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Affaire du casino d'Annemasse

L'affaire du casino d'Annemasse est une affaire de financement illégal impliquant le RPF de Charles Pasqua. Ce dernier est accusé d'avoir bénéficié en 1999 de 7,5 millions de francs (1,143 million d'euros) issus des plus-values de la vente du casino d'Annemasse en 1995.

Charles Pasqua est poursuivi dans cette affaire pour le financement illégal de sa campagne aux élections européennes de 1999. Il a été mis en examen pour abus de confiance et faux. En tant qu'ancien ministre, il fait l'objet d'une procédure pour corruption passive devant la Cour de justice de la République (CJR).

L'affaire

Le projet d'ouverture d'un casino à Annemasse est longtemps resté bloqué entre des avis négatifs de la Commission supérieure des jeux et des refus ministériels. En 1994, le ministre de l'Intérieur Charles Pasqua accorde à Robert Feliciaggi l'exploitation du casino d'Annemasse, contre l'avis des autorités administratives et policières[1].

En 1985, des investisseurs, comme Toussaint Luciani ou Robert Azoulay, engagent des discussions avec le maire Robert Borrel. En 1987, le conseil municipal donne un avis favorable[1]. En , Robert Feliciaggi et un second groupe d'investisseurs présentent un dossier à la Commission supérieure des jeux, qui émet un avis négatif ainsi que Philippe Marchand, ministre de l'Intérieur. En , la Commission supérieure des jeux (CSJ) refuse une deuxième fois, suivie par le ministre Paul Quilès. Les deux fois, la CSJ argue du nombre important de casinos en Savoie. De plus, la sous-direction des courses et des jeux des Renseignements généraux (RG) et la Direction des libertés publiques et des affaires juridiques (DLPA) du ministère de l'Intérieur émettent des réserves sur Robert Feliciaggi et son associé Michel Tomi, condamné en 1976 dans une affaire de détournement de fonds aux dépens du casino de Bandol, dans le Var[2].

Le , Charles Pasqua devient ministre de l'Intérieur. En , Robert Feliciaggi et ses associés déposent un autre dossier pour l'exploitation du casino de Grasse, pour lequel la Commission des jeux émet également un avis négatif, pour les mêmes raisons[3].

Le , pour une troisième demande d'autorisation, les RG défendent le projet de Robert Feliciaggi à Annemasse et accordent un avis favorable[1]. La DLPA reste opposée. En parait un nouveau rapport favorable des RG : «Les doutes exprimés par le passé s'avèrent infondés (…). Aujourd'hui, rien ne permet de douter de l'honorabilité » de Robert Feliciaggi et Michel Tomi. Cependant, la DLPA et la Commission supérieure des jeux à une quasi-unanimité maintiennent leur refus, inquiété par l'origine géographique des fonds. Le , malgré la défiance de ses services, le ministre Charles Pasqua autorise l'exploitation du casino d'Annemasse par Robert Feliciaggi[1].

En , Robert Feliciaggi commence la revente et contacte Jean-Claude Aaron, exploitant d'établissement de jeux. En , le Casino d'Annemasse est revendu, muni de son autorisation, trois jours après une menace de la DLPA de retirer l'autorisation[3]. Selon Robert Borrel, le maire d'Annemasse, Robert Feliciaggi a « revendu l'autorisation d'exploitation »[1]. Robert Feliciaggi réalise ainsi une plus-value de 100 millions de francs (soit 15 millions d'euros)[4].

Quelques annĂ©es après, Charles Pasqua aurait rĂ©cupĂ©rĂ© une avance de 7,5 millions de francs (1,1 million d'euros) pour financer la campagne europĂ©enne du RPF, via Marthe Mondolini, dirigeante du PMU du Gabon (PMUG) et de Michel Bligny dit « Rackam Â», chef d'entreprise local et membre de diffĂ©rentes sociĂ©tĂ©s « occultes » proches de H. Manant, responsable de la sĂ©curitĂ© de Charles Pasqua. C'est l'affaire du casino d'Annemasse[5] - [1].

Protagonistes

  • Marthe Mondolini est mise en examen pour « recel de corruption active Â» et de « complicitĂ© de financement illĂ©gal de campagne Ă©lectorale Â»[6].
  • Le père de Marthe Mondolini, Michel Tomi, est mis en examen pour « corruption active Â», « financement illĂ©gal de campagne Ă©lectorale Â» et « faux Â»[6].
  • Edgard Vincensini et Daniel Romo sont mis en examen pour « faux Â»[6].
  • L'action publique contre Robert Feliciaggi est Ă©teinte Ă  la suite de son assassinat de deux balles dans la tĂŞte, sur le parking de l'aĂ©roport d'Ajaccio, alors qu'il rentrait de Paris[7].

