Cæcotrophie
La cæcotrophie est un comportement de certaines espèces animales chez lesquelles la digestion complète nécessite que les aliments passent deux fois à travers le tube digestif : à la fin du premier passage, l’animal cæcotrophe ingère ses propres excréments, alors appelés eux aussi cæcotrophes, de façon à en extraire les éléments qui n’ont pas pu être assimilés lors du premier passage. Les cæcotrophes sont mous et entourés d'une couche mucilagineuse ; les excréments finaux produits une fois que les cæcotrophes ont traversé à leur tour le tube digestif (et notamment le cæcum) sont quant à eux des crottes dures et sèches.
Ceci permet à l'animal de récupérer des nutriments et micro-organismes (communautés bactériennes[1] et fongiques) qu'ils contiennent, notamment la vitamine B12. Chez le lapin, sauf perturbation anormale, ces communautés restent stables au cours de la vie du lapin[1].
D'un point de vue métabolique, c'est une pratique qui est comparable à la rumination.
Exemples d'espèces cæcotrophes
Sont cæcotrophes :
- la plupart des musaraignes[2], des petits mammifères insectivores ;
- de nombreux rongeurs comme les marmottes, les castors[3] ou les chinchillas[4] ;
- les lagomorphes (lièvres et lapins)[5] - [6] ;
- le koala[7].
Ainsi le jeune lapin adopte-t-il ce comportement alimentaire nocturne entre le 22e et 28e jour, quand il entame son sevrage, après l'ingestion de ses premiers aliments solides. Au 28e jour des cæcotrophes sont trouvés dans le fundus dont ils représentent 25 à 30 % du contenu stomacal[8]. Le lapin récupère ces déjections dès leur émission, par aspiration directement à l'anus, pour les ré-ingérer aussitôt[9].
RĂ´le
La cellulose des végétaux et d'autres composés (biopolymères) ingérés par les animaux cæcotrophes ont du mal à être décomposée en nutriments par leurs enzymes intestinales. Elle est donc envoyée vers le cæcum qui contient des bactéries capables de décomposer la cellulose. Les cæcotrophes formés sont envoyés vers le côlon et réingurgités dès leur excrétion afin d'absorber les nutriments devenus assimilables par l'intestin, tels que les vitamines B.
Chez le lapereau, il a été démontré que la coprophagie commence à la période du sevrage, vers trois semaines, mais sa flore intestinale met un peu plus de temps à s'adapter à ce nouveau régime alimentaire, cause d'amaigrissement temporaire et d'augmentation de la mortalité.
Dans le cas d'un sevrage précoce, et afin de minimiser les effets de cette période délicate pour les lapereaux, un apport en flore cæcale de lapin adulte permet d'anticiper cette pratique qui constitue un ensemencement naturel[10].
Notes et références
- R. Michelland, S. Combes, L. Cauquil, T. Gidenne, V. Monteils et L. Fortun-Lamothe, « Caractérisation comparée des communautés bactériennes du contenu cæcal, des cæcotrophes et des fèces dures chez le lapin adulte par CE-SSCP des gènes codant l'ARN16S » [PDF], sur 12es journées de la Recherche Cunicole, 27-28 novembre 2007, Le Mans, France, INRA, (consulté le ).
- Musaraigne sur Terra Nova, consulté en septembre 2011.
- (en) Richard R. Buech, « Ontogeny and Diurnal Cycle of Fecal Reingestion in the North American Beaver (Castor canadensis) », dans Journal of Mammalogy, volume 65, no 2, mai 1984, pages 347-350 résumé.
- (en) A. E. Spotorno, C. A. Zuleta, J. P. Valladares, A. L. Deane et J. E. Jiménez, « Chinchilla laniger ». Publié par l’American Society of Mammologists dans Mammalian Species, no 758, p. 1-9, 3 ill., 15 décembre 2004 [lire en ligne].
- (en) C. De Blas, J. GarcĂa et R. Carabaño, « Role of fibre in rabbit diets. A review », Annales de zootechnie, EDP Sciences, vol. 48, no 1,‎ , p. 3-13 (prĂ©sentation en ligne).
- T. Gidenne et Lebas, « Le comportement alimentaire du lapin », sur 11es journées de la Recherche Cunicole, 29-30 novembre 2005, Paris, ITAVI, , p. 183-196.
- « Le lapin de garenne », La Hulotte, no 60,‎ , p. 37.
- J. Orengo, T. Gidenne et G. Bolet, « Comportement alimentaire et cæcotrophie chez le lapereau avant sevrage » [PDF], sur 11es journées de la Recherche Cunicole, 29-30 novembre 2005, Paris, ITAVI, (consulté le ).
- « Le lapin excrète deux types de fèces », Vie du lapin, Open Archive Toulouse Archive Ouverte (OATAO).
- A. Salse et P. Reaynaud, « Étude sur la flore cæcale du lapin : Essai préliminaire d’implantation précoce de la flore adulte chez le lapereau », Ann. rech. Vét., vol. 16, no 4,‎ , p. 357-362.