Stefan WyszyĆski
Stefan WyszyĆski[1], nĂ© le Ă Zuzela et mort le Ă Varsovie, est un cardinal polonais, archevĂȘque de Varsovie et de Gniezno et Primat de Pologne de 1948 Ă 1981. Il combattit le rĂ©gime communiste, notamment contre l'oppression du rĂ©gime et des restrictions sur la religion, ce qui lui valut plusieurs annĂ©es de prison et des pressions. VĂ©nĂ©rĂ© comme bienheureux par l'Ăglise catholique, il est fĂȘtĂ© le 28 mai.
Stefan WyszyĆski Bienheureux catholique | ||
Le cardinal WyszyĆski dans les annĂ©es 1970. | ||
Biographie | ||
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Naissance | Ă Zuzela (Empire russe) |
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Ordination sacerdotale | par Wojciech Owczarek |
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DĂ©cĂšs | Ă Varsovie |
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Bienheureux de l'Ăglise catholique | ||
Béatification | à Varsovie sous le pontificat du pape François | |
Cardinal de l'Ăglise catholique | ||
Créé cardinal |
par le pape Pie XII |
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Titre cardinalice | Cardinal-prĂȘtre de S. Maria in Trastevere |
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ĂvĂȘque de l'Ăglise catholique | ||
Ordination Ă©piscopale | par le card. August Hlond |
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ArchevĂȘque de Gniezno et Varsovie | ||
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ĂvĂȘque de Lublin | ||
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« Soli Deo » « A Dieu seul » |
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(en) Notice sur www.catholic-hierarchy.org | ||
Biographie
Jeunesse
Stefan naĂźt le 3 aoĂ»t 1901, dans la commune de Zuzela, situĂ©e sur la riviĂšre Bug. Il est le fils de lâorganiste Stanislas (1876-1970) et de Julianna, nĂ©e Karp (1877-1910), deuxiĂšme enfant dâune famille qui en compte six. Sa sĆur ainĂ©e Anastazja (1900 -1974) et les plus jeunes : StanisĆawa (1903-1982), Janina (1905-1995), son frĂšre WacĆaw (1908-1919) et Zofia (1910), dĂ©cĂ©dĂ©e aprĂšs la naissance. Stefan a aussi des demi-frĂšres et sĆurs, issus dâun second mariage de son pĂšre avec Eugenia Godlewska (1883-1948): Julia (1913-1995) et Tadeusz (1917-1981)[2]. LâatmosphĂšre de la maison familiale est empreinte de patriotisme et religiositĂ©.
Le futur cardinal commence son Ă©ducation Ă Andrzejewo, oĂč sa famille dĂ©mĂ©nage en 1910, puis Ă Varsovie, oĂč dĂšs 1912, il continue son Ă©ducation au LycĂ©e Wojciech GĂłrski - Ă©tablissement scolaire privĂ© dâĂ©lite, privilĂ©giant la langue polonaise. Durant la PremiĂšre guerre mondiale, en 1915, Stefan continue sa formation Ă lâĂcole de Commerce (masculine) de la ville de ĆomĆŒa. Il sây inscrit dans une formation scout appelĂ©e « Czajki », appartenant Ă la « PremiĂšre Ă©quipe scoute -Tadeusz KoĆciuszko » Ă ĆomĆŒa. Elle est fondĂ©e par Kazimierz LutosĆawski, un des principaux animateurs du mouvement scout en Pologne. Stefan prend part Ă leurs activitĂ©s clandestines, ce qui lui vaut dâĂȘtre condamnĂ© Ă une peine de fouet par les autoritĂ©s allemandes[3].
En 1917, il entre au LycĂ©e Saint-Pie X, du Petit sĂ©minaire de la ville de WĆocĆawek[4]. Câest en 1920, quâil y passe son baccalaurĂ©at, puis poursuit sa formation au Grand SĂ©minaire de cette mĂȘme ville. Bien quâoriginaire du diocĂšse de PĆock, il choisit comme lieu de formation le Grand SĂ©minaire de WĆocĆawek, Ă cause de son haut niveau dâenseignement. Il termine ses Ă©tudes de sĂ©minariste en 1924 et reçoit le 3 juillet 1924 lâordination sacerdotale de maniĂšre individuelle, Ă cause de ses problĂšmes de santĂ©[4] - [5].
PrĂȘtre
La mĂȘme annĂ©e, il est nommĂ© vicaire auprĂšs de la cathĂ©drale de WĆocĆawek. Il y exerce une activitĂ© journalistique, comme secrĂ©taire de rĂ©daction du quotidien « SĆowo Kujawskie ». En 1924, le futur primat de Pologne se lie aux Syndicats chrĂ©tiens (ChZZ) et les milieux chrĂ©tiens-dĂ©mocrates ; il travaille surtout dans les milieux ouvriers. Il est membre de lâAssociation diocĂ©saine des prĂȘtres charistes Ă WĆocĆawek, organisme ayant pour but dâapprofondir la vie spirituelle des prĂȘtres.
En 1925, le jeune abbĂ© WyszyĆski est envoyĂ© Ă lâUniversitĂ© catholique de Lublin pour y parfaire ses Ă©tudes. Le recteur de lâUniversitĂ© est lâabbĂ© JĂłzef KruszyĆski, originaire de WĆocĆawek. Ainsi commencent ses Ă©tudes en droit canonique. Toutefois, câest Ă lâabbĂ© Antoni SzymaĆski, Ă©minent spĂ©cialiste en sciences sociales de lâĂglise et futur recteur de lâUniversitĂ©, que revient le devoir de prendre en charge le jeune abbĂ©. En 1927, lâabbĂ© WyszyĆski obtient le grade de licenciĂ©, et, en 1929, celui de docteur en droit canonique, Ă la suite de la soutenance de sa thĂšse : « Les droits de la famille, de lâĂglise et de lâĂtat sur la scolaritĂ© »[6]. Durant les annĂ©es trente du siĂšcle passĂ©, il refuse un poste dâenseignant Ă lâUniversitĂ© de Lublin, bien quâayant prĂ©parĂ© Ă cette fin un travail de habilitation: « Lâenvironnement moral du travail Ă lâusine ». Vu lâĂ©clatement de la Seconde guerre mondiale, cet Ă©crit nâa jamais Ă©tĂ© terminĂ©. Lors de ses Ă©tudes, habitant dans une bourse estudiantine pour prĂȘtres, il est sous lâautoritĂ© de lâabbĂ© WĆadysĆaw KorniĆowicz, avec lequel il se lie dâamitiĂ©. Ce dernier deviendra lâun des fondateurs et le pĂšre spirituel du centre Ă©ducatif pour non-voyants Ă Laski. LâabbĂ© WyszyĆski considĂšre le pĂšre KorniĆowicz comme son mentor spirituel et jusquâĂ la fin de ses jours, en parlera comme de son pĂšre spirituel[3].
De 1927, le jeune WyszyĆski devient remplaçant du directeur de la maison pour Ă©tudiants. Durant ses Ă©tudes, il travaille bĂ©nĂ©volement dans lâassociation « Entraide fraternelle », mais câest Ă lâAssociation des Ă©tudiants catholiques « Renaissance » (SKMA), quâil se consacre. Une fois ses Ă©tudes terminĂ©es, il y restera fidĂšle, bien que le plus ĂągĂ© des membres. Il gardera contact avec ce milieu Ă©tudiant jusquâĂ la fin de ses jours. AprĂšs la Seconde guerre mondiale, vu lâimpossibilitĂ© de rĂ©activer officiellement lâassociation, il organise en 1957, Ă Jasna GĂłra, des journĂ©es de priĂšre pour lâintelligentsia catholique de la « Renaissance ». En 1980, câest sous son patronage que naĂźtra informellement le Mouvement Culturel ChrĂ©tien Renaissance.
Durant les annĂ©es 1929-1930, lâabbĂ© WyszyĆski fait un voyage dâĂ©tude en Europe occidentale. Il visite lâAutriche et lâItalie, oĂč il visite lâuniversitĂ© Sacro Cuoro de Milan, lâAngelicum de Rome, ainsi que des centres scientifiques de France, Belgique, Hollande et Allemagne.
Lors des annĂ©es 1930-1931, il est vicaire dans la paroisse de Lipno, puis Ă Przedcz. En 1933, il devient enseignant du droit canonique et des sciences sociales au SĂ©minaire supĂ©rieur de WĆocĆawek et continue de collaborer avec les syndicats chrĂ©tiens (ChZZ). Il participe aux semaines sociales de la « Renaissance », ainsi quâĂ lâAssociation des jeunesses catholiques fĂ©minines et masculines, mouvement de jeunes qui est la branche de lâAction catholique.
