Sylvie Brunel
Sylvie Brunel, née le à Douai, est une géographe et universitaire française. Elle est professeure de géographie à l'université Paris-Sorbonne depuis 2007. Spécialiste de l'Afrique et des questions de développement et de famine, elle est aussi l'une des anciennes présidentes de l'association humanitaire Action contre la faim.
Présidente Action contre la faim | |
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Jacques Serba (d) |
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Éric Besson (jusqu'en ) |
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Mouvement |
GĂ©ographie critique |
Directeur de thèse |
Marc Penouil (d) () |
Distinctions |
Prix Pierre-Chauleur () Prix Jean-Sainteny () Prix du meilleur livre géopolitique (d) () |
À plusieurs reprises, elle est contredite par des climatologues pour des positions jugées climatosceptiques.
Biographie
Formation
Sylvie Brunel est diplômée du Centre de formation des journalistes en 1981 et titulaire d'une maîtrise de droit public en 1982[1]. Elle est agrégée de géographie en 1983 et soutient en 1990 une thèse de doctorat intitulée La faim dans le monde, pour une nouvelle approche, dirigée par Marc Penouil à l'université de Bordeaux[1].
Activités professionnelles
De 1988 à 2007, elle enseigne à l'Institut d'études politiques de Paris[1]. Elle réalise une habilitation universitaire en 2001 et elle est nommée professeure à l'université Paul-Valéry-Montpellier en 2002. Depuis 2007, elle est professeure de géographie à l'université Paris-Sorbonne[1].
Activités institutionnelles
Elle est engagée durant dix-sept ans dans l'action humanitaire[2], d'abord auprès de l'association Médecins sans frontières de 1984 à 1989 en tant que responsable de la recherche, puis durant douze ans, pour Action contre la faim en tant que conseillère stratégique, puis directrice entre 1992 et 1993[3]. Elle en devient la présidente en 2001 mais elle démissionne de ce poste après huit mois car selon elle, les organisations humanitaires sont trop occupées à recueillir des fonds et ne répondent pas assez vite aux urgences[2] avec des niveaux de rémunération des cadres éloignés de l'idéal de départ[4]. Action contre la faim pour sa part « se déclare outrée, scandalisée par les propos tenus par Sylvie Brunel » qu'elle estime « calomnieux »[5], tandis que Médecins du monde estime que ses propos sont « réducteurs » : selon lui, les ONG humanitaires ne choisissent pas leurs interventions en fonction de critères de la rentabilité à l'égard des bailleurs[6].
Membre d'un groupe de travail sur le développement de l'Afrique auprès du secrétaire général des Nations unies en 1991, elle a également fait partie du Haut Conseil de la coopération internationale[7].
Activités éditoriales
« Grande connaisseuse de l'Afrique », elle publie en 2004 L’Afrique, un continent en réserve de développement , ouvrage dans lequel elle relevait les « atouts dont disposait ce continent pour un développement rapide »[9]. Dans son ouvrage de 2014, L’Afrique est-elle si bien partie ?, elle fait état de son pessimisme, relevant qu'une « Afrique riche et peuplée de pauvres et d’exclus n’est pas durable »[9]. Elle estime dans son ouvrage Pourquoi les paysans vont sauver le monde (2021) qu'en Afrique, « l'agriculture doit devenir une priorité », évoquant la nécessité d'une « agriculture compétitive et nourricière » sur ce continent dont seuls « 10 % des terres sont mises en valeur »[10].
Elle-même cavalière et éleveuse de chevaux dans la Drôme[11], elle est autrice, co-autrice ou préfacière de nombreux ouvrages équestres, dont des études sur le milieu des cavaliers de loisir[12]. Elle publie notamment deux ouvrages consacrés au cheval Crin-Blanc, dans lesquels elle envisage le devenir de la Camargue[13].
