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Cinéma bis

Le cinéma bis désigne des films réalisés en reprenant des recettes déjà éprouvées, mais tournés avec des moyens réduits et destinés au public populaire. Le cinéma bis fait référence généralement à un cinéma de genre qui recouvre l’ensemble de la série B et de la série Z, mais également le cinéma d’exploitation et plus généralement les films destinés naguère au circuit des salles de quartier ou des drive in.

Histoire et classification

Dans les années 1950, l’influence de la critique de film, exprimée notamment par des revues comme les Cahiers du cinéma ou Positif, la politique des auteurs et un phénomène comme la Nouvelle Vague provoque une analyse et même une sur-analyse des films. L’essor des ciné-clubs, des cinéphiles et l’importance accordée aux auteurs fait sortir de l’oubli des historiens des cinéastes dont le travail va modifier l’orientation du cinéma de l’époque. Un regard neuf est posé sur ce dernier. Si bien qu’à la fin de la décennie, le cinéma européen est en pleine mutation et profite de l’essoufflement momentané du cinéma américain, dont Hollywood est en pleine crise (Nouvelles lois anti-trust, arrivée de la télévision…) pour remplacer la série B « authentique » (moyen-métrage bon marché destiné à être présenté avant le film principal dit A) et la baisse de production des films de genres populaires aux États-Unis. Les pays européens se lancent alors dans le cinéma d’aventure qui gagne en popularité. À cette occasion, le film policier, le péplum, le western avec Sergio Leone en Italie et le film d’espionnage refont surface. C’est l’émergence des « indépendants ». Alors que l’âge d’or du cinéma bis européen se termine au début des années 1970, le jeune cinéma américain, issu des indépendants, commence à émerger et donne naissance au « Nouvel Hollywood ». Érotisme, et pornographie ont du succès sur le marché. Ne subsistent alors que quelques genres européens, comme le giallo, les films érotiques et les films d’horreur. Ce qu’on appelle le « cinéma de quartier » touche à sa fin. De nos jours, des réalisateurs comme Christophe Gans ou Quentin Tarantino tentent de perpétuer une certaine tradition en important dans le cinéma mainstream les codes du cinéma bis, mais de nos jours, le cinéma bis (ou tout du moins son héritage) est toujours visible, notamment dans les cinémathèques, qui le diffusent régulièrement, sur certaines chaînes câblées pendant les heures creuses ainsi que via des DVD à bas prix édités de manière plus ou moins soignée.

Invention du terme

On ne peut déterminer clairement qui a utilisé le terme de « cinéma bis » pour la 1re fois (au contraire de celui de « documentaire », de « Nouvelle Vague » ou du « Néo-Réalisme »), mais on peut dire que la 1re revue à s’y intéresser est Présence du cinéma en décembre 1960.

Un cinéma différent

L’émergence de la notion du « bis » est liée à une volonté de réhabiliter des films, des cinéastes oubliés. Cela passe d’abord par le retour de genres méprisés et considérés comme décadents, voire éteints : le Fantastique, l’Érotisme… On peut dire que cette notion regroupe des films répondant à des critères comme : être des films de genre, à caractère populaire et commercial (fantastique, péplum, aventure, western, etc.) être des films à budget très limité, de qualité inférieure par rapport au modèle économique dominant et être méprisé par les instances de légitimation sociales dominantes : critiques, historiens, etc.

Genres

Le cinéma bis, bien que difficile à définir, s’articule autour du système de genre cinématographique, qui permet au spectateur de comprendre rien qu’en voyant l’affiche du film ou son nom ce qu’il s’apprête à voir. Ces films ne sont pas a priori choisis par le public pour leur réalisateur ou leur distribution mais pour le genre auquel ils appartiennent. De par son caractère à la fois rétro et innovant mais surtout intemporel, le cinéma bis porte en son sein des genres de films éprouvés et surreprésentés ainsi que des genres inédits ou propres au cinéma de faible budget.

Fantastique

  • Post-apocalyptique : aussi appelĂ© « Post Nuke », ces films prennent place dans un contexte post-apocalyptique qui fait souvent suite Ă  un cataclysme nuclĂ©aire. Ce genre, popularisĂ© par Mad Max et sa suite, fut produit en masse en Italie et aux Philippines, et se reconnait par ses dĂ©cors d’usine dĂ©saffectĂ©, de ruines sableuses et de terrains vagues.
  • Space opera : dans la droite lignĂ©e des Star Wars et Star Trek, les space opera proposent des voyages et aventures galactiques.
  • Robots/cyborgs/androĂŻdes : Sous-genre très reprĂ©sentĂ©, notamment dans les films de SĂ©rie B, lancĂ© par Terminator et RoboCop, caractĂ©risĂ© par la prĂ©sence d’un hĂ©ros ou anti-hĂ©ros mi-homme mi-machine (cyborg), totalement robotisĂ© ou robotique Ă  forme humaine (androĂŻde).
  • Anticipation : Le film d’anticipation propose une hypothèse sur l’avenir du monde et est fortement reprĂ©sentĂ© dans le cinĂ©ma bis, de par la souplesse crĂ©ative et budgĂ©taire qu’il permet.
  • PrĂ©historique : habituellement sujet de documentaire, la prĂ©histoire est Ă  l’honneur dans de nombreuses SĂ©rie B, qui nous proposent des dinosaures et autres homo sapiens intemporels.

