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Riziculture en Camargue

La riziculture en Camargue, connue dès le XIIIe siècle a été développée par Henri IV. Après plusieurs tentatives au début du XXe siècle, la culture du riz a redémarré en 1942. Aujourd’hui, le produit emblématique en est le riz rouge de Camargue, résultant d’une mutation naturelle.

Historique

Premières tentatives

Rizière de Camargue à Aigues-Mortes
Variétés de riz de Camargue

Du XIIIe au XVIe siècle la riziculture ne cesse d’augmenter en Provence et surtout en Camargue. C’est à Henri IV que l’on doit la culture de riz en Camargue dès la fin du XVIe siècle, où il ordonna sa production, ainsi que celle de la canne à sucre et de la garance[1].

On disait alors que « le riz adoucissait et tempérait l'acreté du sang, reconstituait les étiques et pulmoniques ». Mais consommé chaud, il avait la réputation d'affaiblir la vue et de conduire à la cécité[1].

Dans les années 1840, les rizières vont être très utiles pour absorber l’eau des grandes crues du Rhône qui est à proximité, ainsi que pour dessaler les terres[2] - [3]. Grâce à cela, les terres vont être utilisées pour la culture des vignes. Au début du XXe siècle, la riziculture couvrait en Camargue 800 hectares[1]. Les agronomes avaient mis en exergue que la terre et le climat lui étaient très favorables, en effet, ce dernier profite d'une amplitude thermique plutôt réduite. Entre 1840 et 1913, plusieurs centaines d'hectares de rizières sont enregistrés[2]. À cette époque, le riz n'est pas récolté, ou alors pour servir de nourriture aux cochons[2]. La dernière rizière de cette époque disparaît en 1939[2].

Relevés à Arles Température : Tour de Valat/Pluie : Arènes
MoisJanvFévMarsAvrMaiJuinJuilAoûtSeptOctNovDécAnnée
Températures maximales moyennes (°C) 11 12 16 18 23 27 31 30 26 20 14 11 20
Températures minimales moyennes (°C) 3 4 6 8 12 16 19 19 15 12 7 4 10,5
Précipitations totales (mm) 56 33 23 49 36 31 27 34 66 70 58 41 524

Extension dans la seconde moitié du XXe siècle

La riziculture connait un développement important à partir de 1941, corrélé à une augmentation de la population du moustique Culex modestus, vecteur de la fièvre du Nil occidental[3].

Travailleurs indochinois (1942-1946)

Ouvriers agricoles indochinois travaillant dans une rizière de Camargue

Entre et , l’État français fait venir 20 000 travailleurs indochinois dans les usines d’armement[3]; une petite partie est volontaire, mais la grande majoritĂ© est dĂ©signĂ©e par les chefs de village respectant les quotas imposĂ©s par le gouverneur[2]. Ceux-ci ne touchent souvent aucun salaire[3]. En 1941, craignant la pĂ©nurie alimentaire, Henri Maux dĂ©cide de relancer la riziculture en Camargue : Ă  partir de l'automne 1941, 125 personnes indochinoises y travaillent, dans les exploitations de Pierre du Lac ou Edmont Clauzel[2]. L'accord entre l'État et les propriĂ©taires est le suivant : l'État fourni la main-d'Ĺ“uvre deux fois moins chère que les ouvriers agricoles italiens ou espagnols ainsi que les semences ; les propriĂ©taires fournissent le terrain et vendent l'ensemble de la production au Ravitaillement gĂ©nĂ©ral, Ă  un prix fixĂ©[2]. La première rĂ©colte d' est un succès (250 tonnes de paddy, soit 125 tonnes de riz consommable, pour 250 hectares de rizières), malgrĂ© l'immense travail que les sols, dĂ©laissĂ©s depuis des annĂ©es, nĂ©cessitaient[2] - [1]. En 1943, les rĂ©coltes ont doublĂ© et 500 hommes y travaillent ; une Ă©quipe de France ActualitĂ©s rĂ©alise un reportage sur ces rĂ©coltes, diffusĂ© dans les cinĂ©mas le [2]. Une partie de la production est vendue au marchĂ© noir par les propriĂ©taires[3], oĂą il s'Ă©change dix fois le prix fixĂ© par l'État[2]. MalgrĂ© la fin de la guerre, la rĂ©colte de 1946 est encore le fait des travailleurs d'Indochine, oĂą sont rĂ©coltĂ©es 1 900 tonnes de paddy pour 1 000 hectares de culture[2]. Les derniers retournent dans leur pays en 1952[4].

MĂ©canisation

Mais il faut attendre l’endiguement du RhĂ´ne, qui a permis l’apport d’eau douce Ă  la fin du XIXe siècle, puis le plan Marshall, qui a financĂ© d’importantes infrastructures hydrauliques, pour voir apparaĂ®tre une riziculture intensive. L’eau est pompĂ©e dans le RhĂ´ne puis envoyĂ©e dans de grands canaux, vers quelques propriĂ©tĂ©s qui partagent les frais d’entretien. Elle est ensuite distribuĂ©e par d’innombrables petits canaux - les « porteaux » - aux rizières. Il est nĂ©cessaire d'utiliser de 30 000 Ă  50 000 m3 d'eau par hectare afin d’éviter les remontĂ©es de sel[1]. Sans ce vaste rĂ©seau d’eau affectĂ© Ă  la riziculture, qui profite aussi aux Ă©tangs et aux marais, l'Ă©cosystème camarguais serait sans doute très diffĂ©rent en raison de la salinitĂ© importante des sols. En 1958, les rizières s'Ă©tendaient sur 30 000 hectares[3], produisaient 141 000 tonnes de riz pour un rendement moyen de 10 quintaux Ă  l'hectare. Les riziculteurs, au nombre de 2 000, cultivaient des parcelles d'une moyenne de 25 hectares et pompaient, chaque annĂ©e entre 900 000 et 1 200 000 m3 d'eau dans le RhĂ´ne[1]. Au cours des annĂ©es 1960, les riziculteurs commencèrent Ă  mĂ©caniser plantation et rĂ©colte. Sur 100 hectares cultivĂ©s, on comptabilisait une moyenne de 14 tracteurs et de 4 moissonneuses-lieuses[1].

