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Banyuls (VDN)

Le banyuls est un vin doux naturel d'appellation d'origine contrôlée produit sur quatre communes du Sud de la France, dans le département des Pyrénées-Orientales en région Occitanie : Banyuls-sur-Mer, Collioure, Port-Vendres et Cerbère.

Banyuls
Image illustrative de l’article Banyuls (VDN)
Vignoble de Banyuls sur les coteaux de Collioure.

DĂ©signation(s) Banyuls
Appellation(s) principale(s) Banyuls
Type d'appellation(s) Vin doux naturel AOC
Reconnue depuis 1936
Pays Drapeau de la France France
RĂ©gion parente Languedoc-Roussillon
Sous-région(s) Roussillon, Côte Vermeille
Localisation Pyrénées-Orientales
Saison Vendanges d'août à octobre
Climat Climat tempéré méditerranéen
Sol schiste
Superficie totale 2 600 hectares
Superficie plantĂ©e 1 850 hectares
Nombre de domaines viticoles 2 coopératives alimentées par des vignerons indépendants, plusieurs caves particulières
Cépages dominants grenache R, B, Rs ou Gris, mourvèdre, syrah, muscat, ... (B = blanc, N = noir, Rs = rose, G = gris)
Vins produits vin doux naturel blanc, rosé et rouge
Pieds Ă  l'hectare minimum 4 000 pieds par hectare
Rendement moyen Ă  l'hectare maximum 20 Ă  30 hectolitres par hectare[1]

Il est issu de vieilles vignes cultivées en terrasses sur les coteaux pentus de la côte Vermeille, où la partie française du massif des Albères (extrémité orientale des Pyrénées) rejoint la mer Méditerranée.

Histoire

Moyen Ă‚ge

La cité de Banyuls est dénommée Bannils de Maritimo en 1074.

Selon certains auteurs l'organisation du vignoble, implanté par les Grecs et Phéniciens, aurait été radicalement modifiée, au cours du Moyen Âge, par les Templiers qui auraient mis en place un système de filtrage et d'écoulement des eaux pluviales (qui est d'ailleurs toujours utilisé actuellement[2]).

Cette double affirmation est cependant discutĂ©e. Le territoire de Banyuls-sur-Mer commence Ă  ĂŞtre habitĂ© dès le VIIIe siècle, sous l'impulsion du système de l'apprisio mis en place par Charlemagne et du monastère Sant-Kirk de Colera (ses ruines sont visibles sur l'actuel municipi d'Espolla). Au Xe siècle est construite l'Ă©glise paroissiale des Abeilles, preuve de l'existence d'une communautĂ© villageoise constituĂ©e. Les paysans installĂ©s ont-ils attendu l'arrivĂ©e des Templiers au XIIe siècle (soit 200 ans plus tard) pour comprendre comment mettre en valeur leurs terres et nourrir leurs familles? D'autant que si les Templiers possèdent bien des terres, celles-ci sont plutĂ´t situĂ©es dans la vallĂ©e de Cosprons (qui appartient au village de Banyuls jusqu'en 1824) ; terres qu'ils afferment et dont ils exportent la production via leur maison installĂ©e dans la basse-cour du château royal de Collioure.

PĂ©riode moderne

Chaque année, les fêtes de la Saint Vincent se déroulent dans les rues de Collioure, du 14 au 18 août. Historiquement, la procession sur mer du 16 août constituait l’événement majeur des fêtes. La première eut lieu le , afin de célébrer l’arrivée dans la ville des reliques de Saint Vincent. Cette célébration eut alors lieu chaque année jusqu’à l’instauration de la loi de séparation de l’Église et de l’État en 1905. Depuis 2001 (à l’occasion du tricentenaire des fêtes), la procession sur mer a lieu à nouveau.

PĂ©riode contemporaine

Alors que jusque dans les annĂ©es 1850, l'Ă©conomie rurale du canton repose sur le triptyque mĂ©diterranĂ©en (vigne, olive et cĂ©rĂ©ale), le paysage et l'Ă©conomie sont radicalement bouleversĂ©s par la conjugaison de 2 phĂ©nomènes. D'une part, la fin des interdits royaux sur la vigne pousse les agriculteurs locaux Ă  planter une plus grande superficie de vigne. D'autre part, l'ouverture conjuguĂ©e de la rade de Port-Vendres Ă  la marine marchande (1851), de la route nationale n° 114 (1870-1871) et de la gare internationale de Cerbère (1878-1888), permettent aux paysans d'exporter Ă  haut coĂ»t leur vin et d'importer Ă  bas coĂ»t leur cĂ©rĂ©ales. La polyculture vivrière est alors rapidement remplacĂ©e par la monoculture de la vigne. Par exemple, en 1864, le territoire de la commune de Port-Vendres produit 18 000 hectolitres de vin. 16 000 hectolitres (soit la quasi-totalitĂ©) sont exportĂ©s au BrĂ©sil et en AmĂ©rique via le port. La vigne, très rentable Ă©conomiquement, part Ă  l'assaut de la moindre parcelle de terre, alors que disparaissent les cĂ©rĂ©ales peu adaptĂ©es au sous-sol schisteux et au climat mĂ©diterranĂ©en. Avec les pandĂ©mies (phylloxĂ©ra et oĂŻdium) et la crise de mĂ©vente en 1907, le phĂ©nomène d'expansion de la vigne dĂ©croĂ®t progressivement dès 1914, pour se stabiliser au dĂ©but des annĂ©es 1930.