Elle publie également deux essais destinés aux femmes, en 2009, Manuel de guérilla à l'usage des femmes[14], puis en 2021, Manuel de guérison à l’usage des femmes[15], dans lequel elle envisage la vie des femmes après 60 ans, les difficultés des femmes dans leur vie quotidienne mais aussi les changements de comportement depuis le mouvement #Me Too[15].
Famille et vie privée
Mariée à l'homme politique Éric Besson de 1983 à 2009[16] - [14], Sylvie Brunel est mère de trois enfants, dont l’aînée, née en 1989, est elle-même écrivain sous le nom d’Ariane Fornia.
Prises de position et controverses
Critique du développement durable
En 2008, elle publie son ouvrage À qui profite le développement durable? dans lequel elle développe une vision critique du développement durable. Elle s’oppose à la vision d'un état de nature idéalisé et un homme vu comme un parasite qu'elle voit comme un fondement idéologique du développement durable. À l'inverse, elle considère que l’action humaine peut être utile pour la biodiversité, notamment à travers le développement économique[17]. C'est aussi le cas avec l'utilisation de pesticides et insecticides de synthèse, qu'elle estime non polluante et nécessaire[18].
Cette position est cependant contestée par un groupe de chercheurs spécialiste de la biodiversité de l'Université de Lausanne, qui considèrent dans une tribune d'opinions que son analyse est fondée sur des contre-vérités : l'action humaine au cours du XXe siècle a considérablement diminué la biodiversité globale, qu'elle soit sauvage ou agricole, et soulignent que ce processus pourrait à terme mettre en danger la survie de l'espèce humaine[19].
Sylvie Brunel estime quant à elle que l’invocation du développement durable peut servir de paravent à la défense des intérêts des pays du Nord contre ceux du Sud, en particulier aux riches des pays du Nord, aux entreprises et aux organisations non gouvernementales (ONG) de l’environnement. Pour Sylvie Brunel, le développement durable « légitime un certain nombre de barrières à l’entrée », offrant ainsi un prétexte au protectionnisme des pays développés[20].
Climato-scepticisme
En 2012, Olivier Godard, économiste spécialiste de l'environnement et du développement durable, cite Sylvie Brunel comme une figure climato-sceptique médiatique en France, parmi quelques dizaines d'autres personnalités[21].
Selon un article paru dans la revue Socio en 2019 et portant sur la période 2005-2017, Sylvie Brunel s'inscrit dans un courant de disqualification de l’écologie et de la promotion du progrès basé sur les innovations[22]. Elle publie dans Le Monde en 2019 une tribune titrée Le changement climatique n’est pas forcément une mauvaise nouvelle[23].
En 2019, elle fait partie des 40 signataires français d'une lettre ouverte remise aux dirigeants de l'Organisation des Nations unies, qui assure qu'il n'existe pas « d'urgence ou de crise climatique » et présente les mesures de réduction des émissions de CO2 comme onéreuses et nuisibles à l'économie[23] - [24].
En , lors de la canicule qui frappe la France, Sylvie Brunel déclare que ces températures excessives, « c'est quand même le quotidien quand vous vivez à Dakar ». Ces propos sont qualifiés de climato-sceptiques par plusieurs spécialistes dont Célia Gautier, experte Société civile et ancienne responsable Climat-Énergie à la Fondation Nicolas Hulot[25] et Magali Reghezza, géographe spécialisée dans la vulnérabilité sociale aux changements environnementaux, qui contestent la légitimité scientifique de Sylvie Brunel[26] - [27].
Publications
Ouvrages scientifiques
- La vache du riche mange le grain… du riche, LSF, 1985.
- Asie, Afrique : grenier vides, greniers pleins, Economica, « Économie agricole », 1986.
- Le Nordeste brésilien, les véritables enjeux, LSF, 1986.
- Tiers Mondes. Controverses et réalités, Economica, 1987.
- Une Tragédie banalisée, la faim dans le monde, Hachette-Pluriel, 1991.
- Les Tiers Mondes, La Documentation photographique, no 7014, La Documentation française, 1992.
