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Barrage de la Girotte

Le barrage de la Girotte est situé en France sur la commune d'Hauteluce, dans le département de la Savoie en région Auvergne-Rhône-Alpes.

Barrage de la Girotte
GĂ©ographie
Pays
RĂ©gion
DĂ©partement
Coordonnées
45° 45â€?nbsp;55â€?nbsp;N, 6° 38â€?nbsp;48â€?nbsp;E
Cours d'eau
le Dorinet, affluent du Doron de Beaufort
Objectifs et impacts
Vocation
Propriétaire
Date du début des travaux
1943
Date de mise en service
1949
Barrage
Type
Voûtes multiples
Longueur
510 m
RĂ©servoir
Nom
Lac de la Girotte (d)
Altitude
1 727 m
Volume
49,2 millions de m3
Longueur
1,4 km
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Il s'agit d'un barrage Ă  voutes multiples en bĂ©ton perchĂ© Ă  1 700 m d'altitude dans le Beaufortain, au nord-est du dĂ©partement.

Histoire

Avant que le barrage ne soit construit il y avait un lac naturel, qui a été l'un des points de passage de la Glorieuse rentrée des vaudois en 1689[1]. Il sera plus tard aménagé. Depuis 1900, le lac de la Girotte est utilisé pour produire de l'électricité.

L'Ă©poque Girod

Pour assurer la rĂ©gularisation du dĂ©bit du torrent qui alimentait son usine aux Papeteries Aubry de Venthon, Paul Girod, le crĂ©ateur d'Ugitech, eut l'idĂ©e d'utiliser le rĂ©servoir naturel du lac de la Girotte, en faisant une première percĂ©e horizontale[2] Ă  17 mètres sous le niveau de la surface du lac, ce qui permet de l'utiliser aussi en pĂ©riode de basses-eaux, afin d'alimenter de façon plus importante le Doron de Beaufort et l'usine Ă©lectrique desservant les fours Ă  mĂ©taux installĂ©s dans les ex-Papeteries Aubry de Venthon[3] que louait Paul Girod avant de s'installer Ă  Ugine, oĂą il recourt alors Ă  des centrales sur l'Arly et Ă  partir de 1908 dans la gorge du Bon-Nant.

L'installation de pompes centrifuge

Ses successeurs utilisent une pompe centrifuge du type de celles de la sociĂ©tĂ© d'Auguste Rateau, fondĂ©e en 1903, oĂą l'eau descendant du premier barrage de la Girotte est forcĂ©e au travers d’une roue Ă  aubes, actionnĂ©e par l'usine Ă©lectrique sous le barrage, dont la rotation l'aspire axialement dans la pompe, puis l’accĂ©lère radialement et la refoule 500 mètres plus haut dans le barrage. Deux unitĂ©s de 5 000 ch, l'une construites par la Compagnie de Construction MĂ©canique, procĂ©dĂ©s Sulzer[4], exploitĂ©e dès 1923, et l'autre de 8 000 ch (pompe Râteau), en montage en 1931[5] actionnĂ©e par un groupe turboalternateur de 9 000 ch seront alors utilisĂ©es[6]. La première pompait 3 200 m3/h, prenant une dizaine de jours pour remonter 8 millions de mètres-cubes[4] permettant de rĂ©-emplir le lac en utilisant une bonne partie du potentiel apportĂ© par le tunnel de dĂ©jection creusĂ© en 1921 ou 1922 Ă  80 mètres sous sa surface. Le moteur Ă©lectrique Ă©tait susceptible de fonctionner en moteur synchrone durant les pĂ©riodes de pompage[7].

Les captages

Les eaux turquoise du lac s'expliquent par l'origine glaciaire de ses eaux : plusieurs captages ont Ă©tĂ© effectuĂ©s pour augmenter son volume. Ă€ partir de 1923, une «dĂ©rivation de 4,85 kilomètres capte Ă  1 900 mètres d’altitude le Bon-Nant et au passage le ruisseau de Colombe soit un total de 13 millions de mètres cubes ajoutĂ© Ă  la capacitĂ© du Lac, constate en 1925 le congrès de la Houille Blanche, Ă  Grenoble[8], alors qu'Ă©merge le projet de barrer aussi la haute vallĂ©e de La Gittaz, afin de crĂ©er le premier exemple de vallĂ©e alpine amĂ©nagĂ©e et rĂ©gularisĂ©e entièrement[8]. Le captage s'effectue au Plan Jovet Ă  1 910 mètres, sous le col du Bonhomme, cĂ´tĂ© Contamines et passe ensuite sous la tĂŞte de la Cicle et les aiguilles de la Pennaz[9] par un tunnel. Comme il ne suffit pas aux Allemands, en 1942 une autre galerie de 5,3 km, passant Ă  l'aval du Mont Tondu[9], s'y raccorde et plusieurs galeries sont ouvertes dans le glacier de TrĂ© la TĂŞte, sa langue terminale Ă©tant trop basse par rapport Ă  la conduite forcĂ©e[9]. Jusqu’Ă?800 personnes travaillent sur le barrage, reliĂ© par deux tĂ©lĂ©phĂ©riques au Val Montjoie[9]. Au XXIe siècle, ce sera un total de 10 km de galeries souterraines qui capteront les prises d’eau de TrĂ©-la-TĂŞte, du Mont Tordu et du Plan Jovet, avec un dĂ©bit maximum de m3/s, sur un bassin versant total de 28 km2[10]. C'Ă©tait la première prise d’eau sous-glaciaire d'Europe[9], donnant au lac une couleur verte[9]. Le recul du glacier de TrĂ© la TĂŞte oblige Ă  reconstruire en 1961 le captage de 1942[9].

