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Théorie microbienne

La thĂ©orie microbienne, Ă©galement appelĂ©e « thĂ©orie pathogĂ©nique » ou « thĂ©orie des germes », est une thĂ©orie proposant que de nombreuses maladies sont causĂ©es par des micro-organismes. Bien que trĂšs controversĂ©e lors de sa formulation initiale, cette thĂ©orie a Ă©tĂ© validĂ©e Ă  la fin du XIXe siĂšcle et constitue dĂ©sormais un Ă©lĂ©ment fondamental de la mĂ©decine moderne et de la microbiologie clinique. Elle a conduit Ă  d’importantes innovations comme la pratique de l’hygiĂšne prĂ©ventive et l’invention des antibiotiques.

Bacille du charbon découvert par Robert Koch en 1876.

Histoire

Girolamo Fracastoro.
Agostino Bassi.
Antoni van Leeuwenhoek.
Louis Pasteur

Auparavant, on considĂ©rait que l’apparition de la maladie Ă©tait due non Ă  des micro-organismes qui se dĂ©veloppent par la reproduction[1], mais Ă  la gĂ©nĂ©ration spontanĂ©e. Un des premiers anciens textes de mĂ©decine, le texte sacrĂ© hindou de l’Atharva-VĂ©da, identifie les agents pathogĂšnes vivants tels que le yatudhānya, le kimÄ«di, le krimi et le duráč‡ama comme causes de la maladie. Les atharvāns luttent contre la maladie en cherchant Ă  les tuer avec une variĂ©tĂ© de mĂ©dicaments. L’une des premiĂšres rĂ©fĂ©rences occidentales Ă  cette derniĂšre thĂ©orie dite « thĂ©orie des miasmes » apparait dans le Rerum rusticarum publiĂ© par Varron en 36 av. J.-C., oĂč il met en garde contre l’implantation d’une ferme Ă  proximitĂ© de marais :

« ... Et parce qu’il y a certaines crĂ©atures minuscules que les yeux ne peuvent voir, qui flottent dans l’air et pĂ©nĂštrent dans l’organisme par la bouche et le nez et causent de graves maladies[2]. »

La piste ouverte par la muscardine

En 1546, Girolamo Fracastoro a proposĂ© que les maladies Ă©pidĂ©miques Ă©taient causĂ©es par des entitĂ©s transmissibles semblables Ă  des semences et susceptibles de transmettre les infections par contact direct ou indirect ou mĂȘme sans contact sur de longues distances. C’est Ă  son compatriote Agostino Bassi qu’on donne souvent le crĂ©dit d’avoir formulĂ© pour la premiĂšre fois la thĂ©orie microbienne, sur la base de ses observations sur l’épidĂ©mie meurtriĂšre de la maladie muscardine des vers Ă  soie. En 1835, il a expressĂ©ment attribuĂ© la mort des insectes Ă  des agents vivants contagieux visibles Ă  l’Ɠil nu sous forme de masses poudreuses de spores. Ce champignon microscopique a ensuite Ă©tĂ© nommĂ© Beauveria bassiana en son honneur.

Contribution de la microbiologie et de la parasitologie

Les micro-organismes ont d’abord Ă©tĂ© observĂ©s directement par le savant nĂ©erlandais Antoni van Leeuwenhoek, considĂ©rĂ© comme le pĂšre de la microbiologie. S’appuyant sur les travaux de Leeuwenhoek, le mĂ©decin Nicolas Andry de Boisregard, considĂ©rĂ© comme le pĂšre de la parasitologie, a fait valoir en 1700 que les micro-organismes qu’il appelait « vers[3] » Ă©taient responsables de la variole et d’autres maladies[4].

En 1847, l’obstĂ©tricien hongrois Ignace Semmelweis remarqua l’incidence dramatiquement Ă©levĂ©e de morts dues Ă  la fiĂšvre puerpĂ©rale chez les femmes ayant accouchĂ© avec l’aide des mĂ©decins et Ă©tudiants en mĂ©decine Ă  l’HĂŽpital gĂ©nĂ©ral de Vienne oĂč il travaillait, alors que les accouchements pratiquĂ©s par des sages-femmes Ă©taient relativement sĂ»rs. Semmelweis fit le lien, Ă  la suite d’une enquĂȘte entre la fiĂšvre puerpĂ©rale et les examens par des mĂ©decins des femmes en couches, et se rendit compte que ces mĂ©decins venaient gĂ©nĂ©ralement juste de pratiquer des autopsies. Il affirma en consĂ©quence que la fiĂšvre puerpĂ©rale Ă©tait une maladie contagieuse dans le dĂ©veloppement duquel Ă©taient impliquĂ©es les substances provenant des autopsies. Bien qu’il ait rĂ©ussi Ă  ramener la mortalitĂ© Ă  l’accouchement de 18 % Ă  2,2 % dans son hĂŽpital en obligeant les mĂ©decins Ă  se laver les mains avec de l’eau de chaux chlorĂ©e avant d’examiner les femmes enceintes, les thĂ©ories et la personne de Semmelweis furent nĂ©anmoins l’objet de violentes attaques de la plupart de l’établissement mĂ©dical viennois.