Durant les annĂ©es 1935-1939, lâabbĂ© WyszyĆski organise et prĂ©side lâUniversitĂ© ChrĂ©tienne ouvriĂšre de WĆocĆawek, tout en dirigeant la congrĂ©gation mariale des propriĂ©taires terriens de la rĂ©gion de Kujavie-DobrzyĆ. Il essaye, sans succĂšs, de fonder une association catholique pour les jeunesses ouvriĂšres, pareille aux JOC de Belgique, fondĂ©e par le cardinal Josef-LĂ©on Cardijn. En 1933, il est mĂ©diateur entre les ouvriers en grĂšve et les propriĂ©taires dâusines de WĆocĆawek. LâannĂ©e 1939 est celle, oĂč il commence la construction de la Maison des syndicats chrĂ©tiens Ă WĆocĆawek.
Ă cause de son engagement social et de ses opinions, bien ancrĂ©es dans la doctrine sociale catholique, il est critiquĂ© par une partie des propriĂ©taires terriens de Kujavie et par les milieux nationalistes locaux. On le traite de « prĂȘtre rouge », car il approuve la rĂ©forme agraire et le parcellement dâimmenses propriĂ©tĂ©s fonciĂšres. Lâordinaire du diocĂšse de WĆocĆawek, Karol RadoĆski, tenant compte de ces malentendus, lui a mĂȘme interdit, pendant un certain temps, de prĂȘcher[3].
En 1931, lâabbĂ© WyszyĆski obtient le poste de rĂ©dacteur en chef de la revue « LâAthĂ©nĂ©e sacerdotale ». ĂditĂ©e par le diocĂšse de WĆocĆawek, cette revue de spiritualitĂ© est remaniĂ©e par lâabbĂ© WyszyĆski, au point, oĂč durant lâentre-deux-guerres, il en fera la meilleure publication intellectuelle pour les prĂȘtres polonais. Il y Ă©crit principalement sur des sujets sociaux, sur les rapports entre le catholicisme et le capitalisme, le fascisme et le communisme. Il y publie dans les annĂ©es 1931-1939, plus de cent articles sous forme de brochures ou dâarticles. On peut y trouver: La culture du bolchĂ©visme et lâintelligentsia polonaise (1934), La nouvelle ruĂ©e du bolchĂ©visme en Pologne (1936), La portĂ©e et le caractĂšre des acquis de la doctrine sociale catholique (1937), Le programme catholique de la lutte contre le communisme (1937), Comment peut agir un aumĂŽnier en rĂ©alisant un systĂšme corporatiste (1939) et Lâintelligentsia comme avant-garde du communisme (1939).
En cette pĂ©riode, les convictions de lâabbĂ© WyszyĆski portent les traits dâun grand engagement social, mais restent bien ancrĂ©es dans le cadre organiciste. Le futur primat de Pologne sâintĂ©resse au corporatisme catholique, analysant avec beaucoup dâattention et sympathie les rĂ©formes du Portugal, faites par le premier ministre et professeur Oliveira Salazar.
Les acquis sociaux-catholiques, aussi bien intellectuels que pratiques, de lâabbĂ© WyszyĆski, attirent lâattention et sont reconnus par le primat de Pologne, le cardinal August Hlond, qui en 1938 lui demande de faire partie de son Conseil social.
Seconde guerre mondiale
AprĂšs lâĂ©clatement de la Seconde guerre mondiale, lâabbĂ© WyszyĆski accompagne des jeunes sĂ©minaristes Ă Lublin, puis Ă WĆodzimierz, pour ensuite revenir pour quelques semaines Ă WĆocĆawek occupĂ©. Sur ordre de lâĂ©vĂȘque Franciszek KorszyĆski - suffragant de WĆocĆawek et responsable du diocĂšse aprĂšs le dĂ©part de K. RadoĆski - lâabbĂ© WyszyĆski, en danger dâarrestation car professeur du SĂ©minaire, quitte la ville. Il se rend auprĂšs de sa famille Ă Wronciszewo, prĂšs de Warka.
En juillet 1940, par lâintermĂ©diaire du pĂšre KorniĆowicz et en tant quâaumĂŽnier des SĆurs franciscaines servantes de la Croix - parties avec un petit groupe de non-voyants - il arrive, sur lâinvitation dâAleksandre et Jadwiga Zamoyski, dans leur propriĂ©tĂ© de KozĆĂłwka, dans la rĂ©gion de Lublin. Il y reste jusquâĂ septembre 1941.
Passible de rĂ©pressions ordonnĂ©es par lâoccupant allemand, il se cache Ă Nasutow, village voisin du domaine des Zamoyski. Le mĂȘme mois, il dĂ©mĂ©nage Ă Zakopane, comme aumĂŽnier des SĆurs Ursulines du cĆur agonisant de JĂ©sus, dans la localitĂ© de JaszczurĂłwka. La Gestapo lâarrĂȘte par hasard, mais faute de preuves le relĂąche. Lorsquâelle revient lâarrĂȘter, en octobre 1941, il a quittĂ© Zakopane. Il arrive dans un des Ă©tablissements des SĆurs franciscaines servantes de la Croix Ă Ć»uĆowo, oĂč il retrouve le pĂšre KorniĆowicz. Par deux fois, il voyage au chĂąteau de la famille Dzieduszycki dans la commune de Zarzecze, non loin de Przeworske. Il use du surnom « sĆur CĂ©cile », dont il se servira jusquâĂ la fin de lâoccupation. Câest de cette pĂ©riode que datent les rĂ©cits on sur sa participation Ă lâaide aux familles juives qui se cachaient. L'abbĂ© WyszyĆski Ă©tait sur la liste des prĂȘtres polonais Ă abattre tenue par les nazis, avec le motif "excĂšs de sacerdoce". Sur cette mĂȘme liste figurait Maximilien Kolbe.
Ă la charniĂšre de septembre et octobre 1942, lâabbĂ© WyszyĆski se voit octroyer la charge de lâabbĂ© Jan Zieja, jusquâalors aumĂŽnier gĂ©nĂ©ral des formations clandestines scoutes, appelĂ©es Szare Szeregi (Formations grises) ; il est aussi lâaumĂŽnier de lâĂ©tablissement de Laski, tenu par les Soeurs franciscaines servantes de la Croix. Il collabore Ă©troitement avec la fondatrice de cette congrĂ©gation, mĂšre ElĆŒbieta Czacka. Il enseigne Ă Varsovie, chez les SĆurs de la RĂ©surrection, donnant des cours Ă caractĂšre religieux et social. Avec Maciej ĆwiÄcicki, senior de lâassociation Juventus Christiana, il collabore aussi avec la DĂ©lĂ©gation du Gouvernement polonais en exil Ă Londres, Ă lâĂ©laboration dâun nouveau code du travail, prĂ©vu pour lâaprĂšs-guerre. Il prĂȘche des recollections pour divers ordres religieux fĂ©minins et participe aux sĂ©minaires scientifiques clandestins de lâUniversitĂ© de Varsovie et de lâUniversitĂ© des Terres Ouest[3].
De 1942, le futur primat prend soin de lâInstitut de la Transfiguration du Christ, fondĂ© par Halina DernaĆowicz, et dâun groupe de jeunes filles rĂ©unies autour dâune congrĂ©gation mariale, animĂ©e par Maria OkoĆska, appelĂ©es « Huitaines » (du nom des huit bĂ©nĂ©dictions). Câest de ce groupe que naĂźtra le futur lâInstitut laĂŻc des servantes de la Vierge de CzÄstochowa - MĂšre de lâĂglise (aujourdâhui Institut du primat WyszyĆski), dont lâabbĂ© sera lâun des cofondateurs.
Au printemps 1944, lâabbĂ© WyszyĆski prĂȘte serment comme aumĂŽnier militaire, devant le pĂšre Jerzy Baszkiewicz, du VIIĂšme District appelé« ObroĆŒa », appartenant Ă Circonscription varsovienne de lâArmĂ©e de lâIntĂ©rieur (AK). Le futur cardinal portera dĂ©sormais le nom de « Radwan III ». Il prend part Ă lâInsurrection de Varsovie en qualitĂ© dâaumĂŽnier de lâhĂŽpital situĂ© Ă Laski, oĂč il assiste les blessĂ©s et confesse les mourants de lâInsurrection. Il y restera jusquâĂ la fin de lâoccupation allemande[7].
