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Armand Gasté

Armand Gasté, né à Vire le et mort à Caen le , est un historien et homme de lettres français, spécialiste de l'histoire littéraire de Normandie.

Biographie

Carrière

Au sortir du collège de Vire, GastĂ© dĂ©buta dans l’Instruction publique comme maĂ®tre d’étude Ă  Lisieux, puis au LycĂ©e de Caen. Après avoir suivi les cours de l’École normale supĂ©rieure de la rue d'Ulm, oĂą il avait Ă©tĂ© reçu en 1861, GastĂ© passa l’agrĂ©gation de lettres en 1863. SpĂ©cialiste de la poĂ©sie des XVe et XVIe siècles, il occupa successivement les chaires de troisième Ă  Troyes et au collège GĂ©rĂ´me de Vesoul, la seconde puis la première au Mans et, en 1872, la mĂŞme chaire Ă  Caen. En 1874, après avoir Ă©tĂ© reçu en Sorbonne docteur ès lettres avec deux thèses qui lui valurent les Ă©loges du jury[1]. Après avoir refusĂ© une chaire Ă  la FacultĂ© des lettres d’Aix pour ne pas s’éloigner de sa province natale, il fut nommĂ© maĂ®tre de confĂ©rences de littĂ©rature ancienne Ă  la FacultĂ© des lettres de Caen, le . ChargĂ© du cours de littĂ©rature latine et d’institutions romaines de 1881 Ă  1884, il devint professeur titulaire Ă  la fin de la mĂŞme annĂ©e. Le , il fut transfĂ©rĂ© dans la chaire de littĂ©rature française qu’il occupa jusqu’à sa retraite en 1901. Il fut Ă©galement dĂ©lĂ©guĂ©, pendant deux ans, dans la chaire de littĂ©rature et d’art normands.

Études

En dehors de certaines Ă©ditions d’ouvrages classiques, qu’il a publiĂ©es, GastĂ© s’est attachĂ© spĂ©cialement Ă  l’étude des poètes de la Normandie. On lui doit au moins cent cinquante diffĂ©rentes publications : gros volumes, brochures, ou simples plaquettes, mais le sujet de prĂ©dilection auquel il a consacrĂ© sa première et sa dernière Ĺ“uvre est celle de la question de l’origine des « Vaux-de-Vire Â», qui a longtemps soulevĂ© de vives polĂ©miques. Dans son premier essai, datĂ© du , alors qu’il Ă©tait encore Ă  l’École normale, qui est une Ă©dition des NoĂ«ls virais de Jean Le Houx, il remettait dĂ©jĂ  en cause, dans l’introduction, la paternitĂ© des chansons Ă©ditĂ©es par Jean Le Houx et attribuĂ©es Ă  Olivier Basselin. L’un des premiers, Beaurepaire ainĂ© avait, dès 1858, Ă©tabli que, si l’existence d’Olivier Basselin et son rĂ´le littĂ©raire ne pouvaient ĂŞtre mis en doute, il n’en Ă©tait pas de mĂŞme des Ĺ“uvres qui lui Ă©taient attribuĂ©es. GastĂ© reprit le problème, l’étudia sous toutes ses faces dans des publications diffĂ©rentes et donna la solution dĂ©finitive. En 1886, une autre Ă©dition de Chansons normandes du XVe siècle, publiĂ©es pour la première fois d’après les manuscrits de Bayeux et de Vire l’amena Ă  donner, la mĂŞme annĂ©e : Olivier Basselin et les compagnons du Vau de Vire, leur rĂ´le pendant les guerres anglaises et leurs chansons en interrogeant la tradition et les documents authentiques pour arriver Ă  des conclusions acceptĂ©es par les critiques, entre autres Gaston Paris, sur le double rĂ´le d’Olivier Basselin et de ses compagnons. Les rĂ©sultats de ces recherches uniquement fondĂ©es sur les sources confirment les hypothèses de Le Roux de Lincy selon lesquelles l’existence d’Olivier Basselin au milieu du XVe siècle est certaine, qu’il a Ă©tĂ© foulon dans le Val de Vire, et qu’il a composĂ© des chansons devenues rapidement populaires, qu’il existait autour de lui une sorte d’association de joyeux vivants, cultivant la chanson et la bouteille s’appelant les Compagnons vaudevirois ou du Vau de Vire, que cette association prit, lors du soulèvement de la Normandie contre les Anglais, un caractère politique et belliqueux, et contribua, avec d’autres compagnies du mĂŞme genre, Ă  fomenter par ses chants et mĂŞme par ses actes la haine et l’extermination des Anglais, que Basselin fut tuĂ©, dans un engagement malheureux, par les Anglais qui semblent avoir pillĂ© aussi le Val de Vire et beaucoup maltraitĂ© ses compagnons.

