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Cave Ă  Rochefort

La cave à Rochefort ou grotte Rochefort[1] est un site préhistorique appartenant au groupe des grottes de Saulges. Elle est située sur la commune de Saint-Pierre-sur-Erve dans la Mayenne. Elle a livré des vestiges de différentes époques mais est surtout connue pour la présence de Solutréen (Paléolithique supérieur).

Cave Ă  Rochefort
Entrée de la grotte Rochefort.
Localisation
Coordonnées
47° 59′ 38″ N, 0° 24′ 10″ O
Pays
Région française|Région
DĂ©partement
Vallée
Vallée de l'Erve
Localité voisine
Caractéristiques
Type
Altitude de l'entrée
65 m
Longueur connue
250 m
PĂ©riode de formation
Occupation humaine
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Historique des explorations

La grotte est connue depuis longtemps jusqu'Ă  la salle des Troglodytes, Ă  laquelle on accède par une galerie de 20 mètres de long sur 2 Ă  3 mètres de large. Cette grande salle a Ă©tĂ© occupĂ©e par les populations prĂ©historiques, comme l'ont montrĂ© les fouilles pratiquĂ©es dès 1873 et surtout celles engagĂ©es depuis 2001. Elle s'Ă©tend sur 25 mètres de long et 8 mètres de large ; la tempĂ©rature y est constante Ă  13 °C.

De 1879 Ă  1882, Arsène Roblot, propriĂ©taire de la grotte, dĂ©gage un tunnel latĂ©ral, d'une longueur d'une vingtaine de mètres. Le , accompagnĂ© d'un garçon de ferme, il atteint l'extrĂ©mitĂ© du tunnel et, Ă  plus de 70 ans, descend seul avec une corde Ă  nĹ“uds dans le gouffre de 13 mètres, dĂ©couvrant de nouvelles salles et un petit lac souterrain. Ingratitude du sort, seul le nom de LĂ©veillĂ©, un de ses locataires qui le suivra plus tard dans son exploration, restera attachĂ© au tunnel d'accès ("couloir LĂ©veillĂ©").

Cet abîme, aujourd’hui équipé d'escaliers et de balcons de repos, offre un spectacle remarquable de marmites d'érosion et de formes intéressantes, en particulier une « main de géant à six doigts », pendant à mi-hauteur de la paroi.

Ă€ l'extrĂ©mitĂ© d'une salle, le lac est de dimensions modestes : 7 Ă  8 mètres de long, 2 Ă  4 mètres de large ; sa profondeur est de plus de 10 mètres. L'eau y est d'une clartĂ© et d'une transparence remarquables. En 1967, une Ă©quipe de plongĂ©e souterraine de Namur (Belgique), dirigĂ©e par Norbert Casteret, plonge dans une spacieuse salle immergĂ©e avant d'ĂŞtre arrĂŞtĂ©e par les parois Ă  10 mètres de profondeur, sans parvenir Ă  trouver un siphon dĂ©bouchant sur de nouvelles salles. Elle dĂ©couvre cependant des stalagmites immergĂ©es sous les parois, Ă  une dizaine de mètres sous l'eau.

Découvertes archéologiques

Dans la cave à Rochefort, les premières véritables fouilles scientifiques, dirigées par Stéphan Hinguant, ont débuté en 2001 par une évaluation archéologique afin d’estimer le potentiel de la cavité. La réputation de cette grotte sur le plan archéologique ainsi que son ouverture au public depuis des décennies ne laissaient, en effet, guère d’espoir quant à la présence de couches paléolithiques encore en place. Il convenait également d’en vérifier l’importance du remplissage. Les excavations d’Ida de Boxberg ont ainsi été identifiées et, contre toute attente, s’avèrent être d’extension très limitée laissant de larges zones encore exploitables selon les méthodes actuelles.

Parmi les nombreux vestiges collectés dans les déblais abandonnés par les premiers fouilleurs, quelques objets remarquables sont à signaler notamment des fragments de pointes foliacées, façonnées sur silex ou sur grès lustré. On note la présence de nombreuses esquilles de débitage et de façonnage de ces « feuilles de laurier » qui indiquent que les solutréens ont exercé des activités de taille dans la grotte elle-même. La possible présence de véritables sols d’occupations de cette période était donc envisageable et les fouilles proprement dites ont ainsi pu reprendre en 2002.

