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Œuvres de miséricorde

Les œuvres de miséricorde (Du latin « misereo » (avoir pitié) et « cor » (cœur)[1] - [2]) sont les actions bienfaisantes que chaque chrétien doit accomplir par amour pour son prochain en s'efforçant de diminuer ses misères[3]. On distingue quatorze œuvres de miséricorde : sept qui relèvent du corps et sept qui relèvent de l'esprit (Temporel et spirituel).

Les sept œuvres de miséricorde, par Frans II Francken, 1605.

Dans la théologie catholique, l'accomplissement des œuvres de miséricorde est de nature à réparer les fautes que l'on a commises, y compris si on ne les réalise pas individuellement, mais en participant à une institution charitable.

Le , à l'occasion de la Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, le pape François propose de considérer la « sauvegarde de la Création » comme une œuvre de miséricorde[4].

Les œuvres de miséricorde, par Pierre Montallier, 1680 env..

Les sept œuvres de miséricorde corporelles

Les six premières œuvres de Miséricorde corporelles sont énumérées par Jésus dans la Parabole du Jour du jugement (Évangile selon Matthieu)[Note 1] : « Nourrir l'affamé, abreuver l'assoiffé, accueillir l'étranger, vêtir les malheureux, soigner les malades, et visiter les prisonniers » ; « ensevelir les morts » apparaît au cours du XIIe siècle et a été ratifié en 1220 par la collection canonique de Raymond de Peñafort[5].

Elles sont déjà présentes partiellement dans l'Ancien Testament dans le Livre d'Isaïe[Note 2].

La septième, la visite aux prisonniers, est également indiquée dans l’Épître aux Hébreux[Note 3].

Les sept œuvres de miséricorde corporelles sont donc[6] :

  1. donner à manger aux affamés ;
  2. donner à boire à ceux qui ont soif ;
  3. vêtir ceux qui sont nus ;
  4. accueillir les pèlerins ;
  5. assister les malades ;
  6. visiter les prisonniers ;
  7. ensevelir les morts.

Des ordres religieux ont été créés pour se vouer à l'accomplissement de chacune de ces œuvres. Ainsi, les Trinitaires, qui visitaient les prisonniers, ont entrepris une œuvre de rachat et de délivrance des captifs.

Les sept œuvres de miséricorde spirituelles

La tradition des œuvres de Miséricorde spirituelles remonte aux Pères du désert. Elles sont énumérées par Saint Thomas d'Aquin.

Elles sont au nombre de sept[6] :

  1. conseiller ceux qui sont dans le doute ;
  2. enseigner les ignorants ;
  3. avertir les pécheurs ;
  4. consoler les affligés ;
  5. pardonner les offenses ;
  6. supporter patiemment les personnes ennuyeuses ;
  7. prier Dieu pour les vivants et pour les morts.

Historique

La miséricorde se diffuse au sein du christianisme à partir du XIIIe siècle. François d'Assise en est l'un des propagateurs. L'interprétation qui en est donnée, à partir des Évangiles, comme sentiment et comme institution, date des dernières décennies du siècle précédent. On commence alors à appliquer cette notion non seulement aux pécheurs, mais aux pauvres, aux pèlerins, aux malades et aux prisonniers, et à considérer l'assistance apportées par les œuvres de miséricorde, comme un moyen d'entrer dans le royaume des Cieux. Des associations et des institutions aux noms divers (maison-Dieu, hospice, hôpital) se créent, rassemblant des fidèles volontaires, sous le signe de la fraternité et de la solidarité avec les déshérités. Un nombre considérable d'hommes et de femmes s'y engagent pour tenter de remédier aux maux permanent de la société de l'époque. Des particuliers ou des autorités municipales (Italie) fondent des hospices et des léproseries qui permettent d'y parvenir dans une certaine mesure, tout en offrant aux fidèles l'occasion d'un perfectionnement spirituel[7].

Controverse sur le caractère rédempteur des œuvres de miséricorde

Vêtir les malheureux par Michael Sweerts.

Certains courants de théologie catholique, considéraient l'accomplissement des œuvres de comme un moyen de à réparer les fautes que l'on a commises. Cette doctrine dites des indulgences[1] a provoqué de nombreuses critiques au sein de l’Église, conduisant à la Réforme. Certains protestants, en particulier Luther, ont critiqué cette possibilité de racheter ses fautes et de gagner son salut, notamment par des aumônes ; en effet, ils considèrent que le nombre et l'identité des élus sont déterminés depuis toujours, et qu'aucune œuvre ne saurait donner le salut à ceux auxquels il n'est pas destiné[Note 4].

La sauvegarde de la création comme œuvre de miséricorde

Le , à l'occasion de la deuxième Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la Création, le pape a évoqué la sauvegarde de la maison commune qui demande les « simples gestes quotidiens par lesquels nous rompons la logique de la violence, de l’exploitation, de l’égoïsme […] et se manifeste dans toutes les actions qui essaient de construire un monde meilleur » (Laudato si', no 230-231)[8], et ajouté que la « sauvegarde de la Création » doit être considérée comme une œuvre de miséricorde[4].