Durant la guerre, le primat prĂ©pare plusieurs Ă©crits qui ne seront publiĂ©s quâaprĂšs 1945, dont: Le Saint SiĂšge et le monde dâaprĂšs-guerre (paru en1945 et Ă©ditĂ© sous le pseudonyme « dr.Stefan Zuzelski », signature ne faisant aucun doute sur lâidentitĂ© de lâauteur), oĂč il explique la politique de Pie XII. Ainsi quâun ensemble de confĂ©rences consacrĂ©es Ă la thĂ©ologie du travail: Lâesprit dans le travail de lâhomme (1946), Ă©crit pionnier Ă dimension internationale. Il rĂ©dige aussi un manuel de sciences sociales chrĂ©tiennes : Lâamour et la justice sociale (2001), publiĂ© vingt ans aprĂšs sa mort.
LâabbĂ© WyszyĆski revient Ă WĆocĆawek en mars 1945. Pour une seconde fois, il refuse un poste Ă lâUniversitĂ© de Lublin. Ă WĆocĆawek, il remplit la fonction de recteur du SĂ©minaire, quâil relocalise Ă lâentrĂ©e de la commune de Lubraniec. En 1945, il rĂ©active Les Chroniques du diocĂšse de WĆocĆawek et initie la revue diocĂ©saine « Lâordre divin ». En 1946, il relance la revue « LâAthĂ©nĂ©e sacerdotale ». NommĂ© chanoine au chapitre de la cathĂ©drale de WĆocĆawek, il sây installe le 14 aoĂ»t 1945.
ĂvĂȘque de Lublin
Ă lâinitiative du cardinal Hlond, le 4 mars 1946, il reçoit de Pie XII la charge dâĂ©vĂȘque ordinaire de Lublin. Lâonction Ă©piscopale lui est confĂ©rĂ©e le 12 mai 1946 Ă Jasna GĂłra, des mains du primat August Hlond lui-mĂȘme, (accompagnĂ© des Ă©vĂȘques coadjuteurs: K. RadoĆski et StanisĆaw Czajka). Lâinvestiture Ă la cathĂ©drale de Lublin a lieu le 26 mai 1946. Il est alors le plus jeune Ă©vĂȘque de Pologne.
Une fois Ă Lublin, il entreprend un renouveau moral du clergĂ©, par le biais de recollections pour les prĂȘtres et rĂ©active lâassociation « LâUnion des prĂȘtres », lâAssociation des prĂȘtres « Unitas », ainsi que « LâAssociation missionnaire sacerdotale ». Il participe Ă la reconstruction de la cathĂ©drale de Lublin et des Ă©glises du diocĂšse, organisant les fondations du « ComitĂ© Ă©piscopal pour la reconstruction des lieux de culte ». Il rĂ©organise la curie de lâĂ©vĂȘchĂ©, les structures du dĂ©canat et celles des paroisses. Il crĂ©e Ă Lublin lâInstitut de haute culture religieuse.
Il prend sous son patronage le renouveau des congrĂ©gations mariales, initie des actions caritatives ; celle de la Caritas diocĂ©saine est un exemple. En deux ans, il accomplit 80 visitations paroissiales, se rend Ă 80 mille sacrements de confirmation et soutient les fidĂšles dans leurs initiatives dâĆuvres de piĂ©tĂ©, dont les congrĂšs consacrĂ©s au rosaire. De sa plume sortent deux importantes lettres pastorales : De la libĂ©ration chrĂ©tienne de lâhomme (1946) et De la volontĂ© catholique dans la vie (1947).
En tant quâĂ©vĂȘque de Lublin, il reçoit la charge de Grand chancelier de lâUniversitĂ© catholique de Lublin ; il patronne et soutient la rĂ©organisation de lâUniversitĂ© durant lâaprĂšs-guerre. Câest grĂące Ă son initiative que voit le jour la facultĂ© de philosophie chrĂ©tienne de cette mĂȘme universitĂ©.
Au forum quâest lâĂpiscopat de Pologne, il collabore Ă©troitement avec le cardinal Hlond, sâactive dans les commissions pour la presse, les affaires Ă©tudiantes et prĂ©side la commission veillant sur lâUniversitĂ© catholique de Lublin. Il prĂ©pare la Proclamation de lâĂpiscopat polonais pour les Ă©lections au parlement, en 1947. Il sâengage, avec tout son diocĂšse, dans lâActe dâoffrande de la Pologne au CĆur immaculĂ© de Marie, Ă Jasna GĂłra ; Acte qui verra le jour le 8 septembre 1946, et qui laissera une trace durable sur les futures initiatives mariales du primat WyszyĆski et modĂšlera la vie sociale de la Pologne.
ArchevĂȘque de Varsovie
AprĂšs la mort subite du cardinal Hlond, le 16 novembre 1948, il est nommĂ© par le pape Pie XII archevĂȘque de Varsovie et de Gniezno, avec le titre de Primat de Pologne. Nous savons que ce choix a eu lieu Ă la demande personnelle du primat Hlond, alors mourant. Lâinvestiture Ă la cathĂ©drale de Gniezno et de Varsovie a lieu dĂ©but fĂ©vrier 1949.
LâarchevĂȘque reçoit - comme ses prĂ©dĂ©cesseurs - les autorisations extraordinaires dâun lĂ©gat papal, liĂ©es aux difficiles conditions de fonctionnement de lâĂglise en Pologne, gouvernĂ©e par les communistes. Ces droits sâĂ©tendent Ă tout le territoire de la Pologne et une partie de lâUnion soviĂ©tique, qui nâont pas ses propres Ă©vĂȘques. Ils comportent entre autres, le droit de nommer indĂ©pendamment des ecclĂ©siastiques (sauf nomination dâĂ©vĂȘques), le contrĂŽle des ordres religieux, et le fait de remplir les fonctions dâĂ©vĂȘque sur les Terres occidentales et Nord de la Pologne, alors dĂ©pourvues de toute administration ecclĂ©siale stable. Petit Ă petit ces droits prennent de lâampleur. Ainsi, en 1950, le primat obtient lâautorisation de crĂ©er un tribunal ecclĂ©sial, analogique Ă la Rote romaine (annulations de mariage), et dĂšs 1951, il obtient la juridiction sur les rites des Ăglises orientales de Pologne, ne possĂ©dant pas leurs propres Ă©vĂȘques (grĂ©co-catholiques et armĂ©niens). Dans leur ensemble, ces droits sont restĂ©s inchangĂ©s jusquâĂ son dĂ©cĂšs en 1981 ; ils ont Ă©tĂ© confirmĂ©s par les papes Jean XXIII, Paul VI, Jean Paul I et Jean Paul II.
En acceptant la fonction de primat de Pologne, WyszyĆski souligne la continuitĂ© qui le lie avec les actes de son prĂ©dĂ©cesseur, le cardinal Hlond. Les collaborateurs les plus proches du nouvel archevĂȘque de Gniezno et Varsovie sont ceux du primat dĂ©cĂ©dĂ©: lâabbĂ© Hieronim Gozdziewicz, directeur du secrĂ©tariat du primat jusquâĂ son dĂ©cĂšs ; lâabbĂ© Antoni Baraniak SDB, secrĂ©taire, futur Ă©vĂȘque adjoint de Gniezno et archevĂȘque de PoznaĆ ; lâabbĂ© WĆadysĆaw Padacz, aumĂŽnier personnel du primat durant de longues annĂ©es. Le nouvel Ă©vĂȘque veut rebĂątir les Ă©glises varsoviennes en ruine, continuant lâĆuvre commencĂ©e le primat Hlond. Il rĂ©ussit Ă en reconstruire plus dâune cinquantaine, dont la cathĂ©drale St. Jean. Il prend sous son patronage la reconstruction de lâarchicathĂ©drale St. Adalbert Ă Gniezno.
Dans le cadre de ses pouvoirs de supĂ©rieur dâordres religieux, il fait tout pour rehausser leur vie spirituelle, rĂ©activer et fortifier leur organisation et coordonner leurs actions, aussi bien entre eux-mĂȘmes quâavec les structures diocĂ©saines.
JusquâĂ sa mort, il prĂ©side immuablement aux rĂ©unions de lâĂpiscopat polonais, sauf durant sa pĂ©riode dâemprisonnement de 1953 Ă 1956. Dans toutes ses activitĂ©s, le primat tient Ă©normĂ©ment Ă ce que soit sauvegardĂ©e lâunitĂ© spirituelle entre les Ă©vĂȘques, considĂ©rant que câest lĂ le seul moyen de sauver lâĂglise dâune dĂ©sintĂ©gration voulue par les communistes.