  • Feuilles de laurier et plaquette au bouquetin du SolutrĂ©en exposĂ©es au musĂ©e de la prĂ©histoire de ThorignĂ©-en-charnie
  • Feuille de laurier solutrĂ©enne en silex
    Feuille de laurier solutréenne en silex
  • Feuilles de laurier en silex et en grès lustrĂ©
    Feuilles de laurier en silex et en grès lustré
  • Plaquette de grès au bouquetin de la grotte Rochefort
    Plaquette de grès au bouquetin de la grotte Rochefort

D'importantes découvertes ont été faites depuis 2006 dans les caves à Margot (gravures) et de Rochefort : elles comprennent notamment à Rochefort des ossements d'ours et de loup, un fragment de bassin d'enfant et une plaquette de grès gravée représentant un bouquetin au pelage hérissé vu de profil[2].

Les niveaux supérieurs

Depuis cette date, l’ensemble de la surface de la salle des Troglodytes a été nettoyé et les horizons superficiels identifiés. La fouille de ces niveaux, attribués aux périodes historiques, protohistoriques et à la Préhistoire récente, a fait l’objet des campagnes 2002 à 2004. Il s’agit d’une couche moderne (XIV-XVIe siècles) caractérisée par l’utilisation de la grotte comme cave ou cellier mais surtout d’une couche riche en restes osseux humains et en céramique dont la nature de sépulture primaire gauloise, démantelée, a été clairement identifiée.

Le Néolithique n’est représenté que par un petit lot de mobilier lithique attribuable au Néolithique final qui semble également lié à un dépôt de type funéraire (un poignard en silex de type pressignien, deux lames de haches polies et une pointe de flèche à pédoncule et ailerons en silex).

Scellant un Ă©pais horizon argileux, une occupation ponctuelle de la grotte est ensuite imputable Ă  la pĂ©riode du MĂ©solithique final (environ 7 300 ans), matĂ©rialisĂ©e par un corpus lithique et faunique peu abondant mais nĂ©anmoins exceptionnel pour la rĂ©gion. Un nombre relativement important de coquillages perforĂ©s, une crache (canine atrophiĂ©e) de cervidĂ© percĂ©e, la prĂ©sence d’une dent humaine pendeloque et deux dents humaines juvĂ©niles s’ajoutent Ă  ce mobilier. Ces objets indiquent-ils la prĂ©sence d’une sĂ©pulture d’enfant dĂ©mantelĂ©e, avec vestiges de parures ? Le corpus lithique, comme les restes osseux prĂ©sentant des traces de dĂ©coupes, sont-ils plutĂ´t marqueurs d’une vĂ©ritable occupation de la grotte ?

Enfin, sous ces niveaux supĂ©rieurs, un ensemble attribuĂ© au Tardiglaciaire a Ă©tĂ© mis au jour et vient d’être datĂ© du Dryas rĂ©cent (environ - 10 500 ans). Le corpus faunique, exceptionnellement bien conservĂ©, semble faire appel aux tout derniers reprĂ©sentants de la faune froide de l’Ouest de la France, notamment le renne et le rhinocĂ©ros laineux, en association avec des pièces lithiques et osseuses d’obĂ©dience azilienne, tel un harpon autrefois dĂ©crit par Henri Breuil. La fouille de ces couches « rĂ©centes » est Ă  ce jour terminĂ©e et depuis 2005, l’étude des occupations prĂ©historiques solutrĂ©ennes, pour lesquelles la cavitĂ© est dorĂ©navant connue, a vĂ©ritablement commencĂ©.

Les niveaux solutréens

Le SolutrĂ©en semble bien ĂŞtre la culture matĂ©rielle la mieux reprĂ©sentĂ©e dans les couches palĂ©olithiques de la cave Ă  Rochefort. Certes, plusieurs Ă©lĂ©ments indiquent des frĂ©quentations sporadiques postĂ©rieures Ă  20 000 ans, tels les indices du MagdalĂ©nien final. Mais la cavitĂ© ne semble pas receler la richesse stratigraphique de la cave Ă  la Chèvre et c’est donc avant tout pour recueillir des donnĂ©es sur cette pĂ©riode si caractĂ©ristique du PalĂ©olithique supĂ©rieur qu’est le SolutrĂ©en que les recherches se poursuivent aujourd’hui.

Avec les habitats de la vallĂ©e de l’Erve, nous avons affaire aux occupations les plus occidentales et pratiquement les plus septentrionales de cette culture, davantage reprĂ©sentĂ©e dans le sud de la France. Nous sommes alors, il y a 20 000 ans, au plus fort du froid, en pleine glaciation. Le nord de l’Europe connaĂ®t un climat pĂ©riglaciaire et les hommes ne frĂ©quentent guère ces contrĂ©es septentrionales. Le SolutrĂ©en prĂ©sent dans la cave Ă  Rochefort, comme les Ă©lĂ©ments mobiliers recueillis anciennement dans quelques autres cavitĂ©s de la vallĂ©e de l’Erve (dont le porche de la DĂ©rouine), montrent que les groupes prĂ©historiques de ces temps glaciaires ont nĂ©anmoins sĂ©journĂ©, sinon habitĂ©, dans la rĂ©gion.

