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Colivă

Kollyva, Koliva

Kollyva aux raisins secs.

La kollyva, en usage rituel en GrĂšce depuis l’antiquitĂ© jusqu’à nos jours, est une prĂ©paration traditionnelle exclusivement faite pour les enterrements ou les rituels mortuaires des orthodoxes, Ă©galement dĂ©nommĂ©e colivă en Roumanie et Moldavie, koliva en Serbie, MontĂ©nĂ©gro, MacĂ©doine du Nord et Bulgarie et koutia en Ukraine, BiĂ©lorussie et Russie. C’est une prĂ©paration Ă  base de blĂ© concassĂ© et bouilli, mĂ©langĂ© avec des noix, du miel, des zestes d’orange, des raisins secs et de la cannelle. Elle est partagĂ©e seulement aprĂšs le service mĂ©moriel en l’honneur d’un dĂ©funt, ou au cours des funĂ©railles, aprĂšs avoir Ă©tĂ© bĂ©nie par un prĂȘtre orthodoxe.

Histoire

Des prĂ©parations du mĂȘme type que la kollyva sont archĂ©ologiquement attestĂ©es au nĂ©olithique : l’alimentation quotidienne Ă  l’époque semble dominĂ©e par des bouillies de cĂ©rĂ©ales mĂ©langĂ©es Ă  des lĂ©gumineux ou des fruits. DĂ©signĂ©es par le mĂȘme mot en grec, en roumain et dans les langues slaves, les kollyves sont obtenues aprĂšs la mise en bouillie des grains de blĂ© lĂ©gĂšrement broyĂ©s, additionnĂ©e de cerneaux de noix, de sucre ou de miel. Cette bouillie de graines offerte aux funĂ©railles et aux fĂȘtes des morts, rappelle les panspermies ; elle Ă©tait dĂ©jĂ  populaire dans l'antiquitĂ© grecque[1]. Mircea Eliade signale que le nom kollyves et l’offrande sont attestĂ©s en GrĂšce antique mais l’origine est probablement plus ancienne, comme en tĂ©moignent les rĂ©sidus des vases du cimetiĂšre nĂ©olithique du Dipylon[2].

Cependant, la lĂ©gende chrĂ©tienne veut que les kollyves aient Ă©tĂ© inventĂ©es par saint ThĂ©odore Tiron. Selon cette tradition, l’empereur Julien (361-363), pour forcer les chrĂ©tiens Ă  accepter le culte impĂ©rial, aurait ordonnĂ© au gouverneur de Constantinople d’arroser les aliments dans les marchĂ©s avec du sang des victimes sacrifiĂ©es aux dieux romains, durant la premiĂšre semaine du CarĂȘme. Saint ThĂ©odore aurait alors dit aux chrĂ©tiens de ne rien acheter dans les marchĂ©s, mais plutĂŽt de manger du blĂ© cuit avec du miel.

Étymologie

Le nom commun fĂ©minin roumain colivă (singulier), colive (pluriel) vient du terme du grec, τα ÎșόλυÎČα, qui est un pluriel neutre attestĂ© chez Aristophane[3] oĂč il dĂ©signe une sorte de gĂąteau sucrĂ© au miel ou aux fruits. Ce terme semble apparentĂ© au grec ᜁ ÎșόλλυÎČÎżÏ‚ / kollubos : petite piĂšce de monnaie. Une telle Ă©volution de dons de friandises en monnaie, est perceptible de nos jours dans les traditions balkaniques et notamment roumaines lors des colinde, les quĂȘtes d’enfants, particuliĂšrement Ă  NoĂ«l.

Croyance

PrĂȘtres orthodoxes macĂ©doniens bĂ©nissant des koliva en 1916.

En Roumanie, Moldavie et plus largement dans les Balkans, il existe une offrande cĂ©rĂ©aliĂšre liĂ©e au culte des morts. C'est le cas des colive, mais aussi des sfințișori dont la fĂȘte a lieu le 9 mars en mĂ©moire des quarante martyrs de SĂ©baste, ou encore des colaci, que l’on offre aux visiteurs qui viennent saluer le mort, lors de la veillĂ©e funĂšbre.

Selon les prescriptions liturgiques orthodoxes, « le blĂ© bouilli dont se composent les kollyves symbolise la part morte de la nature humaine et la part de rĂ©surrection des morts ». Cette interprĂ©tation se rĂ©fĂšre Ă  la parole du Christ selon laquelle « le grain de blĂ© que l’on jette dans la terre, s’il ne pourrit pas, reste seul, et s’il pourrit, amĂšne beaucoup de fruits »[4].

Préparation et consommation

Sa prĂ©paration peut diffĂ©rer selon les traditions, s’étalant parfois sur plusieurs jours. Certaines traditions veulent que le blĂ© soit lavĂ© neuf fois Ă  l’eau froide et deux fois Ă  l’eau chaude. AprĂšs avoir Ă©tĂ© bouilli, le blĂ© est mĂ©langĂ© Ă  des raisins secs et Ă  des Ă©pices (cumin et cannelle en poudre), puis dĂ©corĂ© sur le dessus avec du sucre glace. On y dessine en gĂ©nĂ©ral une croix avec des dragĂ©es blanches ou du cacao. On y rajoute parfois des bonbons colorĂ©s pour rendre l’aspect plus festif. Pendant la durĂ©e de l'office commĂ©morant les morts oĂč la coliva est bĂ©nite, on place en gĂ©nĂ©ral une bougie sur la coliva. Bien qu’il n’existe pas d’interdiction, on ne prĂ©pare pas ce plat Ă  un autre moment vu sa connotation symbolique liĂ©e Ă  la fĂȘte mortuaire.

En Roumanie et Moldavie, de nos jours on peut acheter aux paroisses des colive toutes faites sous cellophane : elles sont prĂ©parĂ©es sur commande par les sƓurs des monastĂšres orthodoxes les plus proches. La colivă doit ĂȘtre consommĂ©e rapidement pour Ă©viter tout risque de fermentation mais se conserve en gĂ©nĂ©ral bien au rĂ©frigĂ©rateur.

Notes et références

  1. Louis Gernet et André Boulanger, Le Génie grec dans la religion, Albin Michel, 1970, p. 59.
  2. (fr) Dan Monah, « DĂ©couvertes de pains et de restes d’aliments cĂ©rĂ©aliers en Europe de l’est et Europe centrale », sur civilisations.revues.org (consultĂ© le )
  3. Aristophane, Ploutos, 768.
  4. (en) « Jean 12:24 », sur Bible browser (consulté le )

Liens externes

Saint Théodore et la colivă

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