Harmonique (musique)
En acoustique musicale, un partiel harmonique (ou, plus simplement, un harmonique) est une composante d’un son périodique, dont la fréquence est un multiple entier d'une fréquence fondamentale[1].
Si on appelle « ƒ » la fréquence fondamentale, les partiels harmoniques ont des fréquences égales à : ƒ, 2ƒ, 3ƒ, 4ƒ, 5ƒ, etc.
En prenant comme note fondamentale le la3 du piano (440 Hz), les harmoniques ont des fréquences multiples de 440 :
- l'harmonique de rang 1 est la fondamentale, Ã 440 Hz,
- l'harmonique de rang 2 est à 440 × 2 = 880 Hz,
- celle de rang 3 à 440 × 3 = 1 320 Hz, etc.
Dans une conception traditionnelle du « son musical », le son musical est périodique, c'est-à -dire que ses partiels sont harmoniques ; les sons non harmoniques étaient décrits comme des « bruits »[2]. Dans les musiques d'aujourd'hui, tout son peut être considéré comme musical dans un contexte approprié[3]. La fondamentale d'un son périodique détermine la hauteur perçue, la puissance relative des partiels harmoniques de rangs supérieurs influe, avec des caractères dynamiques, sur le timbre.
En musique on appelle « harmoniques » les sons qu'on obtient, sur les instruments à cordes, en forçant la vibration d'une corde à un mode supérieur à son mode fondamental. Par exemple, en effleurant la corde au tiers de sa longueur, on empêche son déplacement latéral à cet endroit, tout en la laissant osciller autour de ce point fixe, créant un nœud qui l'oblige à vibrer à une fréquence triple de celle qu'elle aurait, libre. Le son ainsi produit se trouve à un intervalle de douzième — une octave plus une quinte — avec celui de la corde libre, tout comme le partiel harmonique de rang 3.
L'adjectif « harmonique » est aussi utilisé pour désigner, par opposition aux éléments de la mélodie, ceux appartenant à l'harmonie (par exemple, dans l'expression « intervalle harmonique », qui désigne un intervalle entre deux sons émis simultanément).
Timbre
À hauteur (donc fréquence) identique, les sons émis par deux instruments différents (par exemple un violon et une flûte) ne sonnent pas de la même manière. Chacun se caractérise par ce qu’on appelle son timbre, qui permet de l’identifier[4]. Cela traduit le fait qu’aucun son réel n’est simple : il résulte de la combinaison de sons partiels. La fréquence d'ensemble de ceux-ci détermine la note de musique que l'on perçoit (voir Fondamentale absente) et leur évolution au cours de l'émission de la note déterminent son timbre.
Les sons produits par les instruments à vibration entretenue, dont la vibration est soutenue par un apport constant d'énergie, par exemple par le frottement de l'archet pour les instruments à cordes, ou par un souffle constant pour l'orgue ou les autres instruments à vent, contiennent de nombreux harmoniques, alors que d'autres instruments comme les percussions émettent des fréquences inharmoniques (2,576ƒ, 5,404ƒ... par exemple pour un triangle). De plus, chaque harmonique possède une intensité relative par rapport aux autres. Le spectre harmonique révèle ainsi l’ensemble des fréquences qui déterminent le timbre de chaque instrument.
Les harmoniques
La fréquence fondamentale est celle du premier partiel harmonique du son considéré, que l’on désigne comme harmonique 1 ou harmonique fondamental. La note que l’on perçoit correspond à cet harmonique, même s'il est absent du spectre sonore[5]. Certains sons peuvent cependant tromper l’oreille, un harmonique aigu pouvant s’entendre plus que la fondamentale et la cacher.
Les harmoniques d’une note, forcément plus aigus que cette note, sont souvent appelés harmoniques supérieurs[6] par opposition à la théorie des harmoniques inférieurs avancée par certains théoriciens de la musique, et systématisée dans le dualisme harmonique développé par Hauptmann, Oettingen (de) et Riemann.
Le tableau des fréquences de notes ci-dessous indique une correspondance entre les fréquences harmoniques d’une note et les notes qui s’accordent en consonance avec la fondamentale. Ainsi par exemple pour la note do, les notes constituant des intervalles consonants avec elle sont mi (la tierce), sol (la quinte), si (la septième), do (l’octave), ré (la neuvième), etc. La raison en est qu'un nombre élevé des harmoniques supérieurs de ces notes consonances sont aussi des harmoniques de la fondamentale : la consonance se définit alors par la concordance entre les harmoniques.
Les harmoniques d’une note sont donnés par les fréquences multiples de la fondamentale. Ainsi pour do à 32,7 Hz noté do−1, les harmoniques sont :
Harmonique | 1 | 2 | 3 | 4 | 5 | 6 | 7 | 8 | 9 | 10 | 11 | 12 | 13 | 14 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Fréquence (Hz) | 32,7 | 65,4 | 98,1 | 130,8 | 163.5 | 196,2 | 228,9 | 261,6 | 294,3 | 327 | 359,7 | 392,4 | 425,4 | 457,5 |
Noteoctave de la gamme la plus proche | do−1 | do1 | sol1 | do2 | mi2 | sol2 | si2 | do3 | ré3 | mi3 | fa3 | sol3 | sol3 | la3 |
Écart à la note la plus proche dans la gamme de tempérament égal (cents) | 0 | 0 | 2 | 0 | -14 | 2 | -31 | 0 | 4 | -14 | -49 | 2 | 41 | -31 |
Intervalle avec la fondamentale (cents) | 0 | 1200 | 1902 | 2400 | 2786 | 3102 | 3369 | 3600 | 3804 | 3986 | 4151 | 4302 | 4440 | 4569 |
N.B. : les 7e et 11e harmoniques n'ont été utilisées dans l'histoire récente de la musique occidentale que dans les musiques microtonales ou les musiques spectrales.
