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Arvo PĂ€rt

Arvo PĂ€rt ([ˈɑrvo ˈpĂŠrt]), nĂ© le Ă  Paide en Estonie, est un compositeur estonien. CrĂ©ateur de musique classique, de musique religieuse et de musique contemporaine, il est souvent associĂ© au mouvement de musique minimaliste.

Arvo PĂ€rt
Description de cette image, également commentée ci-aprÚs
Arvo PĂ€rt Ă  la Christ Church de Dublin en 2008
Naissance
Paide, Drapeau de l'Estonie Estonie
Activité principale Compositeur
Style Musique contemporaine
Lieux d'activité Berlin, Allemagne
Années d'activité Depuis 1958
Site internet International Arvo PĂ€rt Centre

ƒuvres principales

Biographie

Arvo PĂ€rt naĂźt Ă  Paide, ville situĂ©e Ă  environ 90 km au sud-est de Tallinn. Ses parents, August PĂ€rt (1899 - 1972) et Linda-Annette (nĂ©e MĂ€ll ; 1907 - 1991), divorcent alors qu'il n'a que trois ans et sa mĂšre l'emmĂšne vivre chez son nouveau compagnon Ă  Rakvere, dans le Nord-Est de l'Estonie. LĂ , entre sept et huit ans, il suit des cours de musique aprĂšs l'Ă©cole et apprend les bases du piano et de la thĂ©orie musicale. À la maison, il ne dispose que d'un vieux piano Ă  queue dont seuls les registres extrĂȘmes peuvent ĂȘtre jouĂ©s convenablement ; cela le pousse Ă  l'expĂ©rimentation et Ă  inventer ses propres Ɠuvres[1].

Adolescent, Arvo PĂ€rt Ă©coute toutes sortes de musiques Ă  la radio mais il est plus particuliĂšrement intĂ©ressĂ© par la musique symphonique. Il Ă©coute notamment les programmes de la Radio finlandaise qui pouvaient ĂȘtre captĂ©s assez clairement dans le nord de l'Estonie. On raconte mĂȘme qu'il tournait en rond sur la place de la ville alors que les concerts symphoniques y Ă©taient diffusĂ©s via des haut-parleurs[1], Ă  vĂ©lo, pour ne pas rester statique et ne pas Ă©veiller les soupçons[2].

Bien que le piano soit son instrument de prĂ©dilection et qu'il en joue parfois en concert comme accompagnateur, il pratique aussi le hautbois dans l'orchestre de son Ă©cole, les percussions dans un groupe de danse et chante dans le chƓur de son Ă©cole. Progressivement, il passe des improvisations au clavier Ă  des compositions plus formelles qu'il commence Ă  noter vers quatorze ou quinze ans. Vers ses dix-sept ans, il prĂ©sente Meloodia, piĂšce pour piano qu'il compose pour un concours de jeunes artistes. Sa piĂšce est remarquĂ©e mais, sans doute Ă  cause d'un manque Ă©vident de racines ou d'influences estoniennes, il ne remporte aucun prix. Arvo PĂ€rt se rappelle qu'elle Ă©tait dans le style de Rachmaninov mais qu'elle n'avait rien de personnel[1].

Arvo PĂ€rt entre en 1954 Ă  l'École secondaire de musique de Tallinn et compte parmi ses professeurs Harri Otsa. Il y Ă©tudie la thĂ©orie musicale, la composition, le piano, la littĂ©rature musicale, l'analyse et la musique populaire. Cet apprentissage est interrompu aprĂšs quelques mois seulement par le service militaire obligatoire au cours duquel il joue de la caisse claire et du hautbois dans la fanfare. Ces deux annĂ©es sont vĂ©cues comme une souffrance et il contracte une maladie rĂ©nale qui compromettra sa santĂ© pendant plus de dix ans. Il retourne Ă  l'École secondaire de musique de Tallinn pour l'annĂ©e scolaire 1956-1957 avec Veljo Tormis pour professeur et assimile facilement toute idĂ©e nouvelle (dont le dodĂ©caphonisme), particuliĂšrement le peu de musique occidentale qu'il peut entendre. Il fait dĂ©jĂ  preuve d'un talent Ă©vident et naturel pour la composition ; un de ses compagnons d'Ă©tude, Ave Hirvesoo, dĂ©clare mĂȘme qu'il « semblait secouer sa manche et des notes en tombaient »[1].