Les vendanges 1906 avaient été désastreuses dans tout le Roussillon. Ce qui n'empêcha pas la chute des cours du vin. Des familles vigneronnes se heurtaient à des difficultés financières telles qu'elles ne pouvaient plus payer l'impôt. Informé, le gouvernement donna ordre de faire intervenir les huissiers. Le village de Baixas fut le premier à se révolter au début de l'année 1907[3].

Le 18 fĂ©vrier, il reçut le soutien de Marcelin Albert, qui envoya un tĂ©lĂ©gramme Ă  Georges Clemenceau. Quant Ă  Joseph Tarrius, viticulteur et pharmacien Ă  Baixas, il fait parvenir au gouvernement une pĂ©tition signĂ©e des habitants du village. Il y est prĂ©cisĂ© que le seul impĂ´t que les contribuables puissent encore payer est celui du sang. Alors que les dĂ©filĂ©s de protestations s'Ă©taient multipliĂ©s dans les villes et villages, prĂ©fectures et sous-prĂ©fectures accueillirent les manifestations viticoles. Le 19 mai, Ă  Perpignan 170 Ă  200 000 personnes dĂ©filent dans la ville. La manifestation se dĂ©roule sans incidents graves[4] - [3].

  • Regroupement des manifestants aux Platanes
    Regroupement des manifestants aux Platanes
  • Le comitĂ© d'Argeliers prend la tĂŞte de la manifestation
    Le comité d'Argeliers prend la tête de la manifestation
  • Ă€ Perpignan, les commerçants aux cĂ´tĂ©s des viticulteurs
    À Perpignan, les commerçants aux côtés des viticulteurs
  • Les manifestants devant le Castillet
    Les manifestants devant le Castillet

Dans les départements du Gard, de l'Hérault, de l'Aude et des Pyrénées-Orientales, les conseils municipaux démissionnent collectivement - il y en aura jusqu'à 600 - certains appellent à la grève de l'impôt. La situation devient de plus en plus tendue, les viticulteurs furieux attaquent perceptions, préfectures et sous-préfectures[5]. Le 20 juin, la tension monte encore. À Perpignan, la préfecture est pillée et incendiée. Le préfet David Dautresme doit se réfugier sur le toit[4].

Banyuls, décret de 1936. Banyuls grand cru, décret de 1962. Le nom de l'appellation peut être complété par les mentions « hors d'âge » et « rancio ».

Situation géographique

À l’est, la Méditerranée ; à l’ouest comme au sud, la montagne des Albères, derniers soubresauts des Pyrénées dont les pentes abruptes plongent dans la mer créant un multitude de petites criques dont celles abritant les quatre petits ports[2].

Orographie

Les 1 750 hectares de vignes sont structurĂ©s en terrasses soutenues par plus de 6 000 km de murettes de pierres sèches. Elles constituent, associĂ©es Ă  des canaux obliques et verticaux, un rĂ©seau de filtrage et de canalisation des rares mais violentes eaux de pluie. Cet ouvrage gigantesque, qui façonne tout un paysage, a Ă©tĂ© construit il y a plus de sept siècles et entretenu par les vignerons pour prĂ©server de l’érosion la fine couche de terre et de schiste en dĂ©composition qui recouvre le sol[2].

GĂ©ologie

Vignes de Banyuls sur un terroir de schiste

Le sol y est presque exclusivement constitué de schiste en strates verticales dans les profondeurs desquelles la vigne plonge ses racines. Elle partage ce maigre et aride terroir avec les pins, les oliviers, les chênes-lièges et la garrigue aromatique et sauvage.