Il consacre Ă©normĂ©ment de temps Ă lâorganisation de lâadministration ecclĂ©siale sur les Terres occidentales et Nord de la Pologne, car au vu des pouvoirs extraordinaires qui lui ont Ă©tĂ© confĂ©rĂ©s, câest lui qui dirige lâĂglise de ces territoires (jusquâen 1972, annĂ©e oĂč le pape promulgue une bulle rĂ©glant le statut canonique de ces rĂ©gions). Il vient rĂ©guliĂšrement visiter ces diocĂšses, sanctifiant les foules de nouveaux arrivant et octroyant le sacrement de confirmation. En 1951, il arrive Ă nommer des Ă©vĂȘques Ă des postes dâadministrateurs apostoliques Ă WrocĆaw, Opole, GorzĂłw, GdaĆsk et Olsztyn, mais les communistes rendent impossible lâentrĂ©e en fonction de ses nouveaux nommĂ©s. Au vu de cette situation, le primat se rĂ©signe aux conditions imposĂ©es par le pouvoir communiste et maintient Ă leurs postes les anciens vicaires capitulaires.
Lutte sous le régime communiste
Le cardinal est pleinement conscient dâune lente et consĂ©quente action des autoritĂ©s communistes, qui vise Ă exacerber les relations avec lâĂglise. MalgrĂ© cela, il initie en 1949 la crĂ©ation dâune commission mixte du gouvernement et de lâĂpiscopat, dont le but est de discuter des principaux problĂšmes et relations entre lâĂtat et lâĂglise. Il est parfaitement conscient du manque de loyautĂ© des autoritĂ©s, qui dĂ©truisent les structures des associations et organisations catholiques, spolient lâĂglise dâune grande partie de ses biens fonciers, accaparent illĂ©galement lâorganisation caritative Caritas et limitent constamment la diffusion de la presse et de lâenseignement catholiques. Quelques Ă©vĂȘques, dont lâĂ©vĂȘque ordinaire de Kielce, CzesĆaw Kaczmarek, sont en prison, dâautres se font expulser de leurs diocĂšses. Un prĂȘtre sur dix est en prison.
Avril 1950, le primat dĂ©cide de signer malgrĂ© tout un accord sans prĂ©cĂ©dent pour lâĂ©poque, avec le gouvernement, accord controversĂ© et humiliant pour lâĂglise. Cette entente, bien que constamment violĂ©e par les autoritĂ©s, limite quelque peu leur action contre lâĂglise. Il est signĂ© sans lâaval du Saint-SiĂšge, mais le pape Pie XII lâaccepte en janvier 1951, aprĂšs la visite Ă Rome de lâarchevĂȘque WyszyĆski.
LâarchevĂȘque WyszyĆski refuse ponctuellement de reconnaĂźtre les organisations religieuses collaborant avec les autoritĂ©s communistes, craignant, et Ă juste titre, quâelles deviendront lâinstrument dâune dĂ©sintĂ©gration interne de lâĂglise, maniĂšre de plus de mettre lâĂglise sous tutelle.
En mai 1953, il proteste contre un dĂ©cret, promu trois mois auparavant par les autoritĂ©s, portant sur les nominations de lâĂtat Ă des postes ecclĂ©siaux, ce qui revenait Ă donner aux autoritĂ©s le droit de contrĂŽler pleinement toutes les nominations ecclĂ©siales. Il publie alors, au nom de tous les Ă©vĂȘques, la cĂ©lĂšbre lettre pastorale Non possumus.
Le 12 janvier 1953, Pie XII nomme lâarchevĂȘque WyszyĆski cardinal, mais ce nâest quâen 1957, aprĂšs avoir Ă©tĂ© libĂ©rĂ© des prisons communistes, quâil pourra recevoir son chapeau cardinalice.
Emprisonnement
Depuis 1946, le primat WyszyĆski vit sous Ă©troite surveillance des services de sĂ©curitĂ© communistes, ingĂ©rence qui ne cessera de croĂźtre. En fĂ©vrier 1949, a lieu la premiĂšre tentative dâassassinat du primat: un cĂąble en fer est tendu au travers dâune route oĂč il se dĂ©place en voiture. DĂšs mars 1951, on commence Ă organiser des opĂ©rations spĂ©ciales dâingĂ©rence, surnommĂ©es « Centrum », visant les institutions centrales de lâĂglise catholique polonaise. Deux partant ans plus tard, vu son rĂŽle unique et sa position dans lâĂglise catholique, on sâacharne sur le primat dans le cadre dâactions oĂč on le nomme « Prorok » (le prophĂšte). DĂšs 1954, lâensemble de ces opĂ©rations sont rĂ©pertoriĂ©es dans les donnĂ©es sensibles des services de sĂ©curitĂ©. En 1953, câest tout un dossier qui lui est consacrĂ©. Ces actions « dĂ©sintĂ©grantes » des services de sĂ©curitĂ© appelĂ©s SB, continueront jusquâĂ la fin de ses jours[3].
Le 25 septembre 1953, le primat WyszyĆski est arrĂȘtĂ© Ă Varsovie par lâUB (bureau de la suretĂ©), conformĂ©ment Ă la dĂ©cision du PrĂ©sidium du gouvernement de la RĂ©publique populaire de Pologne. Ă l'une des religieuses du personnel, il dit : "Ma sĆur, je sortirai de cette maison aussi pauvre que j'y suis entrĂ©". Commencent alors trois annĂ©es dâemprisonnement arbitraire, jonchĂ©es de mauvais traitements et de nombreuses vexations.
Il est dâabord enfermĂ©, jusquâĂ 12 octobre 1953, Ă RywaĆd, puis Ă Stoczek WarmiĆski jusquâau 6 octobre 1954, puis, jusquâ au 27 octobre 1955, Ă Prudnik[8]. Le quatriĂšme lieu dâemprisonnement sera le cloĂźtre de KomaĆcza, oĂč il restera jusquâau 28 octobre 1956.
Durant son emprisonnement, il accomplit lâActe dâoffrande personnelle Ă la Vierge Marie, esclave de son amour maternel, et met au point tout un programme dâune Grande Neuvaine et des cĂ©lĂ©brations du MillĂ©naire du baptĂȘme de la Pologne. InspirĂ© par Maria OkoĆska, il rĂ©dige le texte des VĆux de la Nation de Jasna GĂłra, qui seront transmis au sanctuaire de CzÄstochowa, pour y ĂȘtre prononcĂ©s le 26 aoĂ»t 1956, devant une assemblĂ©e dâun million de fidĂšles - sans la prĂ©sence du primat.
Fin octobre 1956, Ă la demande du premier secrĂ©taire du comitĂ© central du POUP (Parti Ouvrier UnifiĂ© Polonais) WĆadysĆaw GomuĆka, les reprĂ©sentants du pouvoir Zenon Kliszko et WĆadysĆaw BieĆkowski se rendent Ă KomaĆcza et informent le PrĂ©sident de la confĂ©rence de lâĂpiscopat polonais que son isolation prend fin et demandent un rapide retour Ă Varsovie. Le primat leur prĂ©sente alors les conditions Ă remplir pour son retour, demandes dont font partie la libĂ©ration dâautres Ă©vĂȘques, le retour de ceux qui ont Ă©tĂ© chassĂ©s de leurs diocĂšses, lâannulation du dĂ©cret sur les nominations aux siĂšges Ă©piscopaux et la rĂ©activation de la commission mixte entre lâ Ăglise et Ătat. Ses conditions ont Ă©tĂ© remplies[3].
Le primat revient dans la capitale, le 28 octobre 1956, accueilli par des fidĂšles pleins dâenthousiasme. Une fois libĂ©rĂ©, il reprend son activitĂ© apostolique, entreprend un dialogue avec les autoritĂ©s, pour le bien de lâĂglise, et finalise un nouvel accord, appelĂ© mineur. GrĂące Ă sa dĂ©termination, lâĂglise obtient en partie lâacceptation de son activitĂ©, ce que jusquâĂ prĂ©sent, les autoritĂ©s refusaient de faire. Le plus important est le retrait du dĂ©cret concernant les nominations ecclĂ©siales.
Influence sur la société
Lâenseignement pastoral du primat est dâune grande intensitĂ© et reste centrĂ© sur tous les groupes sociaux et professionnels. Il accueille Ă©normĂ©ment de fidĂšles dans sa rĂ©sidence Ă Gniezno et Varsovie. Il prend surtout soin des jeunes, voyant en eux lâavenir de la nation. WyszyĆski encourage les fidĂšles Ă approfondir leur vie intĂ©rieure. Ce ne sont pas seulement les catholiques qui viennent lui rendre visite, mais aussi les orthodoxes, les protestants et les reprĂ©sentants des milieux juifs. Viennent aussi Ă lui des personnes de derriĂšre le « rideau de fer », comme par exemple des groupes de la diaspora polonaise en Occident - les jeunesses polonaises de Grande Bretagne et futurs prĂȘtres du sĂ©minaire dâOrchard Lake aux Ătats-Unis. Lui rendent visite , en toute discrĂ©tion, les prĂȘtres qui travaillent sur le territoire de lâUnion soviĂ©tique. Le primat y envoie aussi ses Ă©missaires. Il garde un contact permanent avec lâĂ©glise de TchĂ©coslovaquie.
