Accueil🇫🇷Chercher

Annie Steiner

Annie Steiner, née le à Marengo (Algérie française) et morte le [1], est une militante algérienne du FLN.

Annie Steiner
Biographie
Naissance
Décès
(Ă  93 ans)
Alger
Nom de naissance
Annie Virginie Blanche Fiorio
Nationalités
Activités
Autres informations
Conflit

Algérienne d'origine française, fille de pieds-noirs, juriste de formation, elle s'engage dans les Centres sociaux, membre du "réseau bombes" de Yacef Saâdi. Arrêtée le , elle est condamnée en mars 1957 par le Tribunal des forces armées d'Alger à cinq ans de réclusion pour aide au FLN, et incarcérée à la prison de Barberousse. Elle est libérée en 1961.

Biographie

Diplômée en 1949, elle travaille dans les Centres sociaux algériens, créés par Germaine Tillion (figure de la résistance et ethnologue anticolonialiste entrée au Panthéon en 2015)[2]. Leur mission est de soigner et d’alphabétiser la population. Là, avec ses collègues, elle fait face à la misère des Algériens.

Un souvenir : lors de la « Toussaint rouge », le , elle est chez elle avec son mari et deux amis. SpontanĂ©ment, elle applaudit Ă  la nouvelle. Son entourage sourit. Il ignore qu’elle entre, peu de temps après, en contact avec des militants du FLN. « Je ne militais dans aucun parti et les AlgĂ©riens, sans doute, trouvaient ma dĂ©cision Ă©tonnante. Ils ont peut-ĂŞtre fait une enquĂŞte sur moi et ils m’ont acceptĂ©e peu après, raconte-t-elle. Ils m’ont demandĂ© : " Jusqu’oĂą ĂŞtes-vous prĂŞte Ă  travailler pour le FLN ? ". J’ai rĂ©pondu : "Je m’engage totalement." » .

Annie Fiorio-Steiner devient ainsi agent de liaison du FLN, transportant des lettres et des couffins : Â« On ne m’a jamais demandĂ© de poser de bombes. J’ai transportĂ© des ouvrages sur la fabrication d’explosifs mais j’ai surtout transportĂ© des lettres qui ont permis les accords entre le FLN et le PCA (Parti communiste algĂ©rien). Â» L’ancienne militante reste très modeste quant Ă  son rĂ´le durant la guerre. « J’ai pu faire beaucoup de choses car je n’étais pas fichĂ©e, mais non parce que j’étais meilleure que les autres. Â»

Elle est arrĂŞtĂ©e Ă  son travail en et dĂ©tenue Ă  la prison de Barberousse, oĂą sont enfermĂ©s les militants du FLN avant leur procès. LĂ , elle rencontre ses « sĹ“urs Â», des moudjahidates, qui l’accompagneront durant sa captivitĂ©. Meriem, Fadila et Safia Ă©taient infirmières au maquis. Avec elles, Annie ressent une rĂ©elle solidaritĂ©, un lien indissociable face Ă  la duretĂ© et la solitude de la prison. Elle est intarissable sur le sujet. « Sans solidaritĂ©, il n’y a plus de groupe. Il fallait faire bloc et se soutenir mutuellement. Â» Avant son procès, ses "sĹ“urs" lui prĂ©parent des bigoudis et l’habillent avec les moyens du bord : « Surtout, il ne fallait pas provoquer de la pitiĂ© au tribunal. Â»

Le à l’aube, dans la cour de la prison de Barberousse où Annie Steiner est emprisonnée, sont guillotinés trois militants nationalistes, Mohamed Ben Ziane Lakhnèche dit « Ali Chaflala », Ali Ben Khiar Ouennouri dit « P’tit Maroc » et Fernand Iveton, seul Européen exécuté pendant la guerre d'Algérie. Le soir même dans sa cellule, Annie Steiner compose le poème Ce matin ils ont osé, ils ont osé vous assassiner[3].

