Babouin
Papio • Papions, Cynocéphales
Les Babouins (Papio) forment un genre de singes cynocéphales de la famille des cercopithécidés répandus en Afrique subsaharienne et au sud de la péninsule Arabique.
Etymologie
Écrit babouin ou baboin, ce terme d' ancien français est usité dès le XIIIe siècle pour désigner un sot, un nigaud. Depuis le milieu du XIIIe siècle, il sert également à désigner un singe caractérisé par de grosses lèvres proéminentes (Dictionnaire historique de la langue française).
Ce terme est celui qui a été celui utilisé par Georges-Louis Leclerc, comte de Buffon, pour nommer le singe cynocéphale dans son Histoire naturelle. Il était alors en conflit avec une famille de banquiers lyonnais du nom de Baboin qui lui avait prêté de l'argent pour la construction de ses forges dans la ville de Buffon. Ruiné par un escroc à qui il avait confié la gestion de son usine, de sa forge, et qui s'était enfuit avec la caisse, Buffon aura de nombreux démêlés avec ses bailleurs de fonds et en particulier avec la famille Baboin, cette dernière lui intentant même un procès.
Lors de la rédaction de son Histoire naturelle dont il est en train d'achever les derniers volumes, il en profitera pour se venger en choisissant de remettre à l'ordre du jour ce terme et fera une description peu flatteuse de l'animal [1].
Description
Les babouins sont de gros animaux au museau nu, gros et très allongé, semblable à celui du chien, d'où leur ancien nom de cynocéphales[note 1]. Certains babouins ont des espaces de peau nue sur la face, sur la poitrine ou le postérieur, où ils exhibent les couleurs les plus vives : rouge, bleu ou violacé.
Comme beaucoup de primates, les babouins vivent en bandes organisées. Le babouin ne se sent en sécurité qu'à l'intérieur de cette bande, dominée par quelques mâles puissants qui en assurent la défense ; ils sont aussi chargés de faire la paix à l'occasion de querelles intestines.
Ils parcourent les savanes arides et les endroits rocailleux en Arabie, en Afrique subsaharienne ainsi que les hautes futaies de l'ouest de l'Afrique. Ils se nourrissent de végétaux, de petits animaux, d'oiseaux et d'œufs. Leur marche est celle des quadrupèdes avec leur queue ramenée à la manière d'un arc. Certaines espèces n'ont d'ailleurs qu'un petit bout de queue.
Les formes de communication sont variées : transmission de signaux au moyen de la queue, la posture, les cris et les jappements. Selon les espèces, les babouins pèsent de 14 à 40 kg et mesurent entre 50 et 115 cm. Les femelles sont deux fois plus petites que les mâles[2].
L'espérance de vie avoisine les 20 ans, mais le double peut être atteint en captivité.
Vie sociale
Les babouins vivent en groupes hiérarchisés de 5 à 250 animaux (le plus souvent autour de 50 individus) dont la taille varie en fonction des circonstances, de l’espèce ou de l’époque de l’année.
La structure des groupes multimâles-multifemelles est très variable au sein de l’espèce hamadryas et des espèces proches (parfois collectivement dénommés « babouins de savane »). Les babouins hamadryas vivent en grands groupes comprenant plusieurs petits harems (un mâle pour environ 4 femelles). Les femelles intègrent le harem avant leur maturité sexuelle. Les groupes intègrent aussi de jeunes mâles, écartés de la reproduction tant que le mâle dominant est présent dans le groupe.
Dans les autres espèces, les groupes sont structurés par une hiérarchie entre matrilignes (les filles d’une même mère) qui n’est jamais remise en cause. Les filles héritent du rang de leur mère[3]. Le statut de dominant chez les mâles est, quant à lui, acquis pour une période variable et le mâle dominant perd régulièrement ce rang du fait d'autres individus, généralement plus jeunes.
Les relations de dominance s’expriment par communication vocale. Les babouins montrent plus d’intérêt pour les confrontations entre membres de différentes familles et pour les offensives menées par des individus de bas rang que pour les confrontations entre membres de la même famille ou les offensives menées par des individus de haut rang, car elles sont plus susceptibles d’affecter la hiérarchie de la troupe.
