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Anglic de Grimoard

Anglic Grimoard (v.1320-1388), frĂšre d’Urbain V, vicaire gĂ©nĂ©ral du diocĂšse d'Avignon, cardinal-prĂȘtre au titre de Saint-Pierre-aux-Liens, puis cardinal-Ă©vĂȘque d’Albano, doyen du collĂšge des cardinaux (1373-1388), dit le cardinal Anglicus (1366-1388).

Anglic de Grimoard
Image illustrative de l’article Anglic de Grimoard
Anglic de Grimoard
Biographie
Naissance v. 1320
Grisac (France)
Ordre religieux Augustins
DĂ©cĂšs et
Avignon
Cardinal de l'Église catholique
Créé
cardinal
par le
pape Urbain V
Titre cardinalice Cardinal-prĂȘtre de Saint-Pierre-aux-Liens
Cardinal-Ă©vĂȘque d'Albano

Blason
.html (en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org

Biographie

Le chĂąteau de Grizac
La Tour Anglica Ă  Barbentane

Il naquit Ă  Grisac, dans le diocĂšse de Mende, au cƓur du GĂ©vaudan. Il Ă©tait le fils de Guillaume II Grimoard[1] et d’AmphĂ©lise de Montferrand[2].

Chanoine de Saint-Ruf

Tandis que son frĂšre entrait chez les bĂ©nĂ©dictins du Monastier, prĂšs de Chirac, il fut placĂ© chez les chanoines rĂ©guliers de saint Augustin de Saint-Ruf Ă  Valence. ProtĂ©gĂ© par la Maison d’Aigrefeuille, une famille limousine apparentĂ©e Ă  ClĂ©ment VI, sa carriĂšre fut calquĂ©e sur celle de son aĂźnĂ©. NommĂ© auditeur de la Sainte Rote par Innocent VI en 1357, il devint prieur de Saint-Pierre-de-Die l’annĂ©e suivante[2]. Elle aurait pu s’arrĂȘter lĂ  si son frĂšre n'Ă©tait devenu pape.

Vicaire général d'Avignon en butte aux Grandes Compagnies

Le , il fut nommĂ© responsable par son frĂšre de l’évĂȘchĂ© d’Avignon dont il fut le vicaire gĂ©nĂ©ral[2]. Responsable du diocĂšse d’Avignon, Anglic Grimoard combla de ses bienfaits l’abbaye de Saint-Ruf d'Avignon, maison mĂšre de celle de Valence. Au cours de l’annĂ©e 1363, les mercenaires libĂ©rĂ©s par l’une des nombreuses trĂȘves de la Guerre de Cent Ans, descendirent la vallĂ©e du RhĂŽne. Les États de Provence ordonnĂšrent la mise en dĂ©fense de chaque ville. Le vicaire gĂ©nĂ©ral fit alors mettre en chantier la Tour Anglica Ă  Barbentane[3].

Dans le courant du mois de , les Grandes Compagnies ravagĂšrent le Languedoc. À tel point que, le 29 aoĂ»t, Urbain V Ă©crivit au lieutenant gĂ©nĂ©ral du roi, Arnoul d'Audeneham, pour excuser l’absence, Ă  la prochaine rĂ©union des États du Languedoc Ă  NĂźmes, de Pierre d'Aigrefeuille, Ă©vĂȘque d’UzĂšs, et d’Anglic Grimoard. Le pape invoqua comme prĂ©texte que ces deux prĂ©lats Ă©taient occupĂ©s par ses affaires.

Il est vrai que le pape avait chargé son frÚre de transmettre, sous deux mois, à la Révérende Chambre Apostolique la décime accordée à Jean II le Bon pour la croisade à laquelle il devait participer avec le roi de Chypre, Pierre Ier de Lusignan[4].

Du service divin au service du vin

Tout danger passĂ©, le , Urbain V, aprĂšs conseil du chapitre de son Ă©glise autorisa son frĂšre Ă  disposer Ă  sa volontĂ© de la Vinea Vespalis d’Avignon[5]. Au dĂ©but de l’annĂ©e 1365, Anglic donna procuration Ă  Isnard Garin et Ă  Sicard du Fresne pour modifier le privilĂšge de l’évĂȘque d’Avignon et de son Église sur ce vignoble urbain. Le 25 mars, Sicard du Fresne, en tant que procureur Ă©piscopal, dĂ©signa trois Juifs pour l’estimer. Enfin le 10 juillet, par bulle, Urbain V autorisa son frĂšre Ă  exempter ses feudataires des charges de ces vignes[6].

