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Corruption en France

La corruption en France décrit la prévention et la présence de la corruption en France.

Une carte du monde de 2015, l'indice de perceptions de corruption par Transparency International.

La France a ratifié plusieurs importantes conventions internationales de lutte contre la corruption telles que la Convention de l'OCDE sur la lutte contre la corruption d'agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales et la Convention des Nations unies contre la corruption. En général, les investisseurs ne considÚrent pas la corruption comme un problÚme pour faire des affaires en France, et les entreprises opérant en France ont en général une bonne réputation de la responsabilité sociale de l'entreprise[1].

L'Assemblée nationale française a voté deux projets de loi pour la lutte contre l'évasion fiscale. Cependant, ces derniÚres années, plusieurs scandales de corruption ont impliqué de hauts fonctionnaires. Les travaux publics et l'industrie de la défense sont considérés comme les plus touchés par la corruption[2].

Histoire

On observe une nette hausse du nombre annuel de condamnĂ©s pour corruption de fonctionnaires au tournant des annĂ©es 1990 : entre 50 et 100 entre 1987 et 1992 ; entre 100 et 200 Ă  partir de 1993 ; et plus de 200 aprĂšs 1999, atteignant dans les annĂ©es 2010 « un niveau historique, jamais observĂ© jusque-lĂ . Cette sĂ©vĂ©ritĂ© accrue s’explique parce que les seuils de tolĂ©rance ont changĂ©, selon les enquĂȘtes d’opinion menĂ©es en France depuis les annĂ©es 1970 »[3].

Les atteintes Ă  la probitĂ© constatĂ©es par les forces de police et de gendarmerie ont augmentĂ©, en France, de 28 % entre 2016 et 2021, selon une Ă©tude statistique officielle rendue publique jeudi 27 octobre 2022 : D’aprĂšs les donnĂ©es collectĂ©es par le Service statistique ministĂ©riel de la sĂ©curitĂ© intĂ©rieure (SSMSI) et l’Agence française anticorruption (AFA), le tiers de ces atteintes Ă  la probitĂ© relĂšve du dĂ©lit de corruption[4].

Étendue et perceptions

En France, en 2009, tous les principaux investisseurs Ă©trangers et les exportateurs, et plus de 80 % des sondĂ©s cadres dirigeants admettaient « ne pas ĂȘtre sensibilisĂ© du tout » avec l'un des plus importants cadres juridiques dans les affaires internationales. Un cartel constitue un dĂ©lit punissable d'une peine d'emprisonnement et/ou d'amendes. Le personnel et les budgets publics dĂ©diĂ©s Ă  l'application de la rĂ©glementation des valeurs mobiliĂšres est d'un tiers, en France, par rapport au Royaume-Uni en 2008[5].

Rapport de Transparency International

En 2011, l'organisation Transparency International a conclu dans son rapport annuel pour l'annĂ©e 2011, la France n'en fait pas assez pour arrĂȘter la corruption[6]. Selon un sondage rĂ©alisĂ© en octobre 2011 par TNS Sofres, 72 % des Français avaient le sentiment que les politiciens sont corrompus[7].

En 2016, l'indice de perception de la corruption de Transparency International indiquait que la France se situait à la 23e place sur 176 nations évaluées, derriÚre l'Estonie mais devant les Bahamas. En Europe occidentale, la France ne fait mieux que vis-à-vis du Portugal, de l'Italie et de l'Espagne[8].

Perceptions internationales

Le 1er février 2017, alors que l'élection présidentielle française est entachée par deux affaires concernant des soupçons d'emplois fictifs concernant François Fillon (Affaire Fillon) et Marine Le Pen (Affaire des assistants parlementaires du Front national au Parlement européen), le magazine spécialisé Foreign Policy publia un article titré « Why is France so corrupt? »[8].

