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Traque-affût

La traque-affût est un mode de chasse collective au grand gibier alternatif à la battue.

Un chasseur positionné sur mirador

DĂ©finition

La traque-affĂ»t consiste Ă  positionner les postĂ©s non pas en ligne, sauf exception liĂ©e au relief, mais Ă  proximitĂ© des coulĂ©es de fuite des animaux, que ce soit Ă  l’intĂ©rieur des enceintes ou Ă  l’écart de celles-ci. Les postĂ©s sont souvent trĂšs Ă©loignĂ©s les uns des autres, et en hauteur. Ceci permet d’autoriser le tir Ă  360 degrĂ©s Ă  trĂšs courte distance[1] - [2] - [3].

Préparation

Ce mode de chasse nĂ©cessite de procĂ©der prĂ©alablement Ă  un repĂ©rage du territoire afin d’y dĂ©terminer les futurs emplacements des postes de tir. Ceux-ci, lorsque le relief est insuffisant pour assurer un tir fichant, sont souvent matĂ©rialisĂ©s par des miradors de type « battue », en bois ou en acier[2]. Ils sont implantĂ©s au cƓur des parcelles forestiĂšres, Ă  proximitĂ© de ce que l’on estime ĂȘtre les coulĂ©es de fuite des animaux[2].

Contrairement Ă  la battue, on recherche une distance suffisante entre les diffĂ©rents postes afin que ceux-ci ne se trouvent pas en covisibilitĂ©, et qu’aucun tir ne puisse mettre en pĂ©ril les autres postes. On admet gĂ©nĂ©ralement une distance minimale entre les miradors de 200 mĂštres, pour une distance de tir maximale de 40 mĂštres[2].

Ainsi postĂ©s, les chasseurs ne prĂ©sentent aucun risque par rapport au non-chasseurs, puisque les tirs sont strictement circonscrits Ă  la zone de chasse. DissĂ©minĂ©s au cƓur des bois, avec une densitĂ© d’un chasseur postĂ© pour 6 Ă  10 hectares[4], ils sont en outre trĂšs discrets visuellement[2].

DĂ©roulement

Dispositif de traque-affût. Les rabatteurs progressent selon l'itinéraire jaune, mettant en mouvement le gibier passant à proximité des postes marqués en rouge.

Comme pour la battue, les participants Ă  ce dispositif de chasse sont soit des postĂ©s, soit des rabatteurs. Au dĂ©but de la journĂ©e de chasse, chaque postĂ© tire au sort un numĂ©ro de poste. Ceci le place sous l’autoritĂ© d’un chef de secteur qui aura la tĂąche de le guider tout au long des opĂ©rations[5]. Une fois les postĂ©s mis en place, les rabatteurs vont animer le territoire en tentant de mettre en mouvement le gibier.

Ces rabatteurs peuvent avoir des chiens courants comme des chiens Ă  plus courte quĂȘte. Ils peuvent aussi ne pas en avoir. Dans ce cas, on parlera de « poussĂ©e silencieuse », ou Drucken, terme allemand signifiant « poussĂ©e ». Le rabat peut se faire en une ou plusieurs Ă©quipes, cette derniĂšre solution prĂ©sentant l’avantage de permettre une plus grande fluiditĂ© de rabat ainsi qu’une meilleure capacitĂ© Ă  dĂ©sorienter le gibier.

Afin d’assurer leur sĂ©curitĂ© en Ă©vitant tout risque de tir dans leur direction, les rabatteurs signalent rĂ©guliĂšrement leur position aux postĂ©s en utilisant soit leur voix, soit une corne ou pibole[6].

Les animaux se dĂ©placent Ă  une allure modĂ©rĂ©e, bien diffĂ©rente de celle qu’ils ont lorsqu’ils se retrouvent contraints de franchir une ligne de chasseurs postĂ©s en battue, ou de sortir en plaine. Ils passent doucement Ă  proximitĂ© des postĂ©s qui ont l'autorisation de tirer Ă  courte distance, de maniĂšre pĂ©riphĂ©rique, Ă  l'exception de la direction des traqueurs. Les tirs sont alors grandement facilitĂ©s ; ceci explique que le ratio de balles tirĂ©es par animal au tableau diminue considĂ©rablement comparativement Ă  la battue[6] - [7].