Contribution de l’empirisme

Au XVIIe siĂšcle, le mĂ©decin italien Francesco Redi fournit les premiĂšres preuves contre la gĂ©nĂ©ration spontanĂ©e grĂące Ă  une expĂ©rience menĂ©e en 1668 au cours de laquelle il plaça un pain de viande et un Ɠuf dans trois bocaux diffĂ©rents. Il laissa l’un des bocaux ouverts, le deuxiĂšme Ă©tait hermĂ©tiquement fermĂ© tandis que le troisiĂšme Ă©tait simplement recouvert de gaze. Au bout de quelques jours, Redi put observer que le pain de viande dans le bocal ouvert Ă©tait couvert d’asticots, et le bocal couvert de gaze avait des asticots sur la surface de la toile. En revanche, l’intĂ©rieur et l’extĂ©rieur du bocal hermĂ©tique Ă©taient entiĂšrement dĂ©pourvus d’asticots. Redi remarqua Ă©galement qu’on ne trouvait les asticots que sur des surfaces accessibles aux mouches. Il en conclut que la thĂ©orie de la gĂ©nĂ©ration spontanĂ©e n’était pas plausible.

Contribution de l’épidĂ©miologie

Le mĂ©decin britannique John Snow a contribuĂ© Ă  la formation de la thĂ©orie microbienne lorsqu’il a remontĂ© la source de l’épidĂ©mie londonienne de cholĂ©ra de 1854 Ă  Soho. L’analyse statistique des cas touchĂ©s a dĂ©montrĂ© que l’épidĂ©mie n’était pas compatible avec la thĂ©orie des miasmes, qui prĂ©valait Ă  l’époque. Dans ce qui constitue un exemple prĂ©coce d’usage de l’épidĂ©miologie, de la mĂ©decine de santĂ© publique et l’application pratique de la thĂ©orie microbienne pour enrayer un risque phytosanitaire [5], Snow a mis en cause, non les miasmes, mais l’eau potable, comme vecteur de l’épidĂ©mie cholĂ©rique aprĂšs avoir constatĂ© que les cas Ă©taient survenus dans les domiciles dont les habitants s’étaient approvisionnĂ©s en eau Ă  la pompe de Broad Street, qui constituait le centre gĂ©ographique de l’épidĂ©mie Ă  la suite de la contamination par les eaux usĂ©es de la source qui l’alimentait.

En 1854 également, Filippo Pacini isole le bacille du choléra (Vibrio cholerae), mais sa découverte est peu remarquée avant que Robert Koch ne la refasse une trentaine d'années plus tard[6].

Contribution de la microbiologie

Entre 1860 et 1864, le pionnier de la microbiologie Louis Pasteur dĂ©montra que la fermentation et la croissance des micro-organismes dans les bouillons de culture n’était pas due Ă  la gĂ©nĂ©ration spontanĂ©e. Il exposa des bouillons fraichement bouillis Ă  l’air dans des rĂ©cipients contenant un filtre destinĂ© Ă  arrĂȘter toutes les particules passant Ă  travers le milieu de croissance, et mĂȘme sans filtre du tout, et juste un long tube tortueux laissant passer l’air en empĂȘchant le passage des particules de poussiĂšre de l’air. Comme rien ne se dĂ©veloppait dans ces bouillons, il fallait nĂ©cessairement que les organismes vivants se dĂ©veloppant dans ces bouillons provinssent de l’extĂ©rieur, sous forme de spores sur la poussiĂšre, plutĂŽt que d’ĂȘtre autogĂ©nĂ©rĂ©s par le bouillon de culture lui-mĂȘme.

Dans les annĂ©es 1870, Joseph Lister joua un rĂŽle important dans le dĂ©veloppement d’applications pratiques de la thĂ©orie microbienne dans les techniques chirurgicales.

En 1890, Robert Koch publia ce qu'on a appelĂ© depuis les postulats de Koch (ou de Henle-Koch), servant Ă  dĂ©terminer si une maladie donnĂ©e est causĂ©e par un microbe donnĂ©[1], encore en usage Ă  l’heure actuelle.

Références

  1. (en) Madigan M, Martinko J (editors)., Brock Biology of Microorganisms, Upper Saddle River, Prentice Hall, , 11e Ă©d. (ISBN 978-0-13-144329-7, LCCN 2004026995).
  2. Varro On Agriculture 1, xii Loeb.
  3. Ceci lui valut le surnom de Dr Vermineux.
  4. (en) « The History of the Germ Theory », The British Medical Journal, vol. 1, no 1415,‎ , p. 312.
  5. (en) Steven Johnson, The Ghost Map (The Story of London's Most Terrifying Epidemic and How It Changed Science, Cities, and the Modern World), Riverhead Books, New York, 2006, p. 299.
  6. Pour une chronologie de la théorie des germes, voir le site The Germ Theory Calendar, de William C. Campbell.

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