An-Nasr
An-Nasr (arabe : ۧÙÙ۔۱, français : Le Secours Divin) est le nom traditionnellement donnĂ© Ă la 110e sourate du Coran, le livre sacrĂ© de l'islam. Elle comporte 3 versets. RĂ©digĂ©e en arabe comme l'ensemble de l'Ćuvre religieuse, elle fut proclamĂ©e, selon la tradition musulmane, durant la pĂ©riode mĂ©dinoise.
110e sourate du Coran Le Secours Divin | |
Le Coran, livre sacré de l'islam. | |
Informations sur cette sourate | |
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Titre original | ۧÙÙ۔۱, An-Nasr |
Titre français | Le Secours Divin |
Ordre traditionnel | 110e sourate |
Ordre chronologique | 114e sourate |
Période de proclamation | Période médinoise |
Nombre de versets (ayat) | 3 |
Ordre traditionnel | |
Ordre chronologique | |
Origine du nom
Bien que le titre ne fasse pas directement partie du texte coranique[1], la tradition musulmane a donnĂ© comme nom Ă cette sourate Le Secours Divin[2], en rĂ©fĂ©rence au contenu du premier verset : « 1. Quand le secours dâAllah vient avec la victoire ».
Historique
Il n'existe Ă ce jour pas de sources ou documents historiques permettant de s'assurer de l'ordre chronologique des sourates du Coran. NĂ©anmoins selon une chronologie musulmane attribuĂ©e Ă ÇŠaÊżfar al-áčąÄdiq (VIIIe siĂšcle) et largement diffusĂ©e en 1924 sous lâautoritĂ© dâal-Azhar[3] - [4], cette sourate occupe la 110e place. Elle aurait Ă©tĂ© proclamĂ©e pendant la pĂ©riode mecquoise, c'est-Ă -dire schĂ©matiquement durant la premiĂšre partie de l'histoire de Mahomet avant de quitter La Mecque[5]. ContestĂ©e dĂšs le XIXe par des recherches universitaires[6], cette chronologie a Ă©tĂ© revue par Nöldeke[7] - [8], pour qui cette sourate est la 11e.
Les sourates de la fin du Coran[Note 1] sont gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ©es comme appartenant aux plus anciennes. Elles se caractĂ©risent par des particularitĂ©s propres. Elles sont brĂšves, semblent issues de proclamations oraculaires (ce qui ne signifie pas, pour autant, quâelles en sont des enregistrements), elles contiennent de nombreux hapax[9]...
Pour Nöldeke et Schwally, la quasi-totalitĂ© des sourates 69 Ă 114 sont de la premiĂšre pĂ©riode mecquoise. Neuwirth les classe en quatre groupes supposĂ©s ĂȘtre chronologiques. Bien que reconnaissant leur anciennetĂ©, certains auteurs refusent de les qualifier de « mecquoise », car cela prĂ©suppose un contexte et une version de la genĂšse du corpus coranique qui nâest pas tranchĂ©e. Cette approche est spĂ©culative[9].
En effet, ces textes ne sont pas une simple transcription stĂ©nographique de proclamation mais sont des textes Ă©crits, souvent opaques, possĂ©dant des strates de composition et des rĂ©Ă©critures Cela nâempĂȘche pas ces sourates de fournir des Ă©lĂ©ments contextuels (comme lâattente dâune Fin des Temps imminente chez les partisans de Mahomet). Ces textes sont marquĂ©s par une forme de piĂ©tĂ© tributaire du christianisme oriental[9].
Cette sourate pose la question de la mĂ©thodologie Ă adopter pour dater les sourates du Coran. Selon certains auteurs musulmans, cette sourate serait mecquoise. Nöldeke[Note 2] et Schwally rĂ©fute cette datation et considĂšre quâelle ne peut possĂ©der quâun contexte mĂ©dinois. De nombreux exĂ©gĂštes musulmans considĂšrent quâelle est la derniĂšre sourate, proclamĂ©e lors de son « pĂšlerinage dâAdieu ». Bell la considĂšre comme appartenant au dĂ©but de la pĂ©riode mĂ©dinoise[10].
De nombreux auteurs ont sous-estimé la dimension eschatologique de cette sourate[10].
Interprétations
Versets 1-2 : Annonce eschatologique
Le verset 1 commence par le terme idha, souvent utilisĂ© dans le Coran pour introduire un texte apocalyptique. Cet usage se retrouve dans les textes bibliques comme le Livre dâĂzĂ©chiel ou lâĂvangile selon Marc mais aussi dans les homĂ©lies syriaques de Jacques de Saroug. Venant Ă la suite de ces textes, le Coran lâutilise aussi[10].
