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Sergueï Chtchoukine

Sergueï Ivanovitch Chtchoukine (en russe : Сергей Иванович Щукин), né le 24 juin 1854 ( dans le calendrier grégorien)[1] à Moscou et mort le à Paris, est un homme d’affaires russe et collectionneur d'art moderne[2].

Sergueï Chtchoukine
Dimitri Melnikov, Portrait de Chtchoukine (1915).
Biographie
Naissance
Décès
Sépulture
Nom dans la langue maternelle
Сергей Щукин
Nationalité
Activités
Famille
Famille Chtchoukine (d)
Père
Ivan Vassilievitch Chtchoukine (en)
Mère
Ekaterina Petrovna Shchukina (d)
Fratrie
Piotr Chtchoukine (en)
Dmitri Ivanovitch Chtchoukine (d)
Ivan Chtchoukine
Enfant
Ivan Stchoukine (d)
Vue de la sépulture.

Biographie

Premières années

Sergueï Chtchoukine, comme l'autre grand collectionneur russe d'art moderne Ivan Morozov, est issu d'une lignée de marchands vieux-croyants installée à Moscou.

Son père, Ivan Vassilievitch Chtchoukine, est le fondateur de la firme de négoce en textiles I.V. Chtchoukine et Fils, marié à Ekaterina Petrovna Botkine, provenant elle-aussi d'une grande famille de marchands de Moscou qui avait fait fortune dans le commerce du thé. Ivan Vassilievitch renoncera discrètement à la Vieille Foi, il aura dix enfants, dont trois autres fils collectionneurs :

  • Piotr (grand collectionneur d'antiquités russes et orientales fondera un musée portant son nom),
  • Dimitri (collectionneur de petits maîtres hollandais, italiens ou français)
  • Ivan (bibliophile, collectionneur de peintres impressionnistes français, puis de classiques espagnols, s'installe à Paris où il tient un salon fréquenté par l'émigration russe).

Sergueï Chtchoukine est envoyé comme ses frères étudier l'industrie textile en Allemagne, à l'école de commerce de Gera en Thuringe. À son retour, il se révélera le plus doué des frères et prendra la succession de son père à la mort de celui-ci en 1890, à la tête de « I. V. Chtchoukine & Fils ». Actionnaire de nombreuses manufactures, banques, compagnies d'assurance, il est surnommé le « ministre du Commerce » de Moscou.

Il épouse en 1884 Lydia Grigorievna Koreneva, une des plus jolies femmes de Moscou, fille du président du comité directeur des Mines du Donbass. À l'occasion de la naissance de son premier fils Ivan en 1886, le père Ivan Vassilievtich fait donation au jeune couple du palais moscovite situé à deux pas de la cathédrale du Christ-Sauveur, acquis de la veuve ruinée d'un des princes Troubetskoï, grande famille noble libérale.

Lydia Grigorievna donne encore naissance à deux autres fils Grigori et Sergueï et, en 1890, à une fille, Ekaterina.

Consolidant sa position et sa fortune, devenu une figure du tout-Moscou, célèbre par les fêtes et les concerts que le couple donne en son palais, Chtchoukine se tourne assez tard vers la collection, domaine où ses frères l'ont largement précédé.

Le Collectionneur

Sous l'influence de son jeune frère Ivan, installé à Paris où il tient un salon brillant où se presse toute l'émigration russe, Sergueï Chtchoukine se tourne vers les peintres français, principalement impressionnistes et postimpressionnistes.

Il acquiert en 1898 son premier Monet : Les Rochers à Belle-Île, (il en possédera 13), il achètera à la même époque des œuvres de Moret, Forain, Degas, Toulouse-Lautrec, Maurice Denis, Pissaro, Renoir, Cottet, Simon, Puvis de Chavannes. Cette collection raffinée lui vaut vite un certain renom dans les milieux culturels et artistiques.

En 1903-1904 il commence à faire des choix plus hardis : Paul Cézanne (Mardi gras, le Fumeur de pipe accoudé, etc.), Vincent van Gogh, Paul Gauguin. Ces tableaux vont constituer la base de sa collection d'avant-garde.

Chtchoukine se passionne pour Henri Matisse, chef de file encensé et honni des fauves qui font sensation au Salon d'automne de 1905; ce dernier crée spécialement pour lui en 1909-1910 deux panneaux décoratifs pour l'escalier de son palais : La Danse et La Musique.

Sa collection exhibe aussi cinquante œuvres majeures de Picasso, comprenant des tableaux marquants du début du cubisme tels que les Trois femmes, des natures mortes et des paysages, ainsi que des pièces-maîtresses des périodes bleue et rose.

À partir de 1908, Chtchoukine ouvre au public ses collections tous les dimanches, permettant ainsi aux Moscovites de découvrir les peintres d'avant-garde français.