Un autre percement du lac avait eu lieu en 1923, cette fois Ă  80 mètres sous le niveau de la surface du lac, une galerie horizontale de 335 mètres permettant d'acheminer l'eau vers l'usine Ă©lectrique de Belleville, en contrebas.

La vallĂ©e est Ă©quipĂ©e par la construction successive d'une sĂ©rie de sept centrales en escalier, de Venthon (1899) (pour la fabrication d'Ă©lectricitĂ©), Queige (1909), Roengers (1919), Domelin (1922), Belleville (1923), Villard (1929) et Hauteluce (1932)[11]. En 1933, la capacitĂ© totale est de 125 MW, en additionnant en particulier les usines de Belleville (27 MW Ă  1 211 mètres), Hauteluce (8,5 MW Ă  1 035 mètres) et Dolimet-Beaufort (77 MW, Ă  750 mètres)[12] et l'ouvrage de Joseph Garin mentionne dĂ©jĂ  le captage du glacier de TrĂ© la TĂŞte, sans donner plus de prĂ©cision qu'une Ă©valuation du flux obtenu. La SociĂ©tĂ© d'Electrochimie et des AciĂ©ries Ă©lectriques d'Ugine entreprit en 1941 de capter le torrent sous-glaciaire via une reconnaissance approfondie de la morphologie du lit du glacier[13]. Les Eaux et ForĂŞts Ă©tudiaient les variations du glacier depuis 1908, viaz des mesures de vitesse[14]. Les premières excavations ont Ă©tĂ© effectuĂ©es en 1942-43, dĂ©crites par l'ingĂ©nieur Max Waeber et dans La Houille Blanche (revue), revue internationale de la SociĂ©tĂ© Hydrotechnique de France[15].

Arrivé dans la région en 1898, Paul Girod avait créé, en 1904 une usine hydro-électrique sur l’Arly, à Ugine, puis, en 1908, une autre plus grosse sur le Bon-Nant, à Saint-Gervais, torrent essentiellement glaciaire, prenant le relais l'été de l’Arly[8].

La compagnie du lac

Ce n'est que pendant la guerre, en aoĂ»t 1942, sous occupation allemande, que le chantier de construction de l'actuel barrage dĂ©marre vraiment. La construction du barrage sert d'alibi aux rĂ©sistants, qui sous l'impulsion du capitaine Jean Bulle (1913-1944)[16] - [17] et de son adjoint Louis Pivier (dit Beauregard)[18] commandant du 3e bataillon F.T.P pour le « secteur Ugine â€?Albertville », crĂ©ent en 1943 la Compagnie du Lac, qui est un "maquis-silo", servant de point d'appui aux "maquis dormants". Les ouvriers ont le droit de se dĂ©placer et des tickets de rationnement en quantitĂ©, en raison de l'altitude, car l'usine d'Ugine est considĂ©rĂ©e comme prioritaire par l'Occupant qui y fabrique des aciers spĂ©ciaux. Le , un très important parachutage de matĂ©riel et d’armes sera fait juste en face du lac, au col des Saisies, ce qui permettra d’équiper environ 3 000 hommes des diffĂ©rents maquis du Val d’Arly jusqu’Ă?la Maurienne, afin d’accĂ©lĂ©rer la LibĂ©ration de la Savoie. La Compagnie du Lac combattra pendant la libĂ©ration d'Albertville, perdant une vingtaine d’hommes, dont quatre officiers, parmi lesquels Jean Bulle.

Le barrage actuel

Piliers du barrage.

