtrĂ©s.

Tous ces éléments indiquent une importante composante rituelle dans l'usage de cette fosse[8]. Les chercheurs voient dans ce dépôt une transformation des morts en un ancêtre collectif reconstitué. Cependant, le mélange entre ossements animaux et humains et le fait que certains corps montrent des traces de traumatismes accomplis avant et après la mort poussent également ces mêmes chercheurs à envisager l'existence de rituels faisant appel au cannibalisme ou à des sacrifices humains[9] - [5].

Au sud de la fosse se trouvent un crâne isolĂ©, une zone d'enterrement secondaire et le squelette presque complet d'un enfant âgĂ© de 6 ans. Ceux-ci datent d'un peu plus tard que la fosse. La zone d'enterrement indique d'autres rituels funĂ©raires menĂ©s Ă  cet endroit. Certains crânes, notamment celui de l'enfant, ont subi des traumatismes[10].

CĂ©ramique

La plupart des restes céramiques de Domuztepe sont attribués à la culture de Halaf[10]. Ces poteries sont faites d'une pâte très fine et sont l'objet d'une cuisson plus chaude et plus oxydante, qui leur apporte une couleur orange ou chamois[11]. Cependant, à Domuztepe les décorations sont empreintes de traits stylistiques régionaux reconnaissables. Deux céramiques peintes découvertes dans un fossé creusé dans une terrasse d'argile rouge[Note 1] présentent des scènes : sur l'une, des femmes dansent en cercle, et sur l'autre se trouve un ensemble de bâtiments entre des arbres. Les débris d'un autre récipient peint semblent représenter un rituel[12].

À côté de la céramique Halaf, il existe une gamme de récipients, majoritairement des bols non peints, brunis avec des plages rouges, brunes ou noires. Même si l'influence principale du village relève de la culture de Halaf, on peut rapprocher ces bols de ceux trouvés au Levant, sur des sites de la culture de Wadi Rabah. D'autres céramiques, produites en petites quantités et qui n'appartiennent pas à la culture de Halaf, présentent des couleurs à dominantes oranges (une barbotine orange foncé avec une peinture marron foncé ou noire) et pourvues d'une fine ligne peinte (une surface chamois blanc ou pâle peinte avec des lignes extrêmement fines). Les origines de cette céramiques se trouvent plus au sud, dans l'Amuq et le Ras Shamra[4].

Il existe Ă©galement une poterie brune, Ă©paisse, peu identifiable Ă  des rĂ©fĂ©rences externes. Ce sont des bocaux aux parois très Ă©paisses (environ 1 centimètre), de matière assez globuleuse et Ă  longs cols verticaux colorĂ©s d'un large brunissage vertical. Ce type de poterie remplit probablement une fonction particulière encore non identifiĂ©e. Les dernières couches archĂ©ologiques ont livrĂ© une sĂ©rie de pots avec ou sans col, dont certains sont enduits de plâtre sur la surface extĂ©rieure. D'autres objets plus grossiers prĂ©sentent une grande variĂ©tĂ© de formes et sont composĂ©s de sable et d’un dĂ©graissant vĂ©gĂ©tal[13].

Autres objets

Le village était également le lieu d'activités artisanales variées, liées à la production textile et à la fabrication de récipients en pierre. On observe une préoccupation de conservation, de réparation et de recyclage : les déchets d'os d'animaux sont transformés en outils, aiguilles, poinçons, bobines ou en perles ; les récipients sont réparés, transformés. Les récipients en céramique étaient parfois réparés, et souvent transformés en fuseau de filage de corde ou en simples disques de grattage ou en perles, pendentifs ou sceaux[4].

La grange brûlée

Les niveaux inférieurs de Domuztepe montrent une zone fortement brûlée. Dans un secteur du site, des appentis d'acacia et de torchis sont construits sur de faibles fondations en pierre et d'os d'animaux. Il semble qu'un incendie ait provoqué l'effondrement du toit et la combustion de nombreux pots et de meules posés sur des surfaces de plâtre fragmentaire. Il s'agit probablement d'une grange, à côté de laquelle se trouve une cour, adjacente à des stalles destinées à garder des animaux. Une partie de cet ensemble, fortement brûlée, a livré un grand nombre d'objets ménagers (des céramiques, des objets en pierre et une pierre à broyer) et des fragments de pisé carbonisés. De nombreux récipients verseurs, des bocaux, des bols à bec, trois grands récipients peints et de grand pots servant à la transformation du lait indiquent qu'il pourrait s'agir d'un lieu de vie ou d'activité commune[13].

Notes et références

Notes

  1. Fossé dans lequel se trouvent également des fragments de céramiques, des outils, des aiguilles finement travaillées en os, des objets en pierres, des impressions de sceaux et un morceau de miroir en obsidienne[12].

Références

  1. (en) Elizabeth Carter et Stuart Campbell, « The Domuztepe Projekt, 2006 », Kültür Varlıkları ve Müzeler Genel Müdürlüğü Yayın, vol. 29, no 3,‎ , p. 123-136 (lire en ligne).
  2. (en) Sarah Whitcher Kansa, Suellen C. Gauld, Stuart Campbell et Elizabeth Carter, « Whose Bones are those? Preliminary Comparative Analysis ofFragmented Human and Animal Bones in the “Death Pit” at Domuztepe, a Late Neolithic Settlement in Southeastern Turkey », Anthropozoologica, vol. 44, no 1,‎ , p. 159-172 (lire en ligne, consulté le )
  3. Kansa et al. 2009, p. 161.
  4. Carter et Campbell 2006, p. 129.
  5. Kansa et al. 2009, p. 160.
  6. Carter et Campbell 2006, p. 133.
  7. Carter et Campbell 2006, p. 128.
  8. Kansa et al. 2009, p. 161-163.
  9. (en) Stuart Campbell, « Northern Mesopotamia », dans D.T. Potts, A Companion To The Archealogy Of The Ancient Near East, Oxford, Blackwell Publishing Ltd., (ISBN 978-1-4051-8988-0), p. 426-427.
  10. Carter et Campbell 2006, p. 125.
  11. W. Cruells, « Nouvelles données sur les origines et le développement de la céramique Halaf en Syrie », dans Méthodes d’approche des premières productions céramiques : étude de cas dans les Balkans et au Levant, Nanterre, Verlag Marie Leidorf GmbH, , p. 100.
  12. Carter et Campbell 2006, p. 124-125.
  13. Carter et Campbell 2006, p. 127.

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