Le magazine rappelle ainsi que « personne en France ne discute le droit de François Fillon de payer sa femme en tant qu'« assistant » pendant huit ans. Alors que les lois contre le nĂ©potisme amĂ©ricaine interdisent de telles pratiques – Ă  moins d'ĂȘtre prĂ©sident – ce n'est pas le cas en France ». Ainsi, selon Foreign Policy, prĂšs de 115 des 577 dĂ©putĂ©s français emploieraient un membre de leur famille en tant qu'assistant. Cela conduit Foreign Policy a Ă©crire que « la France n'est pas un pays particuliĂšrement corrompu, en terme globaux, mais en Occident, elle reste un cas Ă  part ». De plus, Foreign Policy que cette situation est aggravĂ©e par le fait que cette corruption concerne plus souvent les hauts-niveaux politiques que le milieu policiers car, selon le journal, cela repose sur le « principe français d'une monarchie rĂ©publicaine »[8].

Dans un rapport de l'Union européenne en 2014, la France est critiquée pour son manque de contrÎle des financements de campagne, le manque relatif d'indépendance du judiciaire, et l'absence de volonté politique pour lutter contre la culture de la corruption[8].

Milieux concernés

Élections

L'Ă©tude de la corruption politique en France porte notamment sur :

  • les affaires de Jacques Chirac sur l'utilisation de fonds publics pour sa propre campagne Ă©lectorale Ă  Paris dans les annĂ©es 1990[9].
  • l'enquĂȘte sur le financement de la campagne prĂ©sidentielle de 2007, et la somme de 150 000 euros versĂ©e par Liliane Bettencourt Ă  Nicolas Sarkozy.

Emplois fictifs

Les affaires d'emplois fictifs concernent notamment :

Pots-de-vin

Des enquĂȘtes rĂ©pondant Ă  des suspicions de corruption d'hommes politiques français, notamment Jacques Chirac, Dominique de Villepin et Jean-Marie Le Pen, possiblement liĂ©e Ă  l'ex-prĂ©sident du Gabon Omar Bongo. Bernard GraniĂ© a Ă©tĂ© condamnĂ© pour corruption en septembre 2011 pour avoir reçu 300 000 euros de la part de Provence Recyclage[9].

Secteur de l'Ă©nergie

Alstom a fait l'objet d'une enquĂȘte en France et en Suisse pour avoir rĂ©alisĂ© des paiements irrĂ©guliers de 200 millions de dollars de contrats avec le BrĂ©sil, Ă  ItĂĄ pour une usine hydroĂ©lectrique, Ă  SĂŁo Paulo pour l'extension du mĂ©tro et pour d'autres Ɠuvres majeures au Venezuela, Ă  Singapour et en IndonĂ©sie. Le gouvernement mexicain a pĂ©nalisĂ© Alstom et en 2007, l'autoritĂ© antitrust de la Commission europĂ©enne a condamnĂ© Alstom Ă  une amende de 65 millions d'euros pour fixation des prix avec ses concurrents[5].

Les origines de l'enquĂȘte.

Airbus a Ă©tĂ© impliquĂ© Ă  partir de 2012. "Airbus ran ‘massive’ bribery scheme to win orders" (cf. titre d'un article du Financial Times du )[11].

En France, le site Actu.fr commente longuement une enquĂȘte fouillĂ©e de Mediapart parue le , laquelle cite les conclusions du Parquet national financier et de son homologue britannique, le Serious Fraud Office, pour qui ces commissions Ă©taient l’Ɠuvre du dĂ©partement Strategy and Marketing Organisation (SMO) de l’avionneur, service dirigĂ© par Marwan Lahoud, numĂ©ro 2 d'Airbus, opĂ©rant sur les contrats d’export les plus sensibles: « ConcrĂštement, le service Ă©tait chargĂ© de sĂ©lectionner, de traiter et de rĂ©munĂ©rer l’ensemble des intermĂ©diaires utilisĂ©s pour remporter les marchĂ©s, aussi bien civils que militaires. »[12]

Les premiĂšres affaires Ă©clatent en 2012 aprĂšs une enquĂȘte europĂ©enne sur des contrats militaires en Arabie Saoudite, en Roumanie et en Autriche.

