Tamara de Lempicka
Tamara Łempicka [wɛmˈpit͡ska], connue sous le nom de « Tamara de Lempicka », née Tamara Rozalia Gurwik-Górska le à Varsovie (Pologne, alors dans l'Empire russe) et morte le à Cuernavaca (Mexique), est une peintresse polonaise représentative du mouvement Art déco.
Naissance | |
---|---|
Décès | |
Sépulture | |
Nom dans la langue maternelle |
Tamara Łempicka |
Nom de naissance |
Tamara Rozalia Gurwik-Górska |
Autres noms |
Tamara de Lempicka |
Nationalités | |
Formation |
Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg, Académie Ranson, Académie de la Grande Chaumière |
Activités | |
Fratrie | |
Enfant |
Kizette de Lempicka-Foxhall (d) |
Mouvement |
Néo-cubisme |
---|---|
Maître | |
Représentée par | |
Genres artistiques | |
Site web | |
Distinction |
Médaille de bronze à l'Exposition internationale de Poznan, Pologne |
La Belle Rafaëla, Portrait de la Duchesse de la Salle (d), Tamara en Bugatti verte |
Biographie
Jeunesse
Fille de Boris Górski, un juif russe, et d'une mère polonaise, elle passe son enfance dans un milieu aisé et cultivé entre Saint-Pétersbourg, Varsovie et Lausanne. Tamara a un frère aîné, Stanczyk, et une jeune sœur, Adrienne[1]. En 1914, elle est retenue par la guerre à Saint-Pétersbourg où elle s'inscrit à l'Académie des Beaux-Arts. Elle épouse en 1916 Tadeusz Łempicki (1888-1951), un jeune avocat polonais. Elle donne naissance à leur fille Marie-Christine (1916-1980) dite Kizette[2], épouse Foxhall.
La révolution d'Octobre bouleverse sa vie et, après un détour par Copenhague, elle gagne Paris.
Formation et carrière à Paris
Elle y est recueillie par ses cousins qui l'ont précédée dans l'exil. Tamara commence alors avec beaucoup de ténacité une carrière de peintre.
En 1920, à l'académie Ranson, elle reçoit l'enseignement de Maurice Denis et à l'académie de la Grande Chaumière, celle d'André Lhote. C'est là qu'elle forge petit à petit son style qui, dans une synthèse inattendue de l'art maniériste de la Renaissance et du néo-cubisme, va correspondre parfaitement à la mode de son époque.
En 1923 elle expose au Salon d’Automne Perspective (ou Les deux amies), une toile très remarquée "représentant deux nus féminins dans une pose intime, tout à fait saphique", signée Lempitzky ", on la prend alors pour un homme"[3]. Son identité de femme n’est révélée qu'en 1925 lors de sa première exposition personnelle à Milan qui marque l'envol de sa carrière. C'est là qu'elle fait la connaissance de Gabriele D'Annunzio et de son entourage, aussi aristocratique qu'excentrique. En 1927, le vieil écrivain l'invite chez lui, au bord du Lac de Garde, pour qu’elle réalise son portrait.
De retour en France, elle divorce en 1928 puis participe pleinement à la vie artistique et mondaine parisienne où elle rencontre de nouveaux modèles : André Gide, Suzy Solidor, de riches industriels, des princes russes émigrés, etc. Bisexuelle elle assume publiquement ses liaisons avec Colette ou Suzy Solidor[4] - [5].
En 1929, elle installe sa maison-atelier au no 7 de la rue Méchain, dans le 14e arrondissement de Paris, conçue par l'architecte Robert Mallet-Stevens[6] - [7], décoré par Adrienne Gorska, sa sœur, et illuminé par Jean Perzel[8]. Cet atelier fait partie en effet du seul immeuble d'habitat collectif conçu par Mallet-Stevens, dont le travail porte habituellement sur des villas et hôtels particuliers. Il est inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques depuis 1984[9]. Dans son atelier elle reçoit ou "travaille sans interruption sous l’effet de la cocaïne" alors autorisée en usage privé[3].
