Sonagraphe
Un sonagraphe est un instrument permettant de reprĂ©senter les sons sur un diagramme appelĂ© sonagramme, oĂč l'axe horizontal reprĂ©sente le temps, l'axe vertical des fines bandes de frĂ©quence, et la couleur la puissance.
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Problématiques
Temps et fréquences
On peut calculer, pour un échantillon sonore, un spectre d'autant plus précis que sa durée est grande[1]. Mais plus un son dure, plus ses caractÚres ont de chances de changer, et plus son spectre représente une moyenne de ses caractéristiques.
Pour dĂ©crire convenablement un son rĂ©el par son spectre il faut donc un compromis entre la prĂ©cision avec laquelle on connaĂźt le moment oĂč un Ă©vĂ©nement sonore survient, qu'on appelle rĂ©solution temporelle, et le degrĂ© de dĂ©tail avec lequel on connaĂźt les frĂ©quences qui sont prĂ©sentes, appelĂ©e rĂ©solution frĂ©quentielle[2].
Limités à l'origine par la difficulté de réaliser en électronique analogique des filtres, dont la théorie était d'ailleurs à ses débuts, les sonagraphes sont aujourd'hui intégrés dans des logiciels d'analyse du son. Les machines sont suffisamment puissantes pour laisser l'utilisateur déterminer le compromis entre résolution temporelle et résolution fréquentielle.
Ăchelles linĂ©aires et Ă©chelles logarithmiques
L'échelle du temps est toujours linéaire.
Les premiers sonagrammes prĂ©sentaient les bandes de frĂ©quences avec une Ă©chelle linĂ©aire. Cette prĂ©sentation prĂ©sente l'avantage de mettre en Ă©vidence les partiels harmoniques, carastĂ©riquement placĂ©s Ă intervalles rĂ©guliers sur l'Ă©chelle des frĂ©quences, puisque leurs frĂ©quences sont des multiples d'une mĂȘme frĂ©quence fondamentale. C'est aussi le rĂ©sultat direct du calcul par transformĂ©e de Fourier rapide avec fenĂȘtrage glissant qu'effectuent appareils numĂ©riques et logiciels. Ces appareils peuvent aussi afficher les rĂ©sultats sur un graphe en Ă©chelle logarithmique, qui reflĂšte la perception humaine de la hauteur tonale des sons.
L'échelle des puissances se limitait, au début, à un seuil de puissance, au-delà duquel la trace était noire. Le sonagramme donnait une image au trait. Pour obtenir une forme expressive, le réglage du seuil était assez difficile. Les sonagraphes ont ensuite produit des images demi-teintes, dans lesquelles le niveau de gris représente la puissance. Si la relation entre gris et puissance est linéaire, le réglage reste délicat, à cause de la grande différence entre les sons audibles les plus faibles et les plus forts. On souhaite différencier les partiels d'un son selon leur puissance, tout en conservant un contraste suffisant pour une image caractéristique. La perception de la puissance sonore est, elle, plus proche d'une échelle logarithmique. Les sonagraphes modernes offrent la possibilité de transposer l'échelle de gris en pseudo-couleur par une table de correspondance.
Histoire
Issu de recherches sur la parole, le sonagraphe fut créé en 1941 dans les laboratoires de la compagnie de téléphone Bell (Bell Laboratories) par une équipe dirigée par Ralph K. Potter. Classé secret pendant la guerre, le spectromÚtre sonore ((en) Sound spectrometer) fit l'objet de publications dÚs [3].
L'instrument établissait un sonagramme d'un son d'environ 1,5 s, enregistré et rejoué plusieurs dizaines de fois à travers un filtre variable, qui permettait d'enregistrer l'intensité de 176 étroites plages de fréquences de bande passante 45 Hz en mode « étroit », ou 26 bandes de 300 Hz en mode « large », espacées également de 80 à 8 000 Hz, sur un cylindre couvert de papier sensible[4]. L'établissement du spectre complet prenait quelques minutes.
Dans les années 1960, Lawrence Kersta, devenu expert en analyse de sonagrammes pour l'identification judiciaire des voix[5], fut un des promoteurs de l'instrument pour cet usage. Ce débouché relança l'amélioration et la diffusion de l'instrument.
Importance pour la recherche
Le sonagraphe fut l'instrument le plus important pour appréhender la visualition de la décomposition du spectre sonore.
Seul le sonagraphe, appareil de représentation graphique de la totalité des dimensions du phénomÚne sonore (temps - fréquence - amplitude) permettait de suivre un spectre évolutif, c'est-à -dire dont l'intensité de chaque partiel varie dans le temps.
Cet instrument de transcription visuelle de la « rĂ©alitĂ© » sonore a donc fourni les Ă©lĂ©ments dâune expĂ©rimentation acoustique plus aguerrie Ă la prise en compte de la dimension temporelle[6].
Voir aussi
Articles connexes
Liens externes
Bibliographie
- Bernard Caillaud et Mireille Leriche, « Analyse sonagraphique et Aspects de la PhonĂ©tique appliquĂ©e », Revue de l'EPI,â (lire en ligne)
- langue anglaise
- (en) W. Koenig, H. K. Dunn et L. Y. Lacy, « The Sound Spectrograph », J. Acoust. Soc. Am., vol. 18, no 19,â (lire en ligne).
Notes et références
- (en) Dennis Gabor, « Theory of communication : Part 1: The analysis of information », Journal of the Institute of Electrical Engineering, London, vol. 93-3, no 26,â , p. 429-457 (lire en ligne, consultĂ© le )
- Caillaud et Leriche 1999, p. 59.
- IEEE : Liste d'inventions ; R.K. Potter, "Visible patterns of sound", Science, 9 novembre 1945 ; Koenig, Dunn et Lacy 1946; Potter, Kopp and Green, Visible Speech, 1947, 2.e édition corrigée 1966.
- Musée Albert Michotte, loc. cit.
- PossibilitĂ© contestĂ©e devant les tribunaux : (en) Richard H. Bolt, Franklin S. Cooper, Edward E. Jr David, Peter B. Denes, James M. Pickett et Kenneth N. Stevens, « Speaker identification by speech spectrograms: A scientists' view of its reliability for legal purposes », Journal of the Acoustical Society of America, vol. 47, no 2,â , p. 597-612 (lire en ligne) prĂ©sente une Ă©valuation globalement nĂ©gative par un comitĂ© d'experts.
- Par exemple, Ămile Leipp et Abraham A. Moles, « Lâemploi du sonagraphe dans la dĂ©termination de la qualitĂ© des instruments a cordes », Annales des TĂ©lĂ©communications, vol. 14, nos 5-6,â , p. 135-142 (lire en ligne) ; VÄn KhĂȘ Tran, « L'utilisation du sonographe dans l'Ă©tude du rythme », Revue de Musicologie, Paris, SociĂ©tĂ© Française de Musicologie, t. 54, no 2,â , p. 222-232 (lire en ligne).