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Olympia (film, 1938)

Olympia est un film documentaire allemand de propagande nazie en deux parties, réalisé par Leni Riefenstahl en 1936 lors des Jeux olympiques de Berlin et sorti en 1938. La première partie est sortie en France avec comme titre d'exploitation Les Dieux du stade ; la seconde avait pour titre français Jeunesse olympique.

Olympia
Description de cette image, également commentée ci-après
Leni Riefenstahl avec son cameraman en chef Walter Frentz, pendant le tournage du documentaire, en août 1936.
Titre original Olympia
Réalisation Leni Riefenstahl
Pays de production Drapeau de l'Allemagne nazie Reich allemand
Genre Documentaire
Durée 201 à 220 min. (selon versions)
Sortie 1938

Pour plus de détails, voir Fiche technique et Distribution

Genèse du film

Déjà auteur du documentaire controversé Le Triomphe de la volonté (1935), Leni Riefenstahl est le maître d'œuvre de ce film. Hitler apprécie beaucoup le travail avant tout esthétique de cette cinéaste et il lui demande de réaliser une œuvre sur les Jeux olympiques se tenant quelques mois plus tard à Berlin. Riefenstahl, qui avait déjà traîné des pieds pour réaliser Le Triomphe de la volonté, exige des moyens exceptionnels pour réaliser une œuvre novatrice. Hitler lui donne les pleins pouvoirs permettant à la réalisatrice de trouver des angles inédits, de travailler sur les ralentis et d'expérimenter des caméras en mouvement. L'équipe du film comprend plus de 300 personnes dont 40 cadreurs. Ces derniers travaillent plusieurs mois avant les débuts des compétitions afin de mettre au point des techniques inédites, comme la caméra catapulte pour les épreuves de saut, ou la mise en place de rails de travelling le long des pistes d'athlétisme. Le budget du film est de 1,8 million de Reichsmarks, entièrement couvert par le régime nazi.

Le film

« Si vous êtes un idéaliste, vous y verrez de l'idéalisme ; si vous êtes un classique, vous verrez dans ses films une ode au classicisme ; si vous êtes un nazi, vous y verrez du nazisme. »

Jonas Mekas, 1974

Olympia se présente en deux parties : Olympia (Fest der Völker), Les Dieux du stade (Fête des peuples) et Olympia (Fest der Schönheit), Jeunesse olympique (Fête de la beauté). Le montage a duré quinze mois. Conservant 10 % des images filmées au cours des deux semaines de compétitions, Riefenstahl met particulièrement l'accent sur la musculature des corps. La technique de la contre-plongée décuple la stature des athlètes tandis que les images en mouvement, en travelling ou autre, sont très novatrices et fixent la base des règles de prises de vue des compétitions sportives.

Après la clôture des Jeux, Riefenstahl a demandé à quelques sportifs de rééditer les gestes accomplis lors de la compétition, principalement pour pouvoir filmer sous des angles de prise de vue impossible à prendre lors des compétitions. C'est pourquoi dans certaines séquences du film, par exemple pour le saut en hauteur, les gradins et tribunes sont complètement vides.

Le film existe en plusieurs versions, en langue allemande, anglaise, japonaise ou française, avec de légères différences de traduction. De plus, Riefenstahl retoucha son film après sa sortie, ainsi plusieurs versions circulent encore. La copie patiemment restaurée par le Comité international olympique sous la supervision de Robert Jaquier et de l’historien du cinéma Peter Cowie, peut être considérée comme la version définitive du film. Olympia est ainsi édité par Criterion aux États-Unis en DVD et Blu-Ray en 2017 avec les 52 autres films olympiques officiels couvrant la période de 1912 à 2012.

Fiche technique

  • Titre français des deux parties : Les Dieux du stade et Jeunesse olympique
  • Titre original allemand : Olympia
  • Réalisation, scénario et montage : Leni Riefenstahl
  • Musique : Herbert Windt
  • Son : Hermann Storr
  • Caméras : Wilfried Basse, Werner Bundhausen, Leo De Lafrue, Josef Dietze, E. Epkins, Hans Ertl, Walter Frentz, Hans Karl Gottschalk, Richard Groschopp, Willy Hameister, Wolf Hart, Hasso Hartnagel, Walter Hege, Paul Holzki, Albert Höcht, Carl Junghans, Herbert Kebelmann, Sepp Ketterer, Albert Kling, Ernst Kunstmann, Leo de Laforgue, E. Lambertini, Gustav Lantschner, Otto Lantschner, Waldemar Lembke, Georg Lemke, C. A. Linke, Kurt Neubert, Erich Nitzschmann, Albert Schattmann, Hans Scheib, Wilhelm Schmidt, Hugo O. Schulze, Leo Schwedler, Alfred Siegert, W. Siehm, Ernst Sorge, Karl Vass, Willy Zielke, Andor von Barsy, Franz von Friedl, Heinz von Jaworsky, Hugo von Kaweczynski, Alexander von Lagorio, H. von Stwolinski, E. von der Heyden
  • Production : Olympia-Film
  • Pays d'origine : Drapeau de l'Allemagne nazie Reich allemand
  • Langue originale : allemand
  • Format : noir et blanc - 1,37:1 – 35 mm
  • Genre : documentaire
  • Durée : 201 minutes
  • Dates de sortie :

Sortie et réception du film

Le film est présenté le , le jour de l'anniversaire du Führer. Goebbels est tellement impressionné par le travail de Riefenstahl qu'il lui fait verser une prime de 100 000 Reichsmarks qui s'ajoutaient aux 250 000 RMS touchés initialement.

