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Toyotisme

Le toyotisme est une forme d'organisation du travail dont l'ingénieur japonais Taiichi Ōno est considéré comme l'inventeur. Mise en avant par Toyota en 1962, elle n'est pas appliquée immédiatement.

L'application formelle du toyotisme chez Toyota se nomme système de production Toyota ou SPT (traduction de l'anglais japonais Toyota Production System : TPS).

Histoire

Après leur défaite face aux Américains au cours de la Seconde Guerre mondiale, les Japonais doivent relancer leur économie.

Toyota médiatise une vision stratégique pour faire redémarrer l'économie japonaise : rattraper les Américains au plan de la production, sinon risquer de disparaître. À l'origine de ce système de gestion de la production, le fondateur de Toyota, Sakichi Toyoda, son fils, Kiichiro Toyoda, et l'ingénieur Taiichi Ōno. Ces derniers se sont inspirés pour l'essentiel des travaux de William Edwards Deming, ainsi que des écrits de Henry Ford sur le fordisme.

Taiichi Ōno met au point un système de gestion de l'entreprise simple mais efficace, consistant à :

  • rĂ©duire les gaspillages ;
  • maintenir une qualitĂ© optimale des produits tout au long de la chaĂ®ne de production ;
  • Ă©viter l'offre excĂ©dentaire. Si certains modèles de voitures se vendent moins, il faut en rĂ©duire la taille des sĂ©ries, ce qui implique une baisse des stocks. Les voitures et les pièces sont fabriquĂ©es pratiquement Ă  la demande. C'est la production Ă  flux tendu (ou production « juste Ă  temps », ou « mĂ©thode kanban ») ;
  • prendre en considĂ©ration l'avis des opĂ©rateurs : ceux-ci participent au diagnostic des problèmes et Ă  leur rĂ©solution ;
  • amĂ©liorer le système de façon continue, en une dynamique interne qui intègre tous les acteurs concernĂ©s, de l'opĂ©rateur Ă  l'ingĂ©nieur.

Un tel système d'organisation permet un décloisonnement des fonctions et des responsabilités ; il allie l'efficacité de production à une certaine reconnaissance psychologique des travailleurs. On leur demande leur avis sur l'entreprise, et ils se sentent donc plus impliqués.

Application pratique : le système de production de Toyota (SPT)

Le SPT est un composant important de ce qu'on appelle la fabrication « au plus juste » (ou encore « sans gaspi », troncation familière de « sans gaspillage Â»), en anglais japonais lean manufacturing, litt. « la fabrication maigre », « la fabrication sans gras »). Les pièces dĂ©tachĂ©es sont approvisionnĂ©es au bon endroit, au bon moment et en quantitĂ© suffisante, sans gaspillage. Seule la production rĂ©pondant Ă  une demande prĂ©cise sort de la chaĂ®ne de fabrication. Cette mĂ©thode est Ă  l'opposĂ© du système antĂ©rieur de fabrication, qui prĂ©voyait des stocks de pièces importants, indĂ©pendamment de la demande rĂ©elle.

Le système de production de Toyota regroupe plusieurs concepts, dont certains ont, depuis, été adaptés ou repris par d'autres constructeurs automobiles ou entreprises industrielles :

  • Le juste-Ă -temps : système de production qui vise Ă  synchroniser et Ă  ajuster exactement le flux et le nombre des pièces avec le rythme de montage ;
  • Le kaizen : principe d’autonomisation des Ă©quipes chargĂ©es de dĂ©finir les temps standard de production et de se rĂ©partir les diverses opĂ©rations de fabrication d'un produit afin de travailler plus efficacement et plus rapidement. Le kaizen dĂ©crit parfaitement le principe d’amĂ©lioration continue du système ;
  • L’autonomisation des machines : Ă©quipement des machines de dispositif d’arrĂŞt, simples, peu onĂ©reux, qui permettent la surveillance de plusieurs machines par un mĂŞme opĂ©rateur ;
  • Le kanban : système d’étiquettes (de fiches de papier) qui indique le nombre de pièces Ă  produire ou Ă  livrer, en Ă©vitant ainsi toute production excĂ©dentaire ;
  • Le cercle de qualitĂ© : groupe de travail composĂ© d’opĂ©rateurs et de cadres, constituĂ© autour des activitĂ©s de kaizen, qui couvre les questions de qualitĂ©, de maintenance, de sĂ©curitĂ©, de prix de revient… ;
  • ou encore le zĂ©ro dĂ©faut, l'esprit d'Ă©quipe, etc.