Quelques mois plus tard, GastĂ© donnait : les Vaux de Vire de Jean Le Houx, publiĂ©s pour la première fois d’après le manuscrit autographe du poète, Ă©dition refaisant la biographie de l’avocat Jean Le Houx, auquel sont restituĂ©es les chansons attribuĂ©es Ă  Basselin. Toujours dans le mĂŞme ordre d’idĂ©es, GastĂ© Ă©crivait, en 1883, une bonne Ă©tude critique et historique des NoĂ«ls et Vaudevires du manuscrit de Jean PorĂ©e, sieur de Viresne, trĂ©sorier de l’église Notre-Dame de Vire (Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1883). L’origine de quelques NoĂ«ls recueillis et copiĂ©s par PorĂ©e doit remonter au temps de Basselin et plusieurs sont dus Ă  Jean Le Houx. La sociĂ©tĂ© littĂ©raire, la Pomme, ayant mis au concours, en 1886, une Étude sur Olivier Basselin, GastĂ© obtint le prix proposĂ© avec un court et substantiel article. Les conclusions de GastĂ© ayant Ă©tĂ© disputĂ©es par Victor Patard dans douze articles parus, en 1888, dans Le Virois, plus tard rĂ©unies dans un ouvrage intitulĂ© La VĂ©ritĂ© dans la question Olivier Basselin et Jean Le Houx, Ă  propos du « Vau-de-Vire Â» (Paris, H. Jouve, 1891), GastĂ© lut, en 1889, Les Insurrections populaires en Normandie au XVe siècle pendant l’occupation anglaise et la question d’Olivier Basselin devant l’AcadĂ©mie des sciences morales et politiques. Enfin, il fit une rĂ©impression en 1901, quelques mois avant sa mort, pour la SociĂ©tĂ© des bibliophiles normands du Livre des chants nouveaux de Vaudevire de Jean Le Houx, avec une Introduction et des Notes, d’après l’édition donnĂ©e Ă  Vire par l’imprimeur Jean de Cesne, vers 1669 (Rouen, Imprimerie LĂ©on Gy, 1901).

Sociétés savantes

Élu membre titulaire de l’Académie des sciences, arts et belles-lettres de Caen, en 1873, il succéda à Julien Travers comme secrétaire de cette compagnie en 1881, et en fut l’âme pendant vingt ans. À chaque séance, dès que l’ordre du jour n’appelait pas une lecture d’un autre membre, il communiquait à ses confrères d’intéressantes recherches sur quelque sujet d’histoire ou de critique littéraire. C’est ainsi qu’il a enrichi les Mémoires de l’Académie d’une vingtaine d’articles, souvent fort étendus. Sa collaboration fut également des plus actives à la Société des Antiquaires de Normandie, pour laquelle il fit souvent de savantes communications et écrivit pour son Bulletin des articles plus ou moins étendus. L’activité de Gasté, à la Société des Beaux-Arts de Caen, dont il fut plusieurs fois président, ne fut pas moins grande. Enfin, Gasté composa une foule d’articles de philologie, de critique littéraire, d’histoire ou d’archéologie pour d’autres sociétés dont il était membre et pour une foule de recueils tels que la Revue d'histoire littéraire de la France, les Annales de la Faculté des Lettres de Caen ou celle de Bordeaux, le Bulletin historique et philologique, la Nouvelle Revue, la Revue Bossuet, la Revue catholique de la province de Normandie, etc.