La même année, appelée par Rufus Bush, un riche Américain qui lui a commandé le portrait de sa fiancée, Tamara de Lempicka fait son premier voyage à New York. Outre le portrait de commande, elle exécutera sur place plusieurs tableaux, dont des études de gratte-ciel. Elle expose simultanément en Pologne (médaille de bronze à l'exposition internationale de Poznan), à Paris (dans quatre salons et à la galerie Colette Weil) et aux États-Unis (Carnegie Institute de Pittsburgh).
Elle connaît ensuite une crise morale et artistique qui provoque un ralentissement de sa production, puis elle se remarie, en 1933, avec le baron Raoul Kuffner (1886-1961), l'un de ses premiers et plus riches mécènes[10].
Exil aux États-Unis
Fuyant les menaces de guerre, elle s'installe aux États-Unis en 1939 où elle fait trois expositions à New York et à San Francisco chez Paul Rheinardt et chez Julien Levy. Après-guerre, son œuvre tombe dans un profond oubli jusqu'à ce que la redécouverte de l'Art déco, dans les années 1970, fasse ressurgir son nom.
Dernières années au Mexique
En 1978, Tamara de Lempicka s'installe définitivement au Mexique, à Cuernavaca, où elle décède le 18 mars 1980[10] après avoir offert certaines de ses toiles au Centre Pompidou.
Postérité
La chanteuse Madonna a rendu hommage à Tamara dans son clip vidéo Vogue ainsi que dans Open Your Heart avec la toile Andromède (L'Esclave).
Ses œuvres
Tamara de Lempicka occupe une place à part dans l'art du XXe siècle : malgré une production modeste (à peine 150 tableaux dans sa meilleure période, qu'on situe entre 1925 et 1935), ses œuvres évoquent et reflètent le style et la mode des années folles de l'entre-deux-guerres.
Avec une stylisation néo-cubiste, ses œuvres, principalement des portraits, se caractérisent par un modelé accentué, des couleurs vives mais dans une gamme restreinte, mises en valeur par des fonds gris ou noirs. La composition très resserrée s'inspire du cadrage cinématographique.
Collections publiques
Beaucoup d’œuvres de Tamara de Lempicka sont encore dans des collections privées[11], tel son fameux Autoportrait à la Bugatti verte de 1929 (en Suisse). On peut cependant voir certaines de ses œuvres dans les musées français, notamment au musée national d'Art moderne et au musée d'Arts de Nantes qui possèdent chacun sept tableaux.
- 1927 : Lassitude, musée national de Varsovie
- 1927 : Kizette en rose, musée d'Arts de Nantes[12]
- 1927 : Kizette au balcon, musée national d'Art moderne (Paris)[13]
- 1928 : M. Thadeus Lempicki, musée des Années Trente (Boulogne-Billancourt)[14]
- 1929 : La Communiante, musée national d'Art moderne (Paris)[15]
- 1929 : Saint-Moritz, musée des beaux-arts d'Orléans
- 1930 : Jeune fille en vert, musée national d'Art moderne (Paris)[16]
- 1930 : Sainte Thérèse d'Avila, musée Soumaya (Mexico)
- 1932 : Portrait du Baron Raoul Kuffner, musée national d'Art moderne (Paris)[17]
- 1933 : Portrait de Suzy Solidor, château Grimaldi (Cagnes-sur-Mer)[18]
- 1935 : Les Arums, musée national d'Art moderne (Paris)[19]
- 1937 : Madone ronde, MUDO (Beauvais)[20]
- 1937 : Les Réfugiés, musée d'art et d'histoire de Saint-Denis
- 1939 : Jeune femme les bras croisés, Metropolitan Museum of Art (New York)[21]
- 1940 : La Fuite ou Quelque part en Europe, musée d'Arts de Nantes[22]
- 1941 : Nature morte aux œufs, Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole[23]
