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Diego Rodriguez Lucero

Diego Rodriguez Lucero ou Diego Rodrigues de Lucero, surnommĂ© El Tenebrero, nĂ© vers 1440 Ă  Moguer en Espagne et mort le 28 dĂ©cembre 1508 Ă  SĂ©ville, est un prĂȘtre catholique et inquisiteur du Royaume de Castille entre 1499 et 1507. La cruautĂ© et l'injustice de ses persĂ©cutions ont crĂ©Ă© un rĂšgne de terreur jusqu'Ă  ce qu'il soit dĂ©mis de ses fonctions.

Diego Rodriguez Lucero
Biographie
Naissance
DĂ©cĂšs
Activités
PrĂȘtre catholique, inquisiteur

Histoire

Origine et débuts

La date de naissance de Diego RodrĂ­guez de Lucero est inconnue mais il semble ĂȘtre nĂ© Ă  Moguer (province de Huelva), une rĂ©gion oĂč beaucoup d'habitants Ă©taient des convertis du judaĂŻsme ou de l'islam. Ses parents sont Juan Lucero et Marina Rodriguez[1]. Il est issu d'une famille d'ecclĂ©siastiques et de magistrats[2]. Il obtient un baccalaurĂ©at en droit et un diplĂŽme en thĂ©ologie.  

Il devient prĂ©lat et chanoine de SĂ©ville[3]. Il existe une rĂ©fĂ©rence prĂ©coce Ă  RodrĂ­guez de Lucero travaillant comme inquisiteur Ă  Jerez de la Frontera (Ă©vĂȘchĂ© de Cadix), suivie d'une autre au milieu de 1492 Ă  Cordoue, demandant un poste de maĂźtre d'Ă©cole Ă  AlmerĂ­a. Il n'a peut-ĂȘtre pas obtenu cet emploi mais dans des documents ultĂ©rieurs, il reçoit le titre de maĂźtre d'Ă©cole. En 1495, il est juge des biens confisquĂ©s pour les personnes reconnues coupables d'hĂ©rĂ©sie, dont les juifs convertis qui pratiquent leur ancienne foi en secret, Ă  Jerez de la Frontera[1] - [2]. Diego RodrĂ­guez Lucero tient directement ses ordres de Ferdinand le Catholique qui exerce un contrĂŽle permanent sur l’institution, comme il Ă©tait habituel Ă  cette Ă©poque, soit avant les Instructions de 1498, appliquĂ©es par son successeur Pedro Ramos[4].

Inquisiteur

Le 7 septembre 1499, le grand inquisiteur, Diego de Deza (de), nomme Diego Rodriguez Lucero inquisiteur de Cordoue de 1499 à 1507[2]. Il reprend la suite de Pedro de Guiral, inquisiteur écarté pour corruption, mais l'oeuvre de Lucero sera bien pire que celle de son prédécesseur durant l'Inquisition espagnole.

DĂšs sa prise de fonction en 1499, il s'installe rue EncarnaciĂłn, trĂšs proche de la mosquĂ©e-cathĂ©drale de Cordoue et condamne Ă  ĂȘtre brĂ»lĂ©s vifs 107 juifs conversos, convaincu qu'ils Ă©taient en rĂ©alitĂ© des marranes, restĂ©s fidĂšles Ă  leur ancienne religion[3]. Ce fut un des plus meurtriers autodafĂ©s du pays.

Entre 1504 et 1505, 134 personnes encore accusĂ©es de pratiquer le judaĂŻsme en secret (interdit par l'Église) sont brĂ»lĂ©es sous ses ordres[5].

Il s'attaque aussi à la noblesse des vieux chrétiens (par rapport aux « nouveaux chrétiens »), notamment à Julian Trigueros de la femme duquel il voulait obtenir des faveurs et qui finira sur un bûcher[6].

Chambre de tortures sous l'Inquisition

Désirant prouver l'existence d'une conspiration des Juifs et des conversos (ou juifs convertis) contre la chrétienté, il accumule des fausses preuves, arrache des témoignages sous la torture, emprisonne des centaines de personnes[7].

Ainsi, il attend la mort de la reine Isabel le 26 novembre 1504 pour faire arrĂȘter et torturer la famille de l'archevĂȘque de Grenade (es), Hernando de Talavera (en), ancien confesseur des rois catholiques, afin qu'il tĂ©moigne que le vieil archevĂȘque (probablement d'origine juive) abritait une synagogue dans sa maison[8] et accuse sa famille d'hĂ©rĂ©sie[9]. L'opposition Ă©tait farouche entre ces deux religieux catholiques - Talavera soutenant qu'il n'y avait pas de diffĂ©rence Ă  effectuer entre un « vieux » et un « nouveau chrĂ©tien », tandis que Lucero suspectait toujours ces derniers.

