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Conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg

En informatique thĂ©orique, la conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg (aussi connue sous le nom de conjecture d'Aanderaa-Rosenberg ou conjecture de l'Ă©vasion) est un ensemble de conjectures concernant le nombre de questions de la forme « existe-t-il une arĂȘte entre le sommet et sommet ? » dans un graphe auxquelles il faut rĂ©pondre pour dĂ©terminer si oui ou non un graphe non orientĂ© possĂšde une propriĂ©tĂ© donnĂ©e telle que la planaritĂ© ou le caractĂšre biparti . Elles portent les noms de StĂ„l Aanderaa, Richard M. Karp et Arnold L. Rosenberg. La conjecture affirme que, pour une large classe de propriĂ©tĂ©s, tout algorithme pour dĂ©terminer si un graphe possĂšde une de ces propriĂ©tĂ©s, aussi Ă©laborĂ© soit-il, peut ĂȘtre amenĂ© Ă  examiner toute paire de sommets avant de donner sa rĂ©ponse. Une propriĂ©tĂ© satisfaisant cette conjecture est dite Ă©vasive.

Description

La conjecture d'Aanderaa-Rosenberg stipule que tout algorithme dĂ©terministe doit tester, dans le pire des cas, au moins une fraction constante de toutes les paires de sommets, pour dĂ©terminer une propriĂ©tĂ© de graphe monotone non triviale ; dans ce contexte, une propriĂ©tĂ© est dite monotone si elle reste vraie lorsque des arĂȘtes sont ajoutĂ©es ; ainsi;, la planaritĂ© n'est pas monotone, mais la non-planaritĂ© est monotone. Une version plus forte de cette conjecture, appelĂ©e la conjecture d'Ă©vitement ou conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg, stipule qu'exactement tests sont nĂ©cessaires. Des versions du problĂšme pour les algorithmes randomisĂ©s et les algorithmes quantiques ont Ă©galement Ă©tĂ© formulĂ©es et Ă©tudiĂ©es.

La conjecture dĂ©terministe d'Aanderaa-Rosenberg a Ă©tĂ© prouvĂ©e par Rivest et Vuillemin (1975), mais la conjecture plus forte d'Aanderaa–Karp–Rosenberg est encore non rĂ©solue. De plus, il existe un grand Ă©cart entre la borne infĂ©rieure conjecturĂ©e et la borne infĂ©rieure prouvĂ©e pour la complexitĂ© des requĂȘtes alĂ©atoires et quantiques.

Un exemple

La propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre non vide, c'est-Ă -dire d'avoir au moins une arĂȘte, est une propriĂ©tĂ© monotone, car l'ajout d'une autre arĂȘte Ă  un graphe non vide produit un autre graphe non vide. Il existe un algorithme simple pour tester si un graphe est non vide : on parcourt toutes les paires de sommets, et on teste si une paire est connectĂ©e par une arĂȘte. Si on trouve une arĂȘte, le graphe n'est pas vide, et si le parcours se termine sans avoir trouvĂ© d'arĂȘtes, le graphe est vide. Pour certains graphes, comme les graphes complets, cet algorithme se termine rapidement, sans avoir Ă  tester chaque paire de sommets, mais sur le graphe vide, il faut tester toutes les paires possibles avant de pouvoir conclure. Par consĂ©quent, la complexitĂ© de cet algorithme est en , car dans le pire des cas, l'algorithme doit effectuer essais.

L'algorithme ci-dessus n'est pas la seule mĂ©thode possible pour tester si un graphe n'est pas vide, mais la conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg dit que tout algorithme dĂ©terministe pour tester qu'un graphe n'est pas vide la mĂȘme complexitĂ© de requĂȘtes dans le pire des cas, Ă  savoir . Autrement dit, la propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre non vide est Ă©vasive. Pour cette propriĂ©tĂ©, le rĂ©sultat est facile Ă  prouver directement : si un algorithme n'effectue pas tests, il ne peut pas distinguer le graphe vide d'un graphe qui a une arĂȘte reliant l'une des paires de sommets non testĂ©s, et il donne donc une rĂ©ponse incorrecte sur l'un de ces deux graphes.

