Alexandre Marie Eléonor de Saint-Mauris-Montbarrey | ||
Portrait du prince de Montbarrey, par Élisabeth Vigée Le Brun. | ||
Naissance | Besançon |
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Décès | |
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Origine | Royaume de France | |
Grade | Lieutenant-général | |
Distinctions | Ordre du Saint-Esprit Grand d'Espagne |
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Autres fonctions | Secrétaire d'État à la Guerre (1777-1780) |
Alexandre Marie Eléonor de Saint-Mauris-Montbarrey[1], comte de Montbarrey puis prince de Montbarrey et du Saint-Empire (1776), grand d'Espagne de première classe (1780), chevalier du Saint-Esprit, né le à Besançon et mort le à Constance, fut lieutenant-général des armées et Secrétaire d'État à la Guerre de 1777 à 1780 sous Louis XVI.
Biographie
Il appartenait à la famille franc-comtoise de Saint-Mauris-Montbarrey[2], originaire de Dole, anoblie en 1537[3] par lettres de Charles Quint en la personne de Jean de Saint-Mauris, docteur en droit, professeur à l'Université de Dole puis conseiller au Parlement de Dole, conseiller d’État et enfin président du Conseil d’État des Pays-Bas sous Charles Quint et Philippe II.
Le prince de Montbarrey était le fils unique de Claude François Eléonor de Saint-Mauris[4], comte de Montbarrey (1694-1751), lieutenant-général des armées du roi, et de Marie Éléonore Thérèse du Maine du Bourg (1711-1732), petite-fille du maréchal Léonor Marie du Maine du Bourg.
Après une précoce et brillante carrière militaire, lieutenant général des armées du roi, le prince de Montbarrey s'installa à la cour où il fut le protégé de sa parente madame de Maurepas, épouse du marquis de Maurepas, ministre d’État et président du conseil de Louis XVI. Par l'entremise de son mari, madame de Maurepas réussit à faire nommer Montbarrey directeur de la guerre (poste sans attribution spécifique créé spécialement pour lui) et adjoint du comte de Saint-Germain, secrétaire d’État à la guerre. À la démission de ce dernier, toujours grâce à l'influence de madame de Maurepas, Montbarrey fut nommé en 1778 secrétaire d’État à la Guerre.
Il est généralement décrit comme un ministre incompétent et décrié[5],[6],[7],[8], sans moralité et cupide[9],[10], qui s'adonnait plus à l'intrigue et au trafic pour faire avancer ses intérêts [11] et celui de ses maîtresses qu'à la conduite de son ministère[12],[13],[14].
En 1780, en pleine guerre d'Amérique, il dut quitter son poste à la suite des critiques de Necker sur l'utilisation des crédits militaires et au scandale soulevé par la révélation d'un trafic de charges militaires organisé par sa maîtresse en titre mademoiselle Renard, courtisane et figurante à l'Opéra[15]. Après sa démission forcée, il s'installa avec sa femme et sa fille – la princesse de Nassau-Sarrebruck – à l'Arsenal près de la Bastille, dans un luxueux bâtiment richement meublé que le roi lui avait donné en jouissance en plus d'une considérable pension. À la Révolution les meubles, la bibliothèque, la galerie de tableaux et les objets d'arts qui décoraient la résidence de l'Arsenal du prince de Montbarrey furent saisis comme biens d'émigrés et vendus à Lord Chatham (fils aîné du premier ministre anglais William Pitt) qui les emmena en Angleterre[16].
Lors de la prise de la Bastille, le prince de Montbarrey et sa femme échappèrent de justesse au massacre par la foule. Au début de la Révolution, il se réfugia dans son château de Ruffey-le-Château près de Besançon. En 1791 il émigra avec son épouse en Suisse à Neuchâtel puis dans les villages de Cressier et du Landeron[17] où ils furent logés pris en charge par le royaliste Fauche-Borel (lors de leur passage à la frontière ils avaient été dépouillés de tout l'argent et des bjoux qu'ils transportaient avec eux)[18]. À l'arrêté du Conseil d'État de Neuchâtel de renvoyant les émigrés français, il s'installa à Constance dans le Grand-duché de Bade où il mourut le dans une quasi-misère[19]. À son décès, sa veuve revint d'émigration et s'installa à Dole en Franche-Comté jusqu'à son décès en 1819.