Le film reçoit le Deutschen Filmpreis 1937/38, le prix suédois Polar-Preis 1938, une médaille d'Or olympique du Comité international olympique en 1938 et un diplôme olympique en 1948 au Festival de Lausanne. Olympia est également récompensé d'une Coupe Mussolini lors du Festival de Venise, à la suite d'une intervention directe de Benito Mussolini alors que le jury hésitait entre Olympia et Autant en emporte le vent.

À la suite des événements de l'année 1939 impliquant le régime nazi, un boycott des films de Riefenstahl est organisé par Hollywood.

Après la Seconde Guerre mondiale, le film est avant tout considéré comme une œuvre de propagande du Troisième Reich. Plus tard, dans les trois dernières décennies du XXe siècle, les qualités techniques et esthétiques d'Olympia trouvent davantage d'écho, marquant la réhabilitation de Leni Riefenstahl en tant que cinéaste. La revue Les Cahiers du cinéma accorde une interview à Riefenstahl dès septembre 1965. Plusieurs auteurs soutiennent cette évolution, notamment Jonas Mekas, qui écrit en 1974 : « Et voici ma dernière déclaration à propos des films de Riefenstahl : si vous êtes un idéaliste, vous y verrez de l'idéalisme ; si vous êtes un classique, vous verrez dans ses films une ode au classicisme ; si vous êtes un nazi, vous y verrez du nazisme. »[1].

Dans ses Mémoires, Riefenstahl précise : « J'ai tourné Olympia comme une célébration de tous les athlètes et un rejet de la théorie de la supériorité de la race aryenne. »[2]. L'athlète noir américain Jesse Owens est présent dans le film, tout comme l'ensemble des autres vainqueurs « non aryens », mais certains auteurs font remarquer à propos des images d'Olympia : « Elles montrent, avec un pouvoir de séduction intemporel, l'être humain comme une forme pure, défini par ses seules attitudes et ses attributs identitaires, et non sa capacité à exister comme individu »[2].

De par les techniques qui s'y trouvent utilisées et la présentation des performances des athlètes, Olympia peut être considéré comme un documentaire précurseur des retransmissions télévisées actuelles (si l'on met de côté les séquences esthétisantes comme les introductions ou celles dévolues à la gymnastique, à l'escrime et aux plongeons). Il est d'ailleurs extrêmement difficile à voir en salle ou en vidéo. Riefenstahl montre en détail les exploits d'Owens mais aussi, de manière plus étonnante, des défaites allemandes comme celle du match de hockey sur gazon où l'Inde gagne 8 à 1. Tout aussi étonnant est le fait que l'hymne le plus entendu à l'écran est l'hymne des États-Unis et non celui de l'Allemagne. Seule concession réelle à l'idéologie : les athlètes français, britanniques ou du Commonwealth sont peu représentés (malgré la victoire française en cyclisme montrée en détail).

Les droits du film sont rachetés en 2003 par le Comité international olympique.

En 2005, Time.com classe ce film parmi les 100 meilleurs films de tous les temps[3].

Séquences célèbres

Certaines scènes sont particulièrement marquantes :

En un sens, la cinéaste officielle du IIIe Reich inventa la télévision. Des dizaines d'opérateurs, un budget inouï, près de deux ans de montage, une technologie révolutionnaire (dont l'emploi quasi systématique du téléobjectif) pour une version très typée de l'olympisme. À remarquer le kitsch des scènes grecques et la séquence du triomphe de Jesse Owens où la réalisatrice, dans une inversion remarquable des intentions, met toute sa technique au service d'un évident ennemi de la cause raciale.

Annexes

Bibliographie

  • (en) Michael Mackenzie, « From Athens to Berlin: The 1936 Olympics and Leni Riefenstahl’s Olympia », in Critical Inquiry, vol. 29 (Winter 2003)

Documentaires

En mars 2013, dans la série Mystères d'archives diffusée par la chaîne Arte, Serge Viallet a réalisé un épisode intitulé 1936. Les Jeux de Berlin[4] où les innovations techniques imaginées par Leni Riefenstahl sont mises en évidence.

Dans son documentaire Les Jeux d'Hitler (Arte-Roche productions, 90 min, 2016), Jérôme Prieur analyse l'opération de propagande qu'ont été les Olympiades de 1936 et le rôle joué par le film de Leni Riefensthal dans cette entreprise au service du projet national-socialiste.

Articles connexes

Notes et références

  1. (en) Fascinating Fascism par Susan Sontag dans The New York Review of Books, le . Consulté le 10 avril 2008.
  2. coll., Les Jeux olympiques, Paris, L'Équipe, 2003, p.181
  3. (en) All-Time 100 Movies sur le site de Time magazine. Consulté le 10 avril 2008.
  4. 1936. Les Jeux de Berlin émission de la chaîne Arte, présentation avec des extraits de l'émission.

Liens externes

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