DĂ©finitions

Formellement, une propriĂ©tĂ© de graphe est une fonction de la famille de tous les graphes dans l'ensemble telle que deux graphes isomorphes ont la mĂȘme valeur. Par exemple, la propriĂ©tĂ© de contenir au moins un sommet de degrĂ© deux est une telle propriĂ©tĂ© de graphe, mais la propriĂ©tĂ© que le premier des sommets est de degrĂ© deux ne l'est pas, car elle dĂ©pend de l'Ă©tiquetage du graphe (en particulier, cela dĂ©pend de quel sommet est le « premier » sommet). Une propriĂ©tĂ© de graphe est dite non triviale si elle n'attribue pas la mĂȘme valeur Ă  tous les graphes. Par exemple, la propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre vide n'est pas triviale, car le graphe vide possĂšde cette propriĂ©tĂ©, mais pas les graphes non vides. Une propriĂ©tĂ© de graphe est dite monotone si l'ajout d'arĂȘtes ne modifie pas la propriĂ©tĂ©. Par exemple, la propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre non planaire est monotone : un supergraphe (qui contient plus d'arĂȘtes) d'un graphe non planaire est lui-mĂȘme non planaire. En revanche, la propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre un graphe rĂ©gulier n'est pas monotone.

ComplexitĂ© des requĂȘtes

La complexitĂ© dĂ©terministe d'une requĂȘte d'Ă©valuation d'une fonction Ă  bits Ă©tiquetĂ©s est le nombre de bits qui doivent ĂȘtre lus, dans le pire des cas, par un algorithme dĂ©terministe qui Ă©value la fonction. Par exemple, si la fonction prend la valeur 0 lorsque tous les bits sont Ă©gaux Ă  0 et prend la valeur 1 sinon (comme la disjonction logique), alors sa complexitĂ© de requĂȘte dĂ©terministe est exactement : en effet, dans le pire des cas, et quel que soit l'ordre dans lequel on examine les entrĂ©es, il se peut que les premier bits soient Ă©gaux Ă  0, et la valeur de la fonction dĂ©pend alors du dernier bit. Si un algorithme ne lit pas ce bit, la rĂ©ponse peut ĂȘtre incorrecte (de tels arguments sont appelĂ©s arguments de l'adversaire).

La complexitĂ© randomisĂ©e d'Ă©valuation d'une fonction est dĂ©finie de maniĂšre similaire, sauf que l'algorithme peut ĂȘtre randomisĂ©. En d'autres termes, on peut lancer un dĂ© et utiliser le rĂ©sultat de ces lancers pour dĂ©cider quels bits interroger et dans quel ordre. Cependant, l'algorithme randomisĂ© doit toujours produire la bonne rĂ©ponse pour toutes les entrĂ©es. Ces algorithmes sont les algorithmes de Las Vegas ; les algorithmes de Monte Carlo, sont autorisĂ©s Ă  faire des erreurs. La complexitĂ© des requĂȘtes alĂ©atoire peut ĂȘtre dĂ©finie pour les algorithmes de Las Vegas et de Monte Carlo, mais la version alĂ©atoire de la conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg concerne la complexitĂ© des requĂȘtes Ă  la Las Vegas.

La complexitĂ© des requĂȘtes quantiques est la gĂ©nĂ©ralisation naturelle de la complexitĂ© des requĂȘtes alĂ©atoires, permettant des requĂȘtes et des rĂ©ponses quantiques. La complexitĂ© des requĂȘtes quantiques peut aussi bien ĂȘtre dĂ©finie pour les algorithmes de Monte Carlo ou algorithmes de Las Vegas.

Dans le contexte de la conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg, la fonction Ă  Ă©valuer est une propriĂ©tĂ© de graphe, et l'entrĂ©e peut ĂȘtre vue comme une chaĂźne binaire de taille , dĂ©crivant pour chaque paire de sommets s'il existe ou non une arĂȘte avec cette paire comme extrĂ©mitĂ©s. La complexitĂ© de la requĂȘte de toute fonction sur cette entrĂ©e est au plus , car un algorithme qui fait les requĂȘtes peut lire l'intĂ©gralitĂ© de l'entrĂ©e et dĂ©terminer complĂštement le graphe d'entrĂ©e.

ComplexitĂ© dĂ©terministe des requĂȘtes

Pour les algorithmes dĂ©terministes, Rosenberg (1973) a conjecturĂ© que pour toutes les propriĂ©tĂ©s de graphe non triviales sur sommets, dĂ©cider si un graphe possĂšde cette propriĂ©tĂ© a une complexitĂ© en . La condition de non-trivialitĂ© est requise pour Ă©viter des questions triviales telles que « est-ce un graphe ? » auxquelles on peut rĂ©pondre sans mĂȘme poser une question.