Le prince de Montbarrey qui était d'une grande prétention quant à l'origine de la noblesse de sa famille[20],[21] et de ses titres de prince et grand d'Espagne nouvellement acquis (il avait payé la somme de 100 000 livres pour son titre de prince du Saint-Empire que lui avait accordé l'empereur Joseph II[22],[23]), s'était fait fabriquer une généalogie truquée plus flatteuse[24],[25], rattachant sa famille à la famille de Saint-Moris-Salins, de noblesse d'ancienne extraction, de la même région et éteinte au XVIIe siècle[26].
Le prince de Montbarrey a laissé des Mémoires autographes (publiés en 1826) où de page en page il s'étend avec complaisance sur sa généalogie, ses nombreuses liaisons et son énergie à profiter de sa position de ministre pour faire avancer sa fortune et ses intérêts personnels (en échange du remboursement par le trésor royal pour un montant de trois millions de dettes de guerre douteuses réclamées par prince régnant de Nassau-Sarrebruck, le prince de Montbarrey organisa en 1779 le mariage de sa fille âgée de 20 ans avec le prince héritier de Nassau-Sarrebruck âgé d'à peine 11 ans)[27]
Le prince de Montbarrey épousa le Françoise Parfaite Thais de Mailly-Nesle (née en 1737, morte à Dole le ), fille de Louis de Mailly. Montbarrey et sa femme avaient peu d'affinités (il entretint sa vie durant de nombreuses maîtresses et elle fut la maîtresse du fameux Masson de Pezay (1741-1777). Ils eurent deux enfants: Louis Marie François Stanislas, dit le prince de Saint-Mauris, né en 1756, mort guillotiné à Paris le , sans postérité de son mariage le avec Geneviève Andrault de Langeron (mais de Louise Adrienne Cantagrelle il eut un fils naturel reconnu prénommé François Maurice, né à Paris (paroisse de Saint-Eustache) le et qui porta le nom de Saint-Mauris-Montbarrey[28]) et Maximilienne Françoise, née en 1759, épouse de Henry Louis de Nassau-Saarbrücken, dernier prince régnant de Nassau-Sarrebruck, dont elle n'eut pas d'enfant.
Le prince de Montbarrey eut pour maîtresse en titre pendant huit ans (de 1767 à 1775) Jeanne Catherine Delachaux[29] (née à Bruxelles le , décédée à Paris, cour des Petites-Écuries, le ) qui épousa à 27 ans le (paroisse de Saint-Germain l’Auxerrois à Paris) le peintre François Casanova, frère du célèbre Casanova. Elle apporta une dot des plus confortables grâce à la générosité du prince de Montbarrey. François Casanova reconnut les deux enfants naturels du prince de Montbarrey comme étant les siens. Le mariage ne dura pas car François Casanova abandonna son épouse en 1783[30].
Des deux fils naturels de Jeanne Catherine Delachaux et du prince de Montbarrey, reconnus par François Casanova, l’un fut connu sous le nom d’Alexandre Benoît Jean Dufay-Casanova (né à Paris le 22.03.1770, décédé à Paris le 19.04.1844). Il fut l’élève de David, mais ne connut pas un grand succès. À la fin de sa vie, il prit le titre de peintre du roi d'Aoudh (Inde) pour avoir été peintre officiel de ce monarque à Lucknow de 1834 à 1837[31]. Son frère (lui aussi fils naturel du prince de Montbarrey) émigra et rejoignit l'armée des princes à l'étranger avant de revenir vivre à Paris où il mourut avant 1844[32]. On ignore si les deux fils naturels du prince de Montbarrey et de Jeanne Catherine Delachaux eurent des descendants.
Maximilienne de Saint-Mauris-Montbarrey, princesse de Nassau-Sarrebruck, fille du prince de Montbarrey, mourut le à Maisons-Alfort, âgée de 79 ans. Elle réclama en vain pendant des années le douaire important que lui accordait son contrat de mariage avec le prince héritier de Nassau-Sarrebruck. Après la révolution elle n'eut guère de relation avec sa mère la princesse de Montbarrey décédée à Dole en 1819. Elle fut la dernière de sa famille et du nom de Saint-Mauris-Montbarrey. Son héritier fut Joseph de Besiade, duc d'Avaray, son cousin germain.
