Albert de Brandebourg (cardinal)
Albert de Brandebourg (nĂ© le Ă Cölln sur la Spree, aujourd'hui un quartier de Berlin et mort le dans le chĂąteau de Martinsburg Ă Mayence) est archevĂȘque et cardinal de l'Ăglise catholique romaine.
Albert de Brandebourg | |
Portrait du cardinal Albert de Brandebourg par Lucas Cranach l'Ancien. | |
Biographie | |
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Naissance | Cölln sur la Spree |
Ordination sacerdotale | |
DĂ©cĂšs | (Ă 55 ans) au Martinsburg Mayence |
Cardinal de l'Ăglise catholique | |
Créé cardinal |
par le pape LĂ©on X |
Titre cardinalice | Cardinal-prĂȘtre de S. Crisogono Cardinal-prĂȘtre de S. Pietro in Vincoli |
ĂvĂȘque de l'Ăglise catholique | |
Ordination Ă©piscopale | par Dietrich von BĂŒlow |
Fonctions Ă©piscopales | ArchevĂȘque de Magdebourg (1513) ArchevĂȘque de Mayence (1514) |
(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org | |
En tant que partisan du trafic d'indulgences et dignitaire de plus haut rang du Saint-Empire, le cardinal Albert de Brandebourg est l'un des plus puissants et des plus populaires adversaires de Martin Luther.
Biographie
Prince de la Maison de Hohenzollern, Albert est le fils cadet et septiÚme enfant du prince-électeur Jean-Cicéron de Brandebourg et de Marguerite de Thuringe.
Il est d'abord co-margrave du Brandebourg (sous le nom dâAlbert IV), avec son frĂšre Joachim Ier et ces deux princes fondent en 1506 lâUniversitĂ© Viadrina de Francfort-sur-Oder. Albert y fait ses Ă©tudes puis dĂ©cide d'entrer dans les ordres et en 1513, ĂągĂ© de seulement 23 ans, devient (toujours sous le nom dâAlbert IV) archevĂȘque de Magdebourg et (sous le nom dâAlbert V) administrateur apostolique pour le diocĂšse vacant dâHalberstadt. L'annĂ©e suivante il devient archevĂȘque de Mayence et en tant que tel, Ă©vĂȘque mĂ©tropolite de la province ecclĂ©siastique de Mayence, prince-Ă©lecteur et seigneur de lâĂlectorat de Mayence, archichancelier du Saint-Empire romain germanique. En 1518 enfin il est nommĂ© cardinal de l'Ăglise catholique romaine, Ă l'encontre du droit canon.
Il administre ses diffĂ©rents diocĂšses depuis sa rĂ©sidence de Moritzburg Ă Halle de 1514 jusqu'Ă sa destitution le . En tant que prince de lâĂlectorat de Mayence, il dote le Conseil dâĂtat ou Hofrat de cette principautĂ© de prĂ©rogatives prĂ©cises ; car si son prĂ©dĂ©cesseur, lâĂ©lecteur Jakob von Liebenstein (1504-1508) a bien dĂ©crĂ©tĂ© en 1505 le premier rĂšglement connu, ce n'est qu'en 1522 que l'Ă©lecteur Albert met sur pied un conseil permanent (resp. officiel) et donne par lĂ Ă lâassemblĂ©e des conseillers une forme stable. Il comporte treize membres, dont neuf sont nommĂ©s Ă discrĂ©tion de l'Ă©lecteur, Ă savoir : le MaĂźtre des RequĂȘtes, le chancelier, le marĂ©chal, les deux Ă©missaires du chapitre, deux juristes et deux reprĂ©sentants de la noblesse. En 1541, un nouveau rĂšglement est dressĂ© pour le conseil et la chancellerie, qui Ă©claircit Ă©galement les compĂ©tences entre ces administrations centrales et les administrations territoriales. Le collĂšge se compose d'aristocrates et d'Ă©rudits.
En 1517, pour pouvoir effacer la dette qu'il a contractĂ©e auprĂšs des Fugger pour payer le pallium (cf. simonie), Albert de Brandebourg concĂšde aux financiers rhĂ©nans la moitiĂ© des revenus du trafic des nouvelles indulgences accordĂ©es par LĂ©on X. Les manĆuvres interlopes de son agent Ă Magdebourg, le dominicain Johann Tetzel, donnĂšrent Ă Luther la matiĂšre de ses 95 thĂšses. C'est ainsi qu'Albert, bien qu'il favorisĂąt lâhumanisme et qu'en 1515 il ait appelĂ© Ă sa cour de Halle le poĂšte Ulrich von Hutten, se trouve d'emblĂ©e dans le camp opposĂ© Ă la RĂ©forme.