Climatologie

Le climat de la région de Banyuls est de type méditerranéen. Les hivers y sont doux avec quatre jours de gelées par an, les étés sont souvent chauds et secs. La tramontane (Tramuntana) souffle fréquemment (un jour sur quatre ; moins depuis quelques années) et amène une certaine fraîcheur en période estivale. La température moyenne annuelle sur Perpignan est de 15,9 °C. La température des mois les plus chauds atteint plus de 30 °C. La plaine du Roussillon est en effet l'une des régions les plus chaudes de France. Avec plus de 300 jours d’ensoleillement par an, un vent fréquent, des pluies rares mais violentes qui permettent de ne réaliser que 3 à 4 traitements par an, les producteurs se sont engagés dans une viticulture respectueuse de son environnement.

Relevés des précipitations, des heures d'ensoleillement et des phénomènes météorologiques de Perpignan-Banyuls 1961–1990 [6] - [7]
MoisJanv.Fév.MarsAvr.MaiJuinJuil.AoûtSept.Oct.Nov.Déc.Total année
Heures moyennes d'ensoleillement 147,5 153,2 206,2 214,2 240,1 270,6 313,9 270,7 217,7 182,3 147,7 141,9 2506
Moyennes mensuelles de précipitations (mm) 50,6 44,8 43,5 55,9 50,1 28,3 17,1 32,0 47,3 89,8 58,6 54,4 572,4
Nombre de jours de pluie ≥ mm 5,2 4,7 4,5 5,9 5,5 4,1 3,0 3,9 4,2 5,1 5,1 5,3 56,5
Nombre de jours de brouillard 1,2 0,9 0,9 0,8 1,1 0,6 0,6 0,9 2,4 2,0 1,3 1,4 14,1
Nombre de jours d'orage 0,4 0,2 0,5 1,2 2,8 4,3 4,6 5,2 3,2 2,3 0,7 0,5 23,7
Nombre de jours de neige 0,9 0,6 0,4 — — — — — — — 0,2 0,4 2,6
Nombre de jours de gel 4,9 2,8 1,1 0 0 0 0 0 0 0 0,9 3,8 13,5
Nombre de jours de vent ≥ 57,6 km/h 14,4 11,5 15,6 12,9 8,1 7,0 9,0 7,3 6,8 9,4 11,6 13,4 127
Nombre de jours de vent ≥ 100,8 km/h 2,0 1,2 2,1 0,6 0,5 0,2 0,2 — 0,1 0,4 0,7 2,7 10,7

Vignoble

Présentation

L'aire de production est limitée aux quatre communes de la Côte Vermeille : Collioure, Port-Vendres, Banyuls-sur-Mer et Cerbère[2].

Encépagement

Les cépages principaux sont grenache noir, minimum 50 % pour les banyuls et 75 % pour les banyuls grand cru, grenache gris et blanc, macabeu, malvoisie et muscat. Il peut être utilisé trois cépages complémentaires : carignan, cinsault et syrah[2].

MĂ©thodes culturales

Vignobles en terrasses au-dessus de Banyuls
Vendanges Ă  Banyuls en 1920

Architecture en terrasses qui impose une viticulture traditionnelle sans recours à la mécanisation. Vendanges manuelles. Le rendement est limité à 30 hl par hectare. Les vins sont issus de moûts présentant une richesse naturelle minimale en sucres de 252 grammes par litre[2].

L'élevage est d'une durée minimale de 10 mois pour les banyuls et de 30 mois pour les banyuls grand cru. Il existe deux grandes méthodes d’élevage qui définissent les types de vin élaborés.

Élevage

Maturation du banyuls rimage en dame-jeanne

Pour les banyuls et banyuls grand cru traditionnels : en milieu oxydant.

Les vins sont élevés plus ou moins longtemps dans divers contenant de bois, foudres, cuves, barriques ou demi-muids. Ces pièces de bois sont généralement très anciennes. Le vin y est laissé au contact de l’oxygène. Cette oxydation en rancio est parfois accélérée par un élevage en plein air. Au fil du temps, les arômes de fruits murissent puis cèdent le pas à un complexe aromatique très riche de fruits secs, tabac, cuir, épices... C’est ainsi qu’apparait peu à peu l’arôme rancio caractéristique de cet élevage.

Pour les banyuls rimage et certains banyuls blanc : en milieu réducteur.

Les vins sont élevés en les préservant de toute oxydation. On peut procéder à une mise en bouteille précoce après conservation en cuve parfaitement ouillée, ou bien on souligne la structure du vin par un élevage plus ou moins long en barriques et une mise en bouteilles plus tardive. L’objectif est ici de préserver la fraîcheur aromatique et les qualités vineuses du Banyuls. Les spécificités de chaque millésime vont définir son évolution et son potentiel de garde.