Le fort de l'est des Buis, place fortifiée de Besançon, porte son nom.
Notes et références
- Mémoires de la Société d'émulation du Doubs, Volume 9, 1884, page 147.
- Henri Jougla de Morenas, Grand Armorial de France, voulume 6, page 135.
- Roger de Lurion, Nobiliaire de Franche-Comté, Besançon 1890, page 710
- Nicolas-Antoine Labbey-de-Billy Histoire de l'Université du Comté de Bourgogne, volume 2, 1815, page 247.
- « Christophe Luraschi, Conrad-Alexandre Gérard (1729-1790) : artisan de l'indépendance américaine, Séguier, 2008, page 283. »
- « A. Roche, Histoire de France, Volume 2, 1867, page 337. »
- « Gilles Perrault, Le Secret du Roi: La Revanche américaine, Fayard, 1996. »
- « Thomas J. Schaeper France and America in the Revolutionary Era: The Life of Jacques-Donatien Leray de Chaumont, 1725-1803, Berghahn Books, 1995, page 191. »
- « La Revue des deux mondes, 1912, page 313. »
- « Mémoires pour servir a l'histoire des événements de la fin du dix-huitième siècle depuis 1760 jusqu'en 1806-1810, Volume 1, Alexis Eymery, 1820, pages 508 et 509. »
- « Hippolyte-Lazare Carnot, Auguste Jullien, Pierre Leroux, Anselme Petetin Revue encyclopédique ou analyse raisonnée des productions les plus remarquables dans la littérature, les sciences et les arts, par une réunion de membres de l'institut et d'autres hommes de lettres, années 1819-1833, volume 34, 1827, page 754. »
- « Histoire et anecdotes de la Révolution française, volume 2, 1794, page 42. »
- « Procès-verbaux et mémoires de l’Académie de Besançon, 1886, page 280. »
- Dictionnaire contenant les anecdotes historiques de l'amour, tome IV, pages 502 Ă 505 (Gobelet imprimeur, 1811)
- Étienne-Léon de Lamothe-Langon, Mémoires de madame du Barry, page 227 (1829)
- Mémoires de la Société d'émulation du Jura – 1882, page 284.
- Phiippe Ernest Godet : Madame de Charrière et ses amis (1906), volume 2 page 29 et suivantes
- MĂ©moires de Fauche-Borel, Paris 1829
- Léonce de Piépape, Le Prince de Montbarrey, 1886)
- « Académie des sciences, belles-lettres et arts de Besançon "Procès-verbaux et mémoires", 1887, page 264. »
- « Étienne-Léon de Lamothe-Langon Mémoires et souvenirs d'un pair de France, tome 1er, 1840, page 137. »
- « Louis Nicolardot, Ménage et finances de Voltaire, E. Dentu, 1854, page LXIX. »
- « Victor-Donatien Musset-Pathay, Nouveaux mémoires secret, Brissot-Thivars, 1829, page 319. »
- « Ernest Lavisse, Histoire de France, depuis les origines jusqu'à la Révolution, 1910, page 60. »
- « Mémoires de M. le baron de Besenval, tome premier, 1805, page 259. »
- Roger de Lurion, Nobiliaire de Franche-Comté, Besançon 1890, page 710.
- J. F. Georgel, Mémoires pour servir à l'histoire des évènements de la fin du XVIIIe siècle, page 540 (librairie Eymery, 1817)
- Comte de Chastellux, Notes prises aux archives de l'Ă©tat civil de Paris, page 549 (Paris, Dumoulin, 1874)
- Mémoires autographes du prince de Montbarrey, tome II, p. 131-133 (librairie Eymery, 1826-1827)
- Charles Samaran, Jacques Casanova, une vie d'aventurier au XVIIIe siècle (éd. Calmann-Levy, 1914)
- Charles Samaran, Jacques Casanova, une vie d'aventurier au XVIIIe siècle, page 150, (éd. Calmann-Levy, 1914)
- Augustin Jal, Dictionnaire critique de biographie et d'histoire, page 330 (Paris, Plon, 1872)
Voir aussi
Bibliographie
- MĂ©moires autographes de M. le prince de Montbarey, 3 tomes (A. Eymery, 1826-1827)
- MĂ©moires du baron de Besenval (1805),
- Le Prince de Montbarrey par LĂ©once de Piepape (1886)