Il entre au conservatoire de Tallinn Ă  l'automne 1957 oĂč il Ă©tudie avec Heino Eller. Les programmes obligatoires comportent Ă©galement l'Ă©conomie politique, l'histoire du Parti communiste et la « science de l'athĂ©isme ». ParallĂšlement, il trouve un emploi d'ingĂ©nieur du son Ă  la radio estonienne, poste qu'il occupe de 1958 Ă  1967[3]. En 1962, l'une de ses compositions Ă©crite pour chƓur d'enfants et orchestre, Notre jardin (1959), le fait connaĂźtre dans toute l'Union soviĂ©tique et lui permet de remporter le Premier Prix des jeunes compositeurs de l'URSS[4]. À cette Ă©poque il est quelque temps directeur musical du ThĂ©Ăątre des Pionniers de Tallinn et compose de la musique pour le thĂ©Ăątre, particuliĂšrement des piĂšces pour les enfants et les marionnettes (Quatre danses faciles pour le piano, Cinq chansons enfantines) ; il reçoit Ă©galement de nombreuses commandes de musiques de film. Quand il sort diplĂŽmĂ© du conservatoire de Tallinn en 1963, sa carriĂšre professionnelle de compositeur est dĂ©jĂ  bien amorcĂ©e[1].

Au dĂ©but des annĂ©es 1960, Arvo PĂ€rt s'initie Ă  la composition sĂ©rielle, dont relĂšvent ses deux premiĂšres symphonies ; cela lui attire immĂ©diatement d'importantes inimitiĂ©s, la musique sĂ©rielle Ă©tant considĂ©rĂ©e comme un avatar de la dĂ©cadence bourgeoise occidentale. Tout aussi incorrectes politiquement dans le contexte soviĂ©tique, ses compositions d'inspiration religieuse, ainsi que sa technique du collage un temps utilisĂ©e, limitent considĂ©rablement le rayonnement de son Ɠuvre[5].

En 1968, en proie Ă  une crise crĂ©atrice, et Ă  la suite de la censure par le rĂ©gime communiste de son Ɠuvre Credo[6] - [5], Arvo PĂ€rt renonce au sĂ©rialisme et plus globalement Ă  la composition elle-mĂȘme, et ce durant une dizaine d’annĂ©es, temps qu'il consacre Ă  l'Ă©tude du plain-chant grĂ©gorien et Ă  celle de compositeurs mĂ©diĂ©vaux français et flamands tels que Guillaume de Machaut, Ockeghem, Obrecht et Josquin des PrĂ©s[3]. Ces Ă©tudes et rĂ©flexions aboutiront Ă  l'Ă©criture d'une piĂšce de style intermĂ©diaire, la Symphonie no 3 (1971).

Son Ă©volution stylistique est notable en 1976 avec la composition d'une piĂšce pour piano devenue cĂ©lĂšbre, FĂŒr Alina, qui marque une rupture avec ses premiĂšres Ɠuvres et qui pose les jalons de son nouveau style, qualifiĂ© par lui-mĂȘme de « style tintinnabuli »[4] - [5]. L'auteur l'explique ainsi : « Je travaille avec trĂšs peu d'Ă©lĂ©ments - une ou deux voix seulement. Je construis Ă  partir d'un matĂ©riau primitif - avec l'accord parfait, avec une tonalitĂ© spĂ©cifique. Les trois notes d'un accord parfait sont comme des cloches. C'est la raison pour laquelle je l'ai appelĂ© tintinnabulation ». L'annĂ©e suivante, PĂ€rt Ă©crira dans ce nouveau style trois de ses piĂšces les plus importantes et reconnues : Fratres, Cantus in Memoriam Benjamin Britten et Tabula rasa.

En 1980, accompagnĂ© de sa famille, il quitte son pays oĂč il est en proie Ă  la censure[4] pour Vienne oĂč il obtient la nationalitĂ© autrichienne. L'annĂ©e suivante il part pour Berlin-Ouest[5]. De frĂ©quents sĂ©jours le conduisent prĂšs de Colchester dans l'Essex. Il revient ensuite en Estonie et vit dĂ©sormais Ă  Tallinn. Son succĂšs jamais dĂ©menti dans tout l'Occident, et particuliĂšrement aux États-Unis[5], a pour inconvĂ©nient de le ranger dans la catĂ©gorie des compositeurs « minimalistes mystiques », avec Henryk GĂłrecki et John Tavener. En 1996, il devient membre de l'AcadĂ©mie amĂ©ricaine des arts et des lettres.

CrĂ©ateur d'une musique Ă©purĂ©e, d'inspiration profondĂ©ment religieuse — il est de confession chrĂ©tienne orthodoxe, et les chants orthodoxes ainsi que les chants grĂ©goriens ont influencĂ© son style sur la modulation lente des sons[5] —, associĂ©e par certains Ă  la musique postmoderne, Arvo PĂ€rt creuse Ă©galement le sillon du style tintinnabuli. Ses Ɠuvres ont Ă©tĂ© jouĂ©es dans le monde entier et ont donnĂ© lieu Ă  plus de 80 enregistrements, ainsi qu'Ă  de trĂšs nombreuses utilisations pour l'illustration sonore de films et de spectacles de danse.