En , elle est condamnĂ©e Ă  cinq ans de prison et est emprisonnĂ©e Ă  Maison-CarrĂ©e oĂą elle rejoint des prisonnières de droit commun. Elle raconte, Ă©mue : « J’ai d’abord passĂ© plusieurs jours au cachot oĂą Ă©tait enfermĂ©e une femme qui avait perdu la raison. La surveillante qu’on appelait Baqara (vache en arabe) m’a ensuite amenĂ©e dans les "cages Ă  poules". C’était un grand dortoir avec des cellules très petites et grillagĂ©es. Devant moi, il y avait toutes les AlgĂ©riennes, assises sur un banc posĂ© contre le mur. Â»

Annie Steiner continue Ă  faire front avec ses "sĹ“urs" et paye ses actions au prix fort. « Nous avons obtenu de rencontrer le CICR (ComitĂ© international de la Croix Rouge) lors de sa venue dans notre prison. Devant le directeur, j’ai affirmĂ© qu’il y avait des vers dans la viande qu’on nous servait. J’ai alors passĂ© trois mois en prison disciplinaire Ă  Blida (Ă  50 km sud-ouest d'Alger, ndlr). Â» Dans cette nouvelle prison, la jeune femme ne peut pas sortir de sa cellule. Elle obtient une demi-heure de sortie par jour après une grève de la faim de deux semaines.

Annie Fiorio-Steiner est ensuite envoyĂ©e en France, dans des prisons de Paris, Rennes (Ouest) et Pau (Sud). En 1961, elle est libĂ©rĂ©e et se rend en Suisse alĂ©manique oĂą rĂ©sident son mari et ses deux petites filles. Â« Après mon arrestation, il avait quittĂ© l’AlgĂ©rie et il avait emmenĂ© mes filles qu’il avait arrachĂ©es Ă  ma mère. J’ai essayĂ© de reprendre leur garde mais j’ai perdu mon procès devant les tribunaux suisses. »

Ă€ Genève, elle rencontre Meriem qui lui paie le voyage pour rentrer en AlgĂ©rie. Ă€ l’entrĂ©e du port d’Alger, des femmes, des Ă©migrĂ©es kabyles de retour au pays, lancent des youyous pour cĂ©lĂ©brer la levĂ©e du drapeau algĂ©rien sur le bateau. Sans le sou, Annie est accueillie par ses "sĹ“urs" de prison. Peu de temps après, elle occupe un poste de directeur au SecrĂ©tariat gĂ©nĂ©ral du Gouvernement, poste qu’elle gardera plus de trente ans.

Ă€ l'indĂ©pendance de l'AlgĂ©rie, elle opte pour la nationalitĂ© algĂ©rienne[4], et n’a dès lors plus jamais quittĂ© son pays. Son attachement aux principes du l’incitait Ă  se rĂ©volter encore vers la fin de sa vie.

Références

  1. « La Moudjahida Annie Steiner sera inhumé aujourd’hui à El Alia », El Watan, (consulté le )
  2. Sylvie Braibant, « Germaine Tillion et Geneviève de Gaulle-Anthonioz, deux résistantes au Panthéon », sur TV5Monde, (consulté le )
  3. Le poème se termine ainsi : « En nos corps fortifiés / Que vivent votre idéal / Et vos sangs entremêlés / Pour que demain ils n'osent plus / Ils n'osent plus nous assassiner. » Publié en 1963 dans Espoir et parole, poèmes algériens recueillis par Denise Barrat avec des dessins de Abdallah Benanteur, Paris, Éditions Seghers. Le poème d’Annie Steiner est repris intégralement en 1986 dans Pour l’exemple, l’affaire Fernand Iveton de Jean-Luc Einaudi (Paris, Éditions L’Harmattan) et il est cité dans De nos frères blessés de Joseph Andras (Arles, Actes Sud) en 2016. Le documentaire de 2004 de Daniel Edinger, Fernand Iveton, guillotiné pour l’exemple, se termine sur une lecture du poème.
  4. « Qui est Annie Steiner ? », Setif.info (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Jean-Louis GĂ©rard, Dictionnaire historique et biographique de la guerre d'AlgĂ©rie, Éditions Jean Curtuchet, 2001 (ISBN 9782912932273)

Articles connexes

Liens externes

Cet article est issu de wikipedia. Text licence: CC BY-SA 4.0, Des conditions supplémentaires peuvent s’appliquer aux fichiers multimédias.