Il fallut se remettre Ă  l’ouvrage un an plus tard. En effet, en 1366, eut lieu la premiĂšre invasion historiquement connue de sauterelles en Provence[7]. Ce fut aprĂšs leur passage qu’Anglic et Jean Pellegrin, jardinier pontifical, firent planter une immense muscadiĂšre, aux portes d’Avignon, Ă  Champfleury, sur l’emplacement du cimetiĂšre des pestifĂ©rĂ©s de 1348.

Cardinal et légat pontifical en Italie

Page du terrier d'Anglic de Grimoard
Portrait d'Anglic de Grimoard offrant son terrier Ă  la Vierge et l'Enfant

Devenu doyen du chapitre cathĂ©dral d’York, en 1366, cette mĂȘme annĂ©e, Anglic reçut son chapeau de cardinal au titre de Saint-Pierre-aux-Liens, lors du consistoire du 18 septembre[2]. La LivrĂ©e d’Anglic Grimoard Ă©tait situĂ©e dans l’ancien monastĂšre des Dames de Saint-Laurent. C’est aujourd’hui le siĂšge de l’HĂŽtel de Ville d’Avignon sur la place de l’Horloge. Un an plus tard, Urbain V lui accordait le titre d'Ă©vĂȘque suburbicaire d’Albano[2].

Ce fut Ă  cette pĂ©riode qu'il fit rĂ©aliser un terrier. Celui-ci possĂšde une enluminure exceptionnelle. Elle reprĂ©sente la Vierge et l'Enfant JĂ©sus devant lesquels sont agenouillĂ©s Anglic Grimoard tenant dans ses mains le terrier dans un geste d'offrande et, derriĂšre lu, le clavaire Sicard du Fraisse, auteur de l'ouvrage. La miniature est l'Ɠuvre de Bernard de Toulouse et d'une certaine Marie. L'ensemble est datĂ© entre 1366 et 1368[8].

Son frĂšre l’envoya alors en Italie, dans le Patrimoine de Saint-Pierre, en tant que lĂ©gat et vicaire au temporel[9]. Il rĂ©sida Ă  Bologne de mars 1368 Ă  juillet 1371. Ce fut au cours de ce sĂ©jour, en 1370, qu’il se vit honorer du titre d’archiprĂȘtre de la basilique patriarcale du Latran[2]. Cette mĂȘme annĂ©e il procĂ©da Ă  la translation des reliques de Saint ElzĂ©ar de Sabran, Ă  laquelle participa l'AbbĂ© Paul Atanulphi, de l'Abbaye Notre-Dame de Valsaintes[10]

Croisade contre les Visconti

La Guivre : blason des Visconti

Le retour de la papautĂ© Ă  Rome voulu par Urbain V ne fut pas du goĂ»t de tous. Au cours du mois d’avril 1368, BarnabĂ© Visconti et Can Signorio, seigneur de VĂ©rone, avaient envahi la rĂ©gion de Mantoue[11].

Dans le mĂȘme temps, pour rencontrer officiellement sa SaintetĂ©, l’empereur germanique, roi d’Italie, faisait sa calata, cette visite si redoutĂ©e des citĂ©s de la pĂ©ninsule. Charles IV de Luxembourg Ă©tait d’ailleurs arrivĂ© Ă  Padoue le 17 mai.

Le pape avait espoir que l'empereur prit la tĂȘte de sa croisade anti-Visconti. Le 12 juin, Charles IV arriva Ă  Figheruola oĂč il fut rejoint par le cardinal Anglicus Ă  la tĂȘte des troupes pontificales puis par celles de la reine Jeanne. PĂ©trarque, lui-mĂȘme quitta Arqua pour se rendre Ă  Udine auprĂšs de l'empereur afin de participer Ă  la guerre contre les Visconti.

Mais le , pour se dĂ©barrasser de l’affaire milanaise, l’empereur Charles VI fit conclure une trĂȘve avec BarnabĂČ Visconti. Le cardinal de Grimoard rejoignit son frĂšre Ă  Montefiascone. Le pape dĂ©goĂ»tĂ© lui fit part de son intention de retourner Ă  Avignon et de lui confier la direction des États pontificaux italiens.