Dans les harems de babouins hamadryas, les mâles surveillent leurs femelles, au point de les agresser si elles s’éloignent trop. Certains mâles arrivent également à s’approprier des femelles à partir d’autres harems.
Les comportements d’accouplement varient beaucoup en fonction de la structure sociale du groupe. Dans les groupes de babouins de savane, un mâle peut s’accoupler avec n’importe quelle femelle. La priorité d’accès aux femelles est déterminée partiellement par le rang social du mâle. Des combats entre mâles pour l’accès aux femelles peuvent avoir lieu. Il existe néanmoins plusieurs possibilités : certains mâles essayent de s’attirer l’amitié des femelles en les épouillant, les aidant dans les soins aux jeunes ou leur apportant de la nourriture.
La femelle initie l’accouplement en présentant sa croupe gonflée par l’œstrus au mâle. Néanmoins présenter sa croupe est aussi un signe de soumission et peut-être effectué aussi par les mâles. De faux accouplements entre mâles peuvent également faire suite à ce comportement pour symboliser la dominance.
Les femelles donnent naissance en moyenne à un petit par an. À la naissance le babouin pèse en moyenne 1 kg et ses poils sont noirs. Les femelles sont les principaux individus à s’occuper des jeunes. Les jeunes sont sevrés au bout d’un an et atteignent la maturité sexuelle entre 5 et 8 ans. Les mâles quittent généralement leur groupe natal avant la maturité sexuelle tandis que les femelles restent dans leur groupe de naissance (elles sont « philopatriques »).
Dans la péninsule arabique, où les chiens et chats vivent à l'écart de la société humaine, un nouveau comportement aurait été observé : les babouins adopteraient des chiens et des chats [4].
Reproduction
La maturation sexuelle (âge à la ménarche et à la première grossesse) et l’âge lors de l’accession au premier rang social des femelles est diminué par le rang social de la mère et la présence d’apparentés à la mère, à la fois directement et indirectement (en accélérant la croissance). La même chose est vraie pour les mâles pour la maturation sexuelle mais pas pour l’âge au premier accouplement (événement fortement influencé par la disponibilité en femelles) [5] - [6].
Les mâles de haut rang ont un accès plus important aux femelles que les mâles de bas rang et ont une descendance plus importante. Leur stratégie est de garder les femelles fertiles (l’œstrus est très facilement identifiable grâce au gonflement de la vulve) jusqu’à ce qu’elles acceptent la copulation. Le mâle dominant étant incapable de surveiller plus d’une femelle, les opportunités de succès des autres mâles dépendent du nombre de femelles ayant leur œstrus au même moment. Il est cependant difficile de garder la femelle continuellement, notamment lors des repas ou des attaques de compétiteurs et garder la femelle est épuisant pour le mâle qui, si la femelle n’est pas fertile, risque de ne pas pouvoir garder la femelle suivante. Les mâles pourraient éventuellement être capables de faire la différence entre cycles fertiles et cycles non-fertiles (70 % des cycles sont non fertiles chez les babouins) mais seuls les mâles dominant peuvent se permettre de s’accoupler préférentiellement avec les femelles fertiles. Le principal stratagème des mâles pour sélectionner les femelles fertiles est d’éviter de s’accoupler avec les adolescentes. Les mâles de rang inférieur peuvent choisir de s’accoupler en se cachant du mâle dominant (ce serait plus le fait de mâles subadultes qu’adultes). La réussite de cette stratégie dépend aussi des possibilités de se cacher du groupe (forêt ou savane), mais elle est généralement peu efficace comparée à la garde de la femelle [5] - [6].
Même si le premier facteur d’accès aux femelles est la capacité à se battre, il ne faut pas oublier d’autres stratégies : se lier d’amitié avec les femelles, créer des coalitions de mâles pour détourner le mâle dominant, tuer la descendance de ses rivaux, choisir les femelles les plus fécondes, et même prendre soin de sa progéniture [5] - [6].
