Victorine Meurent
Victorine Louise Meurent, parfois écrit Meurend, Meurant ou Meurand, est une peintre française, également modèle, née à Paris le et morte à Colombes le .
Paris, Bibliothèque nationale de France.
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(Ă 83 ans) Colombes |
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Elle est particulièrement célèbre pour avoir été le modèle ayant posé le plus fréquemment pour Édouard Manet, notamment dans deux de ses œuvres les plus connues, mais son art de peintre était pleinement reconnu de son vivant. Elle a ainsi participé au prestigieux Salon à plusieurs reprises. En 1876, ses tableaux y furent acceptés alors que ceux de Manet avaient été refusés.
Biographie
En 1860, Victorine Meurent s'inscrit comme modèle dans l'atelier-école du peintre Thomas Couture[1].
C'est peut-être là qu'elle rencontre Édouard Manet, ancien élève de Couture, mais il est également possible que la rencontre ait eu lieu par l'intermédiaire d'un autre peintre, Alfred Stevens. De fait, c'est dans l'atelier de Stevens, que ce dernier avait généreusement mis à la disposition de Manet, que celui-ci commence à peindre Mlle V. en costume d’espada, première toile du peintre dans laquelle Victorine figure : notamment, Manet sait opportunément profiter des décors et costumes présents sur place, lesquels avaient été déposés par une troupe de théâtre madrilène de passage à Paris. Stevens lui-même, dont elle est très proche, la fait aussi poser : on la reconnaît en particulier dans deux versions du Sphinx parisien du peintre belge installé à Paris, la première datée de 1867 et la seconde peinte, selon une note de la main de l'artiste à l'envers de la toile, pendant le siège de Paris en 1870[1]. Elle pose également pour Edgar Degas.
Mais l’image du modèle reste aujourd'hui étroitement associée à l'œuvre de Manet, pour qui elle aura posé pendant onze ans, de 1862 à 1873. On la voit notamment dans La Chanteuse des rues[2], La Jeune Fille en rose (également intitulée La Femme au perroquet) ou La Joueuse de guitare, peint en 1866-1867. Les deux tableaux les plus célèbres la font apparaître nue : Le Déjeuner sur l'herbe (1863), où elle est dépeinte assise et entièrement dévêtue, près de deux hommes en costume de ville ; Olympia, un nu qui montre son corps mince allongé sur un divan, ce qui lui vaut le surnom de « crevette »[1].
À la fin de l'été 1868, la jeune femme entreprend avec la troupe de théâtre Genot un voyage en Amérique organisé par l'imprésario Jacob Grau, voyage consigné dans la seule lettre connue de sa main et conservée à la Pierpont Morgan Library à New York, et souvent mentionné par ses contemporains (Adolphe Tabarant en particulier)[1]. Victorine est accompagnée d'un jeune garçon de 7 ans, Louis Meurent. La troupe est de retour en France en .
La peintre
A partir de 1875 Victorine Meurent prend des cours à l'Académie Julian dans l'atelier du peintre Étienne Leroy[2]et se met à peindre, rencontrant un certain succès : ses toiles sont reçues à plusieurs reprises au Salon. En 1876, année où Manet est refusé au Salon, elle présente un Autoportrait (musée des Beaux-Arts de Boston[3]) et, en 1879, Une bourgeoise de Nuremberg au XVIe siècle (localisation inconnue), accrochée dans la même salle que Manet, la salle des « M », qui montre quant à lui Dans la serre. Elle expose encore en 1895 et 1904 — elle aura finalement participé à six Salons différents[2].
Artiste reconnue, elle intègre en 1903 la Société des artistes français. Durant ces années, elle pose encore, non plus pour Manet, de qui elle s'est éloignée, mais pour Norbert Goeneutte[1]. L'année suivante, Émile Blavet mentionne que, disant agréablement la chansonnette, elle a passé sa vie entre le théâtre et les artistes, elle est à présent peintre, spécialisée dans les portraits d'animaux de compagnie[4]. En 1904 également, André Devambez est sans pitié quand il la représente, dans son tableau Les Incompris, prématurément vieillie - elle a soixante ans, et revêche à la même table de bistro qu'une sorte de Verlaine alcoolisé.
