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Sonnette (engin)

Une sonnette ou « mùt de battage » ou « machine à battre les palplanches » est un engin de génie civil qui sert à enfoncer par battage les pieux ou les pilotis, servant de fondations aux bùtiments ou aux ouvrages de génie civil, ou les palplanches, assurant l'étanchéité des batardeaux pendant la construction des ouvrages.

Maximilien Luce - Les batteurs de pieux (entre 1902 et 1905)
Battage Ă  la sonnette d'un rideau continu de pieux dans le cadre du rescindement de la Weser, entre 1887 et 1895.

La sonnette porte un outil cylindrique massif appelĂ© « mouton » qui par son poids enfonce le pieu. Par extension, une sonnette est ainsi souvent appelĂ©e mouton particuliĂšrement lorsque l’énergie utilisĂ©e est le diesel. On parle alors de mouton-diesel.

On distingue les sonnettes Ă  tiraudes, manƓuvrĂ©es Ă  la main, les sonnettes Ă  dĂ©clic et les sonnettes manƓuvrĂ©es avec un treuil mĂ©canique actionnĂ© par l'Ă©lectricitĂ©, Ă  la vapeur ou Ă  l'essence.

Étymologie

Le terme « sonnette » est employĂ© dĂšs 1676 par AndrĂ© FĂ©libien dans son Dictionnaire pour dĂ©finir la « machine servant Ă  enfoncer des pilotis ». Il prĂ©cise que Vitruve emploie le terme fistuca pour dĂ©signer « toutes sortes de machines propres Ă  enfoncer des pieux, comme moutons, hies, demoiselles, etc. »[1] Le CNRTL la dĂ©finit comme Ă©tant, dans le domaine du bĂątiment, la « charpente en bois ou en mĂ©tal servant au guidage du mouton dans le battage des pieux » par analogie avec le cordon de la sonnette que l'on tire pour actionner la clochette Ă  distance[2]. On retrouve ce mĂȘme terme employĂ© pour dĂ©crire le fonctionnement d'un soufflet de forge qui, actionnĂ© par la « sonnette » que l'on tire et qui fait remonter lorsqu'on la lĂąche une branloire attirĂ©e par le contre-poids, envoie du vent dans le rĂ©servoir d'air[3]. Dans les trois cas il s'agit d'un mĂ©canisme permettant de produire une action en tirant puis en relĂąchant une ou des cordes.

Histoire

Reconstitution d'une machine de l'époque romaine utilisée lors de la construction du pont sur le Rhin par Jules César en 55 avant Jésus-Christ.
Sonnette Ă  tiraudes
Battage des pieux d'un pont avec une sonnette moderne sur chenille.
Unité universelle de battage de pieux lors de l'exposition "Armée-2021 (ru)"

La sonnette est un outil connu depuis la plus haute antiquitĂ©, de par son fonctionnement simple et Ă©vident, car elle remplaçait les masses manuelles (manipulĂ©es par un seul ouvrier) trop lĂ©gĂšres et inefficaces pour les gros travaux. Ouvrage de charpenterie, elle Ă©tait alors du domaine du charpentier. Les pieux ou pilots en bois Ă©taient frettĂ©s, c'est-Ă -dire renforcĂ©s par un cerclage de fer plat et mince, de forme ronde ou carrĂ©e, Ă  l'endroit de la couronne ou tĂȘte, pour empĂȘcher qu'ils n'Ă©clatassent sous les coups du mouton. On fit trĂšs tĂŽt usage de la sonnette pour la pose des pilotis dans les terrains marĂ©cageux des citĂ©s lacustres ou lagunaires, afin de stabiliser le sol aux endroits destinĂ©s Ă  la construction (immeuble, pont, aqueduc, Ă©cluse, quai , etc.)[4].

Avant l'invention de la machine à vapeur, la remontée du mouton se faisait généralement à la force humaine.

