Piotr Archinov
Piotr AndreĂŻevitch Archinov (en russe : ĐŃŃŃ ĐĐœĐŽŃДДĐČĐžŃ ĐŃŃĐžĐœĐŸĐČ, en ukrainien : ĐĐ”ŃŃĐŸ ĐĐœĐŽŃŃĐčĐŸĐČĐžŃ ĐŃŃĐžĐœĐŸĐČ, nĂ© en 1887 et mort en [1]), pseudonyme Piotr Marine, est un communiste libertaire russe.
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En 1926, il est l'auteur de la « Plate-forme organisationnelle de lâunion gĂ©nĂ©rale des anarchistes » qui provoque dĂ©bat dans le mouvement libertaire russe en exil en France et l'oppose violemment Ă Voline.
Au dĂ©but des annĂ©es 1930, il prend ses distances avec le mouvement anarchiste, se rapproche du pouvoir bolchevik et retourne en URSS oĂč il est fusillĂ© en 1937.
Illégaliste anarchiste
NĂ© Ă AndreĂŻevka prĂšs de Nijni Lomov dans une famille ouvriĂšre, il est employĂ© en 1904 comme ouvrier serrurier dans les ateliers de Kizyl-Arvat, au TurkmĂ©nistan prĂšs de la mer Caspienne oĂč il adhĂšre Ă la section bolchevique du Parti social-dĂ©mocrate de Russie et Ă©dite le journal Molot (Le marteau).
En 1906, pour Ă©chapper Ă la police, il se rend Ă Ekaterinoslav oĂč il se rapproche des anarchistes[2].
Il travaille à l'usine Chaudoir. Il organise des attaques armées contre les représentants des autorités locales et de la police. Le , il fait sauter le siÚge de la police dans la banlieue ouvriÚre d'Amour (par la suite Nijnedneprovsk). Le , devant une foule de travailleurs, il abat d'un coup de revolver Vassilenko, le patron des ateliers ferroviaires de Alexandrovska, dans le gouvernement de Iekaterinoslav. Vassilenko avait dénoncé plus de 100 travailleurs ayant participé à une insurrection armée en , certains d'entre eux ont été exécutés et les autres emprisonnés[3].
ArrĂȘtĂ© le , il est condamnĂ© Ă mort par pendaison par un tribunal militaire. Dans la nuit du , il s'Ă©vade avec d'autres prisonniers au cours d'une messe de PĂąques[3]. Il fuit Ă l'Ă©tranger.
De retour en Russie en 1909, Ă l'automne il est arrĂȘtĂ© pour propagande anarchiste parmi les travailleurs de Briansk. Il sâĂ©vade de la prison avant le procĂšs et passe dans la clandestinitĂ© pour faire de la propagande parmi les travailleurs et les paysans des gouvernements de Kostroma et de Smolensk.
Entre mai et , il prend part à différentes « expropriations »[2].
En , il est en Autriche Ă la recherche d'armes et de matĂ©riel de propagande. En , il est arrĂȘtĂ© par les autoritĂ©s autrichiennes et dĂ©fĂ©rĂ© aux autoritĂ©s russes en [2].
En il est condamnĂ© par le tribunal de Moscou Ă 20 ans de bagne. Il est transfĂ©rĂ© Ă la prison de Boutyrka oĂč il rencontre Nestor Makhno avec qui il se lie dâamitiĂ©[2].
Il est libéré aprÚs la Révolution de février le .
Il est l'un des fondateurs et le secrĂ©taire de la FĂ©dĂ©ration des groupes anarchistes de Moscou, secrĂ©taire de lâUnion pour la propagande de Moscou, organisateur des Ă©ditions Golos Truda et du pĂ©riodique Anarjia (Ă partir du ). Il participe Ă la confĂ©rence des groupes anarchistes de Moscou en [2].
En 1918, il combat pendant la guerre civile en Ukraine aux cÎtés de Nestor Makhno. Il joue un rÎle important dans la Makhnovchtchina, s'occupant avec Voline du département de la culture.
Du 12 au , à Koursk, il participe à la premiÚre conférence générale de la Confédération d'organisations anarchistes d'Ukraine, Nabat. Il y retrouve entre autres, Voline, Aron Baron, Fanya Baron, Sénia Fléchine, Mark Mratchnyi, Grigori Gorelik, Nikolaï Dolenko, Efim Yartchouk et Olga Taratuta[4].
AprÚs la défaite des makhnovistes en 1921, il émigre à Berlin puis en France.
Platerformisme v/s Synthétisme
En 1926, avec Nestor Makhno, Ida Mett, Valevsky, Linsky et Ida Mett, il rĂ©dige la « Plate-forme organisationnelle de lâunion gĂ©nĂ©rale des anarchistes ».