L’image ci-dessous indique les harmoniques du do1 sur une portée et précise par les flèches et les chiffres (en cents) l’écart de hauteur entre chacun des 16 premiers harmoniques et la note la plus proche dans la gamme tempérée. Considérant que le demi-ton (du tempérament égal) fait 100 cents, la déviation de 31 cents de l'harmonique 7 (écrite la dans l'exemple ci-dessous) la situe environ un tiers de demi ton plus bas que la septième mineure tempérée (si ) et la déviation de 49 cents de l'harmonique 11 est quasiment à mi-chemin entre deux notes existantes (fa et fa ), c’est-à -dire un quart de ton : c'est la raison pourquoi elles ont eu peu d'usage dans la musique classique.
Les écarts des harmoniques avec les notes de la gamme tempérée se retrouvent quelle que soit la note fondamentale et sont propres au rang de l'harmonique.
Applications instrumentales
Fichiers audio | |
Harmoniques d'un violon | |
Harmoniques naturels de rangs 2, 3, 4, 5 et 6, joués sur la corde de la d'un violon | |
16 premiers harmoniques | |
Écouter la série des 16 premiers harmoniques (en gamme tempérée, donc très approximative... et tout à fait fausse dans les six dernières notes) | |
Des difficultés à utiliser ces médias ? | |
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- Sur un piano, enfoncer doucement la pédale et faire résonner une note, permet de les écouter lorsque l’intensité sonore diminue : les cordes correspondant aux harmoniques vibrent par sympathie ; la série indiquée ci-dessus est alors relativement audible.
- C’est le bon ajustement des harmoniques de deux notes entendues simultanément qui validera la consonance de l’intervalle ou de l’accord entendu. On retrouve bien les raisons pour lesquelles un accord est parfait (do-mi-sol = 4-5-6) : les harmoniques des notes de l’accord sont en concordance avec les harmoniques de la fondamentale.
- Sur les instruments à cordes, on peut faire entendre un son harmonique en effleurant d’un doigt une division entière de la corde. Ci-contre, les divisions correspondant à la fondamentale F (corde à vide) et aux trois premiers harmoniques, et la façon de noter une note ainsi jouée.
Annexes
Grammaire
Harmonique est à l'origine un adjectif qualifiant des grandeurs qui sont multiples d'une même valeur, dite fondamentale. Dans l'étude des vibrations, les partiels qui ne sont pas harmoniques sont dits inharmoniques. Seuls les partiels harmoniques contribuent à l'identification de la note de musique.
Employé comme substantif, il remplace l'expression « partiel harmonique ». Il est par conséquent, comme partiel, du genre masculin.
Si, dans un discours, on utilisait harmonique comme substantif pour remplacer « note harmonique » ou « division harmonique », il serait du genre féminin, comme les substantifs de l'expression à laquelle il se substituerait.
Par contamination du substantif féminin harmonie, il s'emploie aussi au féminin[7].
Bibliographie
- Patrice Bailhache, Antonia Soulez et Céline Vautrin, Helmholtz du son à la musique, Paris, Librairie philosophique J. Vrin, , 253 p. (ISBN 978-2-7116-2337-2, lire en ligne)
- Philippe Gouttenoire et Jean-Philippe Guye, Vocabulaire pratique d'analyse musicale, Delatour france, , 128 p. (ISBN 978-2-7521-0020-7)
- André Calvet, Le Clavier Bien Obtempéré. Essai de Tempéramentologie, Montpellier, Piano e forte éditions, , 470 p.
Articles connexes
Liens externes
Notes et références
- Gouttenoire 2006, p. 60
- « Musical sounds are the result of rapid and periodic vibrations of the air. Slow vibrations do not affect the auditory nerve; irregular or unperiodic vibrations produce noise, not music ». Henry C. Banister, Music. Londres, Bell and Daldy, 1873, p. 1.
- Voir Musique bruitiste
- L'ASA (American Standard Association) définit le timbre comme « cet attribut de la sensation auditive qui permet à un auditeur de juger que deux sons présentés de manière semblable, avec la même intensité et la même hauteur, sont différents ». Acoustical Terminology, New York, ASA, 1960, Définition 12.9. – timbre
- Laurent Demany, « Perception de la hauteur tonale », dans Botte & alii, Psychoacoustique et perception auditive, Paris, Tec & Doc, , p. 58-58 ; voir aussi Fréquence fondamentale#Cas de la fondamentale absente.
- Bailhache 2011, p. 72
- par exemple dans Richard Taillet, Loïc Villain et Pascal Febvre, Dictionnaire de physique, Bruxelles, De Boeck, , p. 328 « Harmonique ».