William Bechtel (espion)
William Bechtel né le 1894 à Épinal et mort le 1988 à Paris est un agent du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE), et l’assassin présumé de Félix Moumié.
Biographie
Carrière
Né à Épinal (Vosges), William Bechtel fait ses études de chimie au Technikum de Winterthur (Zurich) et à l'université de Genève.
Après avoir fait ses classes auprès des forces spéciales alliées durant la Seconde Guerre mondiale, il a servi durant la Guerre d'Indochine au sein du commando « Conus », qui dépendait de la Direction générale des études et recherches, l'ancêtre du Service de documentation extérieure et de contre-espionnage (SDECE).
Ancien membre des Forces françaises libres à Londres en 1940, William Bechtel est réserviste du SDECE, les services de renseignement extérieurs français[1].
Assassinat de Félix Moumié
En 1960, William Bechtel reçoit du Premier ministre Michel Debré — conseillé par Jacques Foccard — la mission d'assassiner Félix Moumié, militant indépendantiste camerounais[2].
Se présentant comme journaliste installé à Genève pour l'agence Acmé, il rencontre d'abord Félix Moumié à Accra au Ghana afin de gagner sa confiance, et finit par lui proposer un dîner en Suisse. Il l'invite au restaurant du Plat-d'Argent à Genève où il l'empoisonne avec du thallium (autrefois utilisé comme « mort aux rats ») versé dans son apéritif[3] - [4]. Félix Moumié boit un verre de Ricard empoisonné une première fois, et alors qu'il était prévu qu'il meure plusieurs jours après à Conakry en Guinée, il se ressert en avalant une trop forte dose de poison. Les douleurs stomacales commencent à l'aube le lendemain. Transporté d'urgence à l'hôpital cantonal de Genève, son décès est constaté le à 19 h 10. Les autorités françaises et camerounaises feront circuler les hypothèses d'un règlement de comptes interne à l'Union des populations du Cameroun ou d'un assassinat par les Russes[5].
Le , le juge d’instruction Dinichert lance un mandat d’arrêt international contre William Bechtel. Dans un communiqué, il évoque « de très sérieux soupçons » et « d’importants indices à sa charge »[6]. L'autopsie permit à la police suisse de remonter rapidement la piste et de perquisitionner la chambre d’hôtel de William Bechtel le 17 novembre 1960. Celui-ci s’était inscrit à l’hôtel sous son vrai nom et dans ses mémoires, Paul Aussaresses déclare qu'il était accompagné d'une jolie femme blonde qui devait retenir l’attention de Moumié[7]. Bechtel est arrêté en 1974. Défendu par maître Marc Bonnant, il est relâché, sous la pression du gouvernement français[8], après avoir versé une caution de 100 000 francs suisses. Son avocat déclare que « l’État français n’a pas payé, j’ai fait la tournée des popotes, il avait des amis ». La procédure traîne en longueur et aboutit à un non-lieu le [9].
Voir aussi
Notes et références
- « William Bechtel - chef de bataillon », sur plan-sussex-1944.net (consulté le ).
- « Mémoire d'un continent - L’assassinat de Félix Moumié », sur RFI, (consulté le )
- Roger Faligot (dir.) et Jean Guisnel (dir.), Histoire secrète de la Ve République, Éditions La Découverte, , « La vraie fausse indépendance des colonies françaises d'Afrique subsaharienne », p. 113
- Vincent Nouzille, Les tueurs de la RĂ©publique, Fayard, , p. 49
- Thomas Deltombe, Manuel Domergue, Jacob Tatsita, KAMERUN !, 2018
- « Grand reportage - France-Cameroun: comment le tueur de l’indépendantiste Félix Moumié a échappé à la justice », sur RFI, (consulté le )
- « Comment Félix Moumié a été empoisonné », sur Jeune Afrique, (consulté le ).
- P. Kropp, Les Secrets de l'espionnage français, Lattes, , p. 509-510
- « William Bechtel, l'agent français qui a tué Félix Moumié », sur Le Journal du Cameroum, (consulté le )