Ralentis par le froid (il est tombĂ© 18 mètres de neige en 1944-45) et la guerre, les travaux ne seront terminĂ©s qu'en 1949 : 400 Ă  800 personnes, complètement autonomes, reliĂ©es Ă  la vallĂ©e par deux tĂ©lĂ©phĂ©riques, travaillent Ă  la construction de cet ouvrage. Pour les accueillir, il est nĂ©cessaire de bâtir deux villages d’accueil : l’un Ă  Belleville, l’autre près du lac. La dernière annĂ©e, « on parvenait Ă  couler 1 000 m3 de bĂ©ton par jour, c’était un exploit Ă  l’époque, et j’ai une pensĂ©e toute particulière pour ces hommes qui ont donnĂ© le meilleur d’eux-mĂŞmes pendant cinq ans », tĂ©moignera Jean-Richard Le Cointe, ingĂ©nieur sur le chantier de la Girotte[19].

Le barrage est entièrement en béton, il n'y a pas d'armature d'acier dedans. Les points d'appuis sur le roc étant médiocres, les voûtes du barrage sont convexes, dans le sens est-ouest et bombées de bas en haut, ce qui permet à l'eau d'appuyer verticalement sur les piliers, dont certains sont par ailleurs surmontés de tours d'observation.

Maintenance

En mars 2006, un rapport confidentiel d'EDF stipule que des fissures ont Ă©tĂ© observĂ©es sur les voĂ»tes du barrage, ainsi que des fuites sur certaines membranes. L'ouvrage prĂ©sente un risque de vieillissement prĂ©maturĂ©. Les travaux d'entretien sont estimĂ©s Ă  520 000 â‚?/abbr> sur quatre ans.

Littérature

Barrage de la Girotte, Montagne d'Outray, Vallée du Dorinet (vue du Col du Joly).jpg

Bastion de la résistance lors de la Seconde Guerre mondiale, le chantier de construction du barrage de la Girotte est évoqué dans le roman de Roger Frison-Roche Les montagnards de la nuit. Issu de parents originaires de Beaufort, l'écrivain passe pendant son enfance de nombreux séjours dans cette localité.

Notes et références

  1. Parcours de la Glorieuse rentrée, chez.com
  2. Pierre-Louis Viollet, Histoire de l'énergie hydraulique : moulins, pompes, roues et turbines de l'Antiquité au XXe siècle, Presses des Ponts, , 232 p. (ISBN 978-2-85978-414-0, présentation en ligne), p. 182.
  3. Pierre-Louis Viollet, Histoire de l'énergie hydraulique : moulins, pompes, roues et turbines de l'Antiquité au XXe siècle, Presses des Ponts, , 232 p. (ISBN 978-2-85978-414-0, présentation en ligne), p. 178.
  4. Revue La Houille blanche - page 81, 1922
  5. Bulletin de la Société des ingénieurs civils de France, Paris - 1932 -
  6. Le génie civil - Volume 114 - page 25 (1939)
  7. Revue générale de l'électricité (organe de l'Union des syndicats de l'électricité), Volume 30 par Jules Blondin
  8. "Usines hydro-électriques de la Société d’électrochimie, d’électro-métallurgie et des aciéries électriques d’Ugine", compte-rendu du troisième congrès de la Houille Blanche, à Grenoble, du 4 au 8 juillet 1925
  9. "Barrages, l'Eau apprivoisée" par Histoire à tire d'ailes
  10. [PDF]Mairie du village Les Contamines
  11. "1949-1999 : Les 50 ans du barrage de la Girotte", par Isabelle Lemagnen - Hauteluce
  12. Chanoine Joseph Garin (1876-1947), Le Beaufortain : une belle vallée de Savoie : guide historique et touristique illustre, La Fontaine de Siloé, (réimpr. 1996) (1re éd. 1939), 287 p. (ISBN 978-2-84206-020-6 et 2-84206-020-2, présentation en ligne), p. 20.
  13. Compte rendu détaillé en 1943 dans la Revue de Géographie Alpine par l'ingénieur Max Waeber, cité dans "Le glacier de Tré-la-Tête" par Robert Vivian et Martine Frayssinet, dans la Revue de Géographie Alpine en 1970
  14. "Le glacier de Tré-la-Tête" par Robert Vivian et Martine Frayssinet, dans la Revue de Géographie Alpine en 1970
  15. The Journal of Glaciology par la British Glaciological Society, en 1980, dans les volumes 25-26.
  16. Barrages du Beaufortain
  17. Vie et mort du capitaine Bulle, 1913-1944, par Jean d'Arbaumont, Éditions Gardet, 1972
  18. RĂ©sistance Tarentaise, sur resistance-tarentaise.com
  19. 1949-1999 : Les 50 ans du barrage de la Girotte : jamais le terme ouvrage d’art n’a eu autant de sens « Copie archivée » (version du 6 août 2018 sur Internet Archive).

Voir aussi

Liens externes


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