Horreur

  • Zombie : de tous les sous-genres du cinĂ©ma bis, c’est celui qui est le plus reprĂ©sentĂ©. Surfant sur le succès des films de George A. Romero, de nombreux rĂ©alisateurs de SĂ©rie B s’emparèrent de la crĂ©ature zombie, facile Ă  crĂ©er, ne nĂ©cessitant pas d’effets spĂ©ciaux autre que du maquillage, ni un grand jeu d’acteur. Tous les types de zombies ont ainsi Ă©tĂ© abordĂ©s : zombie lent, rapide, stupide, mesquin, joueurs voire pervers.
  • Gore : le film gore fait la part belle au sang et aux dĂ©chiquetages organiques dans de « joyeuses Â» scènes de mort. Très populaire en SĂ©rie B.
  • Monstres gĂ©ants : genre popularisĂ© par les kaiju-eiga, films japonais dont Godzilla fait partie, les films de monstres donnent la vedette Ă  des crĂ©atures gigantesques qui rasent tout sur leur passage, ou Ă  des animaux hypertrophiĂ©s mangeurs d’hommes.
  • Cannibales : sous-genre inspirĂ© du succès de Cannibal Holocaust qui met en scène des individus ou tribus de cannibales aux prises avec des hĂ©ros ethnologues.
  • Épouvante : sous-genre rĂ©servĂ© aux crĂ©atures tels que les fantĂ´mes, vampires, loup-garou ou encore momie, très reprĂ©sentĂ© en SĂ©rie B.
  • Giallo : film aux influences policier/gore, le Giallo est un genre presque exclusivement italien, dĂ©rivĂ© des romans low cost du mĂŞme nom, qui dĂ©crit des histoires de meurtres sanglants souvent perpĂ©tuĂ©s contre de jolies jeunes femmes.
  • Slasher : ce sous-genre fait part belle aux tueurs psychopathes, aux adeptes de la tronçonneuse et de la machette. Très reprĂ©sentĂ© en sĂ©rie B, le slasher est un film gore et prĂ©visible qui offre au mĂ©chant l’occasion d’étriper de jeunes Ă©tudiants en vacances.

Érotique

  • Nazisploitation : Les films appartenant Ă  cette catĂ©gorie ont la particularitĂ© d’être intĂ©gralement bâtis sur l’exhibition des tares des nazis, notamment sous leur jour sexuel. Les films de nazisploitation ont pour la plupart Ă©tĂ© rĂ©alisĂ©s dans les annĂ©es 1970, principalement en Italie mais Ă©galement dans d’autres pays comme les États-Unis. Le genre se caractĂ©rise par une propension Ă  vouloir choquer le public par tous les moyens, par la description de sĂ©vices grand-guignolesques, scènes sado-masochistes et tortures de femmes nues.
  • Nunsploitation : sous-genre très codifiĂ© et principalement italien, qui met en scène des religieuses expĂ©rimentant les plaisirs de la chair.
  • Sexy comĂ©dies : comĂ©die mettant en scène des adolescents ou jeunes adultes, gĂ©nĂ©ralement dans le cadre de vacances en bord de mer, oĂą le sexe est abordĂ© de façon naĂŻve ou trash, la comĂ©die reposant sur les quiproquos et les gags qui prĂ©cèdent ou font suite Ă  l’acte sexuel.

Épique

  • Heroic fantasy : mondes imaginaires et guerriers mystiques. Conan le Barbare a servi de tremplin Ă  un genre très apprĂ©ciĂ© et produit en Italie.
  • Peplum : grandes fresques Ă©piques avec batailles historiques et nombreux figurants. Genre peu reprĂ©sentĂ© en sĂ©rie B.
  • Aventure : les pĂ©ripĂ©ties mouvementĂ©es d’un hĂ©ros souvent très stĂ©rĂ©otypĂ©.