La formulation de cette sourate trouve des parallĂšles dans dâautres passages eschatologiques du Coran. Si elle nâĂ©voque pas un cataclysme, deux termes sont utilisĂ©s : nasr Allah et al-Fath. Le premier, Ă©voquant le secours divin, nâest utilisĂ©, par le Coran, que dans ce contexte apocalyptique. Il est parfois associĂ© au terme al-fath mais aussi Ă la "Bonne nouvelle" (bushra), en son sens nĂ©otestamentaire et eschatologique. LâidĂ©e du Salut divin se retrouve dĂ©jĂ dans lâAncien et dans le Nouveau Testament. Pohlmann a repĂ©rĂ© une proximitĂ© du texte coranique avec lâapocalypse syriaque de Baruch[10].
Le sens du terme al-fath nâest pas non plus Ă©vident. Le mot a le sens dâ « ouverture » et, dans un contexte militaire, celui dâouverture dâune ville. Ici, il prend le sens du mot guĂšze Ă©quivalent, celui de « jugement ». Ainsi, ce premier verset ne fait pas rĂ©fĂ©rence Ă une victoire de Mahomet mais au jugement eschatologique de Dieu[10].
Dans ce contexte, le mot din de la seconde sourate ne signifie pas « religion » mais « jugement », conformément aux termes syriaque ou pahlavi dont il dériverait[10].
Voir aussi
Articles connexes
Bibliographie
- P. Neuenkirchen, "Sourate 110", Le Coran des Historiens, 2019, p. 2281 et suiv.
- R. Paret, Der Koran. Kommentar und konkordanz, 1980[Note 3].
Liens externes
- Texte de la sourate 110 en français, d'aprĂšs la traduction de Claude-Ătienne Savary de 1783.
Notes et références
Notes
- Lâauteur prĂ©cise que ces remarques, si elles sont dans une partie consacrĂ©e aux sourates 69 Ă 99, sâappliquent aussi aux sourates 100 Ă 114.
- Les islamologues ont utilisĂ© plusieurs approches pour tenter de dater les diffĂ©rentes sourates du Coran. Paret et Neuwirth appartiennent Ă lâ« Ă©cole allemande » qui, Ă la suite de Nöldeke, sâappuie sur la chronologie traditionnelle et sur un rĂ©cit « laĂŻcisĂ© » des traditions musulmanes. Autrefois dominant dans les Ă©tudes islamologiques, ce paradigme nöldekien n'est plus qu'« en partie prĂ©sent ». Les auteurs du Coran des historiens appartiennent davantage Ă lâautre courant (dit « sceptique ») qui prend davantage en compte une critique des sources traditionnelles. Voir : Historiographie de l'islam et du Coran
- En 2019, seuls deux ouvrages peuvent ĂȘtre considĂ©rĂ©s comme des commentaires scientifiques et continus du texte coranique. Il s'agit du Commentary on the Qur'an de Richard Bell publiĂ© en 1991 (aujourd'hui datĂ©) et du Coran des historiens publiĂ© en 2019. L'ouvrage de Paret s'inscrit, avec ceux de BlachĂšre, Khoury et Reynolds, dans un ensemble de traduction avec apparat critique. Voir : Sourate
Références
- A. Chouraqui, Le Coran, traduction et commentaires, 1990, p. 15.
- A. Chouraqui, Le Coran : L'appel, France, Robert Laffont, , 625 p. (ISBN 2-221-06964-1)
- G.S. Reynolds, « Le problÚme de la chronologie du Coran », Arabica 58, 2011, p. 477-502.
- R. BlachĂšre, Introduction au Coran, p. 244.
- R. BlachĂšre, Le Coran, 1966, p. 103.
- M. Azaiez, « Chronologie de la Révélation »
- G. Dye « Le Coran et son contexte Remarques sur un ouvrage récent », Oriens Christianus no 95, 2011, p. 247-270.
- E. Stefanidis, « The Qur'an Made Linear: A Study of the Geschichte des Qorùns' Chronological Reordering », Journal of Qur'anic Studies, X, II, 2008, p. 13.
- G. Dye, « Introduction aux sourates 69-99 », Le Coran des historiens, 2019, p. 1789 et suiv.
- P. Neuenkirchen, "Sourate 110", Le Coran des Historiens, 2019, p. 2281 et suiv.