Les œuvres de miséricorde au centre du Jubilé de la Miséricorde

À l'occasion du Jubilé de la Miséricorde lancé en 2015 par le pape François, celui-ci met les œuvres de miséricorde au centre de la démarche jubilaire[9] :

« J'ai un grand désir que le peuple chrétien réfléchisse durant le Jubilé sur les œuvres de miséricorde corporelles et spirituelles. Ce sera une façon de réveiller notre conscience souvent endormie face au drame de la pauvreté, et de pénétrer toujours davantage le cœur de l’Évangile, où les pauvres sont les destinataires privilégiés de la miséricorde divine. La prédication de Jésus nous dresse le tableau de ces œuvres de miséricorde, pour que nous puissions comprendre si nous vivons, oui ou non, comme ses disciples. Redécouvrons les œuvres de miséricorde corporelles : donner à manger aux affamés, donner à boire à ceux qui ont soif, vêtir ceux qui sont nus, accueillir les étrangers, assister les malades, visiter les prisonniers, ensevelir les morts. Et n’oublions pas les œuvres de miséricorde spirituelles : conseiller ceux qui sont dans le doute, enseigner les ignorants, avertir les pécheurs, consoler les affligés, pardonner les offenses, supporter patiemment les personnes ennuyeuses, prier Dieu pour les vivants et pour les morts »[10].

Notes et références

Notes
  1. « Alors le roi dira à ceux qui seront à sa droite : Venez, vous qui êtes bénis de mon Père; prenez possession du royaume qui vous a été préparé depuis la fondation du monde. Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger ; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire ; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli ; j'étais nu, et vous m'avez vêtu; j'étais malade, et vous m'avez visité ; j'étais en prison, et vous êtes venus vers moi. Les justes lui répondront: Seigneur, quand t'avons-nous vu avoir faim, et t'avons-nous donné à manger; ou avoir soif, et t'avons-nous donné à boire ? Quand t'avons-nous vu étranger, et t'avons-nous recueilli ; ou nu, et t'avons-nous vêtu ? Quand t'avons-nous vu malade, ou en prison, et sommes-nous allés vers toi? Et le roi leur répondra : Je vous le dis en vérité, toutes les fois que vous avez fait ces choses à l'un de ces plus petits de mes frères, c'est à moi que vous les avez faites ».
  2. « Voici le jeûne auquel je prends plaisir : Détache les chaînes de la méchanceté, Dénoue les liens de la servitude, Renvoie libres les opprimés, Et que l'on rompe toute espèce de joug. Partage ton pain avec celui qui a faim, Et fais entrer dans ta maison les malheureux sans asile ; Si tu vois un homme nu, couvre-le, Et ne te détourne pas de ton semblable ».
  3. « Souvenez vous des prisonniers, comme si vous étiez aussi prisonniers; et de ceux qui sont maltraités, comme étant vous aussi dans un corps ».
  4. Voir les articles Sola gratia et Sola fide.
Références
  1. Indulgence (catholicisme)#Indulgence partielle ou plénière
  2. (en) Frederick Percival Leverett, A New and Copious Lexicon of the Latin Language: Compiled Chiefly from the Magnum Totius Latinitatis Lexicon of Facciolati and Forcellini and the German Works of Scheller and Leunemann, J.H. Wilkins and R.B. Carter, 1004 p. (lire en ligne), page 540.
  3. Catéchisme de l’Église Catholique, p. 2447.
  4. « Le pape François fait de la sauvegarde de la création une œuvre de miséricorde », sur La Croix.
  5. Dominique Greiner, « Les œuvres de miséricorde en cinq questions », sur La Croix, .
  6. Pratiquer les œuvres de miséricorde.
  7. André Vauchez, François d'Assise, p. 55.
  8. Pape François, , Message pour la deuxième Journée mondiale de prière pour la sauvegarde de la création, Usons de miséricorde envers notre maison commune.
  9. S. de Villeneuve, « Qu'appelle-t-on les œuvres de miséricorde ? », sur La Croix, (consulté le ).
  10. Pape François, Bulle d'indiction Misericordiae Vultus no 15.

Voir aussi

Bibliographie

  • (la) Jean-Paul II, Dives in misericordia [« Encyclique sur la miséricorde divine »], (lire en ligne).
  • (de) Ralf van Bühren, « Die Werke der Barmherzigkeit in der Kunst des 12.–18. Jahrhunderts. Zum Wandel eines Bildmotivs vor dem Hintergrund neuzeitlicher Rhetorikrezeption », dans Studien zur Kunstgeschichte, vol. 115, Hildesheim / Zürich / New York, Verlag Georg Olms, (ISBN 3-487-10319-2).
  • (la) Pape François, Misericordiae Vultus [« Bulle d'Indiction du Jubilé Extraordinaire de la Miséricorde »], (lire en ligne).
  • André Vauchez, François d'Assise, Fayard, , 548 p. (ISBN 978-2-213-61886-9).

Articles connexes

Liens externes

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