La Plate-forme est composĂ©e de trois parties : une partie gĂ©nĂ©rale, sur le capitalisme et la stratĂ©gie pour le renverser ; une partie constructive, sur le projet communiste libertaire et une partie organisationnelle, sur le mouvement anarchiste lui-mĂȘme.
La partie gĂ©nĂ©rale affirme que lâanarchisme nâest pas une « belle fantaisie ni une idĂ©e abstraite de philosophie », mais un mouvement rĂ©volutionnaire ouvrier. Elle propose une grille dâanalyse reposant sur le matĂ©rialisme et la lutte des classes comme moteur de lâhistoire. Dans une situation rĂ©volutionnaire, lâorganisation anarchiste doit proposer une orientation « dans tous les domaines de la rĂ©volution sociale ». Lâenjeu est de « relier la solution de ces problĂšmes Ă la conception gĂ©nĂ©rale du communisme libertaire ».
La partie constructive propose un projet sociĂ©tĂ© transitoire. La production industrielle suit le modĂšle des soviets fĂ©dĂ©rĂ©s. Pour ce qui est de la consommation et de la question agraire, la Plate-forme se dĂ©marque du « communisme de guerre » de LĂ©nine, qui consista Ă spolier les campagnes pour nourrir les villes. Quant Ă la dĂ©fense de la rĂ©volution, le modĂšle est celui de la Makhnovchtchina : « caractĂšre de classe de lâarmĂ©e », « volontariat », « libre discipline », « soumission complĂšte de lâarmĂ©e rĂ©volutionnaire aux masses ouvriĂšres et paysannes ».
Pour finir, la partie organisationnelle propose quatre « principes fondamentaux » pour une organisation anarchiste : lâunitĂ© thĂ©orique, lâunitĂ© tactique, la responsabilitĂ© collective et le fĂ©dĂ©ralisme.
En , Voline et ses amis publie un pamphlet de 40 pages « RĂ©ponse Ă la Plate-forme ». Le ton en est polĂ©mique, les auteurs accusent les plate-formistes de vouloir « bolcheviser » lâanarchisme. Chaque point de la Plate-forme y est dĂ©cortiquĂ© et rĂ©futĂ©. Le caractĂšre de classe de lâanarchisme est niĂ©, lâanarchisme Ă©tant Ă©galement une conception « humanitaire et individuelle ». La partie constructive est comparĂ©e au « programme de transition » lĂ©niniste. Les principes organisationnels sont assimilĂ©s Ă de la discipline de caserne. MĂȘme la dĂ©fense de la rĂ©volution, inspirĂ©e de la Makhnovchtchina, est rĂ©prouvĂ©e. Les auteurs de la RĂ©ponse y voient la « crĂ©ation dâun centre politique dirigeant, dâune armĂ©e et dâune police se trouvant Ă la disposition de ce centre, ce qui signifie, au fond, lâinauguration dâune autoritĂ© politique transitoire de caractĂšre Ă©tatique »[5].
Voline est partisan de la synthĂšse anarchiste qui vise Ă surmonter les divisions internes, tant thĂ©oriques quâorganisationnelles, du mouvement anarchiste. Voline propose une synthĂšse des diffĂ©rents courants du mouvement : communiste-libertaire, anarcho-syndicaliste et individualiste. D'aprĂšs Voline, ces courants sont apparentĂ©s et proches les uns des autres, ils nâexistent qu'Ă cause dâun malentendu artificiel. Il faut donc faire une synthĂšse thĂ©orique et philosophique des doctrines sur lesquelles ils reposent, aprĂšs quoi on pourra en faire la fusion et envisager la structure et les formes prĂ©cises dâune organisation reprĂ©sentant ces trois tendances[6].
Quelques semaines plus tard, Piotr Archinov publie « La rĂ©ponse aux confusionnistes de l'anarchisme »[7]. La controverse entre synthĂ©tistes" et platerformistes se poursuit jusquâen 1931 : Ă lâaccusation de « bolchevisme » des uns, rĂ©pond celle de « dilettantisme » des autres. Les termes du dĂ©bat n'ont guĂšre Ă©voluĂ©s depuis.