Un graphe scorpion. L'un des trois sommets rouges du chemin est adjacent Ă  tous les autres sommets et les deux autres sommets rouges n'ont pas d'autres adjacences.

La conjecture a Ă©tĂ© rĂ©futĂ©e par Aanderaa, qui a prĂ©sentĂ© une propriĂ©tĂ© de graphe orientĂ© (la propriĂ©tĂ© de « possĂ©der un sommet puits ») qui ne nĂ©cessitait que requĂȘtes Ă  tester. Dans ce contexte, un puits dans un graphe orientĂ© est un sommet de degrĂ© entrant et de degrĂ© sortant nul. L'existence d'un puits peut ĂȘtre testĂ©e en moins de requĂȘtes[1]. Une autre propriĂ©tĂ© de graphes non orientĂ©s qui peut Ă©galement ĂȘtre testĂ©e en requĂȘtes est la propriĂ©tĂ© d'ĂȘtre un graphe scorpion, propriĂ©tĂ© dĂ©crite pour la premiĂšre fois dans Best, van Emde Boas et Lenstra (1974). Un graphe scorpion est un graphe contenant un chemin Ă  trois sommets, de sorte qu'une extrĂ©mitĂ© du chemin est connectĂ©e Ă  tous les sommets restants, tandis que les deux autres sommets du chemin n'ont pas d'arĂȘtes incidentes autres que celles du chemin.

Aanderaa et Rosenberg ont ensuite formulĂ© une nouvelle conjecture (dite la conjecture d'Aanderaa-Rosenberg) qui affirme que dĂ©cider si un graphe possĂšde une propriĂ©tĂ© de graphe monotone non triviale nĂ©cessite requĂȘtes. Cette conjecture a Ă©tĂ© rĂ©solue positivement par Rivest et Vuillemin (1975) qui montrent qu'au moins requĂȘtes sont nĂ©cessaires pour tester toute propriĂ©tĂ© de graphe monotone non triviale. La borne a Ă©tĂ© amĂ©liorĂ©e en par Kleitman et Kwiatkowski (1980), puis en (pour tout ) par Kahn, Saks et Sturtevant (1984), en par Korneffel et Triesch (2010), et en par Scheidweiler et Triesch (2013).

Richard Karp a Ă©noncĂ© une conjecture la plus forte, appelĂ©e la conjecture d'Ă©vitement ou la conjecture d'Aanderaa-Karp-Rosenberg, selon laquelle « toute propriĂ©tĂ© de graphe monotone non triviale pour les graphes sur sommets est Ă©vasive ». Une propriĂ©tĂ© est dite Ă©vasive si dĂ©terminer qu'un graphe donnĂ© possĂšde cette propriĂ©tĂ© peut nĂ©cessiter toutes les requĂȘtes possibles. Cette conjecture dit que le meilleur algorithme pour tester une propriĂ©tĂ© monotone non triviale doit (dans le pire des cas) interroger toutes les arĂȘtes possibles. Cette conjecture est encore ouverte, bien que plusieurs propriĂ©tĂ©s spĂ©ciales de graphes se soient rĂ©vĂ©lĂ©es Ă©vasives pour tous . La conjecture est dĂ©montrĂ©e dans le cas oĂč est une puissance premiĂšre par Kahn, Saks et Sturtevant (1984) en utilisant une approche topologique. La conjecture a Ă©galement Ă©tĂ© prouvĂ©e pour toutes les propriĂ©tĂ©s monotones non triviales sur les graphes bipartis par Yao (1988). Il a Ă©galement Ă©tĂ© dĂ©montrĂ© que les propriĂ©tĂ©s fermĂ©es par passage aux mineurs sont Ă©vasives pour les grandes valeurs de (Chakrabarti, Khot et Shi 2001).

Dans l'article de Kahn, Saks et Sturtevant (1984), la conjecture a également été généralisée aux propriétés de fonctions autres que celles portant sur les graphes, en supposant que toute fonction monotone non triviale faiblement symétrique est évasive. Ce cas est également résolu lorsque est une puissance primordiale par Lovåsz et Young (2002).