Action

  • Guerre : genre très reprĂ©sentĂ© car peu onĂ©reux et toujours en vogue.
  • Super hĂ©ros : genre très reprĂ©sentĂ©, notamment chez les Italiens et les Turcs.
  • Espionnage : La saga James Bond a donnĂ© des ailes Ă  beaucoup de producteurs, qui se sont appliquĂ©s depuis Ă  Ă©prouver au maximum la recette de ce genre.
  • Arts martiaux : Composante essentiel de la SĂ©rie B, aussi appelĂ© Bruceploitation en rĂ©fĂ©rence aux films de Bruce Lee, le film d’art martiaux permet Ă  un hĂ©ros, asiatique ou non, de combattre de nombreux antagonistes, le film trouvant son intĂ©rĂŞt dans les chorĂ©graphies de combats, omniprĂ©sentes.
  • Western :
  • CarcĂ©ral : sous-genre populaire auprès des producteurs car facile Ă  tourner (huis clos), le film carcĂ©ral prĂ©sente en gĂ©nĂ©ral une hĂ©roĂŻne qui va devoir composer avec son nouvel environnement pour tenter la grande Ă©vasion ou tout simplement survivre Ă  la torture et aux bassesses.

Comédie

  • ComĂ©die musicale : le genre de la comĂ©die musicale englobe des centaines de productions allant du classic rock au disco, mais aussi plus loin avec le groovy psychĂ©dĂ©lique.

Un cinéma subversif

Le cinéma bis serait un cinéma qui échappe à l’embourgeoisement en ce qu’il évince le goût de l’ordre, du confort et du respect des conventions filmiques. Il offre un spectacle immoral et une exploitation décomplexée des procédés et clichés. La multiplicité des genres et sous-genres, l’originalité des modes de production excluent d’emblée toute approche structurelle. En raison de son approche subversive, il est reproché tout à la fois à un même type de cinéma d’être l’instrument d’une subversion plus ou moins violente des codes établis au sein d’un ordre culturel donné, mais aussi de contribuer au conservatisme social par la transformation du spectateur en un sujet « non pensant » et, partant de là, réceptif à toutes sortes d’idéologies. Il reste que le cinéma bis agresse (volontairement ou par maladresse) le principe de l’effet de réalité en simplifiant de manière outrancière les situations, et qui affaiblit considérablement la place du récit filmique. C’est un cinéma incitant à une consommation nonchalante de la part du spectateur et fonctionnant essentiellement au moyen de leurres pour relancer la curiosité. En d’autres termes, dans le cinéma bis, la séquence primerait le récit, non pas par choix, mais en raison de facteurs multiples tenant au genre (le cinéma pornographique ou le film de karaté par exemple), à la pauvreté des moyens financiers et techniques investis dans le film, aux conditions de tournage ou à la médiocrité de certains. Il a alimenté une sorte de monde parallèle du cinéma dans lequel il a ses propres circuits de diffusions, ses vedettes, son public et sa presse spécialisée.

Aspects techniques

Faibles moyens et budget

Le cinéma bis, qui inclut des films de séries B et série Z ainsi que du cinéma d’exploitation s’est d’abord construit autour du concept des cinémas de quartier, très implantés aux États-Unis, en France et en Italie à partir des années 1950. Ces cinémas proposaient alors deux films pour le prix d’un, et attiraient un certain public, ce qui permit aux industries du « bis » de se développer. Aujourd’hui, le cinéma bis n’existe que grâce à des passionnés ayant acquis une certaine notoriété (comme le réalisateur Italien Dario Argento) pour un public de passionnés, ainsi que grâce à des amateurs de nanars qui font redécouvrir des œuvres restées jusque-là confidentielles, leur donnant parfois un statut de culte. De tous temps, il y eut pour le bis cette obligation, mais parfois volonté, du petit budget : le public restreint et la double affiche obligeant les producteurs à une quête du moindre coût. Cela se traduit par des acteurs débutants voir bénévoles, l’absence de matériel d’envergure (comme les dolly ou les chariots) et de faibles budgets pour les décors, costumes et effets spéciaux (détail flagrant dans les films de Science Fiction). Le « bis » use de certains artifices pour compenser la faiblesse budgétaire, dont certains sont facilement reconnaissables :

  • plan identique montĂ© deux fois ;
  • utilisation d’écrans verts pour de nombreux plans en extĂ©rieur ;
  • utilisation d’un mĂŞme entrepĂ´t pour toutes les scènes intĂ©rieures ;
  • surenchère de plan serrĂ© sur le(s) visage(s) des acteurs regardant au loin, qui permet de traiter l’objet regardĂ© dans un autre plan ou via effets spĂ©ciaux ;
  • peu de plans-sĂ©quences.

Des techniques cinématographiques inventives

Techniquement limité en matériel de pointe, le cinéma bis fait part belle à l’inventivité concernant les techniques filmiques. Sam Raimi, dans son premier film Evil Dead, a popularisé une technique de prise de vue en travelling dynamique appelée « Shakycam ». À l’aide d’une mobylette, le caméraman peut évoluer rapidement tout en ayant à sa portée une multitude d’angles de vue, plongée et contreplongée compris. Cette technique demande une grande dextérité, mais aboutit à des travelling particulièrement rythmés, et à des plans séquences déjantés.

Festivals

Éditeurs de DVD francophones spécialisés dans le bis

Notes et références

Voir aussi

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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