- Le Gaspillage de l'aide publique, Seuil, 1993.
- Le Sud dans la nouvelle Ă©conomie mondiale, PUF, 1995.
- Le Sous-développement, PUF, « Que sais-je ? », 1996.
- Ceux qui vont mourir de faim, Seuil, 1997.
- La Coopération Nord-Sud, PUF, « Que sais-je ? », 1997.
- La Faim dans le monde. Comprendre pour agir, PUF, 1999.
- Action contre la faim, sous la coord. de Sylvie Brunel : GĂ©opolitique de la faim (2001) (ISBN 2-13-050132-X).
- Famines et politique, Presses de Sciences Po, 2002 (ISBN 2-7246-0873-9).
- Frontières (roman), Denoël, 2003 (ISBN 2-207-25462-3).
- Le Développement durable, PUF, « Que sais-je ? », 2004 ; nouvelle édition 2009.
- L'Afrique. Un continent en réserve de développement, Éditions Bréal, 2004 (ISBN 2-84291-866-5)
- L'Afrique dans la mondialisation, La documentation photographique, no 8048, La Documentation française, 2005.
- La Déliaison (roman), coécrit avec sa fille Ariane Fornia, Denoël, 2005.
- La Planète disneylandisée. Chroniques d'un tour du monde, Éditions Sciences humaines, 2006 ; nouvelle édition enrichie en 2012.
- À qui profite le développement durable ?, Larousse, 2008.
- Nourrir le monde. Vaincre la faim, Larousse, 2009.
- Géographie amoureuse du monde, Lattès, 2011.
- Géographie amoureuse du maïs, Lattès, 2012.
- L'Afrique est-elle si bien partie ?, Sciences Humaines, 2014[9].
- Croquer la pomme, l'histoire du fruit qui a perdu le monde et qui le sauvera, Lattès, 2016.
- Plaidoyer pour nos agriculteurs. Il faudra demain nourrir le monde, Buchet-Chastel, 2017 (ISBN 978-2-283-02961-9).
- Toutes ces idées qui nous gâchent la vie : alimentation, climat, santé, progrès, écologie…, Paris, JC Lattès, , 280 p. (ISBN 978-2-7096-6531-5).
- Pourquoi les paysans vont sauver le monde, Buchet-Chastel, 2020, rééd. poche Harper Collins, 2021.
- Nourrir. Cessons de maltraiter ceux qui nous font vivre !, Buchet-Chastel, 2023.
Essais
- Manuel de guérilla à l'usage des femmes, Grasset, 2009.
- Manuel de guérison à l'usage des femmes, Albin Michel, 2021.
Romans
- Cavalcades et Dérobades (roman), éditions Jean-Claude Lattès, 2008.
- Le Voyage à Timimoun, Lattès, 2010.
- Un escalier vers le paradis, Lattès, 2014.
- Crin Blanc ou l'invention de la Camargue (avec Florian Colomb de Daunant), Actes Sud, 2016.
- Le Bonheur Ă cheval (avec Alain Bellanger), Belin, 2017.
- Camargue, Crin-Blanc et ses légendes, Nevicata, coll. L'âme des peuples, 2019.
Distinctions
Elle est nommée chevalier de la Légion d'honneur par décret du 31 décembre 2001[28] - [29].
Elle est membre associée de l'Académie royale de Belgique[30].
Notes et références
- « Sylvie Brunel », sur Laboratoire Médiations (consulté le ).
- [entretien] Jean-Dominique Merchet, « «Les organisations humanitaires sont devenues un business» », Libération,‎ (lire en ligne, consulté le )
- « Rapport moral et rapport d'activité 2011 », sur Actioncontrelafaim.org, (consulté le ).