Publications

  • Les NoĂ«ls virois de Jean le Houx, Caen, Le Gost-ClĂ©risse, 1862, in-16.
  • Chansons normandes du XVe siècle publiĂ©es pour la première fois sur les mass. de Bayeux et de Vire avec notes et introduction, Caen, E. Le Gost-ClĂ©risse, 1866, in-18.
  • (la) De Scoliis sive de Carminibus convivalibus apud Graecos, Paris, E. Thorin, 1873, in-8°.
  • Étude critique et historique sur Jean le Houx et le Vau de Vire Ă  la fin du XVe siècle, thèse française, Paris, E. Thorin, 1874, in-8°.
  • Les Serments de Strasbourg, Ă©tude critique, historique et philologique, Paris, E. Belin, 1888, in-8°.
  • Les Insurrections populaires en Basse-Normandie au XVe siècle, pendant l’occupation anglaise et la question d'Olivier Basselin, Caen, H. Delesques, 1889, in-8°.
  • Les Frères Le Chevallier d’Aigneaux, Caen, Le Gost-ClĂ©risse, 1876.
    Biographie des traducteurs en vers d’Horace et de Virgile, au XVIe siècle.
  • Pierre Vengeons, recteur de l’UniversitĂ© de Caen et auteur de l’Office et des Hymnes de saint Exupère (BrĂ©viaire de Bayeux).
  • Deux lettres inĂ©dites de la princesse Palatine, mère du RĂ©gent, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1879.
    Adressées à l’évêque d’Avranches, P.-D. Huet.
  • Notes critiques sur un manuscrit de JuvĂ©nal, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1880.
  • Quelques documents inĂ©dits sur l’administration provinciale de Louis XIV, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1881.
    Lettres écrites à P.-D. Huet par Louis XIV et ses ministres, Colbert, Seignelay, Châteauneuf, Pontchartrain et La Vrillière, avec plusieurs autres lettres inédites de Louis de Bourbon (plus tard le grand Condé) et du duc du Maine, relatives à la révocation de l’Édit de Nantes, à l’envoi à la Monnaie des trésors des églises, aux poursuites contre les Maximes des Saints, de Fénelon, etc.
  • Pierre Corneille au Palinod de Caen, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1886.
  • La Jeunesse de Malherbe (documents et vers inĂ©dits), Caen, Henri Delesques, 1890.
    Article expliquant pourquoi le poète quitta son pays natal pour s’en aller chercher aventure ailleurs.
  • Bossuet, Lettres et pièces inĂ©dites ou peu connues, Caen, Henri Delesques, 1893.
    Recueillies d’après la collection d’Amable Floquet.
  • Malherbe, concessionnaire de terrains Ă  bâtir sur le port de Toulon, avec un appendice : Le portrait de Malherbe par Pinsonius.
  • Michel Menot. En quelle langue a-t-il prĂŞchĂ© ? — Son genre d’éloquence. — Essai de restitution, en français du commencement du XVIe siècle, des sermons sur « l’Enfant prodigue Â» et sur « la Madeleine Â», Caen, Henri Delesques, 1897 ; rĂ©Ă©d. Paris, Champion, 1971.
    Étude philologique très fouillée.
  • Une demi-victime de Boileau. Les PoĂ©sies de Jean Bardou, curĂ© de Cormelles-le-Royal, près Caen (1621-1668), Caen, Henri Delesques, 1899.
    L’un des membres de l’ancienne Académie de Caen qui fut l’ami des beaux esprits de son temps.
  • Du rĂ´le de Scarron dans la « Querelle du Cid Â», Caen, Henri Delesques, 1900.
    Par un ingĂ©nieux rapprochement des caractères et des bandeaux employĂ©s par un imprimeur du Mans, l’auteur Ă©tablit que les deux pamphlets grossiers, « L’Apologie pour Monsieur Mairet Â» et « La suite du Cid en abrĂ©gĂ© Â», sont bien de Scarron, alors chanoine de la cathĂ©drale du Mans.
  • Voltaire Ă  Caen en 1713, Caen, Henri Delesques, 1901.
  • Le Journal de bord du chevalier de Camilly.
    Celui-ci avait été chargé, en 1721, de reconduire à Constantinople, Méhémet Effendi, l’ambassadeur turc dont la mission en France avait échoué.
  • Un autographe de Victor Hugo, curieuses notes de voyage.
  • Lettres inĂ©dites de P.-D. Huet Ă  son neveu de CharsignĂ©, Caen, Delesques, 1901.
    Précieux recueil, publication dont la deuxième partie sera une œuvre posthume.
  • Tables chronologique, mĂ©thodique et alphabĂ©tique des travaux, insĂ©rĂ©s dans les MĂ©moires de l’AcadĂ©mie des Sciences, Arts et Belles-Lettres de Caen, depuis 1754 jusqu’en 1893.
  • Daniel Huet et les Échevins de Caen.
  • NoĂ«ls et Vaudevires du manuscrit de Jean PorĂ©e, Ă©tude critique et historique, Caen, F. Le Blanc-Hardel, 1883.
    Ce mémoire a valu à son auteur la première mention honorable au concours des Antiquités nationales.
  • La Chanson des Faux-nobles, du registre de Monts (Calvados).
    Gasté l’attribuait à un certain Bousseau, avocat des fermes, mais d’après Eugène de Beaurepaire, l’auteur s’appelait plus probablement Boisleau ou Boileau.
  • Ă€ propos d’Olivier Basselin et de l’édition des Vaudevires de Louis Dubois de 1821, s.l., s.n., [v. 1898].
  • Les Tombeaux des Matignon Ă  Torigni-sur-Vire, Paris, Plon-Nourrit et Cie, 1900.
  • Le Livre des Chants nouveaux de Vaudevire, Rouen, LĂ©on Gy, 1901.
  • Les Droits de l’abbaye de Troarn sur l’église Notre-Dame, sur la chapelle du château de Vire, et sur le collège et les Ă©coles de Vire.
  • Talma Ă  Caen (1826) ; notes et autographe, Caen, F. Le Blanc-Hardel, s.d..
    Curieux souvenirs des représentations du célèbre tragédien.
  • Les Collections de Verrès, Caen, Le Blanc-Hardel, 1883.
  • Un chapiteau de l’église Saint-Pierre de Caen, Caen, H. Delesques, 1887.
    Savante étude d’archéologie et d’histoire littéraire à propos de sculptures qui, dans quelques églises normandes, représentent des scènes tirées des Romans de la Table-Ronde et des Fabliaux.
  • Les Tapisseries des Ursulines Ă  Caen, Caen, s.n., 1893.
    Le sujet en est l’embarquement de sainte Ursule et son martyre.
  • Le Portrait original de d’Alembert par Quentin de La Tour, Caen, C. Valin ; Paris, E. Plon, Nourrit et Cie, 1896.
  • Le MusĂ©e de Vire, sa crĂ©ation, ses collections, et en particulier ses objets d’art, Caen, C. Valin, 1896.
    Recherches sur les origines et la valeur des collections d’une petite ville.
  • LĂ©onor Couraye du Parc, Caen, C. Valin, 1896.
    Biographie du peintre granvillais.
  • La Querelle du Cid, Paris, H. Welter, 1898.
  • Incendie du musĂ©e d’Avranches, Caen, C. Valin, 1901.
    Avec le catalogue des tableaux, dessins et sculptures de cet établissement qui ont été anéantis.

