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Soulèvement du curé Matalas en Soule

On appelle soulèvement du curé Matalas la rébellion populaire qui embrase la Soule en 1661 sous le règne de Louis XIV.

Biographie de Matalas

Bernard Goyheneche, Bernard de Goyheneche ou Beñat Goihenetxe, dit Matalas nait à Moncayolle dans les Pyrénées-Atlantiques. On ne connait pas avec précision sa date de naissance. Il meurt à Mauléon-Licharre le .

Il effectue des études sacerdotales à Bordeaux et devient curé de sa localité d'origine.

Causes du soulèvement

En France, les XVe et XVIe siècles avaient vu l'établissement du monopole fiscal au profit du roi, monopole qui se renforça au XVIIe siècle, l'État et le pouvoir royal se confondant. Colbert, contrôleur général des finances, devient l'homme-clé d'un royaume où le roi est le seul à pouvoir décider du montant des impôts et de leur destination[1].

Les provinces du Pays basque français (Labourd, Basse-Navarre et Soule), sont exemptes de la plupart de ces impôts (tels que la taille) du fait de leur statut de pays d'États, mais la pression fiscale centrale s'intensifie.

En 1639, Louis XIII prend possession des terres indivises de Soule, et le silviet, l'assemblée provinciale qui élit le syndic général et a autorité sur la gestion des biens communaux, est alors obligé de s'endetter pour les racheter. En 1661, le roi, sous l'impulsion du comte Arnaud de Trois-Villes qui se porte acquéreur des terres, autorise le recouvrement des dettes de la province sur ses habitants eux-mêmes.

C'est le détonateur de la révolte populaire, qui débute en , en réaction au colbertisme et aux appétits nobiliaires.

Soulèvement armé

La révolte est menée par Bernard de Goyheneche, dit Matalas, curé de Moncayolle (Pyrénées-Atlantiques) d'où il est originaire.

À la tête de 7 000 hommes (estimation du chevalier de Béla[1]), Matalas met sur pied, dès , un contre-gouvernement qui a autorité pour lever des taxes et prendre des mesures judiciaires et économiques.

Malgré une tentative de négociation avec l'administration royale (envoi d'un représentant plénipotentiaire auprès du roi), l'affrontement armé devient inévitable.

Il débute par une victoire des Souletins, aux cris de Herria ! Herria ! (le Peuple ! le Peuple !) à Undurein[2]. Mais, le , les insurgés sont écrasés à Chéraute par la noblesse souletine et les troupes de Bordeaux dirigées, par le capitaine mercenaire Calvo, et Matalas doit prendre la fuite.

Durant la révolte, les rebelles brûlent plusieurs maisons de Chéraute. Ils avaient précédemment assiégé la ville de Mauléon et son château.

Exécution et décapitation de Matalas

Matalas est arrêté le près d'Ordiarp, dans la tour de Jentañe.

Transporté au château de Mauléon, il est condamné à mort par arrêt du Parlement de Bordeaux[1], avec huit autres insurgés[3], et exécuté le de la même année, décapité sur la place centrale de Licharre. Sa tête est accrochée à l'un des canons du château, puis déplacée à l'entrée de la ville où elle restera exposée jusqu'au [2], date à laquelle elle est dérobée pour être enterrée en secret.

De cette révolte, le pouvoir de la noblesse sort renforcé et la démolition des institutions souletines[4] est désormais inéluctable. Dès la fin 1661, le port d'armes à feu est par exemple interdit dans la province (bien qu'il faille attendre le début du siècle suivant pour que cette mesure soit effective).

Matalas fait partie du panthéon basque, figure mythologique d'une opposition au centralisme d'État, et de l'attachement aux symboles culturels locaux.

Jusqu'à 1966 une croix rappelait le lieu de sa mort ; elle disparut lors de la création d'un rond-point routier.

Le poète et l'auteur Etxahun Iruri lui a consacré une pastorale qui a été représentée à Esquiule en 1955.

Pour le nationalisme basque, de nos jours, il suppose la figure d'un héros qui a défendu l'identité et les intérêts des Souletins, de la Soule, et du Pays basque. Ainsi est évoqué par une chanson qui porte son nom :

Matalaz
Basque Traduction (français)
Dolü gabe (bis)

Hiltzen niz

Bizia Xiberuarendako

Emaiten baitüt


Agian, agian, egün batez

Jeikiko dira egiazko ziberotarrak

Egiazko eüskaldünak

Tirano arrotzen ohiltzeko


Eta gure aiten aitek ützi deikien

Lürraren popülüari erremetitzeko

Sans peine (bis)

Je meurs

Car pour la Soule

Je donne ma vie


Espérons, espérons, qu'un jour

Se soulèveront les vrais Souletins

Les vrais Basques

Pour chasser les tyrans étrangers


Et pour remettre au peuple

La terre laissée par nos ancêtres

Bibliographie

  • Jean-Marie Régnier: Histoire de la Soule. Éditions Hitzak, 1991 (ISBN 978-2-908132-05-2)
  • Christian Desplat: Les villageois: Face à la guerre (XIVe-XVIIIe siècle)
  • Emmanuel Le Roy Ladurie: Histoire de France des régions. La périphérie française, des origines à nos jours

Notes et références

  1. Peio Etcheverry-Ainchart, Louis XIV et le Pays basque, Donostia/Baiona i.e. Bayonne, Elkar, , 98 p. (ISBN 978-84-9783-790-3)
  2. Juan Carlos Etxegoien "Xamar" (trad. Fermin Arkotxa Mortalena), Orhipean. Le Pays de la langue Basque [« Orhipean: Gure herria ezagutzen »], Pampelune, Pamiela, , 128 p. (ISBN 8476814763 et 9788476814765, OCLC 470682898)
  3. bien qu'ils aient pu, dans un premier temps, s'enfuir dans les vallées de Roncal et de Salazar, en Espagne.
  4. Expression empruntée à Eugène Goyheneche, Le Pays basque, SNERD Pau 1979
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