Dâabord perplexe devant les idĂ©es des rĂ©formateurs, Albert tente de composer avec les « Ă©vangĂ©liques » (en allemand, Evangelisch dĂ©signe les Protestants en gĂ©nĂ©ral) et suggĂšre d'examiner une rĂ©forme gĂ©nĂ©rale de l'Ăglise Ă l'occasion d'un concile. Il fait venir Ă la cathĂ©drale de Mayence les prĂ©dicateurs Wolfgang Fabricius Köpfel Capiton et Caspar Hedio, qui tiennent des prĂȘches humanistes et favorables Ă la RĂ©forme, et qui sont apprĂ©ciĂ©s des fidĂšles. Le nonce pontifical AlĂ©andre, lorsqu'en 1520 il se rend Ă Mayence pour y faire brĂ»ler les Ă©crits de Luther, Ă©chappe de peu au lynchage.
Finalement, Albert prend parti contre la Réforme dont les idées minent en réalité son autorité. En 1523, Hedio, comme Capito avant lui, doivent quitter Mayence. Puis, le , le cardinal Albert prend part à la création de la ligue antiluthérienne de Dessau. Martin Luther, qui fonde au début de grands espoirs sur la conversion du cardinal Albert, reconnait bientÎt que plus aucun compromis n'est possible. En , Albert n'a plus d'autre choix que de conclure avec le landgrave Philippe de Hesse le Traité de Hitzkirchen (de), par lequel l'électorat de Mayence abandonne définitivement sa tutelle religieuse sur la Hesse.
En 1530, le cardinal Albert appelle encore depuis Augsbourg Ă la paix entre chrĂ©tiens et Ă l'union sacrĂ©e contre l'envahisseur ottoman, puis en 1534 il propose avec le duc Georges de Saxe aux princes protestants de conclure le TraitĂ© de KadaĆ avec le Roi des Romains Ferdinand Ier. Finalement en 1538, avec son frĂšre Joachim, il prend la tĂȘte de la Ligue de Halle contre la Ligue de Smalkalde. Cette initiative, conjuguĂ©e Ă l'exĂ©cution sans jugement de Hans von Schönitz (de) inspirent Ă Luther une de ses plus acerbes philippiques Ă l'encontre du cardinal Albert.
Albert de Brandebourg entend concĂ©der la libertĂ© religieuse Ă ses sujets de l'archevĂȘchĂ© de Magdebourg contre la remise des dettes qu'il a contractĂ©es envers eux, lorsqu'il est expulsĂ© de son chĂąteau de Moritzburg (prĂšs de Halle) oĂč il siĂšge depuis 27 ans ; sur quoi il exhorte l'empereur Ă rĂ©primer les Protestants, et est le premier des princes allemands Ă faire venir des jĂ©suites (leur ordre vient d'ĂȘtre crĂ©Ă© en 1540) sur ses terres, Ă Mayence oĂč il s'est retirĂ©. Il est l'instigateur de l'ambigu recĂšs d'empire des Ă©tats protestants lors de la DiĂšte de Spire de 1544 et passe des accords provisoires avec les princes catholiques pour la guerre qui s'annonçait.
MalgrĂ© la persistance de partisans protestants dans ses murs, Mayence et son Ă©vĂȘchĂ© demeurent catholiques. Le chapitre ecclĂ©siastique de Mayence Ă©lit ainsi en la personne de Sebastian von Heusenstamm un tenant du catholicisme comme nouveau prince-archevĂȘque.
à sa mort en 1545, le cardinal Albert est remplacé par son cousin Jean Albrecht de Brandebourg-Ansbach qui fut son coadjuteur.