Inspiration et style

Elle se caractérise par l'écriture minimaliste de PÀrt, une musique épurée qui donne une impression de simplicité.

Le premier élément est l'utilisation de rythmes simples tels que « noire, blanche, noire, blanche » ou « blanche, noire, blanche, noire ». Le second élément est le style tintinnabuli. Chez Arvo PÀrt, cette écriture s'inspire ainsi du son de la clochette, lorsqu'un instrument - quel qu'il soit - articule son jeu entre trois notes principales, celle de l'accord parfait d'une gamme.

Cette simplicité se retrouve également dans l'utilisation de notes récurrentes et d'une certaine stabilité de la gamme. PÀrt, contrairement à beaucoup de compositeurs des époques baroque, classique et romantique, n'utilise pratiquement jamais de modulations.

ƒuvres complùtes

Liste chronologique des Ɠuvres complĂštes d'Arvo PĂ€rt[7] :

PremiÚre période (néoclassique et sérielle)

Période intermédiaire (abandon du sérialisme)

DeuxiÚme période (tintinnabulum)

Travail pour le cinéma et utilisation cinématographique

Arvo PÀrt et sa femme Nora en août 2012.

Dans les annĂ©es 1960 et 1970, Arvo PĂ€rt compose, sur commande, plusieurs musiques de film[8]. Cette production est estimĂ©e Ă  prĂšs de quarante bandes originales[9] - [3] dont les plus notables sont Des diamants pour la dictature du prolĂ©tariat (1975) de Grigori Kromanov et L'EnquĂȘte du pilote Pirx (1979) de Marek Piestrak. Le style est imaginatif, mais manque d'unitĂ©[10]. Ce travail n'a pour le compositeur qu'une fonction lucrative et reste sans rapport avec le travail de recherche qui l'occupe Ă  la mĂȘme Ă©poque[10] - [11].

Bien que la musique d'Arvo PĂ€rt Ă  partir de 1976 soit composĂ©e spĂ©cifiquement pour les concerts, le succĂšs des enregistrements discographiques pousse de nombreux rĂ©alisateurs Ă  utiliser, Ă  partir des annĂ©es 1990, des extraits de ses Ɠuvres en leur assignant une fonction critique et narrative importante[12]. L'estimation actuelle regroupe une vingtaine de piĂšces, prĂ©sentes dans plus de cent-cinquante de longs mĂ©trages[11] - [13] - [3]. Parmi ses Ɠuvres sont utilisĂ©es le plus frĂ©quemment FĂŒr Alina, Fratres, Cantus et, plus particuliĂšrement, Spiegel im Spiegel qui apparaĂźt en surimposition d'une variĂ©tĂ© de thĂšmes, notamment la guerre, la maladie en phase terminale, le terrorisme, la compassion et le pardon[11].

D'une maniĂšre plus gĂ©nĂ©rale, y compris dans son utilisation au cinĂ©ma, l'Ɠuvre d'Arvo PĂ€rt peut ĂȘtre considĂ©rĂ©e comme l'agent esthĂ©tique de quelque chose qui est « inaccessible, oubliĂ© ou dĂ©possĂ©dĂ© »[14] propice Ă  l'introspection et Ă  la rĂ©flexion mystique[3].

Spectacle vivant

En 2015, le concert-spectacle Adam's Passion, mis en scÚne par Bob Wilson, est joué dans une ancienne usine de sous-marins à Tallinn.

Principaux enregistrements

La plupart sont parus chez ECM dans la collection New Series et Harmonia Mundi :

Distinctions

Arvo PÀrt recevant la Légion d'honneur des mains de Frédéric Mitterrand en 2011.

Arvo PÀrt est docteur honoris causa de plusieurs universités dans le monde dont celles de Sydney (1996), Tartu (1998), Durham (2003), Fribourg (2007), LiÚge[15] (2009) et Saint Andrews (2010).

Membre de l'AcadĂ©mie amĂ©ricaine des arts et des lettres (dĂ©partement musique) depuis 1996, il a reçu le prix LĂ©onie-Sonning de la musique en 2008 et a Ă©tĂ© nommĂ© chevalier de la LĂ©gion d'honneur en 2011. Il est Ă©galement membre du Conseil pontifical pour la culture depuis 2011. En , il reçoit la distinction d'Archonte du patriarcat ƓcumĂ©nique de Constantinople[16].