Avantages par rapport Ă  la battue

Sécurité

La facilitation du tir, du fait de la proximité du gibier et de sa faible vitesse, permet la diminution considérable du ratio de balles tirées par animal au tableau. L'Association Nationale des Chasseurs de Grand Gibier[8] estime qu'en France, le nombre de balles tirées en battue est en moyenne de 7 par animal tué, soit 6 balles "perdues". La traque affût permet de faire chuter ce chiffre en-dessous de 2[2] - [3].

Le positionnement des chasseurs postĂ©s, au cƓur des bois, assorti de consignes strictes visant Ă  n'autoriser les tirs qu'Ă  trĂšs courtes distances, souvent matĂ©rialisĂ©es par des repĂšres visuels pĂ©riphĂ©riques, rend impossible tout tir au-delĂ  de la stricte zone de chasse. Chemins ruraux, bĂątiments, voies de circulation sont ainsi totalement protĂ©gĂ©s, alors que la battue gĂ©nĂšre chaque annĂ©e des dizaines d'accidents du fait de tirs en direction des habitations et des vĂ©hicules[9].

Le grand éloignement des postes, et l'absence de covisibilité entre les postés, sont déterminants pour s'affranchir du risque de tir entre postés en battue qui représentent, selon l'Office Français de la Biodiversité, une part importante des accidents générés par la battue[9].

Efficacité

Outre l’efficacitĂ© des tirs, le positionnement des postĂ©s Ă  proximitĂ© des coulĂ©es permet une redondance des postes. Si un ou plusieurs animaux empruntent un de ces itinĂ©raires, la probabilitĂ© de prĂ©lĂšvements augmente en proportion du nombre de postes qu’il pourra croiser. C’est une diffĂ©rence fondamentale avec la battue qui, une fois le gibier sorti et tirĂ©, ne permet plus aucun tir[10].

Discrétion

Le positionnement des chasseurs postĂ©s au cƓur des bois leur permet de passer inaperçu par rapport aux promeneurs, riverains et automobilistes. La battue, en comparaison, gĂ©nĂšre des lignes de postĂ©s d’autant plus voyantes et anxiogĂšnes que le port de tenues Ă  haute visibilitĂ© orange est une obligation pour toute chasse collective au grand gibier[11].

Le moindre nombre de tirs, ainsi que leur espacement géographique et temporel, contribue également au sentiment de sécurité[10]. L'efficacité décuplée de la méthode permet aussi de limiter le nombre de jours de chasse, tout en réalisant malgré tout le plan de chasse[2].

Éthique

Le gibier, en plein cƓur des parcelles forestiĂšres, se dĂ©place Ă  faible allure ; gĂ©nĂ©ralement au pas ou au trot, lorsqu'il ne s'arrĂȘte pas totalement. Le tir d’un animal dans des conditions plus favorables permet un meilleur placement des balles. Pour assurer une mort la plus rapide d’un gibier, l’idĂ©al est d’atteindre la partie avant de celui-ci, tout particuliĂšrement la zone cƓur/poumons. Cet exercice est dĂ©licat, surtout si l’animal se meut Ă  grand galop comme c’est trĂšs souvent le cas lors des battues. La traque-affĂ»t permet d’augmenter trĂšs significativement la proportion d’atteintes dans la zone recherchĂ©e et, ainsi, de limiter d’autant les souffrances animales[1].

Le faible nombre de balles tirées, combiné à l'allure modérée du gibier et à la bonne visibilité offerte par les postes surélevés, est un facteur de facilitation pour les éventuelles recherches du gibier blessé par un conducteur de "chien de rouge", spécialisé dans cette démarche[12] - [13].

DĂ©veloppement et popularisation

MĂ©connue Ă  l’échelle nationale, la traque-affĂ»t est souvent administrativement assimilĂ©e Ă  la battue[14] - [15]. Les SchĂ©mas DĂ©partementaux de Gestion CynĂ©gĂ©tique, prĂ©cisant dans chaque dĂ©partement les conditions d’exercice de la chasse[16], interdisent parfois le tir « dans la traque »[14] - [17]. Une telle disposition peut ĂȘtre un facteur bloquant si la traque-affĂ»t n’est pas reconnue comme un mode de chasse Ă  part entiĂšre.