- Yves Gounin, « Sylvie Brunel. Famines et politique », Politique étrangère, vol. 67, no 3,‎ , p. 805–806 (lire en ligne, consulté le )
- « Action contre la faim :la présidente démissionne », sur L'Obs, (consulté le )
- « La présidente d'ACF dénonce le business humanitaire », sur ladepeche.fr (consulté le )
- « Sylvie Brunel | Biographie, actualité et podcasts à écouter | Page 4 », sur Radio France (consulté le )
- https://www.charentelibre.fr/societe/agriculture/conference-sur-l-agriculture-la-reponse-cinglante-de-jean-bernard-sallat-a-jean-francois-daure-10202854.php
- [compte rendu] Henri Leridon, « Sylvie Brunel, L’Afrique est-elle si bien partie ?, Auxerre, Editions sciences humaines, 2014, 183 p », Population,‎ , p. 173-175 (lire en ligne, consulté le ).
- [critique] Julien Damon, « Plaidoyer pour les paysans. Un tour du monde de l'univers des paysans », sur Les Échos, (consulté le ).
- « Débat. Sylvie Brunel invitée jeudi de la Liberté de l'esprit », sur Le Télégramme, (consulté le ).
- PMB Group, « Brunel Sylvie IFCE », sur mediatheque.ifce.fr (consulté le ).
- « Neuf titres pour comprendre ce que les chevaux nous disent de nous: Crin-Blanc et ses légendes », sur psychologies.com (consulté le ).
- Charlotte Rotman, « Fort marrie » , sur Libération,
- [entretien] Manon Durand, « Sylvie Brunel savoure la liberté retrouvée des 60 ans : « Un immense bonheur » », sur Ouest-France, (consulté le ).
- « L’ex-épouse d’Éric Besson lève les voiles », sur Gala.fr.
- Brunel, 2008, p. 78 et suivantes.
- Sylvie Brunel, Plaidoyer pour nos agriculteurs : il faudra demain nourrir le monde, Paris, Buchet-Chastel, , 125 p. (ISBN 978-2-283-02961-9), p. 66-69.
- Le Temps, 19 octobre 2010, « Non, l’homme ne peut guère produire de la biodiversité » par Antoine Guisan, Pascal Vittoz, Frédéric Bastian, Danielle Mersch, Luigi Maiorano, Morgan Pearcy, Blaise Petitpierre, Christelle Vangenot, Sophie Cotting et Nicolas Perrin.
- « Les enjeux internationaux », entretien avec Sylvie Brunel sur France Culture, 11 juin 2008.
- Olivier Godard, « Le climato-scepticisme médiatique en France : un sophisme moderne », Écologie & politique,‎ 2eme trimestre 2012, p. 47 à 69 (lire en ligne )
- Quentin Hardy et Pierre de Jouvancourt, « Y a-t-il un « danger écologique » ? », Socio. La nouvelle revue des sciences sociales, no 12,‎ , p. 159–185 (ISSN 2266-3134, DOI 10.4000/socio.4701, lire en ligne, consulté le )
- Lucie Oriol, « Face au GIEC, une tribune climato-sceptique récolte 500 signatures », sur huffingtonpost.fr, .
- Sophie Chapelle, Christophe Gueugneau, Vanina Delmas et Alexandre-Reza Kokabi, « En France, le climatoscepticisme n’est pas mort » , sur Basta,
- « Célia Gautier », sur Expertes France (consulté le )
- Julien Pain, Françoise Vimeux, climatologue à l'IRD et Mathilde Garcia, journaliste, « "Vrai ou Fake", on nous ment sur le climat ? Démarre à 13min20s », sur Franceinfo, (consulté le )
- « Réchauffement climatique : pourquoi les propos d'une géographe sur BFM ont choqué les climatologues ? », sur news.yahoo.com, (consulté le )
- « Décret du 31 décembre 2001 portant promotion et nomination », sur Legifrance, (consulté le ).
- Daïc Audouit, « Recevoir la Légion d'honneur à quelques mois d'une présidentielle est-ce forcément suspect ? » , sur France TV Info,
- « Académie royale de Belgique, Annuaire 2020 » [PDF], sur www.academieroyale.be,