Le principal souci, prĂ©sent dans tout son enseignement aprĂšs son retour de prison, est le renforcement et lâapprofondissement de la foi des Polonais, ainsi quâun appel Ă lâunitĂ©. Il considĂ©rait que lâexemple par excellence de cette unitĂ© devrait venir des Ă©vĂȘques, câest pourquoi, il garde dĂšs son retour certains collaborateurs, dont les Ă©vĂȘques MichaĆ Klepacz et Zygmunt ChoromaĆski, qui durant son absence se sont montrĂ©s dociles envers les autoritĂ©s communistes, mais il rĂ©voque du poste de vicaire gĂ©nĂ©ral de archidiocĂšse de Gniezno, lâabbĂ© StanisĆaw Bross, qui a outrepassĂ© ses compĂ©tences durant lâemprisonnement du primat.
En mai et juin 1957, il part pour Rome, oĂč il reçoit un accueil enthousiaste, considĂ©rĂ© comme martyr. Ă Vienne, il rencontre le cardinal König, Ă Venise, il rend visite au cardinal Roncalli. Le 18 mai 1957, il reçoit les attributs cardinalices et le 30, il prend possession de son Ă©glise titulaire Ă Rome: Santa Maria in Transtevere.
Une année plus tard, il part pour un second voyage à Rome, aux funérailles du pape Pie XII, décédé le 9 octobre 1958. Il participe au conclave, qui élit comme nouveau pape le patriarche de Venise, le cardinal Angelo Roncalli, ce qui réjouit le primat, car leurs relations étaient des plus amicales[3].
Depuis 1957, les autoritĂ©s de la Pologne populaire dĂ©tĂ©riorent progressivement leur politique confessionnelle envers lâĂglise, toujours dans le but de lâaffaiblir. Le primat a conscience que les autoritĂ©s de lâĂtat veulent durablement instaurer lâathĂ©isme dans la sociĂ©tĂ© polonaise. Cependant, il nâesquive pas le dialogue avec le pouvoir. DĂ©but 1958, il rencontre le premier secrĂ©taire du parti WĆadysĆaw GomuĆka. Leur entretiens sont difficiles et ont lieu quatre fois.
Le 21 juillet 1958, la milice du rĂ©gime et le procureur font une descente Ă lâInstitut du primat pour les VĆux de la Nation Ă Jasna GĂłra, y perquisitionnent et rĂ©quisitionnent les publications de lâInstitut, qui Ă©dite et diffuse les discours et homĂ©lies du primat.
Le 3 mai 1957, le cardinal WyszyĆski initie un programme de plusieurs annĂ©es pour un renouveau spirituel de la Pologne, par le biais dâune Grande Neuvaine pour le MillĂ©naire du baptĂȘme de la Pologne. Il est basĂ© sur les rĂ©flexions contenues dans les Voeux de Jasna GĂłra, oĂč un accent spĂ©cial est mis sur lâapprofondissement de la foi et le renouveau religieux de la nation polonaise, aprĂšs les ravages moraux provoquĂ©s par la Seconde guerre mondiale, la politique du rĂ©gime communiste et le manque de souverainetĂ© nationale â situation vĂ©cue par tous les Polonais. La Neuvaine est assortie chaque annĂ©e dâune intention particuliĂšre. Dans les homĂ©lies paroissiales du dimanche, on fait appel Ă un approfondissement de la foi, Ă la dĂ©fense des enfants Ă naĂźtre, au renouveau de la famille et du mariage, Ă une Ă©ducation responsable, au maintien dâune dimension « dâamour et de justice sociale », une lutte contre les vices de la nation et lâacquisition de vertus sociales. Le programme sâappuie sur une profonde spiritualitĂ© mariale, centrĂ©e sur Jasna GĂłra. Dans le programme de la Grande Neuvaine, le primat inclut le pĂšlerinage de la copie du tableau de la Vierge Noire de CzÄstochowa, dans toutes les paroisses. Cette pĂ©rĂ©grination de la Vierge, commence le 26 aoĂ»t 1957. JusquâĂ 1966, dix diocĂšses accueillent la Vierge de CzÄstochowa. LâannĂ©e du MillĂ©naire, le tableau est plusieurs fois bloquĂ© en route par les autoritĂ©s communistes. Finalement, celles-ci procĂšdent à « lâarrestation » du tableau - le 2 septembre 1966 - et ordonnent de le remettre au Sanctuaire de Jasna GĂłra, oĂč il reste pendant six ans. Mais le pĂšlerinage continue: les paroisses accueillent le cadre sans tableau. Ce nâest quâen 1972, que la Vierge Noire est secrĂštement dĂ©placĂ©e de Jasna GĂłra pour continuer son cheminement[3].
Le cardinal WyszyĆski se heurte non seulement aux agissements des autoritĂ©s communistes, mais doit affronter la rĂ©sistance dâune bonne partie de « catholiques progressistes », qui conçoivent autrement lâavenir du catholicisme polonais, formulant leurs propres postulats sur lâapprofondissement intellectuel et promouvant la vision dâune Ăglise Ă©litiste. Le primat exige de lâintelligentsia quâelle adhĂšre Ă la doctrine sociale de lâĂglise et garde dâĂ©troits liens avec la hiĂ©rarchie ecclĂ©siale. Ces objectifs ne sont guĂšre rĂ©alisĂ©s par les milieux catholiques affiliĂ©s aux autoritĂ©s communistes, dont lâassociation « Pax » ; envers le mouvement « Znak », le primat garde ses distances.
Concile Vatican II
Le cardinal prend une part active aux prĂ©paratifs du concile Vatican II - initiĂ©s par Jean XXIII - et participe Ă ses assises. Il est choisi pour faire partie Ă la Commission prĂ©paratoire du concile universel Vatican II ; depuis le 17 octobre 1962, il est membre de son SecrĂ©tariat comme extra ordinem. Un an plus tard, le 13 octobre 1963, il reçoit la nomination Ă la PrĂ©sidence du Concile, oĂč il siĂšge jusquâĂ la fin des dĂ©bats. Il participe au conclave de 1963, qui aprĂšs la mort de Jean XXIII, Ă©lit Paul VI.
DĂ©jĂ en 1959, le primat WyszyĆski transmet deux fois ses conclusions au sujet des problĂšmes qui doivent ĂȘtre soulevĂ©s dans un futur concile. Durant les annĂ©es 1962-1965, il participe aux quatre sessions conciliaires. Il prend la parole 11 fois, au sujet de la liturgie, de lâunitĂ© de lâĂglise, de lâessence de lâĂglise, du rĂŽle des Ă©vĂȘques, de la doctrine sociale, de la libertĂ© religieuse, des indulgences et du rĂŽle de la MĂšre de Dieu dans lâĂglise. Il Ćuvre tout particuliĂšrement lors de la rĂ©daction du chapitre VIII de la Constitution conciliaire Lumen gentium, consacrĂ©e Ă la Vierge Marie. En septembre 1964, il adresse Ă Paul VI - avec tout lâĂpiscopat polonais - la demande dâoctroyer Ă la MĂšre de Dieu le titre de MĂšre de lâĂglise, ce que le pape fait en novembre de la mĂȘme annĂ©e.
Le primat tient Ă ce que les Ă©vĂȘques polonais prennent eux aussi une part active aux dĂ©bats du concile. Ă Rome, il coordonne - lors de leurs rencontres rĂ©guliĂšres - les travaux des pĂšres polonais du concile, afin de mettre au point des propositions communes. Les Ă©vĂȘques polonais travaillent en Ă©quipes, partagent entre eux les tĂąches et leurs interventions sont prĂ©parĂ©es lors de confĂ©rences hebdomadaires.
Durant les sessions du concile, le primat invite les autres pĂšres conciliaires aux cĂ©lĂ©brations du MillĂ©naire du baptĂȘme de la Pologne. Les Ă©vĂȘques polonais envoient des lettres dâinvitation aux solennitĂ©s Ă au moins 65 Ă©piscopats catholiques dâEurope, des deux AmĂ©riques, dâAfrique, Australie, OcĂ©anie et Asie, ainsi quâaux reprĂ©sentants des Ăglises orthodoxes et protestantes[3].