Pprotecteur des moniales

De retour Ă  Avignon, en 1372, dix ans aprĂšs le passage des Tard-Venus, le cardinal Grimoard prit sous sa protection deux couvents de moniales oĂč ils avaient commis vols et viols. Celui des Dames de Sainte-Croix Ă  Roussillon, dont les religieuses Ă©taient rĂ©fugiĂ©es depuis dans le chĂąteau de Gargas, et celui des bĂ©nĂ©dictines de Notre-Dame de Fours, prĂšs de Sauveterre.

Pour les premiĂšres, il fit bĂątir Ă  l’intĂ©rieur d’Apt un nouveau couvent et son Ă©glise, pour les secondes, il les installa Ă  Avignon dans un monastĂšre placĂ© sous l’invocation de saint Marguerite et elles reçurent du cardinal un bras de sainte Lucie dans un reliquaire d’argent[12].

DĂ©vĂŽt d’ElzĂ©ar et Delphine de Sabran

En 1373, le cardinal Anglicus fit Ă©lever pour ElzĂ©ar de Sabran, comte d’Ariano et parrain de son frĂšre aĂźnĂ©, un splendide mausolĂ©e, dans le couvent des cordeliers d’Apt. Treize ans plus tĂŽt, il avait fait l’éloge funĂšbre de sa veuve Delphine, la sainte comtesse. Ce prince de l’Église Ă©tait partisan de l’École Delphinienne pour laquelle l’ordinaire de la vie devait ĂȘtre vĂ©cu de façon extraordinaire[13].

DerniĂšres missions du cardinal Anglicus

La Porte d'Orange, unique vestige des remparts de Carpentras

Le , en prĂ©vision du dĂ©part de GrĂ©goire XI vers Rome, en compagnie du cardinal Pierre d’Estaing, il concĂ©da Ă  ferme la gabelle des vins d’Avignon Ă  Jean de Baroncelli.

En 1379, aprĂšs la rĂ©volte de Montpellier contre la rapacitĂ© de Louis d’Anjou, ClĂ©ment VII dĂ©puta auprĂšs du roi ses lĂ©gats sous la conduite du cardinal Anglicus. Charles V comprit leurs arguments et ordonna la clĂ©mence Ă  son frĂšre d’Anjou[14].

Sa derniĂšre mission fut liĂ©e au financement des travaux de fortification de Carpentras. Le SacrĂ© CollĂšge fit savoir au clergĂ© de la capitale du Comtat Venaissin qu’il Ă©tait imposĂ© de 5 000 florins, l’évĂȘque devant, quant Ă  lui, en donner 2 000. SuffoquĂ©, Pierre de la Plotte fit appel Ă  ClĂ©ment VII qui lui dĂ©lĂ©gua, le , le cardinal Grimoard. Attentif Ă  la dĂ©tresse du pauvre Ă©vĂȘque il accepta que la contribution Ă©piscopale fĂ»t rĂ©duite Ă  1 400 florins, la diffĂ©rence Ă©tant rĂ©partie sur la tĂȘte du bas-clergĂ©.

Il testa le et décéda trois jours plus tard. Il fut inhumé à Saint-Ruf de Valence[2].

Anecdote

Anglic Grimoard fut l’un des rares cardinaux Ă  ne jamais participer Ă  un conclave. Lors de l’élection de GrĂ©goire XI, en , il Ă©tait en lĂ©gation en Italie, pour celles d’Urbain VI, Ă  Rome, en avril 1378, et de ClĂ©ment VII, Ă  Fondi, en septembre de la mĂȘme annĂ©e, il faisait partie des cardinaux restĂ©s Ă  Avignon.

HĂ©raldique

Anglic de Grimoard

Les armes du cardinal Anglic de Grimoard Ă©taient de gueules au chef Ă©manchĂ© d’or, de quatre piĂšces.