Retour en URSS et exécution
Sur la suite, Alexandre Skirda Ă©crit : « DĂ©couragĂ© par les polĂ©miques continuelles et la situation dĂ©pressive du mouvement anarchiste, il avait pris contact avec Sergo OrdjonikidzĂ©, Ă ce moment proche de Staline et tout-puissant [...] quâil avait connu personnellement une vingtaine dâannĂ©es auparavant lorsquâils partageaient la mĂȘme cellule en prison [...] OrdjonikidzĂ© lui avait promis de lâaider Ă rentrer au pays, mais, Ă©videmment, avec des conditions politiques prĂ©cises : il lui fallait renier toutes ses critiques du bolchevisme et couper avec le mouvement anarchiste [...] Archinov publia deux brochures anti anarchistes : Đnarjizm i dikatura proletariata (L'anarchisme et la dictature du prolĂ©tariat, Paris, 1931) et Anarjizm i v nashe vreme (Lâanarchisme Ă notre Ă©poque, Paris, 1933)[8].
Le , il publie Fiasco de lâanarchisme dans les Izvestia oĂč il rompt avec lâanarchisme.
Il retourne en URSS et travaille comme correcteur.
AccusĂ© de « tentative de restauration de lâanarchisme », il est fusillĂ© Ă Moscou en 1938, d'aprĂšs Alexandre Skirda[9].
Controverses
Il est trÚs sévÚrement critiqué par ses anciens camarades. Nestor Makhno le traite de vaniteux qui n'a eu l'occasion de faire quelque chose d'utile qu'en Ukraine puis s'est imaginé comme un leader international de l'anarchisme[3].
Alexander Berkman Ă©crit qu'il le considĂšre comme quelqu'un de peu important, le soupçonnant de rallier les bolcheviks pour des raisons Ă©conomiques. Max Nettlau dit plus ou moins la mĂȘme chose[3].
Camillo Berneri remarque qu'il n'a pas quitté le mouvement calmement et avec dignité, mais qu'il a claqué la porte derriÚre lui comme un homme ivre[3].
C'est presque l'ensemble du mouvement qui le condamne et particuliĂšrement son livre sur le mouvement makhnoviste[3].
Certains pensent, cependant, que tout cela n'Ă©tait que ruse et qu'en fait, son but Ă©tait d'organiser le mouvement anarchiste clandestin en URSS[3].
Publications
- La Makhnovchtchina : l'Insurrection RĂ©volutionnaire en Ukraine de 1918 a 1921, Spartacus, (1re Ă©d. 1924), 256 p. (ISBN 978-2-9029-6362-1).
- La réponse aux confusionnistes de l'anarchisme, Paris, , dans Alexandre Skirda, Autonomie individuelle et force collective : les anarchistes et l'organisation de Proudhon à nos jours, A.S., 978-2950213006, 365 p. (ISBN 978-2-9502-1300-6).
- Les deux Octobre, , Alternative libertaire, no 166, , texte intégral.
- Il contribue à l'Encyclopédie anarchiste, initiée par Sébastien Faure, publiée en quatre volumes, entre 1925 et 1934[10].
- Quelques écrits de Piotr Archinov, sur la révolution russe et sur l'organisation des anarchistes, texte intégral.
Notes et références
- Piotr Archinov sur Le Maitron
- Fondation Pierre Besnard, 2005, notice biographique traduite de rubricon.com
- Libcom, 2004, texte intégral.
- L'ĂphĂ©mĂ©ride anarchiste : notice.
- Alexandre Skirda, Autonomie individuelle et force collective : les anarchistes et l'organisation de Proudhon Ă nos jours, Spartacus, 1987.
- René Berthier, à propos des 80 ans de la Révolution Russe, mars 2007, texte intégral
- Dielo Trouda, 1927 : introduction.
- Skirda, Autonomie individuelle et force collective : les anarchistes et lâorganisation de Proudhon Ă nos jours, 1987, page 185.
- Skirda, Autonomie individuelle et force collective : les anarchistes et lâorganisation de Proudhon Ă nos jours, 1987, page 186.
- RenĂ© Bianco, RĂ©pertoire des pĂ©riodiques anarchistes de langue française : un siĂšcle de presse anarchiste dâexpression française, 1880-1983, thĂšse de doctorat, universitĂ© dâAix-Marseille, 1987, 3503 pages, LâEncyclopĂ©die anarchiste.
Annexes
Bibliographie
- Nick Heath, Plate-forme d'organisation des communistes libertaires, introduction historique, Anarchist Federation, 1989, texte intégral.
- (en) Robert Graham, Anarchism : A Documentary History of Libertarian Ideas, From Anarchy to Anarchism (300 CE to 1939), volume I, Black Rose Books, 2005, texte intégral.
Notices
- Fondation Pierre Besnard, 2005 : notice biographique.
- Libcom.org : notice biographique.
Articles connexes
Liens externes
- Ressource relative Ă la vie publique :
- Notice dans un dictionnaire ou une encyclopédie généraliste :