Incidence et développements

Le toyotisme serait le modèle idéal de l’organisation de l’entreprise du point de vue de la productivité[1]. Mais sa mise en place au Japon a pris plusieurs dizaines d’années, et n’a probablement été possible que parce que le modèle social japonais pouvait l’accepter (« Au Japon, les syndicats de l'industrie automobile sont intégrés à l'entreprise à laquelle ils appartiennent, représentant uniquement les travailleurs réguliers, défendant surtout les intérêts de cette entreprise. »[1]).

Certaines multinationales ont cependant décidé d’appliquer quelques concepts toyotistes tels que le juste-à-temps, l’autonomisation des machines, le kaizen, le kanban ou le cercle de qualité.

Cette nouvelle forme d’organisation, basée sur les compétences et la qualification des ressources humaines, marque la fin du taylorisme et du fordisme à l’état pur.

Critiques

Plusieurs études ou ouvrages ont été consacrés à ce mode de production, mais les avis divergent sur sa reproductibilité en l'absence de la culture d'entreprise Toyota (en anglais, the Toyota Way) et sur son caractère exemplaire (voir miracle économique japonais).

Le journaliste japonais Satoshi Kamata a fait une analyse très critique de ce système dans un livre-enquête, réédité en français en 2008 sous le titre Toyota. L'usine du désespoir. En 1972, il a partagé pendant cinq mois le quotidien des ouvriers sur les chaînes à l'usine Toyota de Nagoya. Il décrit l'augmentation sans fin des cadences, la polyvalence bouche-trou, la mise en concurrence et l'endoctrinement de ses collègues au nom de l'esprit d'entreprise[2].

Terminologie

  • Juste-Ă -temps (just-in-time, minimiser les stocks et les en-cours de fabrication)
  • Jidoka (autonomation, nĂ©ologisme en anglais japonais fabriquĂ© par contraction de autonomous automation, automatisation autonome)
  • Heijunka (lissage de la production)
  • Kaizen (amĂ©lioration continue)
  • Poka-yoke (dĂ©trompeur, prĂ©vention des erreurs — du japonais yokeru, Ă©viter, et de poka, erreurs intempestives)
  • Kanban (fiche, carte)
  • Andon (panneau lumineux ; Ă  l'origine, corde permettant de prĂ©venir d'un problème)
  • Muda (gaspillage)
  • Genchi Genbutsu (voir de ses propres yeux)
  • Genba (ĂŞtre prĂ©sent sur le terrain)

Notes et références

  1. Henry Houben et Marc Ingham, « Par quel système remplacer le Fordisme ? », Gérer et Comprendre - Annales des Mines,‎
  2. « Toyota. L'usine du désespoir », sur sante-et-travail.fr (consulté le )

Voir aussi

Bibliographie

  • Paul Jobin, « Du fordisme au toyotisme : l'État japonais en question », in La pensĂ©e comptable, Presses universitaires de France, Paris, 1998, p. 217-228.
  • Taiichi ĹŚno et Setsuo Mito, PrĂ©sent et avenir du toyotisme. ProductivitĂ© de l'entreprise, Masson, 1993, (ISBN 9782225840005).
  • KoĂŻchi Shimizu, Le toyotisme, La DĂ©couverte, Paris, 1999, 118 p., (ISBN 9782707129215)
  • Satoshi Kamata, Toyota, l'usine du dĂ©sespoir, Demopolis, Paris, 2008.
  • Ohno, Taiichi (1995), Toyota Production System: Beyond Large-Scale Production, Productivity Press Inc., (ISBN 0-915299-14-3).
  • Yasuhiro Monden (1998), Toyota Production System, An Integrated Approach to Just-In-Time, Third edition, Norcross, GA: Engineering & Management Press, (ISBN 0-412-83930-X).
  • Jeffrey Liker (2003), The Toyota Way: 14 Management Principles from the World's Greatest Manufacturer, First edition, McGraw-Hill, (ISBN 0-07-139231-9).
  • S. Heim, Toyota victime du toyotisme : pourquoi les sciences sociales ont encore beaucoup Ă  apprendre de cette entreprise ?, ()

Articles connexes

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