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Suzanne Torrès

Suzanne Torrès, née Rosambert le dans le 17e arrondissement de Paris, également connue en tant que Suzanne Massu, est une résistante française ambulancière au sein du Groupe Rochambeau, des Forces françaises libres, puis créatrice et directrice jusqu'à sa mort le à Conflans-sur-Loing dans le Loiret[1], de l'Association pour la formation de la jeunesse, une institution sociale à destination des enfants des rues pendant la bataille d'Alger puis des enfants de harkis.

Suzanne Torrès
Suzanne Torrès dans les jardins de Bagatelle, à Paris.
Biographie
Naissance
Décès
Nom de naissance
Suzanne Rosambert
Conjoints
Autres informations
Conflit

Enfance et formation

Suzanne Rosambert est née dans le 17e arrondissement de Paris le 9 janvier 1907, de Willy Rosambert et Madeleine Sinauer[2]. C'est une étudiante engagée à gauche, qui dirige ensuite une galerie d'art d'avant-garde. En 1930, elle épouse en secondes noces l'avocat et homme politique socialiste Henry Torrès[3].

Engagement dans les Forces françaises libres

Dès le début de la Seconde Guerre mondiale, Suzanne Torrès s'engage dans les Sections sanitaires automobiles de la Croix-Rouge, accréditées par le haut commandement de l'armée française, où elle fait la liaison entre les unités et le commandement. Lors de la Débâcle, elle suit le gouvernement à Bordeaux, puis est évacuée avec la Croix-Rouge vers l'Afrique du Nord. À la suite de la capitulation et de l'avènement du régime de Vichy, elle s'exile à l'automne 1940 vers l'Espagne neutre, puis vers le Brésil, et enfin vers New York début 1942[4]. En 1943, elle est recrutée par une riche Américaine, Florence Conrad, pour la seconder dans le commandement d'une unité de dix-neuf ambulances qu'elle a rassemblées, surnommée le Groupe Rochambeau, lequel est rapidement (mais non sans réticence de la part du général Leclerc) intégré à la 2e DB des Forces françaises libres.

Suzanne Torrès devient de façon informelle successivement lieutenant puis capitaine, puisque ni l'armée française régulière ni les FFL ne prévoient de grades pour les femmes. Elle est rémunérée comme officier 1re classe et appelée Madame[5] Torrès, ou surnommée « Toto » par les membres de son unité. Elle participe à la formation des recrues en Amérique (une douzaine) puis au Maroc (vingt-cinq de plus dont Rosette Peschaud), et débarque enfin à Utah Beach le 31 juillet 1944. Les Rochambelles, comme les surnomment les soldats, évacuent les blessés sous les balles de la première ligne vers un poste de traitement à l'arrière, et participent à la Libération de Paris en août[6]. Florence Conrad, déjà âgée, reste à Paris et confie alors à Suzanne Torrès le commandement de l'unité, qui participera à la libération de Strasbourg et à la prise de Berchtesgaden avec la division Leclerc.

Guerre d'Indochine

Après la Libération, et comme plusieurs autres Rochambelles, Suzanne Torrès reste au côté du général Leclerc et devient commandante des Forces féminines du Corps expéditionnaire pendant la guerre d'Indochine. C'est là qu'elle rencontre le général Massu en 1947, qu'elle épouse en 1948 de retour en France après avoir divorcé d'Henri Torrès. Suzanne Massu suit ensuite son époux jusqu'en Algérie en 1957[6].

Association pour la formation de la jeunesse (AFJ)

En 1957, la guerre d'Algérie fait rage et la bataille d'Alger commence, sous le commandement du général Massu. C'est dans ce contexte que Suzanne Massu fonde en avril l'Association pour la formation de la jeunesse (AFJ), avec des fonds reçus sous forme de valises de liquide par son mari[3]. D'après ses statuts, l'association « a pour but général l’aide, la protection, la sauvegarde, l’éducation professionnelle et morale de la jeunesse », et ouvre le 6 juin 1957 un centre de jeunesse à Bab El Oued, qui prend en charge les enfants des rues musulmans ou yaouleds, dans une démarche à la fois humaniste et compatible avec la « doctrine de la guerre révolutionnaire » à laquelle souscrivait le général Massu. En lieu et place des centres sociaux instaurés par Germaine Tillion, l'objectif est de transformer ces jeunes marginaux en « Français comme les autres » : les éducateurs viennent du secteur social proche des JOC et l'encadrement vient de l'armée. Selon le directeur pédagogique du centre et médecin militaire Guy-Marc Sangline :

« Madame Massu se dépensait sans compter. Elle ne manquait ni de volonté, ni de dynamisme, ni de goût. Elle savait se faire si pressante, si persuasive ; elle était si enthousiaste que personne n’eût songé, n’eût été à même de lui résister ou de la contrarier. Elle obtenait ce qu’elle voulait, veillait au moindre détail technique, savait s’entourer de conseils et choisissait elle-même les dessus-de-lit. Madame Massu, c’était le Centre de jeunesse et le centre, c’était Madame Massu. Jamais ces deux noms ne pourront être dissociés »[3].