Notes et références

  1. Les Grimoard Ă©taient originaires des CĂ©vennes. Le pĂšre, Guillaume 1er, vassal de l’évĂȘque de Mende, Ă©tait sire de Bellegarde Ă  Saint-Privat-de-Vallongue. Dans la seconde moitiĂ© du XIVe siĂšcle, les Grimoard possĂ©daient encore quelques fiefs en Languedoc dans la paroisse cĂ©venole de Notre-Dame de Chausse : Chausse, Alteyrac et l’Apostoli.
  2. Salvador Miranda Cardinal Anglic de Grimoard, University Park, Miami, FL 33199, 2009
  3. L’édification de cette tour de dĂ©fense, haute et massive fut dĂ©finitivement achevĂ©e en 1369.
  4. Le vendredi , Urbain V autorisa Anglic de Grimoard Ă  recevoir des fidĂšles de ses citĂ©s et diocĂšse les usures, rapines et biens mal acquis, de les relever de l’excommunication et de convertir l’argent en subsides pour la Terre Sainte.
  5. Le lieu-dit Vinea Vespalis avait comme centre l’actuel Plan-de-Lunel. Son vin avait Ă©tĂ© jusqu’au 11 juillet 1364 celui des chanoines d’Avignon.
  6. Ces transactions d’importance occupent plusieurs feuillets de la Gallia Christiana Novissima du chanoine AlbanĂšs. Pour rĂ©sumer, le Souverain Pontife avait dĂ©possĂ©dĂ© de ses vignes le chapitre capitulaire d’Avignon pour les octroyer Ă  son frĂšre cadet.
  7. Les chroniques de l’époque parlent d’une espĂšce de grillets ou de langoustes.
  8. Archives départementales de Vaucluse
  9. Urbain V avait nommé son frÚre Anglic de Grimoard légat à la place du cardinal Audroin de la Roche.
  10. Hugues Du Tems, Le ClergĂ© de France, ou tableau historique et chronologique des ArchevĂȘques, ..., chez Delalain, Paris, 1774, p.55.
  11. Le 30 mai 1368, Urbain V avait dĂ©crĂ©tĂ© BarnabĂ© Visconti coupable de rĂ©volte contre l’Église et prĂȘcha la croisade contre lui.
  12. Ce monastĂšre devint ensuite le CollĂšge d’Annecy, Ă©tablissement fondĂ© en 1428 par le cardinal Jean Allarmet de Brogny, originaire de Savoie.
  13. Cf. dans MĂ©moires de l’AcadĂ©mie de Vaucluse, Le Peuple des Saints. Croyances et dĂ©votions en Provence et Comtat Venaissin des origines Ă  la fin du Moyen Âge, 1987, les articles de Paul Amarguier (p. 111 et passim) et d’AndrĂ© Vauchez (p. 153 et passim).
  14. Louis d’Anjou avait voulu, le 17 mars 1379, se faire allouer cinq francs dix gros par feu. Le 25 octobre, les agents du fisc envoyĂ©s par le duc Ă  Montpellier furent reçus par le tocsin et ceux qui ne voulurent pas comprendre se virent entourĂ©s, saisis, rouĂ©s de coups, tuĂ©s, traĂźnĂ©s dans les rues puis dĂ©coupĂ©s en morceaux avant d’ĂȘtre jetĂ©s dans les puits et des furieux allĂšrent jusqu’à manger la chair baptisĂ©e des victimes.

Voir aussi

Bibliographie

  • Fr. du Chesne, Histoire de tous les cardinaux françois de naissance ou qui ont Ă©tĂ© promus au cardinalat par l’expresse recommandation de nos roys, Paris, 1660.
  • É. Baluze, Vitae paparum Avenionensium, sive collectio actorum veterum, Vol. I et II. Paris, 1693.
  • J. H. AlbanĂšs, Recherche sur la famille de Grimoard, Mende, 1866.
  • P. Pansier, Les palais cardinalices d’Avignon aux XIVe et XVe siĂšcles, Fasc. 1, 2 et 3, Avignon, 1926-1932.
  • G. Mollat, Contribution Ă  l’histoire du SacrĂ© CollĂšge de ClĂ©ment V Ă  EugĂšne IV, Revue d’histoire ecclĂ©siastique, T. XLVI, 1961.
  • J. de. Font-RĂ©aulx, Les cardinaux d’Avignon, leurs armoiries et leurs sceaux, Annuaire de la SociĂ©tĂ© des amis du palais des papes, XLVII – LII, nos 140 Ă  186, 1971-1975.
  • Anne-Lise Rey-Courtel, L’entourage d’Anglic Grimoard, cardinal d’Albano (1366-1388), Colloque d’Avignon : GenĂšse et dĂ©but du Grand Schisme d’Occident (), Éd. du C.N.R.S. Paris, 1980.
  • Anne-Lise Rey-Courtel, « Nonnulli filii Belial tunicam Domini inconsutilem lacerare nituntur. Le cardinal Anglic Grimoard et le Grand Schisme (1378-1388) », BibliothĂšque de l'École des chartes, vol. 174,‎ 2018-2019.
  • A-M. Hayez, Le terrier avignonnais de l’évĂȘque Anglic Grimoard, 1366-1368, Documents inĂ©dits in-−8°, 21, Paris, 1993.

Articles connexes

Liens externes

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