Puis, en 2014, c’est l’affaire du Kazakhgate: « Lors d’une perquisition chez Airbus Helicopters, la justice française dĂ©couvre des mails qui attestent que le groupe a donnĂ© son accord de principe pour verser 12 millions d’euros de pots-de-vin au premier ministre kazakh pour faciliter une vente d’hĂ©licoptĂšres », dĂ©voile Mediapart. Dans cette affaire, les policiers de l’Office central anticorruption (OCLCIFF) ont ensuite perquisitionnĂ© le au matin le domicile de Marwan Lahoud, le numĂ©ro 2 d’Airbus Group[13] - [14].

Toujours en 2014, ce sont cette fois deux intermĂ©diaires turcs qui portent carrĂ©ment plainte contre le groupe pour rĂ©clamer le paiement de commissions dont ils estiment devoir ĂȘtre bĂ©nĂ©ficiaires dans le cadre de la vente de 160 Airbus Ă  la Chine pour 10 milliards de dollars. Selon Mediapart, un feuillet rĂ©digĂ© par Marwan Lahoud, n°2 d’Airbus Groupe, prĂ©voyait que les commissions pouvaient atteindre 250 millions de dollars, selon les deux agents turcs. D’aprĂšs des documents citĂ©s par Mediapart, l’astuce du SMO pour dissimuler ces commissions furent des fausses factures Ă©mises au titre d’un projet fictif de pipeline en mer Caspienne
[15]

Signature d'un accord de reconnaissance des faits de corruption avec le Parquet National Financier, et paiement d'une amende record de 3,6 milliard d'Euros.

En , la presse annonce que les tribunaux français, britannique et amĂ©ricain ont validĂ© les accords passĂ©s en dĂ©but de semaine par Airbus et le Parquet national financier (PNF) français, le Serious Fraud Office (SFO) britannique et le Department of Justice (DOJ) amĂ©ricain en vertu desquels le groupe europĂ©en s'engage Ă  payer des amendes d'un montant total Ă  3,6 milliards d'euros: 2,08 milliards en France dans le cadre d'une convention judiciaire d'intĂ©rĂȘt public (CJIP), 984 millions au Royaume-Uni et 526 millions aux États-Unis[16].

Le PNF, le SFO et le DOJ enquĂȘtaient conjointement depuis 2016 sur les « irrĂ©gularitĂ©s » portant notamment sur les agents commerciaux intervenant dans les contrats de ventes d'avions. Au total, ces irrĂ©gularitĂ©s concernent des contrats conclus en Chine, dans les Émirats Arabes Unis, en CorĂ©e du Sud, au Japon, en Arabie Saoudite, Ă  TaĂŻwan, au Koweit, en Turquie, en Russie au Mexique, au BrĂ©sil, au Vietnam, en Inde, en Colombie et au NĂ©pal. Éric Russo, procureur, a fait Ă©tat des « pratiques massives de corruption au sein de la sociĂ©tĂ© » et a expliquĂ©: " Ces faits ont Ă©tĂ© constituĂ©s par le versement de millions d'euros de commissions ou d'avantages en nature occultes" .

"La plus grosse affaire de corruption que l'Europe ait connue", "Elle a abouti Ă  la plus grosse pĂ©nalitĂ© transactionnelle jamais infligĂ©e par la justice française. L’amende va rapporter Ă  elle seule deux fois plus que les cinq prĂ©cĂ©dentes conventions judiciaires d’intĂ©rĂȘt public(CJIP) conclues depuis leur introduction en droit français par la loi Sapin 2, il y a trois ans." Ă©crit Mediapart[17].

Les faits et pratiques de corruption dans cette affaire sont détaillés dans les accords signés, et notamment celui signé avec le parquet national financier qui est accessible ici. Aujourd'hui dissoute, l'unité du groupe Airbus baptisée Strategy and Marketing Organization (SMO), dirigée par Marwan Lahoud, était au coeur du dossier.

Ces accords permettent de clore les poursuites contre Airbus, mais ne concernent qu'Airbus en tant que personne morale et pas ses dirigeants ou ex-dirigeants. Mediapart cite sur ce point le procureur financier : "Le procureur national financier a indiquĂ© vendredi que l’enquĂȘte allait se poursuivre pour « examiner maintenant les responsabilitĂ©s individuelles » des salariĂ©s et dirigeants de l’avionneur"[18].

