Palais du Te
Le palais Te[1] (en italien palazzo Te) est une demeure située au sud de Mantoue (Lombardie), construite entre 1525 et 1536, et exemplaire du style maniériste primitif en architecture. Il fut commandé à l'architecte Jules Romain par le fils d'Isabelle d'Este, Frédéric II (1500-1540), marquis puis duc de Mantoue.
Palazzo Te (it)
Type |
Palais urbain, villa, ensemble architectural (en) |
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Destination actuelle |
Musée |
Fondation | |
Style | |
Architecte | |
DĂ©but de construction |
1525 |
Fin de construction |
1536 |
Commanditaire | |
Occupant |
Museo di Palazzo Te (d) |
Propriétaire initial | |
Propriétaire | |
Patrimonialité |
Bien culturel italien (d) |
Site web |
Coordonnées |
45° 08′ 53″ N, 10° 47′ 11″ E |
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Origine du nom
L'hypothèse la plus plausible sur l'origine du nom (en italien palazzo Te) est que l'édifice a pris le nom du lieu où il a été construit : l'île Tejeto dont le nom fut abrégé en Te et où se trouvaient déjà des écuries seigneuriales. L'îlot se situait au milieu d'un lac marécageux à présent asséché, à l'extérieur des murs d'enceinte de Mantoue, à environ deux kilomètres de l'actuel centre[2].
Historique architectural
Frédéric II, marquis de Mantoue, décida, en 1524, de la construction d'un palais résidentiel ou villa Suburbana. En 1525, il confia cette charge à Jules Romain, un des élèves de Raphaël, qui créa le corps du bâtiment, un édifice rectangulaire autour d'une cour, en 18 mois.
Le marquis qui affectionnait particulièrement la chasse, les chevaux et l'amour, destinait dès le départ le palais à ses loisirs et, selon Vasari, demanda donc à Jules Romain de lui « arranger un espace où aller et rester parfois déjeuner pour se distraire[3] ».
Profitant de la situation extra-muros, Jules Romain reprend le modèle idéal de la maison romaine à un étage, avec un vestibule et un grand atrium qu'il avait déjà pu connaître à Rome quand il avait travaillé à la villa Madame ou à la Farnesina sous la direction de Raphael[3].
Le bâtiment est ample, de structure planimétrique avec une succession d'atrium, de salles, de cours carrées, de jardins, rappelant parfois le style dorique de l'architecture classique. La construction est complétée par un jardin bordé de rangées de colonnes devant les bâtiments attenants, eux-mêmes terminés par un hémicycle de colonnes (exèdre)[4].
Les quatre façades extérieures ont des piliers muraux plats encadrant des façades en retrait. Le fenêtrage permet de distinguer le bel étage (piano nobile), qui se situe au rez-de-chaussée, de l'étage supérieur. Les façades ne sont pas aussi symétriques qu'il y paraît et l'implantation des colonnes est irrégulière. La façade est se distingue des trois autres par des motifs palladiens (réutilisation des éléments d'architecture antique) sur ses colonnes et une loggia ouverte en son centre. Les centres des façades sud et nord sont percés de trois arches de la hauteur des deux étages, sans portique ni pignon ; ce ne sont que des passages couverts vers la cour intérieure. Le bossage rustique qui recouvre les murs, particulièrement apprécié pour les résidences des campagnes, est en fait constitué de briques recouvertes d'une couche de crépi qui imite la pierre, celle-ci étant difficilement disponible à Mantoue[3].
Jules Romain, architecte.
Peu de fenêtres donnent sur cette cour intérieure (cortile) ; sur les quatre côtés, les murs à colonnades sont agrémentés de niches profondes et de fenêtres aveugles, et les espaces intermédiaires sont crépis avec du spezzato (plâtre broyé et teinté), donnant vie et profondeur à ces surfaces.
Sur la façade donnant sur le jardin, Jules Romain conçut des bassins emplis d'eau dans lesquels se reflétait l'élégante façade et qui constituaient de grands viviers approvisionnant en poissons la table du marquis tout en agrémentant la vue[3].
Le tympan néoclassique de la façade donnant sur le jardin a été inséré au XIXe siècle[3].
Pour le profane en architecture qui se promène dans les faubourgs de Mantoue, le palais du Te, bâtiment carré isolé, donne l'impression simple et immédiate d'une réaction au style de construction de la Haute Renaissance (Cinquecento). Il semble à la fois déroger et obéir aux règles de l'architecture classique de la Renaissance telles qu'elles furent définies, au siècle précédent, par Leon Battista Alberti dans son ouvrage De re aedificatoria, 1485 (L’Architecture et Art de bien bâtir, trad. 1553).