- 1945 : Le Turban orange II, musée d'art moderne André-Malraux (Le Havre)[24]
- 1949, Coupe de raisins, musée national d'Art moderne (Paris)[25]
- 1952 : La femme au chapeau, Musée d'art moderne et contemporain de Saint-Étienne Métropole[26]
Expositions
- de 1922 à 1950, Salon d’Automne, Salon des indépendants
- 1925, exposition personnelle, Bottega di Poesia, Milan
- 1926, 30 et 31, expositions personnelles, Galerie Colette Weil, Paris
- 1929, Exposition Internationale des Beaux-Arts, Poznan, Pologne
- 1932, 1933, 1934, 1935, 1936 : Femmes Artistes Modernes (FAM), Théâtre Pigalle, Maison de France, Galerie Bernheim-Jeune[27]
- 1941, 42, expositions personnelles, Julien Levy Gallery, New York et Los Angeles
- 1947, Salon d'hiver : Quelque part en Europe
- 1957, exposition personnelle, Galerie Sagittarius, Rome
- 1961, rétrospective, galerie Ror-Volmar, à Paris, figuratif et abstrait
- 1972, rétrospective, galerie du Luxembourg (Alain Blondel et Yves Plantin), Paris
- 1980, rétrospective, Seibu, Tokyo-Osaka, catalogue (préface par Germain Bazin)
- 1981, rétrospective, galerie Françoise-Blondel et Yves Plantin, Paris
- 1984, exposition Tamara, Hollywood American Legion Post, Los Angeles
- 1989, rétrospective, Museo Nacional de Arte, Mexico
- 1991, exposition Les années 20, l'âge des métropoles, Musée des beaux-arts de Montréal
- 1992, exposition Polish Women Artists and Avant-Garde, National Museum of Women in the Art, Washington
- 1994, exposition Tamara de Lempicka, Tra eleganza e trasgressione, Accademia di Francia, Villa Medici, Rome
- 1994, exposition Tamara de Lempicka, symbole d'élégance et de transgression, Musée des Beaux-Arts de Montréal
- 1996, rétrospective, Barry Friedman Ltd, New York
- 1997, rétrospective, Musée des beaux-arts d'Hiroshima (catalogue par Alain Blondel)
- 2003, exposition Art Deco: 1910-1939, Victoria and Albert Museum, Londres
- 2004, exposition Tamara de Lempicka: Art Deco Icon, Royal Academy of Arts, Londres & Kunstforum Wien, Vienne[28]
- 2006, rétrospective, Musée des Années Trente, Boulogne-Billancourt
- 2006, rétrospective, Palazzo Reale, Milan
- 2007, rétrospective, Fundación CaixaGalicia, Vigo
- 2009, rétrospective, Museo del Palacio de Bellas Artes, Mexico
- 2011, exposition Tamara de Lempicka, la Regina del Moderno, Complesso del Vittoriano, Rome
- 2013, exposition Tamara de Lempicka, la Reine de l'Art déco, Pinacothèque de Paris[29]
- 2015, exposition Tamara de Lempicka, Dandy déco, Palazzo Chiablese, Turin
- 2022, exposition Pionnières[30], Musée du Luxembourg, Paris
Prix
- 1929, médaille de bronze à l'Exposition internationale de Poznan, Pologne
Iconographie
- Willy Maywald, Tamara de Lempicka dans son atelier, 7 rue Méchain, Paris XIVe, 1949, photographie[31]
Notes et références
- Gilles Néret, De Lempicka, Taschen, (ISBN 978-3-8365-3225-9), p. 93
- Kizette de Lempicka évoquée sur APJN.org.
- « Tamara de Lempicka en 2 minutes », sur Beaux Arts (consulté le )
- « Tamara de Lempicka - Ce qu'il faut savoir », Vanity Fair, 5 août 2013 (lire en ligne)
- (en) Elizabeth Ashburn, « Lempicka, Tamara de (1898?-1980) », qlbtq: An Encyclopedia of Gay, Lesbian, Bisexual, Transgender, and Queer Culture, 2002 (lire en ligne)
- (en) Lempicka par Patrick Bade, éd. Parkstone International, 2006, (ISBN 9781780429694), p.95 et 119.