Le retentissement de l'affaire en Europe et dans le monde

En Grande Bretagne, le Financial Times publie le , dans un article intitulĂ© Airbus ran 'massive' bribery' schemes to win orders, une photo de lui avec ce titre: « Marwan Lahoud, qui dirigeait l'organisation de stratĂ©gie et de marketing d'Airbus, SMO, une division dĂ©diĂ©e Ă  la sĂ©curisation des ventes sur les marchĂ©s Ă©mergents et au cƓur d'un catalogue d'infractions »[19].

En Allemagne, le Handelsblatt a Ă©crit un long article le sur ces affaires de corruption, et notamment: « Bien que le cas du Kazakhstan soit suffisamment grave, il pourrait y avoir pire Ă  venir alors que les enquĂȘteurs se tournent vers des contrats d'aviation civile avec la Chine et la Turquie. Dans ce dernier cas, M. Lahoud aurait signĂ© 250 millions de dollars de pots-de-vin. Airbus dĂ©ment les allĂ©gations, mais certains disent que le dĂ©part soudain de M. Lahoud de la sociĂ©tĂ© en fĂ©vrier dernier apparaĂźt dĂ©sormais sous un nouveau jour »[20].

Références

  1. « Snapshot of the France Country Profile », Business Anti-Corruption Portal, GAN Integrity Solutions (consulté le )
  2. « 2013 Investment Climate Statement - France », The US Department of State, The US Department of State (consulté le )
  3. Jens Ivo Engels, Silvia Marton et FrĂ©dĂ©ric Monier, « Des politiques blancs comme neige », La vie des idĂ©es,‎ (lire en ligne, consultĂ© le ).
  4. Fabrice Arfi et Antton Rouget, « Corruption, dĂ©tournement de fonds publics, favoritisme : les atteintes Ă  la probitĂ© ont augmentĂ© de 28 % entre 2016 et 2021 », mediapart,‎ (lire en ligne, consultĂ© le )
  5. Rapport sur la Corruption Mondiale De 2009, la Corruption et le Secteur Privé, de Transparency International, août 2009
  6. "La Corruption chien de garde dit que la France pourrait mieux faire", Radio France Internationale, le 6 septembre 2012.
  7. "Mauvaises odeurs", L'Économiste, le 1er octobre 2011.
  8. Zaretsky 2017
  9. Korruptio mÀdÀttÀÀ Ranskaa HS 7.11.2011 B4 (finlandais)
  10. AFP, « L'affaire des chargĂ©s de mission de la ville de Paris », Le Figaro,‎ (lire en ligne)
  11. « Airbus ran ‘massive’ bribery scheme to win orders », sur Financial Times (consultĂ© le ).
  12. « Selon Mediapart, un gigantesque scandale de corruption concerne Airbus », sur actu.fr (consulté le )
  13. Nicolas Beau, « Kazakhgate, nouvelles perquisitions chez Marwan Lahoud », sur Mondafrique, (consulté le )
  14. Yann Philippin, « Les 12 millions d’euros d’Airbus pour le premier ministre kazakh », sur Mediapart (consultĂ© le )
  15. martine orange et Yann Philippin, « Le gigantesque scandale de corruption qui menace Airbus », sur Mediapart (consulté le )
  16. « Corruption : Airbus évite le pire », sur La Tribune (consulté le )
  17. Martine Orange et Yann Philippin, « Airbus paye 3,6 milliards d’euros pour solder douze ans de «corruption massive» », sur Mediapart (consultĂ© le )
  18. Martine Orange et Yann Philippin, « Airbus paye 3,6 milliards d’euros pour solder douze ans de «corruption massive» », sur Mediapart (consultĂ© le )
  19. (en-GB) « FT », sur Financial Times (consulté le )
  20. (en) « Bribery Scandal(s): Airbus rocked by corruption allegations », sur www.handelsblatt.com (consulté le )

Annexes

Articles connexes

Bibliographie

  • Robert Zaretsky, « Why is France so corrupt? », Foreign Policy,‎ (lire en ligne)
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