L'introduction de Chilo suppressalis en 1970 porte un coup Ă  la riziculture camarguaise qui devient moins compĂ©titive[3]. Le minimum de surface exploitĂ©e est atteint avec 4 400 ha en 1981, annĂ©e oĂą est mis en place un plan de soutien[3].

Production

RĂ©colte du riz en Camargue
Usine Sud-Céréales, pour le conditionnement du riz, à l'entrée d'Arles

En 2008, le riz Ă©tait cultivĂ© en Camargue sur 16 640 hectares avec une production de 98 176 tonnes de riz paddy (Ă  l'Ă©tat brut, non dĂ©cortiquĂ©)[5].

Ă€ titre de comparaison, en Europe 408 498 hectares sont cultivĂ©s pour une production de 2 583 133 tonnes de riz paddy, et une production mondiale de 661 millions de tonnes, toujours en 2008.

En 2010, 200 riziculteurs cultivent 21 200 hectares avec une production de 120 000 tonnes de riz paddy.

[réf. nécessaire]

En 2014, suit Ă  la baisse des subventions provenant de la politique agricole commune, la culture du riz en Camargue rĂ©gresse Ă  12 000 hectares et doit disparaitre avec la disparition progressive des aides financières voulue par Bruxelles[6].

Riz rouge

Sel et riz de Camargue

Le riz rouge de Camargue est un riz complet dont le péricarpe est teinté par mutation naturelle d'un rouge foncé[7]. Cultivé de façon biologique, sa récolte se fait à pleine maturité pour que son goût subtil et sa texture particulière soient totalement préservés. Il est de plus séché naturellement sous les effets conjugués du soleil et du mistral[8].

Riziculture biologique

En 2010, 30 exploitations, soit 5 % des surfaces sont cultivées en agriculture biologique. Les rendements moyens en riz paddy s'établissent à 4 t/ha avec une variabilité de 0,5 t à 8t/ha, contre 5,7 t/ha (oscillant entre 2 et 10 t/ha), obtenus en riziculture conventionnelle.

La riziculture biologique peut se faire en parallèle avec l'élevage de canards utilisés pour le désherbage des rizières[9].

Riz de Camargue

Riz de camargue - Carte IGP « Riz de Camargue »

Le riz de Camargue bénéficie d'une indication géographique protégée (IGP) depuis 2000[10], qui apporte des garanties au consommateur.

L'indication gĂ©ographique protĂ©gĂ©e est actuellement rĂ©gie par le Cahier des charges IGP « Riz de Camargue Â»[11], tel que dĂ©posĂ© par le Syndicat des riziculteurs de France et Filière auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualitĂ© (INAO) et par l'arrĂŞtĂ© du portant homologation du cahier des charges de l'indication gĂ©ographique protĂ©gĂ©e (IGP) « Riz de Camargue »[12].

Notes et références

  1. François Cali, op. cit., p. 174.
  2. Pierre Daum, « Quand la Camargue était vietnamienne », GEO Histoire,‎ , p. 118-126
  3. Dominique J. Bicout et al., Le virus du Nil occidental, Quæ, coll. « Synthèses », , 239 p. (ISBN 978-2-7592-1968-1, lire en ligne), chap. 4 (« Les moustiques, vecteurs du virus »), p. 83-86, disponible en accès libre.
  4. Pierre Daum, Immigrés de force. Les travailleurs indochinois en France (1939-1952), Actes Sud, Arles, 2009.
  5. « Site du syndicat des riziculteurs - Chiffres clés en Camargue »(Archive.org • Wikiwix • Archive.is • Google • Que faire ?)
  6. PHILIPPE BERJAUD, « Gard : le riz de Camargue est menacé de disparition », Midi libre,‎ (lire en ligne, consulté le ).
  7. Le riz en Camargue
  8. Riz long rouge de Camargue
  9. Poulain C., 2011 : « Canards aux herbes, une recette 100 % bio », INRA Magazine : alimentation, agriculture, environnement n° 19 (décembre 2011) - pp. 27-28
  10. Site du syndicat des riziculteurs - Qualité du riz de Camargue
  11. Cahier des charges IGP « Riz de Camargue Â», tel que dĂ©posĂ© par le Syndicat des riziculteurs de France et Filière auprès de l'Institut national de l'origine et de la qualitĂ© (INAO).
  12. arrêté du 14 septembre 2011 portant homologation du cahier des charges de l'indication géographique protégée (IGP) « Riz de Camargue », sur Légifrance

Bibliographie

  • François Cali, Provence enchantĂ©e, Éd. B. Arthaud, Paris 1963.
  • Jacques Marseille (sous la direction de), Dictionnaire de la Provence et de la CĂ´te d'Azur, Éd. Larousse, Paris, 2002. (ISBN 2035751055)

Voir aussi

Articles connexes

Lien externe

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