- Encyclopédie Universalis
- Entrée de l'Atelier de Tamara de Lempicka, rue Méchain - Décoratrice Adrienne Gorska, architecte Robert Mallet-Stevens, luminaires par Jean Perzel, Paris, 1931. Bibliothèque de la Smithsonian Institution.
- Immeuble de rapport par Robert Mallet-Stevens, notice no PA00086624, base Mérimée, ministère français de la Culture.
- (de) « Tamara's Life », sur Tamara de Lempicka (consulté le )
- (de) « Tamara de Lempicka », sur Tamara de Lempicka (consulté le ).
- Musée d’arts de Nantes, « Musée d’arts de Nantes », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, « Musée national d’art moderne », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, « Musée national d’art moderne », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- « La Communiante », sur Centre Pompidou (consulté le )
- Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, « Musée national d’art moderne », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, « Musée national d’art moderne », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- « Encyclopédie Larousse en ligne - Tamara de Lempicka », sur larousse.fr (consulté le ).
- Musée national d’art moderne – Centre Pompidou, « Musée national d’art moderne », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- « mudo.oise.fr/collections/detai… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- (en) « Tamara de Lempicka - Woman with Arms Crossed », sur The Metropolitan Museum of Art (consulté le ).
- Musée d’arts de Nantes, « Musée d’arts de Nantes », sur Navigart.fr, (consulté le ).
- Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole, « Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole », sur Navigart.fr, (consulté le )
- « LEMPICKA, Le Turban orange II », sur muma-lehavre.fr (consulté le ).
- « Coupe de raisins », sur Centre Pompidou (consulté le )
- Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole, « Musée d’art moderne et contemporain Saint-Etienne Métropole », sur Navigart.fr, (consulté le )
- Catalogues des expositions
- « kunstforumwien.at/de/ausstellu… »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?).
- « A la Pinacothèque de Paris, Tamara de Lempicka, peintre art déco », sur Franceinfo, (consulté le )
- « Pionnières », sur museeduluxembourg.fr (consulté le )
- Collection de l'association Willy Maywald, ADAGP.
Annexes
Bibliographie
- Dictionnaire Bénézit
- « Arsène Alexandre », article dans La Renaissance de l'art français, , Paris
- Tamara de Lempicka, monographie, préface de Giancarlo Marmori, Franco Maria Ricci, Milan, traduction de l'italien par Nino Franck, 1978 (ISBN 2-85108-183-7)
- Kizette Foxhall. & C. Philips, Passion by Design: The Art and Times of Tamara De Lempicka, biographie, Abbeville Press Publishers, New York, 1987
- Gioia Mori, Tamara de Lempicka - Paris 1920-1938, monographie, Giunti, Florence, 1994
- Alain Blondel, Catalogue raisonné, éditions Acatos, Lausanne, 1999
- Gilles Néret, Tamara de Lempicka 1898-1980, monographie, Taschen, 2001
- Gioia Mori, Tamara de Lempicka, la Reine de l'art déco, Skira, 2013, catalogue de l'exposition à la Pinacothèque de Paris (ISBN 978-88-572-2022-2)
- Virginie Greiner & Daphné Collignon, Tamara de Lempicka. Une femme moderne, Paris, Glénat, 2017, 56 p.[lire en ligne]
- Tatiana de Rosnay & Charlotte Jolly de Rosnay, Tamara par Tatania. Neuilly-sur-Seine : Michel Lafon, 2018, 223 p. (ISBN 978-2-7499-3336-8) ; rééd. Pocket, 2021, 304 p. (ISBN 978-2-266-32154-9)
Documentaire
- Sylvie Kürsten, Tamara de Lempicka, la reine de l'art déco, ARTE, Allemagne, 2022
Liens externes
- Site officiel
- Ressources relatives aux beaux-arts :
- AGORHA
- Delarge
- (de + en) Artists of the World Online
- (en) Bénézit
- (en) Grove Art Online
- (da + en) Kunstindeks Danmark
- (en) MutualArt
- (nl + en) RKDartists
- (en) Union List of Artist Names
- Ressource relative à la littérature :
- Ressource relative à la musique :
- Notices dans des dictionnaires ou encyclopédies généralistes :