Le mouton national est une masse qui servit en à pilonner la Constitution française de 1791 et la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, le changement de régime de septembre 1792 ayant conduit à l'élaboration d'une nouvelle constitution et d'une déclaration révisée[5] - [6].

Aujourd'hui, la sonnette est toujours en usage, principalement pour la pose de palplanches dans la construction des batardeaux pour assurer l’étanchĂ©itĂ© pendant la mise en Ɠuvre des ouvrages maçonnĂ©s. Sa technique a beaucoup Ă©voluĂ©.

Descriptif

Une sonnette comprend, en général, un systÚme de charpente, le plus léger possible relativement au poids du mouton pour lui offrir un point de suspension assez élevé, et enfin pour le guider, soit dans son ascension, soit dans sa chute et une poutre verticale servant de guide au pieu, appelée jumelle[7]. Dans beaucoup de types de sonnettes, la jumelle peut s'incliner sur le chùssis d'un angle pouvant aller jusque 25° et ce pour le battage de pieux inclinés[8].

Les pieux en bois, gĂ©nĂ©ralement du chĂȘne, Ă©taient taillĂ©s en pointe, durcie au feu. Pour Ă©viter l’éclatement du bois lors de l’impact, la tĂȘte du pieu Ă©tait Ă©quipĂ©e d’un cerclage en acier ou coiffĂ©e d’un casque de battage qui Ă©tait ensuite retirĂ© et montĂ© sur un autre pieu. En principe, le pieu est enfoncĂ© jusqu’à trouver un terrain suffisamment dur pour que le mouton n’ait plus d’effet ; ce qu’on appelle un « pilotis Ă  refus de mouton »[4].

Sonnettes Ă  tiraudes

On appelle ainsi celle oĂč le mouton, attachĂ© Ă  un cĂąble, et soutenu par une poulie placĂ©e au sommet d'un appareil de charpente, est alternativement Ă©levĂ© et abandonnĂ© Ă  sa propre pesanteur au moyen de plusieurs hommes, dont chacun est appliquĂ© Ă  une corde, appelĂ©e tiraude, ces cordes se rĂ©unissant toutes au cĂąble[7].

Il s’agit du procĂ©dĂ© le plus ancien permettant de battre des pieux en bois, dĂ©jĂ  utilisĂ© Ă  l’époque romaine. L’analyse scientifique, et l'amĂ©lioration qui en dĂ©coulera, ne seront toutefois entreprises qu’au XVIIIe.

Pour un mouton d'un masse d’environ 300 kg et une hauteur de chute de 1 Ă  1,20 m, un homme devra fournir un effort de levage de 15 kg[8]. Selon Joseph Mathieu Sganzin (1839) le nombre d'hommes pour le mouvoir doit ĂȘtre tel, que chacun n'ait que 14 Ă  15 kilogrammes Ă  Ă©lever Ă  la hauteur d'un mĂštre trois dixiĂšmes par seconde[9].

Sonnettes à déclic

Les sonnettes Ă  dĂ©clic permettent de manipuler un mouton bien plus lourd qu’avec une sonnette Ă  tiraudes, de l’ordre de 500 Ă  1 000 kg. Les hommes peuvent ĂȘtre remplacĂ©s par des chevaux ou un moteur[7].

Un treuil à engrenage fait élever le mouton jusqu'à une certaine hauteur, puis une détente le lùche alors pour le laisser tomber librement, et ainsi de suite[7], la hauteur de chute pouvant atteindre 3 m[8].

Sonnettes mécaniques

Les sonnettes de base manƓuvrĂ©es au treuil mĂ©canique, actionnĂ© Ă  l'Ă©lectricitĂ©, Ă  la vapeur, Ă  l'essence portent un mouton de 1 500 Ă  2 000 kg et dont la hauteur de chute est de 1 Ă  2 m. Ce systĂšme est naturellement plus rapide et on atteint 50 Ă  100 coups par minute[8].