Distinctions

Sources

  • Émile Travers, « Notice sur M. Armand GastĂ© Â», MĂ©moires de l’AcadĂ©mie nationale des sciences arts et belles-lettres de Caen, t. 3-27, 1903.

Notes et références

  1. Dans sa thèse latine, De Scoliis, sivede convivalibus carminibus apud GrĹ“cos, GastĂ© examinait d’abord ce qu’étaient les Scolies chez les Grecs, oĂą et quand elles Ă©taient chantĂ©es et recherchait l’origine de ce nom de scolion donnĂ© aux convivales cantilenĹ“ ; puis, il parlait du rameau de myrte portĂ© Ă  la main par les chanteurs des scolies, du mètre de ces poĂ©sies et des principaux auteurs auxquelles elles sont dues, enfin, des plus populaires de ces compositions, telles que celles d’Harmodius et d’Aristogiton, d’Admète et de TĂ©lamon, des scolies en l’honneur des dieux, morales, historiques, et de celles destinĂ©es aux banquets, au jeu du cottabus qui consistait Ă  jeter bruyamment un liquide contre un vase d’airain, amoureuses ou plaisantes. Il terminait par quelques mots sur le Scolion Hybriæ Cretensis, sur les scolies attribuĂ©es Ă  StĂ©sichore par Aristophane, enfin sur Bacchylide de CĂ©os, qu’il faut, selon lui, mettre au nombre des auteurs des compositions de ce genre. Sa thèse française avait pour titre : Jean Le Houx et le Van de Vire Ă  la fin du XVIe siècle est une Ă©tude historique et critique sur un sujet dont il s’est occupĂ© toute sa vie. Dans l’introduction, il posait nettement la thèse qu’il entendait dĂ©velopper, selon laquelle l’auteur des chansons attribuĂ©es Ă  Olivier Basselin, est l’avocat de Vire, de la fin du XVIe siècle Jean Le Houx. Il a montrĂ©, en examinant le travail des Ă©diteurs de 1811 pour le rĂ©futer avec soin, que les doutes Ă©mis, de 1833 Ă  1858, par Julien Travers, Boisard, Edelestand du MĂ©ril, Boiteau, Eugène de Beaurepaire, sur la paternitĂ© de certaines pièces qui leur semblaient devoir ĂŞtre attribuĂ©es Ă  Jean Le Houx, Ă©taient infondĂ©s et que c’était bien Le Houx qui avait composĂ© les pièces connues sous le nom de « vaudevires Â». Le manuscrit de l’avocat virois, conservĂ© Ă  la Bibliothèque de Caen, est en effet le manuscrit autographe d’un auteur prĂ©parant une Ă©dition dĂ©finitive de ses Ĺ“uvres.
  2. « Cote LH/1084/58 », base Léonore, ministère français de la Culture

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