Arvo PÀrt a reçu en le Praemium Imperiale dans la section « musique »[17], attribué par l'Association japonaise des beaux-arts.

En 2017, il reçoit le prix Ratzinger pour sa contribution significative dans le domaine de la musique sacrée.

En 2023, il est lauréat du prix Polar Music, récompense considérée comme le « Nobel de la musique »[18].

Hommage

Est nommé en son honneur (4087) PÀrt, un astéroïde de la ceinture principale découvert en 1986[19].

Notes et références

  1. Paul Hillier, Arvo PĂ€rt, Oxford University Press, 1997, 232 pages, pp. 26-27 et 29.
  2. 24 preludes for a fugue, DVD par Dorian Supin
  3. LĂ©opold Tobisch, « La musique d’Arvo PĂ€rt et le tintinnabulisme au cinĂ©ma », France Musique, 19 mai 2020.
  4. « Arvo PÀrt », sur le site de l'Ircam
  5. Arvo PĂ€rt sur l'EncyclopĂŠdia Britannica.
  6. Richard Holding, « Arvo PÀrt, la musique qui ramÚne Adam au paradis », sur lemondedesreligions.fr, (consulté en )
  7. (de + en) « Catalogue des Ɠuvres d'Arvo PĂ€rt », sur le site d'Universal Edition
  8. Laura Dolp, « Arvo PÀrt in the marketplace », in Shenton 2012, p. 189.
  9. Laura Dolp, « Arvo PÀrt in the marketplace », in Shenton 2012, p. 190, note 62.
  10. Hillier 1997, p. 74.
  11. Laura Dolp, « Arvo PÀrt in the marketplace », in Shenton 2012, p. 190.
  12. Laura Dolp, « Arvo PÀrt in the marketplace », in Shenton 2012, p. 177.
  13. (en) Arvo PĂ€rt sur l’Internet Movie Database.
  14. Kaire Maimets-Volt, « Mediating the ‘Idea of One’: Arvo PĂ€rt's Pre-existing Film Music », thĂšse de doctorat, AcadĂ©mie estonienne de musique et de thĂ©Ăątre, 2009, p. 188, citĂ© par Laura Dolp, « Arvo PĂ€rt in the marketplace », in Shenton 2012, p. 178.
  15. Cérémonie de rentrée académique 2009.
  16. Visite du patriarche BartholomĂ©e en Estonie: le 8 septembre – Le compositeur Arvo PĂ€rt Ă©levĂ© Ă  la dignitĂ© d’archonte sur le site www.orthodoxie.com le 10 septembre 2013.
  17. « Arvo PÀrt remporte le Praemium Imperiale de musique », France Musiques, (consulté le ).
  18. La Rédaction, « Arvo PÀrt reçoit le prestigieux Polar Music Prize », sur Diapason,
  19. (en) « (4087) PĂ€rt », dans Dictionary of Minor Planet Names, Springer, (ISBN 978-3-540-29925-7, DOI 10.1007/978-3-540-29925-7_4065, lire en ligne), p. 349–349

Annexes

Bibliographie

  • (en) K. Robert Schwarz, Minimalists, Londres, Phaidon, coll. « 20th century composers », , 239 p. (ISBN 978-0-7148-4773-3, BNF 41256974)
  • (en) Paul Hillier, Arvo PĂ€rt, Oxford/New York, Oxford University Press, coll. « Oxford studies of composers », , 219 p. (ISBN 978-0-19-816616-0, BNF 35871200)
  • (de) Oliver Kautny, Arvo PĂ€rt zwischen Ost und West : Rezeptionsgeschichte, Metzler Verlag, Stuttgart, 2002 (ISBN 978-3-476-45306-8)
  • (de) Hermann Conen (dir.), Arvo PĂ€rt : die Musik des Tintinnabuli-Stils, Dohr Verlag, Cologne, 2006 (ISBN 978-3-936655-33-9)
  • (en) Andrew Shenton (dir.), The Cambridge Companion to Arvo PĂ€rt, Cambridge University Press, coll. « Cambridge companions to music », , 250 p. (ISBN 978-0-521-27910-9)
  • Leopold Brauneiss et Enzo Restagno, Arvo PĂ€rt, Actes Sud Beaux Arts / Classica, Arles, 2012 (ISBN 978-2-330-01241-0)
  • Julien Teyssandier, Arvo PĂ€rt, Ă©ditions Pierre-Guillaume de Roux, Paris, 2017 (ISBN 978-2-36371-176-2), 250 p. – prix PellĂ©as

Articles connexes

Liens externes

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