Constatant ces difficultĂ©s juridiques, les sĂ©nateurs rĂ©unis au cours de l'annĂ©e 2022 Ă  l'occasion d'une Mission d'Information SĂ©natoriale consacrĂ©e Ă  la sĂ©curitĂ© Ă  la chasse[15] ont recommandĂ© de populariser des mĂ©thodes de chasse plus sĂ»res, dont la traque-affĂ»t fait partie, en prenant soin de la distinguer de la battue afin que les dispositions spĂ©cifiques Ă  celle-ci ne puissent rendre la traque-affĂ»t impossible Ă  mettre en Ɠuvre[18].

Reprenant les conclusions de cette commission, le MinistĂšre de la Transition Écologique et de la CohĂ©sion des Territoires , par la voix de la SecrĂ©taire d’État chargĂ©e de l’Écologie, Madame BĂ©rangĂšre Couillard, a prĂ©sentĂ© le 9 janvier 2023 un plan de sĂ©curitĂ© Ă  la chasse[19] enjoignant les FĂ©dĂ©rations DĂ©partementales des Chasseurs de "favoriser les pratiques de chasse les plus sĂ»res : tirs postĂ©s, traque-affĂ»t"... Ces FĂ©dĂ©rations devant assurer la promotion de ces pratiques et les actions de sensibilisation au niveau local[19].

L'Office National des ForĂȘts, souhaitant rĂ©pondre aux problĂ©matiques de conflit d'usages, est aujourd'hui un important promoteur de la traque-affĂ»t[20], de mĂȘme que l'Institut de France sur la ForĂȘt de Chantilly. De nombreux autres territoires privĂ©s se sont lancĂ©s dans cette voie[21] - [11] - [10] - [7] - [6].

Notes et références

  1. https://www.chassons.com/pratique-ou-conseils/en-quoi-consiste-la-traque-affut/370994/
  2. Collectif, Guide Pratique des Traques-Affûts
  3. Documentaire "Traque-Affût, l'Autre Battue" (Réal. Xavier Gasselin, - Parceque Prod - Diffusion : Chaßne Seasons, groupe Canal Plus, juin 2022)
  4. Plaquette « Traque-Affût, une méthode séculaire adaptée aux enjeux de la chasse » (ONF 2020)
  5. Connaissance de la Chasse, Éditions Larriviùre, janvier 2021, 114 p., p. 40
  6. Revue Nationale de la Chasse, Reworld Media, février 2021, p. 18
  7. Plaisir de la Chasse, Jean-Marc Thiernesse, août/septembre 2017
  8. « ANCGG - Association - Chasse », sur www.ancgg.org (consulté le )
  9. « Bilan des accidents-incidents de chasse 2021-2022 », sur Drupal (consulté le )
  10. Connaissance de la Chasse, Éditions Larriviùre, janvier 2021, 114 p.
  11. Connaissance de la Chasse, Éditions Larriviùre, janvier 2021
  12. « La recherche au sang | UNUCR », sur www.unucr.fr (consulté le )
  13. « Accueil », sur arggb-idf-bourgogne (consulté le )
  14. Fédération des Chasseurs des Landes, « Schéma Départemental de Gestion Cynégétique des Landes »
  15. « Rapport d'information n° 882 (2021-2022) de Mme Maryse CARRÈRE, PrĂ©sidente et M. Patrick CHAIZE, fait au nom de la commission des affaires Ă©conomiques et de la commission des lois, dĂ©posĂ© le 14 septembre 2022 »
  16. https://www.legifrance.gouv.fr/codes/id/LEGISCTA000006176647/
  17. « Participation du public : Schéma Départemental de Gestion Cynégétique du FinistÚre 2020-2026 », sur Fédération départementale des chasseurs du FinistÚre, (consulté le )
  18. « La sécurité : un devoir pour les chasseurs, une attente de la société », sur www.senat.fr (consulté le )
  19. « Dossier de presse - Le plan sĂ©curitĂ© Ă  la chasse 2023 », sur MinistĂšres Écologie Énergie Territoires (consultĂ© le )
  20. « Vers une nouvelle gĂ©nĂ©ration de chasseurs ? », sur Office national des forĂȘts, (consultĂ© le )
  21. « Les chevreuils du Bois Landry », sur Camera One TV, (consulté le )
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