Terroir et vins

Murets, vignes et palmier de Banyuls

Ce terroir viticole est façonnĂ© par les murettes en schistes qui s'Ă©talent sur plus de 6 000 kilomètres. Certaines de ces substructions datent du Ve siècle avant notre ère. Leur amĂ©nagement fut perfectionnĂ© durant la pĂ©riode mĂ©diĂ©vale ; « De loin, on aperçoit sur les coteaux verdoyants les dessins des "peus de gall" (pieds de coq) - ingĂ©nieux système de canaux en pierre sèche, initiĂ© par les Templiers, permettant d'Ă©vacuer l'eau des orages, rares mais violents[8] ».

Cet étagement « écarte toute possibilité de mécanisation et d’automatisation dans la culture de la vigne, ce qui donne aux vins de Banyuls toute leur force, leur caractère, et leur préciosité. Ce travail laborieux que les vignerons perpétuent depuis des siècles est récompensé par des saveurs uniques, gorgées de soleil et d’intensité aromatique ». De plus ces coteaux ont forte déclivité, puisqu'ils vont des rives de la Méditerranée jusqu'à 500 mètres d'altitude. Ce qui nécessite pour les vignerons de travailler uniquement à la main, sans aucune mécanisation, « sur des sols pauvres, des ceps d'une moyenne de quarante ans d'âge leur offrant 20 à 30 hl à l'hectare, soit moins d'une bouteille par pied de vigne[8] ».

Type de vins et gastronomie

Les banyuls sont d'abord des vins de dessert qui se marient bien avec le chocolat ou les fromages bleus. Ils sont aussi ingrédient du Civet de langouste.

Liste de producteurs

  • AOC Banyuls hors d'âge
    AOC Banyuls hors d'âge
  • AOC Banyuls 2005, M. Chapoutier
    AOC Banyuls 2005, M. Chapoutier
  • AOC Banyuls Croix-Milhas, 4 ans d'âge
    AOC Banyuls Croix-Milhas, 4 ans d'âge
  • Degustation Banyuls, Cave Tambour
    Degustation Banyuls, Cave Tambour
  • Cave de l'AbbĂ© Rous[9]
  • Cave L'Étoile[10]
  • Cave Tambour[11]
  • Cellier des Dominicains
  • Cellier des Templiers[12]
  • Domaine Abbaye Sainte EugĂ©nie
  • Domaine Berta Maillol[13]
  • Domaine de la Casa Blanca
  • Domaine de la Rectorie[14]
  • Domaine du Mas Blanc
  • Domaine du Traginer
  • Domaine Hugi
  • Domaine Le Casot des Mailloles
  • Domaine Madeloc[15]
  • Domaine Manya-Puig
  • Domaine Pietri-GĂ©raud[16]
  • Domaine Saint-SĂ©bastien[17]
  • Domaine Vial Magneres
  • Le Clos de Paulilles[18]

Notes et références

Bibliographie

  • G. Ferrer, Le vignoble de Banyuls-sur-Mer, Revue gĂ©ographique des PyrĂ©nĂ©es. Sud-ouest, n°1, pp. 185-192, 1930.
  • R. Furon, L'Ă©rosion du sol, consĂ©quence de l'activitĂ© humaine. Application Ă  la rĂ©gion du vignoble de Banyuls, Vie Milieu, n°1 (4), pp. 465-473, 1950.
  • F. Poirot, C. Rosas, A. Dourdan, J.M. Goyhenex et P. Palat, Les vignerons sculpteurs de montagnes, Terres catalanes, n° 5, 1974.
  • Jacques Maby, Terroirs agressĂ©s : de la nature des agressions, in Colloque sur la protection des terroirs du ComitĂ© interprofessionnel des Vins Doux du Roussillon, Perpignan, 1997.
  • F. Alcaraz, Feixes, agouilles et peus de gall : le dispositif anti-Ă©rosion du vignoble de Banyuls. Étude des pratiques d'entretien des terrasses de culture. Montagnes mĂ©diterranĂ©ennes, 5, 1997.
  • F. Alcaraz, Les terrasses mĂ©diterranĂ©ennes, entre terroirs et paysages (nord-ouest du bassin mĂ©diterranĂ©en), Toulouse, UniversitĂ© de Toulouse Le Mirail, U.F.R. de Sciences humaines et sociales, DĂ©partement de GĂ©ographie, thèse de doctorat de l'UniversitĂ© de Toulouse, Vol. I et II, 1999.
  • Roger Rull, Actes du Congrès international : Terroir, paysage et environnement mĂ©diterranĂ©ens en viticulture de montagne, Banyuls, mai 2002.
  • Guy Olivier, Le paysage de terrasses du cru "Banyuls" (PyrĂ©nĂ©es orientales) et son Ă©volution, 1er novembre 2002, en ligne.
  • Eric Conant, « Plaidoyer pour le vrai Banyuls », sur L'Express, .

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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