Le mécÚne
Albert de Brandebourg est un protecteur des arts et des sciences. Ă Halle, il ordonne la construction de deux Ă©glises au style dĂ©pouillĂ©, l'impressionnante Ă©glise Sainte-Marie et la « cathĂ©drale de Halle » â ainsi nommĂ©e bien que Halle ne soit pas Ă proprement parler siĂšge d'un diocĂšse. Pour la dĂ©coration intĂ©rieure de la cathĂ©drale, il charge Lucas Cranach de fabriquer 16 autels comportant 142 panneaux peints, Ă livrer sous cinq ans : c'est la plus importante commande Ă un peintre de toute l'histoire de l'Ăglise d'Allemagne. Puis Albert demande Ă Matthias GrĂŒnewald de peindre l'autel-triptyque de « Saint Ărasme et Saint Maurice » ; enfin il subventionne Hans Baldung. Câest ainsi que l'aspect de la ville de Halle reste encore de nos jours tout imprĂ©gnĂ© des commandes de l'archevĂȘque Albert : il suffit de citer le plus beau cimetiĂšre europĂ©en de la Renaissance encore visible, le Stadtgottesacker, et le chĂąteau fort du Moritzburg, qu'il met sous la protection de Saint Maurice lors de la consĂ©cration de son archevĂȘchĂ©. Son espoir de fonder Ă Halle une universitĂ© confessionnelle ne se concrĂ©tise jamais. Il reconvertit les bĂątiments restants de l'Ă©vĂȘchĂ© en une rĂ©sidence Ă©piscopale, la Neue Residenz. Albert enrichit Ă©normĂ©ment le Hallesches Heiltum, trĂ©sor sacrĂ© de Halle et collection de reliques, qu'il avait reçu de son prĂ©dĂ©cesseur Ă l'Ă©vĂȘchĂ©. Lorsquâen 1541 il dut fuir la ville, il emmena avec lui plusieurs de ses Ćuvres d'art. C'est ainsi que plusieurs tableaux de Cranach et un calendrier-reliquaire (avec une relique associĂ©e Ă chaque saint du calendrier liturgique) vinrent en possession de lâĂ©glise Saint-Pierre et Alexandre dâAschaffenbourg, mais la plus grande partie des trĂ©sors emportĂ©s par Albert dans sa fuite devaient disparaĂźtre au cours d'un incendie.
Albert voit dans son activitĂ© de mĂ©cĂšne une Ćuvre pour le salut de son Ăąme, mais la finance pourtant par le trafic des indulgences[1].
- L'archevĂȘque de Mayence Albert en « saint JĂ©rĂŽme dans son Ă©tude », toile de Lucas Cranach l'Ancien (1526)
- Mathis Gothart-Nithart, dit GrĂŒnewald : Saint-Ărasme, Portrait du commanditaire Albert de Brandebourg
- Albert de Brandebourg priant au pied de la Croix, par Lucas Cranach lâAncien
Famille
Il existe en Allemagne une littĂ©rature abondante sur les amours du cardinal Albert : si certains auteurs ont spĂ©culĂ© sur lâidentitĂ© de ses concubines, d'autres estiment qu'il nâa eu de liaison quasi-maritale quâavec Ălisabeth « Leys » SchĂŒtz puis avec la veuve AgnĂšs Pless (nĂ©e Strauss) de Francfort. Avec Ălisabeth Leys il a une fille, Anna, qu'il marie avec son secrĂ©taire Joachim Kirchner. Celle-ci devait avoir Ă son tour un fils quâelle baptise Albrecht. DâAgnĂšs Pless, une nĂ©gociante fortunĂ©e, il fait la mĂšre supĂ©rieure d'un couvent de bĂ©guines qu'il a fondĂ© dans la vallĂ©e de la Schöntal prĂšs dâAschaffenbourg.
Albert ne fait aucun mystĂšre de ses liaisons ; on prĂ©sume mĂȘme quâĂlisabeth Leys est reprĂ©sentĂ©e sur certains tableaux de Cranach : ainsi elle serait la femme adultĂšre de l'Ăvangile selon Jean[2], et le cardinal un homme qui garde ostensiblement les mains vides tandis que la foule qui l'entoure brandit des cailloux et entreprend de lapider la pĂ©cheresse. Deux portraits de Cranach reprĂ©sentent Albert et sa compagne sous les traits de saint Martin et sainte Ursule.
Albert est aussi le parrain de Maurice de Saxe (1521-1553), lequel grandit Ă la cour du cardinal, au chĂąteau de Moritzburg Ă Halle.
Notes et références
- Cf. Hannoversche Allgemeine Zeitung du 5 oct. 2006, p. 9
- Cf. Jn 8. 1-7
Bibliographie
- (de) Cet article est partiellement ou en totalitĂ© issu de lâarticle de WikipĂ©dia en allemand intitulĂ© « Albrecht von Brandenburg » (voir la liste des auteurs).
- (de) Ludwig Grote, Kardinal Albrecht und die Renaissance in Halle, Waldersee, Halle, (ISBN 3-939335-03-7).
- (de) Friedrich Wilhelm Schirrmacher (de), « Albrecht (Markgraf von Brandenburg) », dans Allgemeine Deutsche Biographie (ADB), vol. 1, Leipzig, Duncker & Humblot, , p. 268-271
- (de) Heinrich Grimm (de), « Albrecht von Brandenburg », dans Neue Deutsche Biographie (NDB), vol. 1, Berlin, Duncker & Humblot, , p. 166â167 (original numĂ©risĂ©).
Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- (en) British Museum
- (en) Te Papa Tongarewa
- (en) Union List of Artist Names
- Ressources relatives Ă la religion :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :