Ăcoulement en charge
Les Ă©coulements en charge sont un des trois types dâĂ©coulements Ă©tudiĂ©s couramment en hydrodynamique avec les Ă©coulements en surface libre et les Ă©coulements de percolation.
DĂ©finition
Les Ă©coulements en charge sont l'objet d'Ă©tude de lâhydraulique en charge. Cette branche de l'hydraulique sâintĂ©resse aux Ă©coulements dans les conduites sans surface libre câest-Ă -dire lorsquâelles sont entiĂšrement remplies de fluide. La section dâĂ©coulement du fluide est Ă©gale Ă la section du canal. Lâhydraulique en charge sâapplique Ă tous les canaux Ă section fermĂ©e contrairement Ă lâhydraulique Ă surface libre qui sâapplique aux canaux Ă section ouverte comme les riviĂšres, les chenaux, les conduites non remplies etc. Dans une conduite en charge, la pression du fluide varie temporellement suivant les conditions d'Ă©coulement[1].
Les propriĂ©tĂ©s permettant de dĂ©crire les Ă©coulements en charge sont le dĂ©bit, la vitesse dâĂ©coulement du fluide, la viscositĂ©, la rugositĂ© et la gĂ©omĂ©trie dans le sens de lâĂ©coulement et de la section du canal permettant de calculer les pertes de charges.
Ăquation de continuitĂ©
LâĂ©quation de continuitĂ© transcrit le fait quâaucune matiĂšre ne peut apparaĂźtre ou disparaĂźtre dans un volume fixĂ©.
Pour une mĂȘme conduite, on a alors un dĂ©bit constant dans toutes les sections. On Ă©crit :
avec
- = débit volumique
- = surface dâĂ©coulement dâune section n
- = vitesse dĂ©bitante, c'est-Ă -dire la vitesse moyenne dâĂ©coulement sur la section n, autrement dĂ©finie par :
étant le champ de vitesse défini en tout point de la section .
Ăquation de Bernoulli (1738)
LâĂ©quation de Bernoulli ou Ă©quation gĂ©nĂ©rale dâĂ©coulement permet de calculer la valeur de la charge totale, câest-Ă -dire, lâĂ©nergie totale le long de la conduite. Pour un fluide parfait avec une viscositĂ© nulle, cette charge est constante, pour un fluide rĂ©el, la charge diminue le long de la canalisation en raison des pertes de charges[2] - [3].
Cas d'un fluide parfait
avec
- = altitude (en m)
- = pression au point 1 (en Pa ou N/mÂČ)
- = masse volumique en un point (en kg/mÂł)
- = accĂ©lĂ©ration de la pesanteur (en N/kg ou m/sÂČ)
- = vitesse du fluide au point 1 (en m/s)
- = charge totale
Cas d'un fluide réel
avec
- = altitude (en m)
- = pression en un point (en Pa ou N/mÂČ)
- = masse volumique en un point (en kg/mÂł)
- = accĂ©lĂ©ration de la pesanteur (en N/kg ou m/sÂČ)
- = vitesse du fluide en un point (en m/s)
- = pertes de charge entre les points 1 et 2
Pertes de charges
Les pertes de charges ou pertes dâĂ©nergie du fluide dans la conduite sont dues Ă diffĂ©rents facteurs. On distingue les pertes de charges dites primaires qui sont la consĂ©quence de la viscositĂ© du fluide et de la rugositĂ© des parois de la section dâĂ©coulement (les frottements) et les pertes de charges dites secondaires qui correspondent aux pertes dâĂ©nergies engendrĂ©es par la gĂ©omĂ©trie de la conduite : coudes, Ă©largissements, rĂ©trĂ©cissement etc. On parle Ă©galement de pertes de charges linĂ©aires pour les pertes de charges primaires et de pertes de charges ponctuelles pour les pertes de charges secondaires.
Calcul des pertes de charges
Le calcul des pertes de charges dans un rĂ©seau sous pression est un Ă©lĂ©ment essentiel de lâhydraulique sous pression. Comme pour les autres domaines de lâhydraulique, il existe diffĂ©rentes formules empiriques permettant dâestimer ces pertes dâĂ©nergies.
Loi de Hagen-Poiseuille
La loi de Hagen-Poiseuille donne, dans le cas dâun Ă©coulement laminaire dans une conduite circulaire, la relation entre diamĂštre et dĂ©bit[4] - [5].