Le musée

Après la révolution d'octobre de 1917, la collection Chtchoukine est nationalisée par un décret de Lénine du après que Chtchoukine a émigré en août 1918 en Allemagne, puis renommée en musée de la peinture occidentale moderne no 1, ou MNZj1.

Le gouvernement installe dans l'ancien hôtel particulier de Chtchoukine l'un des premiers musées de peinture moderne au monde, qui ouvre ses portes au public en , sa conservatrice est sa fille, Ekaterina Keller, qui émigrera en 1922.

En 1928, la collection rejoint l'autre branche du musée ou MNZj2, constituée par la collection d'Ivan Morozov qui avait ouvert en 1919 dans l'hôtel particulier de ce dernier, et prend le nom de Musée national d'Art moderne occidental (GMNZI), sous la direction du sculpteur et historien Boris Mikhaïlovitch Tsernovetz, avec environ huit cents œuvres.

Chtchoukine s'est installé en France, à Nice, puis à partir de 1920 à Paris où il meurt en 1936.

En 1948, sa collection est victime des campagnes staliniennes contre l'art bourgeois dit formaliste : le musée d'art moderne est « liquidé » et ses collections partagées entre le musée Pouchkine à Moscou et celui de l'Ermitage à Leningrad.

Après la mort de Staline (1953) les œuvres réapparaissent progressivement pour devenir aujourd'hui l'un des trésors des musées russes.

Après la perestroïka, les historiens commençant à découvrir les collectionneurs derrière les collections, l'audace et l'intuition de Chtchoukine, l'homme aux trente-huit Matisse et aux cinquante Picasso, sont enfin reconnues.

Collection

Les artistes

La collection Chtchoukine réunit les œuvres de 64 peintres (et 13 artistes africains et asiatiques). Parmi ces œuvres, on compte sept Rousseau, huit Cézanne, neuf Marquet, 13 Monet, 16 Derain, 16 Gauguin, 38 Matisse et 50 Picasso[3].

Quelques œuvres

Les œuvres de la collection Chtchoukine représentent des natures mortes[4], des personnages, des portraits et des paysages. Elles sont de styles variés, en majorité cubiste, décoratif, fauve, impressionniste[5], naïf ou réaliste.

Postérité

Sépulture de Chtchoukine au cimetière de Montmartre.

Irina Antonova, directrice du musée Pouchkine, fit un jour cette réflexion à propos de Chtchoukine :

« Il commença une collection d’un art impopulaire rejeté par le Louvre et d’autres musées. C’était son goût personnel. Peut-être ressentait-il les événements qui allaient changer le monde. Un collectionneur pareil ne pouvait apparaître que dans un pays qui attendait une révolution. Il collectionna l’art qui préfigura l’ensemble des cataclysmes »

— Cf.

.

Expositions

Notes et références

  1. La date de naissance a donné lieu à des erreurs, mais le certificat de naissance conservé au musée Pouchkine indique bien le 24 juin 1854 (calendrier julien, alors en retard de 12 jours sur le calendrier grégorien). Les sources erronées antérieures donnaient :
  2. « L'histoire de Sergueï Chtchoukine - Collection Chtchoukine », Collection Chtchoukine, (lire en ligne, consulté le ).
  3. « Les artistes de la Collection Chtchoukine », Collection Chtchoukine, (lire en ligne, consulté le )
  4. « Les natures mortes de la Collection Chtchoukine », Collection Chtchoukine, (lire en ligne, consulté le )
  5. « L'impressionnisme dans la Collection Chtchoukine », Collection Chtchoukine, (lire en ligne, consulté le )
  6. Icônes de l’art moderne. La collection Chtchoukine.

Voir aussi

Sources

  • Natalia Semenova et André Delocque, Chtchoukine. Le patron de l'art moderne.

Bibliographie

  • (de) Albert Kostenewitsch, « Russische Sammler französischer Kunst. Die Familienclans der Schtschukin und Morosow », in Morosow und Schtschukin - die russischen Sammler. Monet bis Picasso, [catalogue de l'exposition]), Cologne, Éd. DuMont, 1993, pp. 35–150, dont pp. 36-83 : « Die Schtschukins » (ISBN 3-7701-3144-4).
  • Natalia Semenova et André Delocque, Chtchoukine. Le patron de l'art moderne, Paris, éd. La Collection Chtchoukine, 2016, 400 p. (ISBN 978-2-7466-9352-4).
  • Icônes de l'Art moderne. La Collection Chtchoukine, Paris, Éd. Gallimard/Fondation Louis Vuitton, 2016, 478 p. (ISBN 978-2-07-269273-4).
    Catalogue de l'exposition de la Fondation Louis Vuitton sous la direction d'Anne Baldassari.

Liens externes

Articles connexes

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