En 1907, l'année où Olympia entre au musée du Louvre (au musée du Jeu de paume) et Le Déjeuner sur l'herbe au musée des Arts décoratifs, c'est à Colombes que Victorine Meurent s'installe, avec son amie Marie Dufour, dans un modeste pavillon où elle continue à peindre et à donner des leçons de guitare[2].
C'est à Colombes qu'elle meurt en mars 1927, âgée de 83 ans. Le musée municipal de Colombes conserve deux de ses toiles.
- Autoportrait (1876), musée des Beaux-Arts de Boston.
- Le Jour des rameaux (vers 1880), musée municipal d'Art et d'Histoire de Colombes.
- Le Briquet, musée municipal d'Art et d'Histoire de Colombes.
Historiographie et apparition dans la fiction
En 1906, l'écrivain irlandais George Moore fait de Meurent un personnage de son autobiographie semi-fictionnelle Memoirs of My Dead Life (1906), où elle apparaît comme une femme entre-deux-âges vivant une relation lesbienne avec une courtisane célèbre.
L'intérêt pour Victorine Meurent a été renouvelé à la fin du XXe siècle et surtout au début des années 2000. Une thèse lui est consacrée dès 1986, permettant de mettre à jour les principales sources sur sa vie et son œuvre[5].
Le fait qu'il s'agisse d'une femme lesbienne a nourri l'intérêt, en particulier aux États-Unis, pour son parcours, bien que son travail de peintre n'ait pas marqué l'histoire de l'art. Elle apparaît ainsi dans de nombreuses fictions des années 1990 et surtout 2000 : Alias Olympia: A Woman's Search for Manet's Notorious Model and Her Own Desire, d'Eunice Lipton (1992), Mademoiselle Victorine: a Novel (2007) de Debra Finerman, A Woman With No Clothes On (2008) de V. R. Main, Sacré Bleu de Christopher Moore (2012), etc.
En France, Emmanuel Laurent publie son journal imaginaire, accompagné d'une biographie, Mademoiselle V. Journal d'une insouciante, en 2003. Cette publication est l'occasion de rechercher les tableaux de Victorine Meurent, et d'en trouver deux au musée de Colombes.
Victorine Meurent est aussi un personnage du film Intimate Lives: The Women of Manet ou Manet in Love (1998), où elle est jouée par Shelley Phillips.
Elle est l'une des protagonistes de l'opéra Victorine, écrit par le mouvement d'artistes conceptuels Art & Language et composé en partie par Mayo Thompson[6].
Le modèle
- Portrait de Victorine Meurent (1862),musée des Beaux-Arts de Boston.
- Le Sphinx parisien (1870), musée d'Art de San Diego.
Notes et références
- Emmanuel Laurent, Mademoiselle V. Journal d'une insouciante, éditions de La Différence, 2003.
- (en) Claude J. Summers, The Queer Encyclopedia of the Visual Arts, Cleis Press, 2004.
- Longtemps tenu comme disparu, il a été acquis le musée des Beaux-Arts de Boston en 2021 (cf. Bénédicte Bonnet Saint-Georges, « Boston acquiert un tableau de Victorine Meurent », sur La Tribune de l'Art, (consulté le )).
- Blavet 1884.
- (en) Margaret Seibert, A biography of Victorine-Louise Meurent and her role in the art of Edouard Manet, thèse d'histoire de l'art, Ohio State University, 1986, 451 p.
- Art & Language : Reality (Dark) Fragments (Light), Montsoreau, Éditions du Château de Montsoreau-Musée d'art contemporain, , 173 p. (ISBN 9782955791721), p. 35.
Annexes
Bibliographie
- (en) Margaret Seibert, A biography of Victorine-Louise Meurent and her role in the art of Edouard Manet, thèse d'histoire de l'art, Ohio State University, 1986, 451 p.
- Emmanuel Laurent, Mademoiselle V. Journal d'une insouciante, éditions de La Différence, 2003. — Journal imaginaire de Victorine Meurent, suivi d'une biographie critique.
- Émile Blavet, « Les modèles femmes », La Vie parisienne,‎ , p. 119-124.
- Olivier Renault, Les Modèles et leurs peintres, Éditions Parigramme, 2019, pp. 22-35.
Liens externes
- Ressources relatives aux beaux-arts :