Parmi ces lettres, on retrouve la Proclamation des Ă©vĂȘques polonais Ă leurs frĂšres et Ă©vĂȘques allemands, dans le Christ, dans laquelle les Ă©vĂȘques polonais font un douloureux rappel historique du passĂ©, tout en invitant Ă une rĂ©conciliation. Le primat approuve le contenu de la lettre adressĂ©e Ă lâĂpiscopat allemand, lettre rĂ©digĂ©e par BolesĆaw Kominek ; il en prend lâentiĂšre responsabilitĂ©. Selon son opinion : « Cette proclamation (...) dâune rĂ©sonance internationale, a encore plus rehaussĂ© la position de lâĂglise catholique polonaise, a corrigĂ© les jugements que lâon portait sur elle, faisant que les accusations de chauvinisme et de nationalisme sont devenues lettre morte ».
La proclamation des Ă©vĂȘques polonais provoque chez les autoritĂ©s communistes une rĂ©action dâune rare violence, suivie dâune propagande et dâattaques dans les mĂ©dias ; elles considĂšrent que câest lĂ une ingĂ©rence des Ă©vĂȘques dans la politique extĂ©rieure de la Pologne populaire. La cible premiĂšre de cette attaque est Ă©videmment le primat WyszyĆski. En guise de reprĂ©sailles, on refuse de lui dĂ©livrer son passeport pour aller Ă Rome cĂ©lĂ©brer en janvier les commĂ©morations du MillĂ©naire.
Célébrations du millénaire
Les cĂ©lĂ©brations commencent par une messe, le 1 janvier 1966, dans la cathĂ©drale de Gniezno. Durant les cĂ©rĂ©monies principales du MillĂ©naire du baptĂȘme de la Pologne -, qui ont lieu dĂ©but mai Ă Jasna GĂłra - le 3 mai, au nom de lâĂglise de Pologne, le primat prononce lâActe dâoffrande de la Pologne Ă lâamour maternel de la Vierge Marie, MĂšre de lâĂglise, pour les mille ans qui viennent, pour la libertĂ© de lâĂglise du Christ en Pologne et dans le monde. Par ces vĆux, lâĂpiscopat veut non seulement fortifier la foi et la morale catholique de la nation, mais garantir la libertĂ© de lâĂglise universelle.
Les commĂ©morations du MillĂ©naire du baptĂȘme se dĂ©roulent non seulement en Pologne, mais aussi dans les milieux de la diaspora polonaise, dissĂ©minĂ©e dans le monde. Le 13 et 15 janvier, câest le pape Paul VI Ă Rome qui prie pour la Pologne. Le cardinal WyszyĆski invite officiellement le Saint PĂšre Ă venir cĂ©lĂ©brer lâĂ©vĂ©nement de lâĂglise polonaise, en Pologne mĂȘme, mais les plus hautes instances de lâĂtat lui refusent le droit de sây rendre[3].
Les commĂ©morations du MillĂ©naire durent dans certains diocĂšses, jusquâĂ 1967. Le sabotage permanent des festivitĂ©s, par le pouvoir en place, a fait que les fidĂšles se sont encore plus mobilisĂ©s. LâĂglise gagne la confrontation avec la propagande de lâĂtat communiste, qui essayait dâopposer au baptĂȘme millĂ©naire de la Pologne des festivitĂ©s officielles sur le thĂšme : « Mille ans de lâĂtat polonais ». LâautoritĂ© du primat est devenue incontestable.
En 1967, le cardinal WyszyĆski initie un second programme pastoral : une Croisade sociale pour lâamour. Il y fait appel aux fidĂšles pour quâils Ă©radiquent la haine et lâatomisation de la sociĂ©tĂ© et vienent en aide aux plus proches. En 1976, il annonce les prĂ©paratifs pour le jubilĂ© du 600Ăšme anniversaire de la prĂ©sence de la MĂšre du Christ Ă CzÄstochowa, qui aura lieu en 1982.
Le cardinal WyszyĆski continue de soutenir les mouvements pastoraux et apostoliques, dont un groupe appelĂ© « Famille des familles », nĂ© en 1952 et dont il est le cofondateur. En 1969, il met en place le « Mouvement dâaide Ă la MĂšre de lâĂglise ».
PĂšre de la nation
Son moyen principal de communiquer avec les fidĂšles sont ses homĂ©lies et ses discours, quâil prononce en divers endroits du pays. On en a sauvegardĂ© prĂšs de onze mille, prononcĂ©s dans les annĂ©es 1956-1981.
Le primat rĂ©agit Ă tous les Ă©vĂ©nements socio-politiques importants de Pologne. Face aux Ă©vĂ©nements de mars 1968, bien quâayant pris du recul, il considĂšre quâils sont lâeffet de luttes entre les diverses fractions du POUP (parti communiste). Il souligne en mĂȘme temps que cette action antisĂ©mite, initiĂ©e par les autoritĂ©s, va dĂ©grader lâimage des Polonais en Occident, qualifiant les agissements des communistes comme une « ombre monstrueuse (âŠ) dâun racisme renaissant ». Avec tout lâĂpiscopat, il dĂ©fend les Ă©tudiants emprisonnĂ©s et relĂ©guĂ©s des Ă©coles supĂ©rieures.
En dĂ©cembre 1970, il est solidaire avec la sociĂ©tĂ© polonaise qui manifeste son mĂ©contentement. Il prend en mĂȘme temps la dĂ©cision de ne pas se prononcer au sujet du « danger biologique menaçant la nation », ne voulant pas ainsi dĂ©stabiliser encore plus la situation du pays. Vu les violences dont usent les autoritĂ©s, lâĂglise doit soutenir la sociĂ©tĂ© persĂ©cutĂ©e, et il ajoute : « LâĂglise doit ĂȘtre avec ceux qui sont battus, au lieu de camoufler sa faute (âŠ) Il sâagit de sang versĂ© - dâun sang consacrĂ© ».
Le primat nâa pas changĂ© dâapproche envers les autoritĂ©s communistes, il reste ouvert au dialogue, surtout aprĂšs lâarrivĂ©e au pouvoir dâEdward Gierek - premier secrĂ©taire du POUP - qui laisse entrevoir une chance de normaliser les relations entre lâĂglise et lâĂtat. Il dĂ©cide cependant de garder une certaine distance et accepte avec circonspection les dĂ©clarations des dignitaires du parti.
Durant les annĂ©es soixante-dix, les autoritĂ©s de la Pologne populaire veulent avoir plus dâinfluence sur les enfants et les jeunes, voulant les dĂ©fendre de tout endoctrinement. Le primat et les Ă©vĂȘques changent alors leurs projets pastoraux et lâoriente la pastorale vers la jeune gĂ©nĂ©ration et les Ă©tudiants. En mĂȘme temps, le primat WyszyĆski parle ouvertement de la responsabilitĂ© des parents dans le processus Ă©ducatif, rappelant que câest Ă eux, et non au pouvoir en place, de prendre les dĂ©cisions dans ce domaine. Plus dâune fois, il critique publiquement la politique sociale de lâĂtat permettant lâavortement et approuvĂ©e par la juridiction en vigueur. Le primat soutient les actions ayant pour but la protection des enfants Ă naĂźtre.
Dans ces mĂȘmes annĂ©es soixante-dix, il a plus dâune fois transmis aux autoritĂ©s son opinion sur les questions primordiales pour la nation polonaise, Ă©crivant entre autres sur des sujets comme lâĂ©ducation, les conditions de logement, la dĂ©mographie, la situation de la famille, lâinterprĂ©tation de lâhistoire contemporaine, etc. Voulant quâune vĂ©ritable vie sociale soit prĂ©sente, il prononce trois sĂ©ries dâhomĂ©lies dans les annĂ©es 1974-1976, appelĂ©es « Sermons de Sainte-Croix », (du nom de lâĂ©glise Sainte-Croix Ă Varsovie). Il y a rappelĂ© les principes de lâenseignement social de lâĂglise, dont la libertĂ© religieuse, la libertĂ© dâassociation et la libertĂ© de parole.
Le cardinal soutient la population rurale, marginalisĂ©e par la politique des communistes. Il appelle Ă maintenir la propriĂ©tĂ© privĂ©e des terres et soutient les groupes qui luttent pour lâobtention de permis de construire des Ă©glises et chapelles. Exemple: il sâengage personnellement dans la construction de lâĂ©glise de Zbrosza MaĆa. Il y vient en personne, le 24 mai 1972, et bĂ©nit la chapelle, Ă©rigĂ©e sans les autorisations administratives.