Sonnette Ă  simple effet

Les sonnettes à vapeur modernes sont basées sur le systÚme de la machine à vapeur. Le mouton est, en fait, un cylindre mobile qui, sous faction de la vapeur, se meut sur la tige du piston. Le poids de ce mouton peut atteindre 10 t ; hauteur de chute : toujours 1 à 2 m[8].

Sonnette Ă  double effet

Le double effet ou trĂ©pideur, consiste toujours Ă  l’emploi d’un vĂ©rin pour actionner la masse sauf que celle-ci est toujours solidaire du vĂ©rin (plus d’emploi de dĂ©clic Ă  sonnette). Le vĂ©rin pneumatique ou hydraulique pousse violemment la masse vers le bas puis la remonte, continuant ainsi un va-et-vient rapide. Le choc sur le pieu est fonction aussi bien de la masse que de la vitesse de descente et de la pression du vĂ©rin[10].

Le poids du mouton est de 1 000 kg environ. Le nombre de coups est beaucoup plus Ă©levĂ© : 250 Ă  1 000 coups par minute. Avec ce type de sonnette, le pieu est toujours en Ă©tat de vibration. En effet, la frĂ©quence de battage est trop rapide pour que le terrain puisse absorber un choc avant que le suivant se produise[8].

Vibrateur

Un vibrateur industriel est un systĂšme mĂ©canique, engendrant des vibrations soit Ă  l'aide d'un mĂ©canisme rotatif, linĂ©aire ou Ă©lectromagnĂ©tique. Ce type de mouton, suspendu Ă  l’élingue d’une grue, fait appel au systĂšme de vibrofonçage fondĂ© sur l’action de vibrations engendrĂ©es par des masselottes excentrĂ©es tournant Ă  grande vitesse sur un axe. Ces vibrations sont transmises Ă  l’objet en contact, et par celui-ci au sol mĂȘme. Ce systĂšme Ă  effet direct sur la nature du terrain permet non seulement d’enfoncer les objets (palplanche, tube, etc.), mais Ă©galement de les retirer du sol une fois le travail accompli. De plus, le mouton vibrateur Ă  l’avantage d’ĂȘtre relativement silencieux par rapport aux autres systĂšmes.

Notes et références

  1. André Félibien, Des Principes de l'architecture, de la sculpture, de la peinture et des autres arts qui en dépendent. Avec un dictionnaire des termes propres à chacun de ces arts, Paris, J.-B. Coignard, 1676, 795 p., notice bibliographique de la BnF n° FRBNF30425296, lire en ligne sur Gallica p. 740.
  2. « Sonnette », TLFI, CNRTL (lire en ligne).
  3. Alexandre-Édouard Baudrimont (1806-1880), Dictionnaire de l'industrie manufacturiùre, commerciale et agricole, Meline, Cans et Cie, 1840 (lire en ligne p. 413).
  4. PlanÚte TP, « Pieux battus », sur planete-tp.com.
  5. « Convention : notice no 16 », sur Archim, Archives nationales.
  6. « Convention : notice no 19 », sur Archim, Archives nationales.
  7. J. A. Borgnis (1823) p. 248.
  8. Carl Nachtergal (1988) p. 167.
  9. Joseph Mathieu Sganzin (1839), p. 163.
  10. « Noise mitigation for the construction of increasingly large offshore wind turbines », Federal Agency for Nature Conservation,

Voir aussi

Bibliographie

  • Giuseppe Antonio Borgnis, TraitĂ© complet de mĂ©canique appliquĂ©e aux arts, Paris, Bachelier,
  • Joseph Mathieu Sganzin, Programme ou rĂ©sumĂ© des leçons d'un cours de construction, Bruxelles, Hauman et Cie, (lire en ligne)
  • Carl Nachtergal, Agenda du bĂątiment : Ă  l'usage des ingĂ©nieurs, architectes, dessinateurs, Bruxelles, de Boeck – Wesmael, (ISBN 2-8041-1085-0, lire en ligne)

Sitographie

  • « Sonnette » sur le site de l'Association pour la connaissance des travaux publics (ASCO-TP) planete-tp.com

Articles connexes

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