De 1957 Ă  1962, plus de 800 enfants sont accueillis dans diffĂ©rents centres de l'AFJ, pour environ 6 000 Ă  7 000 yaouleds. Après le cessez-le-feu du 19 mars 1962, plus d'une centaine d'enfants des centres d'AlgĂ©rie sont remis Ă  leurs familles, et les 66 restants sont envoyĂ©s en mĂ©tropole auprès des 35 qui y Ă©taient dĂ©jĂ  en colonie Ă  Moumour, dans les PyrĂ©nĂ©es. La pression s'accentue sur les enfants pour qu'ils s'assimilent Ă  la sociĂ©tĂ© française, et l'association commence Ă  prendre en charge les enfants de familles harkis alors stationnĂ©es dans des camps, puis des enfants placĂ©s par la DDASS ou sur dĂ©cision de justice. L'encadrement se professionnalise, mais Suzanne Massu continue Ă  suivre l'institution de près et se fĂ©licite des rĂ©ussites (diplĂ´me, emploi, mariage voire baptĂŞme) de ses pensionnaires jusqu'au soir de sa vie. Après sa mort, c'est son mari qui reprend le flambeau, jusque dans les annĂ©es 1990.

Vie de famille

Suzanne Rosambert de son nom de jeune fille a Ă©tĂ© mariĂ©e trois fois. La première fois avec Jacques Bernheim-Darnetal, de qui elle eut en 1927 un fils prĂ©nommĂ© Patrice, qu'elle perd 4 ans plus tard. La deuxième fois avec l'avocat et homme politique socialiste Henry Torrès, et la dernière avec le gĂ©nĂ©ral Jacques Massu, de qui elle a une fille prĂ©nommĂ©e VĂ©ronique, dĂ©cĂ©dĂ©e du vivant de son Ă©poux[2]. Sans doute en Ă©cho Ă  ces drames familiaux, et en cohĂ©rence avec l'action de Suzanne dans l'AFJ, les Ă©poux Massu ont Ă©galement recueilli en AlgĂ©rie puis adoptĂ© officiellement en mĂ©tropole deux enfants, Malika, une adolescente arabe de 15 ans qui a fait une proclamation de foi pour l’AlgĂ©rie française en mai 1958 et qui se trouve pour cela en danger, et Rodolphe, un petit garçon kabyle de six ans recueilli en 1958 par un appelĂ© qui, lorsqu’il termine son service en 1959, le confie Ă  l’AFJ. Pour Jacques Massu, ces adoptions sont « un exemple de l’intĂ©gration telle que nous la concevions et pour laquelle nous combattions »[3].

Suzanne Massu meurt Ă  70 ans, le , des suites d'une maladie. Elle est inhumĂ©e dans le cimetière de Conflans-sur-Loing, dans le Loiret, au cĂ´tĂ© de Jacques Massu[6].

Ĺ’uvres

  • Suzanne Massu, Quand j'Ă©tais Rochambelle, B. Grasset,
  • Suzanne Massu, Un Commandant pas comme les autres, Fayard,

Notes et références

  1. État civil sur le fichier des personnes décédées en France depuis 1970
  2. Jacques Ghémard, « Suzanne Rosambert épouse Torrès Massu - Les Français Libres », sur www.francaislibres.net (consulté le )
  3. Yves Denéchère, « Les « enfants de Madame Massu ». Œuvre sociale, politique et citoyenneté pendant et après la guerre d’Algérie (1957-1980) », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 64-3, no 3,‎ (ISSN 0048-8003 et 1776-3045, DOI 10.3917/rhmc.643.0125, lire en ligne, consulté le )
  4. « Suzanne TORRES – Confluences81 », sur confluences81.fr (consulté le )
  5. Jauneau, Elodie, « Des femmes dans la France combattante pendant la Deuxième Guerre mondiale : Le Corps des Volontaires Françaises et le Groupe Rochambeau », Genre & Histoire, no 3,‎ (ISSN 2102-5886, lire en ligne, consulté le )
  6. « Les Filles de la DB », sur marinettes-et-rochambelles.com (consulté le )

Bibliographie

  • Pauline Brunet, Les Rochambelles, ambulancières de la Division Leclerc 1943-1945, Paris, Memorabilia, , 128 p. (ISBN 9782377830558).

Articles connexes

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