Fin 1975, le primat passe au crible de la critique les amendements Ă la Constitution de la Pologne populaire, prĂ©parĂ©s par les communistes. Câest grĂące Ă son initiative que lâĂpiscopat rĂ©dige deux mĂ©morandums contenant les opinions des Ă©vĂȘques envers les changements projetĂ©s dans la Constitution (le 9 et le 26 janvier 1976). Ces actions atteignent leurs buts et les autoritĂ©s retirent certains amendements.
En juin 1976, lors des protestations ouvriĂšres dans les villes de Radom et Ursus, pour cause dâune hausse de prix des produits alimentaires, câest par le biais de lâĂpiscopat, que le primat intervient pour dĂ©fendre les ouvriers en grĂšve, soumis aux reprĂ©sailles. Il adresse mĂȘme une lettre au premier ministre polonais de lâĂ©poque, Piotr Jaroszewicz, lâappelant Ă mettre fin Ă la rĂ©pression.
Envers lâopposition dĂ©mocratique, qui est en train de naĂźtre, le primat WyszyĆski garde ses distances, ayant peur dâentrainer lâĂglise dans les piĂšges tendus par le pouvoir: « Notre action doit ĂȘtre sagement pensĂ©e, mĂ»rie et pacifique. Nous ne pouvons pas prendre parti, pour telle ou autre institution laĂŻque, ou milieu politique. Les laĂŻcs le font Ă leur maniĂšre, les Ă©vĂȘques ont la leur ». Maintes fois, il prend la dĂ©fense des personnes touchĂ©es par les rĂ©pressions. Il reçoit des personnalitĂ©s de divers milieux, mĂȘme si elles nâont rien Ă voir avec la foi catholique. Jacek KuroĆ en est un exemple[3].
Pontificat de Jean-Paul II
Ălection et premier voyage
Le 12 août 1978, le cardinal participe aux obsÚques de Paul VI, puis prend part au conclave qui suit. Le nouveau pape, Albino Luciani, est élu le 26 août, prenant le nom de Jean Paul Ier. AprÚs son décÚs prématuré, le cardinal se rend une fois encore à Rome, pour un second conclave.
LâĂ©lection du cardinal Karol WoytyĆa comme pape a lieu le 16 octobre 1978. Câest pour le cardinal WyszyĆski un Ă©vĂ©nement dâimportance. Voici que lâun de ses collaborateurs les plus proches vient dâĂȘtre Ă©lu - mĂ©tropolite de Cracovie -, et successeur le plus probable Ă son poste.Vers la fin des annĂ©es soixante-dix, leurs relations Ă©taient des plus amicales. Dans les notes laissĂ©es par le primat, juste aprĂšs lâĂ©lection de 1978, on peut lire : « Câest une vĂ©ritable dimension internationale que dĂ©montre cette Ă©lection dâun Polonais au Saint-SiĂšge. Ă travers le dĂ©cĂšs mystĂ©rieux de deux papes, cette Pologne tant critiquĂ©e par divers pays (France, Belgique, Hollande, Allemagne) devient lâespĂ©rance des pays catholiques, une espĂ©rance rĂ©vĂ©lĂ©e par cette Ă©lection dâun Polonais Ă la tĂȘte de lâĂglise - et quel Polonais ».
Jean Paul II souligne ses liens avec le primat et lâhonore pendant la cĂ©rĂ©monie de lâhommage des cardinaux au nouveau Ă©lu, en recevant sa rĂ©vĂ©rence debout (il est lâun des deux dignitaires Ă ĂȘtre ainsi reçus).
Juste aprÚs le conclave, le primat invite officiellement le pape à venir en Pologne. Le primat joue un rÎle de premier plan dans les négociations lors des préparatifs au pÚlerinage papal. Le 24 janvier 1979, a lieu la rencontre du primat avec le premier secrétaire Edward Gierek, lors de laquelle les parties mettent au point les conditions indispensables à cette visite.
Le pĂšlerinage de Jean Paul II se dĂ©roule du 2 au 10 juin 1979. Le primat lâaccueille, et lui fait ses adieux, puis lâaccompagne Ă Varsovie, Gniezno, CzÄstochowa et le suit dernier jour de sa visite Ă Cracovie. Le pĂšlerinage est un immense succĂšs du primat et de lâĂglise de Pologne quâil conduit. Le primat souligne : « La visite du Saint PĂšre dans un pays du bloc communiste, est une forme de transgression du « rideau de fer » (âŠ) La prĂ©sence du Saint PĂšre ici, en Pologne, fait croĂźtre lâespĂ©rance, suscite une mobilisation spirituelle, vivifie la foi de tous, leur montrant quâil est possible de faire quelque chose en restant dĂ©terminĂ© ».
Solidarnosc
Au moment oĂč Ă©clatent, durant lâĂ©tĂ© 1980, les grĂšves ouvriĂšres, le primat est parfaitement conscient quâelles nâont pas seulement une signification Ă©conomique. Il sâengage dans deux voies: il appelle au calme (de peur que les soviĂ©tiques interviennent) et en mĂȘme temps soutient les postulats des grĂ©vistes, voulant des syndicats ouvriers indĂ©pendants. Dans les chantiers de GdaĆsk se trouve son envoyĂ© Romuald KukoĆowicz. Le 26 aoĂ»t, les autoritĂ©s communistes, manipulent une partie de son sermon, donnant lâimpression que le primat se distancie des grĂšves. Ainsi, le lendemain, soutenu par le Conseil GĂ©nĂ©ral de lâĂpiscopat polonais, il proclame son soutien aux demandes sociales des grĂ©vistes.
Le primat juge comme positive la signature des « Accords dâaoĂ»t ». Il soutient la naissance et la lĂ©galisation du Syndicat IndĂ©pendant SolidarnoĆÄ, conseille que Jan Olszewski et WiesĆaw Chrzanowski soient les auteurs de son statut syndical. Il juge lâaction du syndicat par le prisme du bien qui en dĂ©coule pour toute la nation et tient compte des rĂ©alitĂ©s gĂ©opolitiques de la Pologne. Il considĂšre la naissance de ce mouvement comme une force reprĂ©sentant la nation, dĂ©chargeant lâĂglise de bien des responsabilitĂ©s politiques face au pouvoir totalitaire. Mais il nâhĂ©site pas Ă prĂ©venir les leaders du mouvement et suggĂšre la direction Ă prendre. Il redoute lâintervention soviĂ©tique et demande quâon mise sur lâorganisation et insiste sur le respect des syndicalistes envers la doctrine sociale de lâĂglise. Le primat joue un rĂŽle de premier ordre dans lâenregistrement officiel du Syndicat indĂ©pendant des agriculteurs individuels SolidarnoĆÄ. Sans son appui il est fort probable que ce syndicat rural nâaurait jamais vu le jour.
DécÚs et funérailles
Depuis 1977, le primat est gravement malade et la rĂ©surgence de la maladie, en avril 1981, rend impossible ses activitĂ©s. Il cĂ©lĂšbre sa derniĂšre messe le 12 mai 1981. Il demande que les priĂšres Ă son intention soient offertes Ă lâintention du pape Jean Paul II, gravement blessĂ© lors de lâattentat de la place Saint-Pierre Ă Rome le 13 mai. Il offre sa vie Ă Dieu en Ă©change de celle du pape, dont le pronostic vital est encore engagĂ©.
Lâenregistrement de ses derniĂšres paroles est divulguĂ© dans toutes les Ă©glises de Pologne. Le primat dĂ©cĂšde le 28 mai Ă 4 heure 40, Ă la rĂ©sidence des Ă©vĂȘques de Varsovie, rue Miodowa. Quelques jours plus tĂŽt, le pape Jean-Paul II s'Ă©tait rĂ©tabli de son attentat.