Plusieurs centaines de personnes, dont beaucoup sont des partisans de la reine Isabel, sont exécutées sur le bûcher. L'inquisiteur général, appuyé par le roi, réprime toute protestation[10].

Rodríguez de Lucero célÚbre un auto-da-fé à Cordoue en décembre 1504, qui suscite une peur généralisée. Un témoignage du massacre dit : « Il a brûlé cent sept hommes qui criaient à Dieu et à la Vierge de leur pardonner et en disant qu'ils n'avaient jamais commis le péché d'hérésie, et ont appelé les scribes à témoigner qu'ils étaient morts en tant que chrétiens catholiques et dans la foi de Jésus-Christ »[11].

Sa duretĂ© et ses excĂšs dans les Ă©preuves sont devenus proverbiaux. Le chroniqueur Pietro Martyre d'Anghiera l'appelait « El Tenebrero »[11] D'autres Ă  l'Ă©poque disaient qu'il Ă©tait un « monstre exceptionnel, inspirĂ© par Lucifer »[11].  

Le marquis de Priego avec son armĂ©e prend alors d'assaut la prison de l'Inquisition, libĂšre les prisonniers et arrĂȘte le procureur[12].

Une protestation unanime des ecclĂ©siastiques et des laĂŻcs rĂ©ussit en 1507 Ă  faire dĂ©mettre de ses fonctions l'inquisiteur gĂ©nĂ©ral Diego Deza (en), considĂ©rĂ© comme responsable de ces excĂšs, qui est remplacĂ© par le cardinal Francisco JimĂ©nez de Cisneros[3]. À la suite d'un examen de ses activitĂ©s par une congrĂ©gation gĂ©nĂ©rale Ă  Burgos en 1508, durant lequel Lucero est emprisonnĂ©, il fut finalement relevĂ© de son poste la mĂȘme annĂ©e et alla finir ses jours Ă  SĂ©ville.

Son cas, qui fit scandale à l'époque, fut un révélateur de la nécessité d'opérer des réformes dans le fonctionnement de l'Inquisition[13] - [4] ; d'autant que son influence avait déjà commencé à toucher les juridictions environnantes comme Jaen.

Liens connexes

Notes et références

  1. (es) Mariångeles Ortiz, « Bajo la mirada de Córdoba: El Inquisidor Lucero expulsado de Córdoba por los cordobeses », sur Bajo la mirada de Córdoba, (consulté le )
  2. (es) José Manuel de Bernardo Ares, « Diego Rodríguez Lucero | Real Academia de la Historia », sur dbe.rah.es (consulté le )
  3. (es) « Biografia de Diego Rodríguez de Lucero », sur www.biografiasyvidas.com (consulté le )
  4. BĂ©atrice PĂ©rez, « Inquisition et mutations sociales des conversos Ă  SĂ©ville : des rĂ©formes complexes de sociĂ©tĂ© entre 1480 et 1523 », dans L’Inquisition espagnole et ses rĂ©formes au xvie siĂšcle, Presses universitaires de la MĂ©diterranĂ©e, coll. « Voix des Suds », (ISBN 978-2-36781-093-5, lire en ligne), p. 25–40
  5. Voir page 58 in The Spanish Inquisition, Helen Rawlings, Blackwell, 2004
  6. Voir page 98 in El Tribunal de la Inquisicion en Andalucia: Seleccion de Textos y Documentos, Manuel Barrios, Rodriguez Castillejo, 1991
  7. Voir pages 614-624 in The American Historical Review, Vol. 2, No.4 (July 1897), « Lucero the Inquisitor », Charles Lea
  8. Voir page 238 in Conversos, Inquisition and the expulsion of Jews from Spain, Norman Roth, University of Wisconsin, 2003
  9. (es) Joseph Pérez, Cisneros, el cardenal de España (Colección Españoles Eminentes), Penguin Random House Grupo Editorial España, (ISBN 978-84-306-0958-1, lire en ligne)
  10. (en) Thomas, Werner, A Companion to Heresy Inquisitions : La métamorphose de l'inquisition espagnole, 1520-1648, BRILL, (ISBN 978-90-04-39387-5, lire en ligne), p. 201
  11. (es)Recio Mateo, Luis, "El inquisidor RodrĂ­guez de Lucero" , cordobainterculturalidad.com
  12. Voir page 58-60 in The spanish inquisition: a history, Joseph PĂ©rez, Yale University, 2005
  13. Voir page 46 in Spain, 1469-1714: A Society of Conflict, Henry Kamen, Pearson Longman, 2005


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