Les premiers niveaux en cours de fouille indiquent que les humains y ont pratiqué des activités de taille du silex ou de boucherie. L’observation est-elle à mettre en lien avec les conditions paléoclimatiques qui pouvaient régner alors, empêchant ou du moins réduisant les possibilités d’activités extérieures ? Éclats de silex (mais aussi d’autres roches taillées comme le grès lustré), esquilles et pièces osseuses fragmentées ou présentant des incisions liées à la découpe, os brûlés mais également outils de pierres et objets d’art mobilier sont autant d’éléments à ce jour recueilli dans la cave à Rochefort. La perspective d’obtenir des informations sur cette culture matérielle, d’établir un corpus faunique inédit pour le Pléistocène supérieur de l’Ouest de la France, comme de bâtir une séquence chronostratigraphique fiable du Paléolithique supérieur de cette région, ne peuvent donc qu’encourager les recherches à venir.

Bibliographie

  • Colleter, R., Aubin, G., Cherel, A-F., Hinguant, S., Peuziat, J., Sellami, F., Ă  paraĂ®tre. « Un ensemble funĂ©raire latĂ©nien ou antique dans la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve, Mayenne) », Revue archĂ©ologique de l’Ouest.
  • Colleter, R., Hinguant, S., soumis - « Un vestige osseux humain dans la couche tardiglaciaire de la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve, Mayenne) », Bulletin de la sociĂ©tĂ© prĂ©historique française.
  • Hinguant, S., 2002 - « Diagnostic archĂ©ologique Ă  la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve, Mayenne) », JournĂ©e civilisations atlantiques et archĂ©osciences, Rennes, , p. 3-7.
  • Hinguant, S. et Colleter, R., avec la coll. de Noel, F. et Peuziat J., 2001 - Rapport de sondage archĂ©ologique dans la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve), campagne 2001, Rennes, 54 p., ill., 6 pl., inĂ©dit.
  • Hinguant, S. et Colleter, R., avec les contributions de MoullĂ©, P.-E., Arellano-MoullĂ©, A., Noel, F. et Peuziat, J., 2002 - Rapport intermĂ©diaire de fouille dans la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve), Campagne 2002, Rennes, 53 p., 14 ill., 5 pl., inĂ©dit.
  • Hinguant, S. et Colleter, R., avec les contributions de Aubin, G., Chaut, J.-J., Cherel, A.-F., Dhenin, M., Labaune, F., Noel, F. et Peuziat, J., 2003 - Rapport intermĂ©diaire de fouille dans la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve), Campagne 2003, Rennes, 51 p., 16 ill., 7 pl., inĂ©dit.
  • Hinguant, S. et Colleter, R., avec les contributions de Arellano-MoullĂ©, A., Aubin, G., Chaut, J.-J., Cherel, A.-F., Dhenin, M., El Guennouni, K., Labaune, F., Lacombat, F., Merle, D., MoullĂ©, P.-E., Noel, F., Peuziat, J. et Roger, T., 2004 - Les occupations historiques, protohistoriques et prĂ©historiques rĂ©centes de la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve, Mayenne), Rapport de fin d’opĂ©ration triennale, Rennes, 108 p., 57 fig., annexes, inĂ©dit.
  • Hinguant, S. et Colleter, R., avec les contributions de Arellano, A., Desclaux, E., MoullĂ©, P.-E. et Roger, T., 2005 - Rapport intermĂ©diaire de fouille dans la grotte Rochefort (Saint-Pierre-sur-Erve), Campagne 2005, Rennes, 51 p., 9 fig., 27 photos, inĂ©dit.
  • Marchais, P., La grotte Rochefort, J. Malka.

Notes et références

  1. Bénédicte Boucays, « Cinq grottes méconnues à découvrir de l'Yonne à la Lozère : En Mayenne, une fée, le diable et des cygnes », sur lemonde.fr, Le Monde,
  2. Romain Pigeaud, Stéphane Hinguant, Jean-René Ladurée, Hervé Paitier, Jean-Pierre Betton, Pascal Bonic, « Les grottes Margot et Rochefort : L'art préhistorique des grottes de Saulges », Maine Découvertes no 56 de mars-avril-mai 2008, Les éditions de La Reinette, pp. 5-16.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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