Les funĂ©railles du cardinal WyszyĆski ont lieu le 31 mai 1981 et sont une grande manifestation de soutien de la sociĂ©tĂ© polonaise Ă lâĂglise et Ă la personne du dĂ©funt. Plusieurs centaines de milliers de fidĂšles y participent, rendant hommage Ă celui quâon appelle dĂ©sormais: le Primat du MillĂ©naire. Aux cĂ©rĂ©monies funĂ©raires commençant Ă 17 heures, place de la Victoire Ă Varsovie, participent les dĂ©lĂ©gations du Saint-SiĂšge et de la majoritĂ© des Ă©piscopats dâEurope et des Ătats-Unis. Son venus rendre un dernier hommage au primat : le cardinal Agostino Casaroli, secrĂ©taire dâĂtat du Vatican, WĆadysĆaw Rubin, prĂ©fet des CongrĂ©gations de rite oriental, Joseph Höffner, prĂ©sident de la confĂ©rence de lâĂpiscopat allemand, le cardinal Joseph Ratzinger, archevĂȘque mĂ©tropolite de Munich (futur pape BenoĂźt XVI), le cardinal Roger Etchegaray, prĂ©sident de la ConfĂ©rence Ă©piscopale de France, le cardinal Franz König, prĂ©sident de la ConfĂ©rence Ă©piscopale dâAutriche, Laszlo LekaĂŻ primat de Hongrie, le cardinal Joannes Willebrands, primat de Hollande, le cardinal ThomĂĄs Ă Fiaich, primat dâIrlande, le mĂ©tropolite de Prague FrantiĆĄek TomĂĄĆĄek, John KrĂłl, lâarchevĂȘque de Philadelphie, ainsi que lâarchevĂȘque de Chicago, le cardinal John Patrick Cody. Y est aussi prĂ©sente la dĂ©lĂ©gation des plus hautes autoritĂ©s de la Pologne populaire, avec Ă sa tĂȘte Henryk JabĆoĆski, prĂ©sident du Conseil de lâĂtat.
LâInstitut primatial Stefan WyszyĆski
En 1957, le primat lance la fondation de lâInstitut primatial Stefan WyszyĆski, dans le but de sauvegarder lâhĂ©ritage et propager son enseignement. LâInstitut existe jusquâaujourdâhui et joue un rĂŽle clĂ© dans la sauvegarde de la mĂ©moire et des actions du cardinal (on y a Ă©ditĂ© vingt volumes de ses Ćuvres complĂštes). Le primat est aussi le cofondateur, avec Maria OkoĆska, dâun institut laĂŻc pour femmes, mis en place officiellement en 1988, toujours actif, sous le nom dâInstitut du Primat WyszyĆski. Le 3 mai 1994, le primat est dĂ©corĂ© Ă titre posthume de lâOrdre de lâAigle blanc. Le 1 octobre 1999, lâAcadĂ©mie de thĂ©ologie catholique Ă Varsovie porte dĂ©sormais le nom dâUniversitĂ© Stefan KardynaĆ WyszyĆski. Le cardinal est le patron de maintes Ă©coles, aussi bien primaires que secondaire, de deux hĂŽpitaux (Sieradz et ĆomĆŒa) et de diverses fondations et associations sociales. Des rues portent son nom, pour ne citer que lâexemple de Varsovie, oĂč se trouvent deux espaces Stefan WyszyĆski ainsi quâune lâAllĂ©e du Primat du MillĂ©naire. Dans tout le pays on peut retrouver dissĂ©minĂ©s les lieux oĂč on a sauvegardĂ© sa mĂ©moire: Andrzejewo, BachledĂłwka, ChroszczĂłwka Ă Varsovie, CzÄstochowa, KomaĆcza, Prudnik, RywaĆd, Stoczek WarmiĆski, Stryszawa et Zuzela. Le primat a ses statues Ă Lublin (avec Jean Paul II) Ă lâUniversitĂ© catholique de Lublin, Ă ToruĆ, Varsovie (rue Krakowskie PrzedmieĆcie), WĆocĆawek, CzÄstochowa (devant le Sanctuaire marial) et Ă ZÄ bki, ainsi que bon nombre de plaques commĂ©moratives dans toute la Pologne. Des documentaires et films ont Ă©tĂ© tournĂ©s sur la personne du primat WyszyĆski, et on a mĂȘme mis en scĂšne des piĂšces de thĂ©Ăątre.
Vénération
BĂ©atification
EnquĂȘte sur les vertus
Ă l'initiative du pape Jean-Paul II, le procĂšs en bĂ©atification de Stefan WyszyĆski a Ă©tĂ© ouvert le . Le a Ă©tĂ© clĂŽturĂ©e la phase diocĂ©saine du procĂšs en bĂ©atification. Le dossier est ensuite examinĂ© par la CongrĂ©gation pour la Cause des Saints.
Ă la suite de l'avis favorable des diffĂ©rentes commissions sur la saintetĂ© de Stefan Wyszynski, le pape François, reconnaĂźt, le , les vertus hĂ©roĂŻques du cardinal WyszyĆski, lui attribuant ainsi le titre de vĂ©nĂ©rable[9].
Reconnaissance d'un miracle
Ă partir de mars 2012, une enquĂȘte sur une guĂ©rison miraculeuse obtenue par l'intercession du Serviteur de Dieu Stefan WyszyĆski a Ă©tĂ© ouverte[10]. Il s'agirait d'une jeune religieuse de dix-neuf ans guĂ©rie d'un cancer incurable, en 1989[10]. Ă la suite de l'avis favorable des commissions mĂ©dicales[11], le pape François reconnaĂźt authentique cette guĂ©rison dite miraculeuse le , et signe le dĂ©cret de bĂ©atification[12].
Stefan WyszyĆski sera solennellement proclamĂ© bienheureux le 12 septembre 2021, lors d'une messe cĂ©lĂ©brĂ©e au Temple de la Divine Providence de Varsovie par le cardinal Marcello Semeraro. Avec lui, MĂšre Elizabeta Czacka sera Ă©galement Ă©levĂ©e aux honneurs des autels.
Culte
Le bienheureux Stefan WyszyĆski est fĂȘtĂ© le 28 mai, jour de sa "naissance au Ciel". Sa mĂ©moire liturgique est observĂ© par tous les diocĂšses polonais.
Par son poids dans l'histoire récente de la Pologne, il y jouit d'une dévotion fervente. Un grand nombre de pÚlerinages sont organisés sur sa tombe, dans la cathédrale de Varsovie, et de nombreuses statues en son hommage lui sont élevées.
Notes et références
- Prononcer Vychinski
- (pl) Andrzej Micewski, KardynaĆ WyszyĆski, prymas i mÄ ĆŒ stanu, Paris, Editions du Dialogue, , 465 p. (ISBN 2-85316-038-6 et 978-2-85316-038-4, OCLC 9895226, lire en ligne)
- RafaĆ Ćatka et PaweĆ SkibiĆski, « Stefan WyszyĆski », SĆownik biograficzny polskiego katolicyzmu spoĆecznego,â
- (pl) Waldemar Chrostowski, « KardynaĆa Stefana WyszyĆskiego droga do kapĆaĆstwa », sur naszdziennik.pl, (consultĂ© le )
- « Stefan Cardinal WyszyĆski », sur catholic-hierarchy.org (consultĂ© le )
- (pl) Witold Kujawski, « Szkic wĆocĆawskich dziejĂłw Stefana WyszyĆskiego », sur web.diecezja.wloclawek.pl, (consultĂ© le )
- (pl) Florian Kniotek, Zenon Modzelewski et Danuta Szumska, Prymas TysiÄ clecia, Prymas TysiÄ clecia, Ăditions du Dialogue, (OCLC 27130010, lire en ligne)
- Histoire du XXe siĂšcle, Le monde entre guerre et paix, Serge Berstein et Pierre Milza
- (it) « Promulgazione di Decreti della Congregazione delle Cause dei Santi », sur press.vatican.va, (consulté le )
- (pl) Milena Kindziuk, « Kard. WyszyĆski w drodze na oĆtarze », sur niedziela.pl, (consultĂ© le )
- (pl) « O. Bartoszewski: Konsylium lekarskie Kongregacji ds. ĆwiÄtych zatwierdziĆo cud za wstawiennictwem kard. WyszyĆskiego », sur niedziela.pl, (consultĂ© le )
- (it) « Promulgazione di Decreti della Congregazione delle Cause dei Santi », sur press.vatican.va, (consulté le )
Voir aussi
Bibliographie
- Nation Ă©lue et thĂ©ologie de l'histoire dans les lettres pastorales de Mgr WyszyĆski (1901-1981), thĂšse soutenue en 1993 par RĂ©my Kurowsky pour l'obtention du doctorat d'histoire de l'universitĂ© Paris-Sorbonne et du doctorat de thĂ©ologie de l'Institut catholique de Paris. Une biographie dĂ©taillĂ©e de Mgr WyszyĆski est proposĂ©e en introduction.
- Critique thĂ©ologique de la conception de Nation comme sujet ecclĂ©sial - Ă partir des Lettres Pastorales de Mgr WyszyĆski, primat de Pologne de 1948 Ă 1981. RĂ©my Kurowsky, 1997, 23 p.
- La vision de la nation Ă©lue chez Mgr WyszyĆski selon ses lettres pastorales. RĂ©my Kurowsky, Colloque Institut catholique de Paris, , 29 p.
Article connexe
- Square du Cardinal-Wyszynski (Paris)
Liens externes
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