Distribution et habitat
Classification et taxinomie
La systématique des babouins soulève de nombreuses difficultés. En effet, les diverses espèces occupent des aires géographiques voisines et l'hybridation entre deux espèces voisines est fréquente, de sorte qu'un certain nombre de spécialistes ne considèrent qu'une seule espèce, Papio hamadryas, les divers représentants du genre Papio n'en étant que des sous-espèces[7].
Liste des espèces et sous-espèces
Selon la troisième édition de Mammal Species of the World de 2005 :
- Papio hamadryas (Linnaeus, 1758) — Babouin hamadryas[8], Hamadryas[8] - [9], Hamadryade[8], Cynocéphale hamadryade[8], Cynocéphale papion[8], Papion à perruque[8], Tartarin[9]
- Papio cynocephalus (Linnaeus, 1766) — Babouin jaune[8] - [9], Babouin cynocéphale[8] - [9]
- sous-espèce Papio cynocephalus cynocephalus
- sous-espèce Papio cynocephalus ibeanus
- sous-espèce Papio cynocephalus kindae
- Papio ursinus (Kerr, 1792) — Chacma[8] - [9], Babouin chacma[8] - [9]
- sous-espèce Papio ursinus ursinus
- sous-espèce Papio ursinus griseipes
- sous-espèce Papio ursinus ruacana
- Papio papio (Desmarest, 1820) — Babouin de Guinée[8] - [9]
- Papio anubis (Lesson, 1827) — Babouin doguéra[9], Babouin olive[8], Babouin vert-olive[9], Papion anubis[8] - [9], Babouin du Kenya[8]
Le babouin et l'homme
Plusieurs divinités du panthéon égyptien antique étaient représentés par des babouins:
Annexes
Bibliographie
- Rowe N., 1996. The Pictorial Guide To The Living Primates, Pogonias Press, p. 136–140.
- Dorst J. et Dandelot P., 1976. Guide des mammifères d'Afrique, Niestlé & Delachaux, p. 44–50.
- Altmann S.A. et Altmann J., 1970. Baboon Ecology : African field research, Bibliotheca Primatologica, no 12.
Références taxinomiques
- (en) Référence Mammal Species of the World (3e éd., 2005) : Papio
- (en) Référence Tree of Life Web Project : Papio
- (fr+en) Référence ITIS : Papio Erxleben, 1777
- (en) Référence Animal Diversity Web : Papio
- (en) Référence NCBI : Papio (taxons inclus)
- (fr+en) Référence CITES : genre Papio (sur le site de l’UNEP-WCMC)
Notes et références
Notes
- Le mot « cynocĂ©phale » est empruntĂ© au grec ancien κυνοκÎφαλος « qui a une tĂŞte de chien » (de κυνός cyno-, « chien », et κεφαλη, kèfalè, « tĂŞte »).
Références
- « Famille Baboin », sur Geneawiki (consulté le )
- www.nature.ca
- Bernard Chapais, Liens de sang : Aux origines biologiques de la société humaine, Montréal, Boréal, , 368 p. (ISBN 978-2-7646-2386-2), p. 68
- Jean-François Barthod, « L'évolution en marche (1/3) : Quand les babouins adoptent des chiens », sur Arte TV, 27 octobre 2014 18:15 à 19:00 (consulté le )
- S.C. Alberts, J.C. Buchan et J. Altmann, « Sexual selection in wild baboons: from mating opportunities to paternity success », Animal Behaviour, 2006, 72, 1177e1196
- M.J.E. Charpentier, J. Tung, J. Altmann et S.C. Alberts, « Age at maturity in wild baboons: genetic, environmental and demographic influences », Molecular Ecology, 2008, 17, 2026–2040
- Aux origines de l'humanité, sous la direction d'Yves Coppens et Pascal Picq, Éditions France Loisirs (2001), tome I, p.216-217
- Meyer C., ed. sc., 2009, Dictionnaire des Sciences Animales. consulter en ligne. Montpellier, France, Cirad.
- (en) Murray Wrobel, Elsevier's Dictionary of Mammals : in Latin, English, German, French and Italian, Amsterdam, Elsevier, , 857 p. (ISBN 978-0-444-51877-4, lire en ligne).