Ăquation de Hazen-Williams
LâĂ©quation de Hazen-Williams permet de calculer les pertes de charge dues Ă la rugositĂ© des conduites. Ă la diffĂ©rence de la formule de Poiseuille, limitĂ©e aux Ă©coulements Ă trĂšs faible vitesse dans des conduites de petit diamĂštre, elle permet de dĂ©crire les Ă©coulements turbulents de l'eau[3].
avec
- = débit volumique dans la conduite (en m3/s)
- = coefficient de rugosité de Hazen-Williams du matériau constituant la conduite (nombre sans dimension)
Loi de Darcy â Weisbach (1857)
La loi de Darcy - Weisbach permet le calcul des pertes de charges linaires dues aux frottements dans le cas de lâeau[6].
avec
- = longueur de la conduite considérée (en m)
- = diamĂštre de la conduite (en m)
- = vitesse du fluide (en m/s)
- = accĂ©lĂ©ration de la pesanteur (en N/kg ou m/sÂČ)
- = coefficient de frottement (sans unité)
Plusieurs formules permettent de calculer le coefficient lambda suivant le régime d'écoulement.
Dans le cas d'un régime laminaire :
Dans le cas d'un régime turbulent :
Formule de Colebrook â White (1938)
La formule de Colebrook - White permet de calculer le coefficient lambda de pertes de charges linaires dues aux frottements et à la viscosité[7].
avec :
- = coefficient de perte de charge linéaire
- = nombre de Reynolds
- = diamĂštre de la conduite (m)
- = la rugosité de la canalisation
Suivant cette formule, on voit que le coefficient lambda dépend à la fois de la rugosité de la conduite et de la viscosité du fluide.
Formule de Blasius (1911)
La formule empirique de Blasius permet de calculer le coefficient lambda pour une valeur du nombre de Reynolds inférieure à 105 [8] - [9].
avec :
- = coefficient de perte de charge linéaire
- = nombre de Reynolds
Formules de Lechapt et Calmon
Les formules de Lechapt et Calmon sont une simplification de la formule de Colebrook â White et permettent Ă lâaide de coefficients fonctions de la rugositĂ© de calculer les pertes de charges linĂ©aires avec une prĂ©cision relativement bonne (maximum 3 % d'Ă©cart relatif) dans leur domaine dâapplication (fluide = eau, vitesses comprises entre 0,4 m/s et 2,0 m/s, tempĂ©rature de lâeau de 10 °C)[10] - [11].
avec
= débit en m³/s
= diamĂštre en m
= pertes de charges en mm/m
Valeurs des coefficients L, M et N en fonction de la rugosité k
k (mm) | L | M | N |
---|---|---|---|
2 | 1,863 | 2,000 | 5,33 |
1 | 1,601 | 1,975 | 5,25 |
0,5 | 1,400 | 1,960 | 5,19 |
0,25 | 1,160 | 1,930 | 5,11 |
0,1 | 1,100 | 1,890 | 5,01 |
0,05 | 1,049 | 1,860 | 4,93 |
0,025 | 1,010 | 1,840 | 4,88 |
Diagramme de Moody
Ătabli grĂące aux travaux de Nikuradse, le diagramme de Moody, du nom de l'ingĂ©nieur amĂ©ricain Lewis Ferry Moody, permet de dĂ©terminer le coefficient lambda des pertes de charge en fonction du nombre de Reynolds pour diffĂ©rents types dâĂ©coulements et de rugositĂ©s[3].
Formule de Chézy
La formule de ChĂ©zy est dĂ©rivĂ©e de celle de Darcy â Weisbach[2] - [12].
avec
- = coefficient de vitesse (donné par des tables)
- = débit en m³/s
- = module de débit
- = longueur de la conduite considérée (en m)
Pertes de charges singuliĂšres
Pour le calcul des pertes de charges ponctuelles, il existe pour chaque cas particulier une ou plusieurs formules permettant dâapproximer les pertes dâĂ©nergies locales. Ces formules sont de la forme suivante[2] :
avec
- = coefficient propre Ă chaque type de perte de charge singuliĂšre
- = vitesse du fluide (en m/s)
- = accĂ©lĂ©ration de la pesanteur (en N/kg ou m/sÂČ)
Simulation numérique
Il existe aujourdâhui de nombreux modĂšles de simulation plus ou moins dĂ©taillĂ©s permettant le calcul et le dimensionnement des conduites et de systĂšmes complexes tout entier incluant les rĂ©seaux, les rĂ©servoirs et les diffĂ©rents organes de contrĂŽle tels que les pompes, les vannes etc. De mĂȘme quâil est aujourdâhui possible de calculer prĂ©cisĂ©ment les pertes de charges singuliĂšres grĂące Ă des modĂšles numĂ©riques.