ComplexitĂ© des requĂȘtes randomisĂ©es

Richard Karp a Ă©galement conjecturĂ© que requĂȘtes sont nĂ©cessaires pour tester des propriĂ©tĂ©s monotones non triviales mĂȘme si des algorithmes randomisĂ©s sont autorisĂ©s. Aucune propriĂ©tĂ© monotone non triviale n'est connue qui nĂ©cessite moins de requĂȘtes. Une borne infĂ©rieure linĂ©aire (c'est-Ă -dire en ) sur toutes les propriĂ©tĂ©s monotones dĂ©coule d'une relation trĂšs gĂ©nĂ©rale entre les complexitĂ©s des requĂȘtes randomisĂ©es et dĂ©terministes. La premiĂšre borne infĂ©rieure super-linĂ©aire pour toutes les propriĂ©tĂ©s monotones a Ă©tĂ© donnĂ©e par Yao (1991), qui a montrĂ© que requĂȘtes sont nĂ©cessaires. Cette borne a Ă©tĂ© amĂ©liorĂ©e par King (1991) en , puis par Hajnal (1991) en . La meilleure borne infĂ©rieure connue en 2007 (parmi les bornes valables pour toutes les propriĂ©tĂ©s monotones) est , donnĂ©e par Chakrabarti et Khot (2007).

Certains rĂ©sultats donnent des bornes infĂ©rieures qui sont dĂ©terminĂ©es par ce qui est appelĂ© la probabilitĂ© critique de la propriĂ©tĂ© de graphe monotone considĂ©rĂ©e. La probabilitĂ© critique est dĂ©finie comme Ă©tant le nombre unique dans l'intervalle tel qu'un graphe alĂ©atoire , obtenu en choisissant alĂ©atoirement si chaque arĂȘte existe, indĂ©pendamment des autres arĂȘtes, avec probabilitĂ© par arĂȘte, possĂšde cette propriĂ©tĂ© avec une probabilitĂ© Ă©gale Ă  . Friedgut, Kahn et Wigderson (2002) ont montrĂ© que toute propriĂ©tĂ© monotone avec probabilitĂ© critique requiert

requĂȘtes. Pour le mĂȘme problĂšme, O'Donnell et al. (2005) ont montrĂ© une borne infĂ©rieure en .

Comme dans le cas déterministe, il existe de nombreuses propriétés particuliÚres pour lesquelles une borne inférieure en est connue. De plus, des bornes inférieures meilleures sont connues pour plusieurs classes de propriétés de graphe. Par exemple, pour tester si le graphe a un sous-graphe isomorphe à un graphe donné (le problÚme de l'isomorphisme de sous-graphe), la meilleure borne inférieure connue est , due à Gröger (1992).

ComplexitĂ© des requĂȘtes quantiques

Pour la complexitĂ© des requĂȘtes quantiques Ă  erreur bornĂ©e, la meilleure borne infĂ©rieure connue est , comme l'a observĂ© Andrew Yao. Elle est obtenue en combinant la borne infĂ©rieure randomisĂ©e avec la mĂ©thode de l'adversaire quantique. La meilleure borne infĂ©rieure possible que l'on puisse espĂ©rer atteindre est , contrairement au cas classique, grĂące Ă  l'algorithme de Grover qui donne une algorithme en requĂȘtes pour tester la propriĂ©tĂ© monotone d'ĂȘtre une graphe non vide. Comme dans le cas dĂ©terministe et randomisĂ©, certaines propriĂ©tĂ©s sont connues pour avoir une borne infĂ©rieure en , par exemple d'ĂȘtre non vide (ce qui dĂ©coule de l'optimalitĂ© de l'algorithme de Grover) et la propriĂ©tĂ© de contenir un triangle. Certaines propriĂ©tĂ©s de graphes sont connues pour avoir une borne infĂ©rieure en , et mĂȘme certaines propriĂ©tĂ©s avec une borne infĂ©rieure en . Par exemple, la propriĂ©tĂ© monotone de la non planaritĂ© nĂ©cessite requĂȘtes[2] et la propriĂ©tĂ© monotone de contenir plus de la moitiĂ© du nombre possible d'arĂȘtes (Ă©galement appelĂ©e la fonction majoritaire) nĂ©cessite requĂȘtes[3].

Notes et références

(en) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de l’article de WikipĂ©dia en anglais intitulĂ© « Aanderaa–Karp–Rosenberg conjecture » (voir la liste des auteurs).

Références

Bibliographie complémentaire

Liens externes

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