Instruction

L'instruction est menée par le juge Philippe Courroye de 2001 à 2006[8].

Procès en première instance

Le procès en première instance de l'affaire du financement de la campagne européenne du RPF de 1999 s'ouvre à Paris le [9].

Le , Michel Tomi admet Ă  l’audience qu’une partie de la vente du casino d’Annemasse en 1995 avait bien servi Ă  financer la campagne de Charles Pasqua et Philippe de Villiers. Les fonds prĂŞtĂ©s par Robert Feliciaggi au RPF auraient bien Ă©tĂ© une contrepartie de l’autorisation d’exploitation accordĂ©e par le ministre Charles Pasqua. Ces fonds ne provenaient pas de la cession d’actions d’une sociĂ©tĂ© gabonaise de Paris, la Cogelo, mais de « sa part sur la vente du casino d’Annemasse ». Marthe Mondoloni, gĂ©rante du PMU gabonais, a jouĂ© le rĂ´le d’intermĂ©diaire Ă  deux reprises. Cependant, Michel Tomi refuse de reconnaĂ®tre que ce versement constitue un « pacte de corruption Â»[10].

Selon le rĂ©quisitoire du procureur Philippe Combettes, le financement illĂ©gal du RPF fut bien fondĂ© sur « un pacte de corruption » liĂ© Ă  l'autorisation d'exploitation du casino d'Annemasse. Le procureur a fait Ă©tat des « conditions anormales » d'autorisation du casino, contre l'avis de l'administration. Le pacte corruptif aurait pour contrepartie « la promesse d'un soutien aux activitĂ©s politiques futures » de Charles Pasqua. Dix-huit mois de prison avec sursis sont requis contre lui[11]. Le procureur requiert Ă©galement quatre ans de prison ferme et 150 000 euros d'amende contre Michel Tomi. Il sera condamnĂ© Ă  quatre ans de prison dont deux avec sursis et 150 000 euros d’amende tandis que sa fille Marthe Mondoloni Ă©copera de douze mois avec sursis et 150 000 euros d’amende[3]. Bien que longtemps suspectĂ© d'ĂŞtre le bras armĂ© de H. Manant, Michel Bligny ne sera condamnĂ© qu'a six mois de prison avec sursis et 550 000 euros d'amende. Deux relaxes sont Ă©galement requises pour d'autres prĂ©venus.

Dans cette affaire, Charles Pasqua est condamné le par le tribunal correctionnel de Paris à 18 mois de prison avec sursis, peine confirmée en appel en [12] - [13].

Le pourvoi en cassation de Charles Pasqua étant rejeté le , il est définitivement condamné à 18 mois de prison avec sursis pour « faux, financement illégal de campagne et abus de confiance »[14].

Cour de justice de la RĂ©publique (CJR)

Charles Pasqua doit répondre de ces faits, en , devant la Cour de justice de la République (CJR), créée pour juger les faits délictueux commis par un ministre dans l'exercice de ses fonctions. L'ancien ministre de l'Intérieur est relaxé des accusations de « corruption passive par une personne dépositaire de l'autorité publique »[15].

Notes et références

  1. « Pasqua joue son sort à la roulette », sur Libération (consulté le )
  2. Par Christophe Dubois Le 18 avril 2001 à 00h00, « Les soupçons s'accumulent sur le casino d'Annemasse », sur leparisien.fr, (consulté le )
  3. « Casino d’Annemasse« L’ombre de Pasqua va planer sur ce procès » - l'Observateur de Monaco », (consulté le )
  4. « Un proche de Pasquaface à la justice », sur L'Obs, (consulté le )
  5. Charles Pasqua dans la chienlit, Libération, 2 novembre 2007
  6. « Pour la première fois, Charles Pasqua est renvoyé en correctionnelle », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  7. « Robert Feliciaggi, assassiné à Ajaccio il y a dix ans », sur Corse Matin, (consulté le )
  8. Par I. G. Le 5 novembre 2007 à 00h00, « Charles Pasqua soupçonné de financement illégal », sur leparisien.fr, (consulté le )
  9. « Financement du RPF : Pasqua toujours muet à son procès », sur L'Obs, (consulté le )
  10. Coup de tonnerre au procès Pasqua, Le Figaro, 12 novembre 2007
  11. « Dix-huit mois de prison avec sursis requis contre Charles Pasqua », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  12. « Pasqua condamné à 18 mois de prison avec sursis », sur LEFIGARO, (consulté le )
  13. « Charles Pasqua condamné à 18 mois de prison avec sursis pour financement illégal de campagne électorale », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne, consulté le )
  14. « Première condamnation définitive pour Charles Pasqua », L'Express, 8 avril 2010.
  15. « Un an avec sursis et “deux relaxes de plus” pour Pasqua », L'Express, 30 avril 2010.
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