Champs dâapplications pratiques
Lâhydraulique en charge sâapplique par exemple pour le dimensionnement des rĂ©seaux dâeau potable sous pression, des conduites forcĂ©es pour la production dâĂ©lectricitĂ©, des rĂ©seaux dâirrigation sous pression, de certains rĂ©seaux de fluides en charge dans industrie comme par exemple la pĂ©tro-industrie, des conduites de refoulement ou dâaspiration des stations de pompages ou de relĂšvement des eaux usĂ©es, des conduites de vidange de rĂ©servoirs ou encore des rĂ©seaux dâassainissement sous pression.
Ăcoulement stationnaire et instationnaire
On parle dâĂ©coulement instationnaire lorsque les conditions hydrauliques se modifient dans le temps. Par exemple, un cas extrĂȘme : un coup de bĂ©lier hydraulique lors de lâouverture ou la fermeture soudaine dâune vanne dâarrĂȘt. Une onde de sur- et sous-pressions importantes se propage alors le long du rĂ©seau. Ce type dâĂ©vĂšnement peut engendrer des dommages importants du rĂ©seau.
Configuration du réseau
La configuration du rĂ©seau de conduites joue un rĂŽle important dans la rĂ©partition et la fiabilitĂ© du service de distribution dâeau par exemple. Les rĂ©seaux sous pression ont souvent une configuration en mailles qui permet de pallier des incidents localisĂ©s. Chaque point du rĂ©seau est reliĂ© par plusieurs conduits sous pression. Ce type de systĂšme prĂ©sente une complexitĂ© plus Ă©levĂ©e qui peut nĂ©cessiter des simulations informatiques pour ĂȘtre apprĂ©hendĂ©e. DiffĂ©rents types de logiciels sont spĂ©cialisĂ©s pour ces calculs.
Liens
- Courant dans un Tube - Animation
Références
- José Vazquez, Hydraulique générale, Strasbourg, Laboratoire SystÚmes Hydrauliques Urbains (ENGEES) (lire en ligne), p. 5
- Institut National Agronomique - Département du Génie Rural - Section Hydraulique Agricole, Hydraulique Générale, 31 p.
- François G. BriÚre, Distribution et collecte des eaux, Presses inter Polytechnique, , 399 p. (ISBN 978-2-553-00775-0, lire en ligne)
- D'aprÚs (de) Istvån Szabó, Geschichte der mechanischen Prinzipien und ihrer wichtigsten Anwendungen, Bùle, BirkhÀuser Verlag, coll. « Wissenschaft und Kultur », (réimpr. 1987,1996), 491 p. (ISBN 978-3-7643-1063-9 et 978-3-764-30864-3, OCLC 5801710), p. 269-273.
- Albert Schlag, Hydraulique générale, Dunod, (lire en ligne)
- Albert Schlag, Hydraulique générale et mécanique des fluides, Sciences et lettres, (lire en ligne)
- (en) D. I. H. Barr et HR Wallingford (Firm), Additional Tables for the Hydraulic Design of Pipes, Sewers and Channels, Thomas Telford, , 229 p. (ISBN 978-0-7277-1667-5, lire en ligne)
- Vermeiren L, L'irrigation localisée : calcul, mise en place, exploitation, contrÎle du fonctionnement, Food & Agriculture Org., , 219 p. (ISBN 978-92-5-200986-3, lire en ligne), p. 56
- (en) Arthur Akers, Max Gassman et Richard Smith, Hydraulic Power System Analysis, CRC Press, , 358 p. (ISBN 0-8247-9956-9), p. 37
- La Houille blanche, Association pour la diffusion de la documentation hydraulique., (lire en ligne), p. 183
- « Les cours d'hydraulique de l'UMR G-EAU », sur hydraulique.g-eau.net (consulté le )
- Raymond Comolet, Méchanique expérimentale des fluides : Dynamique des fluides reels turbomachines, Masson, (lire en ligne)