Décoration intérieure
Une fois la structure du bâtiment terminée, il fallut près de dix ans de travaux aux plâtriers, sculpteurs et peintres de fresques, afin que la moindre surface dans les loggias et les salons fût décorée. Les fresques signées Benedetto Pagni ou Rinaldo Mantovano (le Mantouan), qui a réalisé une bonne partie de la salle des Géants[3], sont aujourd'hui la plus remarquable curiosité du Palais. Les thèmes représentent un Banquet olympien dans le salon de Psyché (Sala di Psiche)[5], des Chevaux stylisés dans le salon des Chevaux (Sala dei Cavalli) pour arriver au plus surprenant de tous, celui du salon des Géants (Sala dei Giganti) où ces derniers, grotesques, semblent surgir du Chaos. Les salles offrent aussi des pavages en marbre qui varient en couleurs et dessins d'un endroit à l'autre. On compte une quinzaine de salles, loggias, appartements[6].
Une des parties du palais la plus charmante et la plus évocatrice du passé est le Casino della Grotta (pavillon de la Grotte), petite suite de pièces privées (appartement dit « secret ») arrangées autour d'une grotte et d'une logetta, c'est-à -dire un balconnet couvert, sur laquelle s'aventuraient les courtisans après s'être baignés dans une petite cascade qui courait sur les galets, les coquillages et les porcelaines incrustés dans les murs et les parois.
L'intérieur du palais a été entièrement restauré de 1984 à 1990.
Les extérieurs du palais
Frédéric Gonzague voulait que les jardins soient plantés de vignes et de citronniers en provenance de toutes les régions d'Italie, mais la statuaire antique devait demeurer le principal ornement extérieur. Certaines statues provinrent du sac de Rome, acquises par l'intermédiaire du mercenaire Fabrizio Maramaldo, ce qui fit dire en au sculpteur Alfonso Lombardi que le duc « avait à Mantoue une demi-Rome d'anticailles[3] ».
L'exèdre qui sépare le jardin du palais de la campagne environnante a été conçue par l'architecte Nicolo Sebregondi au XVIIe siècle. Ce dernier conçut aussi l'orangerie.
Le palais Te dans l'histoire
Nombre de personnages de l'époque ont visité les lieux, en particulier l'empereur Charles Quint venu à Mantoue en 1530 élever le marquis Frédéric II à la dignité de duc. À cette occasion, un banquet fut offert à l'empereur dans la salle de Psyché, entièrement peinte par Jules Romain et ses meilleurs assistants entre 1526 et 1528. Pour la seconde venue de l'empereur en 1532, le duc fit terminer en urgence les deux premiers murs peints de la salle des Géants afin d'honorer sa personne en lui montrant une décoration innovante qui évoquait les succès politiques et militaires impériaux face aux puissances ennemies[3].
Une fois le palais achevé, Frédéric fit demeurer sa maîtresse « officielle », Isabella Boschetti, une femme mariée avec qui il resta lié de nombreuses années[3], dans ce qu'il appelait son « Palais des illusions chatoyantes » (« Palazzo dei lucidi inganni »), entouré de bosquets et cerné des eaux du lac.
La renommée du palais ne tint qu'un siècle. En 1630, pendant la guerre de succession de Mantoue et la conquête du duché, la cité et le palais furent pillés par les troupes impériales de Ferdinand II. Le reste de la population fut victime d'une des pires épidémies de peste de l'histoire. Le palais, mis à sac de fond en comble, est resté comme une coquille vide et, dans cet état, les remarquables fresques sont d'autant plus surprenantes que les nymphes, les dieux, les déesses et les géants peuplent les murs de salles vides.
Le palais Te aujourd'hui
Le Museo Civico (Musée civique) qui expose une collection d'art mésopotamien parrainée par l'éditeur Arnoldo Mondadori, est hébergé dans une partie du palais.
La salle des Fruitière est aussi réservée à des expositions temporaires de peinture, le plus souvent de la Renaissance.
Notes et références
- Le Palais Te, Mantoue, Gianna Suitner, Chiara Tellini Perina, Electa, 1991
- Guida d'Italia, 5 vol. t.I : Liguria, Piemonte, Valle d'Aosta, Lombardia, Ă©d. Touring Club Italiano, 1996, p. 149 (ISBN 8836510841)
- Barbara Furlotti et Guido Rebecchini (trad. de l'italien), L'art Ă Mantoue, Paris, Hazan, , 270 p. (ISBN 978-2-7541-0016-8), Page 132 et suivantes
- Collectif, Le Palais Te à Mantoue, Éd. Elemond Electa, 2000, pp. 102-111 (ISBN 8843535129).
- Collectif, L'abcdaire de la Renaissance italienne, Flammarion, 2001, p. 61.
- Collectif, Le Palais Te à Mantoue, Éd. Elemond Electa, 2000, pp. 131-152.
Annexes
Bibliographie
- Gianna Suitner, Chiara Tellini Perina, Le Palais Te, Mantoue, Electa, 1991.
- Hazan Olga, Giulio Romano et Federico Gonzaga au Palazzo Te, Université du Québec à Montréal, Monréal, 1986. URL : http://oatd.org/oatd/record?record=oai%5C%3Aarchipel.uqam.ca%5C%3A11313. Consulté le 6 février 2022. Ce mémoire de maitrise est disponible en ligne en accès ouvert.